© L'AUTOMOBILE SPORTIVE (06/09/2012)
CASQUE ET BOTTINES DE CUIR
Présentée au salon de Londres en octobre 1962, la Lotus Elan possède tous les gènes chers à Colin Chapman. Petite voiture de sport légère et agile, l'Elan marque le début d'une réussite industrielle pour Lotus en dehors des circuits de F1. Un charmant roadster anglais, délicieusement aromatisé aux 60's...
Texte :
Sébastien DUPUIS
Photos : D.R.
Suite au succès mitigé du coupé Lotus Elite vendu à 1000 exemplaires, Colin Chapman ne gagne pas d'argent. Pourtant, le célèbre "self-made man" britannique, persiste et signe dans la construction de voitures de sport selon une recette basée sur un poids réduit au maximum. L'Elan, Lotus type 26 selon la nomenclature maison, lui offrira son premier vrai succès commercial pendant plus d'une décennie, de 1962 à 1974. A partir de 1967, la série TV "The Avengers", connue chez nous sous le titre "Chapeau melon et bottes de cuir", propulsera sur le petit écran la notoriété de la sportive Lotus, conduite par la charmante agent Emma Peel...
DESIGN
Avec ses phares rétractables accentuant ses lignes douces et fines, le petit roadster Lotus séduit tout de suite. Ses formes, qui restent proches de celles de l'Elite, son formée dans la fibre de verre, matériau très léger et facile à industrialiser en petite série. Un hardtop est livré en option pour le cabriolet Elan. En véritable trompe-l'oeil, les pare-chocs parfaitement intégrés ne sont pas en lourd acier chromé mais en résine et fibre de verre comme le reste de la carrosserie. Conformément à ses premières réalisations, Chapman vend aussi l'Elan en kit, pour ses clients amateurs de bricolage.
A BORD DE LA LOTUS ELAN
A l'intérieur de la Lotus Elan, la planche de bord porte admirablement son nom puisque le tableau de bord est taillé d'une pièce dans un bloc de noyer. Déjà, les notions de finition et de confort semblent secondaires dans le cahier des charges Lotus... Spartiate et étriqué, l'habitacle semble moulé autour des deux occupants. Une impression de confinement qui atteint son maximum avec la série 3 de 1965 qui évolue en coupé. On en profite pour déplacer la batterie dans le coffre, au bénéfice de la répartition des masses.
MOTEUR
L'Elan débute sa carrière avec un petit moteur de 1498 cm3 de Ford Cortina dont Lotus sort 102 ch à 5700 tr/mn à l'aide d'une culasse modifiée avec double arbres à cames en-tête. Le moteur se distingue plus par son couple que par sa puissance spécifique et déjà les performances sont étonnantes avec un 0 à 100 km/h parcouru en 8"7. Mais, dès 1963, l'Elan 1600 fait son apparition avec le quatre cylindres en ligne réalésé à 1558 cm3 et développant 105 ch à 5500 tr/mn et 146 Nm à 4000 tr/mn.
Avec 620 Kg à vide, la puissance modeste du petit moteur Ford suffit à l'Elan pour suivre des sportives bien plus "armées", telles que les AC Cobra ou les Jaguar type E. Avec un rapport de pont plus court en option, les performances font un bond en avant. Le 0 à 100 est ainsi décroché en moins de 8 secondes pour l'Elan S1.
CHASSIS
Pour Lotus, une voiture de sport doit avant tout avoir du poids en moins, plutôt que des chevaux en plus, et ce afin d'exploiter au mieux le châssis. Avec un rapport poids/puissance identique, la voiture la plus légère sera en effet toujours la plus facile à conduire rapidement et avec précision. Contrairement à l'Elite, l'Elan ne repose plus sur une structure monocoque mais sur un châssis poutre, comme l'Alpine A110. Le plancher et la carrosserie sont fixés sur une poutre carrée de large section qui se termine à chaque extrémité en Y pour supporter le moteur et les suspensions indépendantes aux quatre roues. La Lotus Elan utilise une suspension à quatre roues indépendantes, avec des triangles superposés à l'avant et triangle inférieur avec bras supérieur à l'arrière. Enfin, le freinage à quatre disques reçoit le renfort d'un servo Girling.
Légère, agile et précise (2,5 tours de butée à butée pour la direction), la petite Lotus Elan étonne toujours par ses qualités dynamiques. Elle fait merveille sur route sinueuse et offre un grand plaisir de conduite. Ce sacré Chapman avait une vision absolument avant-gardiste de l'automobile qui, ayant sombré dans les excès de poids, de confort, de puissance et de consommation, revient désormais à des orientations plus légères. "Light is right" comme il disait si justement...
EVOLUTION
La Lotus Elan Série 2 (S2), évolution de la S1 cabriolet, apparaît en 1964. Elle ressemble beaucoup à la série 1 mais présente plusieurs dont un tableau de bord en placage bois, une boîte à gants verrouilable et une meilleure isolation thermique du moteur. Les freins à disques sont légèrement plus gros.
En 1965, Lotus présente l'Elan Coupé (sans mauvais jeu de mots !) sous le type 36. Ce petit coupé 2 places possède un toit fixe - d'où son autre appellation de Elan FHC pour "Fixed Head Coupe" - sensiblement différent du hard-top déjà disponible pour le cabriolet. Le coupé devient un modèle à part entière et possède des éléments de confort améliorés par rapport au cabriolet S2 dont il dérive, comme des vitres de porte à commande électrique. Il se situe à mi-chemin entre l'Elan S2 et la S3 qui apparaît la même année. La Lotus Elan S3 présente une porte de malle qui s'allonge jusqu'à la plaque et de nouveaux feux arrières plus carrés. Les évolutions intérieures du coupé sont transposées à la série 3.
En 1966, la première évolution moteur, baptisée SE pour "Special Equipment", permet de booster le 1.6L de la Lotus Elan à 115 ch à 6000 tr/mn, avec l'appui d'une boîte synchronisée Ford à 4 rapports plus rapprochés.
En 1968, l'Elan S4, dernière évolution de l'Elan, s'offre une ultime poignée de chevaux supplémentaire à travers deux carburateurs Weber 40 DCOE (126 à 6500 tr/mn et 153 Nm à 5500 tr/mn) avec un différentiel renforcé. La vitesse maxi dépasse 180 km/h et confirme une très bonne aérodynamique (Cx de 0,30).
A partir de 1969 et jusqu'en 1971, une bosse apparaît sur le capot avant en raison des nouveaux carburateurs Zenith-Stromberg CD175S à dépression, plus hauts. Lotus reviendra finalement au montage des Weber tout en conservant le bossage de capot. En 1971, la série spéciale Elan Sprint basée sur l'Elan Série 4 et équipée du moteur 1.6L 126 ch se distingue par sa peinture biton (couleur au choix en haut + bas de caisses blancs avec une bande de séparation couleur or).
LOTUS ELAN +2
En 1967, l'Elan +2 (Type 50) apparaît comme une alternative plus habitable, avec 2 petites places supplémentaires via un allongement de 30 cm du châssis. La garde au toit est également réhaussée de 3 cm. Pour compenser son poid légèrement plus élevé (870 kg), le coupé Elan +2 commence sa carrière avec le bloc Twin-cam SE de 118 ch. Il gagne le bloc 126 ch « big valve » des Elan Sprint en fin de carrière, sous l'appellation Elan +2 S130. Elle sera produite jusqu'en 1974.
ACHETER UNE LOTUS ELAN TYPE 26
La Lotus Elan est relativement facile à dénicher dans les petites annonces, grâce à sa grande et longue diffusion. La cote de la Lotus Elan varie autour de 15 à 20.000 euros pour un bel exemplaire. A savoir que les dernières versions sont les plus recherchées et que les coupés +2 cotent généralement moins que les 2 places.
Si la carrosserie n'est pas sujette à la corrosion, contrairement aux éclats de peinture, il conviendra de vérifier en premier le châssis poutre en acier. Pour cela il faudra toutefois monter la voiture sur un pont. La bonne nouvelle, si une remise en état s'impose, c'est que la majorité des pièces est toujours disponible, y compris le fameux châssis-poutre. Bon nombre de pièces sont par ailleurs trouvables en dehors de chez Lotus, à moindre prix. Autre spécificité des anciennes, venues d'outre manche notamment, l'électricité capricieuse entraîne quelques surprises avec les phares, clignotants, lèves vitres, ventilateur, etc. Pensez à vérifier les accessoires un par un. Enfin, le moteur est assez fiable sous réserve d'un entretien très régulier. La chaîne de distribution, la consommation d'huile ou d'eau sont à inspecter soigneusement. En cas de doute, n'hésitez pas à contacter le Club Lotus France pour vous aider à vérifier l'identification du modèle convoité.
CHRONOLOGIE LOTUS ELAN TYPE 26
1962 : Elan S1 (Type 26) moteur 1L5 102 ch. Carrosserie cabriolet (dite DHC pour "Drop Head Coupe").
1963 : Nouveau moteur 1.6L 105 ch.
1964 : Elan S2, évolution de la S1 toujours en version cabriolet. Freins plus grands et intérieur remanié.
1965 : Elan S3. Remplace la S2. Une version coupé dérivée de l'Elan cabriolet est proposée en parallèle (type 36 dans la nomenclature Lotus). Il est couramment désigné sous la dénomination FHC ("Fixed Head Coupe").
1967 :
Elan +2 (type 50).
1968 : Elan S4 L'ultime évolution de la Lotus Elan conserve ses numéros de type dans la nomenclature Lotus (36 en cabriolet FHC et 45 en coupé DHC). Ailes élargies pour accueillir des pneus plus larges (155). Apparition d'un niveau de finition supérieur dit SE "Special Equipment" sur les deux versions. Elan +2S avec équipement plus riche (feux anti-brouillard, sièges couchettes, feux de recul, lunette arrière chauffante).
1971 :
Elan Sprint. Série spéciale de la S4, équipée du moteur 1.6L 126 cv. Elle se distingue par sa peinture biton : couleur au choix en haut + bas de caisses blancs avec une bande de séparation couleur or.
1972 :
Elan +2S 130/5, caractérisée par sa boîte de vitesses Lotus à 5 rapports. Fin de production des roadsters et coupés Elan.
1974 : Fin de production de la Lotus Elan +2.
PRODUCTION LOTUS ELAN MKI
Elan S1/S2 (type 26) : 2 050 exemplaires
Elan Coupé (type 36) : 3 000 exemplaires
Elan S4 (type 45): 3 000 exemplaires
Elan +2 (type 50) : 5 168 exemplaires
TOTAL LOTUS Elan MKI : 17 392 exemplaires
:: CONCLUSION
Il va sans dire que cette petite anglaise, dotée de tout le génie de Colin Chapman en donne pour son argent et constitue un modèle de choix dans la généalogie de la marque. Une voiture simple, économique, performante et vivante; des valeurs qui de nos jours semblent encore tellement d'actualité qu'on ne saurait s'y refuser ! |