© L'AUTOMOBILE SPORTIVE (12/05/2003)
CHAUD DEVANT !
Après avoir oublié son glorieux
passé pendant quelques décennies, Alfa Roméo nous est revenu il
y a quelques mois avec une 156 GTA qui ne devait démériter en rien
à une appellation légendaire. Voici maintenant le tour de la 147
qui reprend ni plus ni moins que le gros V6 3.2L de sa grande soeur
pour s'imposer dans la hiérarchie des berlines compactes sportives,
mettant fin du même coup à une très longue période de règne allemand...
Texte :
Nicolas LISZEWSKI
Photos : D.R.
DESIGN
La 147 vient rejoint donc l'Alfa
Romeo 156 GTA dans la petite famille des sportives. Et la nouvelle
venue, pourtant plus petite, est pour le moins tout aussi imposante.
La ligne de l'Alfa Romeo 147 étant si pure et distinguée, il semblait
difficile de la toucher sans briser cette harmonie. Pourtant, lorsque
nos yeux se perdent sur la carrosserie de la GTA, on ne peut que
tomber sous le charme du très beau travail des designers. Ils ont
réussi de partir d'une base excellente pour la sublimer ! Autant
la 147 est distinguée, presque gracile mais inspire la confiance
et la sportivité, autant la GTA respire la force et la puissance,
tout en conservant sa distinction naturelle, qui reste la marque
des designs réussis. C'est en quelque sorte notre Marie-José Perec
nationale (du temps où ses idées étaient plus claires…) en tenue
de soirée. Elle parvient à affirmer son potentiel sportif sans pour
autant que son esthétique générale ne tombe dans le "tuning" de
mauvais goût. Elégante mais puissante. Pour arriver à un tel résultats,
les hommes d'Alfa Romeo n'ont pas hésité à redessiner des boucliers
avant et arrière beaucoup plus suggestifs avec des aérations prononcées.
Celui de l'arrière est notamment une réussite totale ! Les ailes
sont légèrement gonflées pour bien coller à l'esprit de l'auto.
Ainsi gréée et posée sur des jantes alu de belle facture en 17"
reprenant le célèbre dessin en cadran de téléphone, l'Alfa 147 GTA
en jette un max', comme on dit dans les milieux branchés et impose
le respect. La somme de ces modifications extérieures laisse à penser
que le bilan aérodynamique ne doit pas être très favorable... mais
bon, le résultat est beau et flattera l'ego du propriétaire.
A L'INTERIEUR DE L'ALFA ROMEO 147 GTA
L'intérieur
est plus sobre, un peu dans la mouvance "chic et sport" d'une Audi
S3, la personnalité en plus. "L'originalité intérieure" de la 147
GTA se constituant d'une graduation revue des compteurs (300 pour
la vitesse maxi !), d'un nouveau volant, d'une sellerie cuir, d'une
nouvelle grille de sélecteur, et du pédalier aluminium de la 156
GTA. Oubliez toutes les références Alfa des années 80 sur les habitacles.
Fini les cigales dans les planches de bord, les tissus criards et
fragiles, les sièges peu confortables et l'ergonomie fantaisiste
des commodos et autres boutons. Désormais, chez Alfa c'est beau,
c'est agréable à toucher presque partout (il reste encore ça et
là des plastiques au grain trop dur…) et surtout, pour 35 000 €,
l'équipement est ultra complet. Nous sommes loin des longues listes
d'options coûteuses en pratique chez les constructeurs bataves.
Ainsi, la climatisation bizone est en série, une installation radio
haut de gamme avec chargeur 6 CD itou, un très bel intérieur cuir
et encore de nombreux autres équipements. Seul bémol dans cet excès
de louange, les très beaux sièges baquets offrent un maintien insuffisant
en conduite musclée (idéalement sur circuit) et le confort escompté
n'est pas au rendez-vous. De même, ce satané ordinateur de bord
qui veut désormais tout contrôler renferme la température d'huile.
Il faut donc aller la chercher dans les différents menus. Mais où
sont passées les superbes planches de bord d'antan avec leur batterie
d'instruments alignés sous les yeux du pilote… euh du conducteur.
Pour le reste, c'est le sans faute, et il restera de voir à l'usage
et avec le temps, si la finition conserve son éclat actuel…
MOTEUR : LE V6 BUSSO !
Si le physique de la bête est évidemment un des points majeurs
de l'Alfa 147 GTA, le moteur peut représenter à lui seul le facteur
d'achat de cet engin diabolique. Alfa Romeo n'est pas le premier
constructeur à monter un 6 cylindres dans une compacte, puisque
c'est VW qui fut précurseur en la matière avec la Golf III VR6.
Mais aujourd'hui encore, peu de constructeurs proposent ce choix
technique. Sous le capot, la 147 GTA reprend ni plus ni moins que
le V6 3.2 24 soupapes de la 156 GTA. La 147 GTA devient dès lors
la compacte la plus sportive, la plus puissante et la plus rapide
de son segment. Ce très beau V6 de 3,2 litres, aussi beau à contempler
qu'à entendre, offre des caractéristiques exceptionnelles. 250 ch
à 6 400 tr/mn pour un V6 atmosphérique, la performance est déjà
remarquable, d'autant plus que son rendement approche les 80 ch/litres
! Certes, un moteur suralimenté sera plus rageur très bas dans les
tours, mais le V6 Alfa, c'est quelque chose ! A partir de 3 500
tr/mn, cette belle mécanique commence à donner le ton. Pour résumer,
ce V6 délivre des miaulements pour la sono, et une poussée très
forte, cela jusqu'à 6 400 tr/mn, soit le rupteur. Déjà à l'aise
sur la 156 GTA, ce V6 3,2 litres est réellement à son avantage dans
la caisse de la 147 GTA. En contrepartie, les moteurs Italiens font
payer plus cher que leurs homologues allemands le plaisir qu'ils
dispensent. La 147 GTA n'y fait pas exception, sans être très gourmande,
sa consommation oscille entre 10 et 18l selon l'utilisation.
SUR LA ROUTE : CHAUD DEVANT !
Une fois à bord de l'auto, la séduction opérée à l'extérieur
demeure. Bien installé, avec les compteurs ronds enchâssés les un
dans les autres, cela fleure bon les références au passé de la firme
d'Arese. Volant agréable au toucher et boîte 6 tombant bien sous
la main, nous sommes prêts pour la mise en route. Le florilège de
voyants au tableau de bord s'allume et s'éteigne dès que le V6 s'ébroue.
Dès les premières vocalisent, la chair de poule nous gagne. Alfa
est de retour et pour de bon ! Nos pieds effleurent la pédale de
droite en alu ajourée et la première enclenchée nous sommes partis.
Le temps de laisser monter en température la pièce d'orfèvrerie
située sous le capot, nous observons au passage qu'il est fini le
temps des monstres indomptables et peu compatibles avec une utilisation
quotidienne. Comme toutes ses congénères, l'Alfa 147 GTA sait se
montrer docile à bas régime et évoluer tranquillement dans les règles
actuelles de circulation et de … répression routière. L'auto est
chaude désormais, et la route empruntée se tortille comme une anguille.
Rétrogradage (la commande est un peu lente, dommage), et pied dedans
! Coller dans le siège, l'Alfa 147 se montre très équilibrée et
offre une poussée encore plus franche dès 3 500 tr/mn. C'est la
joie des moteurs atmos, et ici le son procuré nous a fait éteindre
l'autoradio. La GTA est équipée d'une boîte manuelle à 6 rapports,
ferme, mais rapide et plutôt bien guidée, lui permettant d'évoluer
à hautes vitesses sur autoroute sans aller chatouiller le rupteur.
Le moteur ayant gagné en souplesse le sixième rapport permet également
de rouler, sur un filet de gaz lors d'une conduite plus soft. Sans
être aussi précise que celle de BMW, elle sait être rapide et efficace
en conduite musclée. La boîte robotisée Selespeed est également
disponible depuis quelques jours. Très directe (1,75 tours de volant
mais pour un diamètre de plus de 12 mètres) la direction s'accorde
très bien à l'incisivité du train avant conférant à l'ensemble un
agrément certain. Suspension surbaissée de 20 mm, barres antiroulis
et points d'ancrage revus, flexibilité des ressorts et tarage des
amortisseurs modifiés, la 147 GTA opte aussi pour des réglages de
châssis plus sportifs. Des modifications fortement justifiées pour
canaliser la fougue de la mécanique. D'un virage à l'autre, la belle
italienne se montre redoutable d'efficacité, mais on sent bien que
l'électronique veille en permanence et gomme ici et là des légères
pertes d'adhérences. Il est vrai que les roues avant pourtant d'une
généreuse largeur (équipées de Pirelli ou de Bridgestone en 225/45
ZR 17) ont fort à faire pour passer au sol les 250 ch de cette GTA.
Si on exploite toute la plage d'utilisation du V6, le plaisir obtenu
est alors irrésistible ! Heureusement, les Brembo à 4 pistons (à
l'avant) sont d'une efficacité redoutable. Il est vrai que les jantes
de 17" ont permis la pose de généreux disques de 305 mm. L'ensemble
est bien entendu sous la tutelle d'un ABS avec répartiteur électronique
EBD. Il est d'ailleurs dommage que la 147 GTA doive se contenter
d'un blocage électronique du différentiel agissant sur les freins
et couplés à l'antipatinage en lieu et place d'un véritable autobloquant.
Et curieusement et contrairement à la 156, la 147 GTA reçoit un
ESP (VSC) non déconnectable pour compléter l'action de l'antipatinage
ASR. Néanmoins, dans le cadre d'une conduite sportive, ses interventions
judicieusement calibrées ne viennent que très rarement briser l'élan
de la voiture et les cabrioles de son conducteur... qui pourrrait
trop abuser du plaisir immense qu'est capable de procurer cette
Alfa Romeo 147 GTA. Mais l'essai est déjà terminé et nous devons
(malheureusement) rendre les clés de la belle. Comme souvent, mais
ici encore plus que d'ordinaire, on se demande combien va-t-on pouvoir
vendre la voiture de notre compagne et surtout comment réunir les
35 000 € nécessaires pour notre orgasme routier quotidien…
PRODUCTION ALFA ROMEO 147 GTA
TOTAL (2002-2006) : 5029 exemplaires
:: CONCLUSION
Nous attendions beaucoup de cette Alfa 147 GTA tant elle semblait
prometteuse. Bonne nouvelle, nous n'avons pas été déçus, bien au
contraire. Le renouveau d'Alfa Romeo, après la 156 GTA, est bel
et bien affirmé (et non plus confirmé) par cette 147 GTA aboutie,
sportive, mélodieuse, efficace et… belle à mourir ! Bon, il ne nous
reste plus qu'à trouver les 35 000 € requis, à moins d'attendre
un an ou deux pour en toucher une en occasion à un prix plus en
phase avec notre budget (sic !). |