CONTINENTAL EXPRESS !
Après un rachat pleins de rebondissements et de polémiques,
Bentley est donc passé dans les mains du groupe VAG sous
l'impulsion de Ferdinand Piech. Faisant un réel pied de nez
à son concurrent de Bavière, BMW, VAG comptait bien
développer Bentley sur un créneau encore inexploité
par le groupe : le luxe sportif très haut de gamme...
Texte :
Gabriel LESSARD
Photos : D.R.
Depuis les années 60 Bentley était devenu progressivement
une marque complémentaire à Rolls-Royce. En effet,
les Bentley étaient identiques aux Rolls, mais bénéficiaient
d'une calandre différente et d'une présentation qui
se voulait plus sportive (dans l'esprit seulement...). Il faut donc
attendre les années 80 pour voir apparaître une Bentley
Turbo R, en berline exclusivement, pour constater un regain de sportivité.
Pourtant, le sport et Bentley ont été indissociables
pendant de nombreuses années avant la deuxième guerre
mondiale avec notamment des succès retentissants dans la
Sarthe.
Dans les années 90, VAG et BMW, alors en mal de prestige
se sont livrés une lutte sans merci pour le rachat des firmes
Rolls-Royce et Bentley. Le résultat, on le connaît
aujourd'hui, puisque Rolls-Royce est revenu à BMW et Bentley
à VAG. DaimlerChrysler qui s'est intéressé
un temps à ces marques prestigieuses a décider de
faire différement en ranimant une marque surgie du passé
: Maybach.
ELEGANCE ET EQUILIBRE
Lorsque des designers s'attèlent à tracer les
lignes de la future GT de Bentley, la tâche est ardue. Certes,
il sera aisé de ne pas tomber dans les excès du passé
comme sur les Continental T des années 90 (carrées
et aux dimensions imposantes !), mais devoir dessiner une GT qui
devra non seulement être à la hauteur de son blason,
mais en plus devenir une référence dans son micro-segment
de marché.
Globalement l'impression générale
est excellente. Les lignes sont fluides, équilibrées
et l'ensemble est élégant. Une sensation de force
tranquille se dégage de ce noble coupé anglais (ou
allemand ?). La calandre Bentley et les doubles optiques rondes
ont particulièrement été bien intégrées
à la face avant et les lignes fuyantes vers l'arrière
avec une carrosserie du type Fastback rappelle avec bonheur le coupé
Bentley Continental des années 50. Si de prime abord, ou
en photo, l'auto ne paraît pas imposante, le diamètre
des jantes en 19" peut vous donner des indications sur les
proportions réelles de cette GT. A noter les traits historiques
des Bentley avec l'ouverture des vitres latérales sans montant,
le pavillon bas, les portières très hautes, le porte-à-faux
avant inexistant et la poupe rallongée. Il n'y a que nos
confrères britanniques aujourd'hui pour faire la fine bouche,
puisque le chef designer du projet Continental GT, Dirk Van Braeckel,
est un ancien de chez... Skoda !
INTERIEUR SO BRITISH
Pas possible de concevoir une anglaise sans un intérieur
qui ait une âme. Pari réussi là encore sur cette
Bentley Continental GT, puisque l'atmosphère typique des
grandes berlines britanniques a pu être recréé
ici. Certes, l'espace est beaucoup plus compté que d'ordinaire,
mais pour le reste, tous les ingrédients sont réunis
: cuir et bois, des touches de chromes, une boîte automatique,
des cadrans ronds enchassés dans le bois, une moquette épaisse
et un équipement pléthorique. Rien ne manque à
bord, et la seule concession à la tradition est la petite
montre analogique Breitling au milieu en haut de la console centrale.
Lorsque deux noms prestigieux s'associent
MOTEUR : CONTIENNTAL EXPRESS !
Le W12 de la Bentley Continental GT est évidemment le
frère de celui monté sur les Phaeton W12. A ceci près
que sur la Continental GT, il n'était pas question de réaliser
une GT au passé aussi lourd que son poids total, qui n'ait
pas les performances des meilleures GT du segment. Pour mouvoir
les 2,3 tonnes de la belle anglaises, les ingénieurs motoristes
n'y sont pas allés par quatre chemins en montant deux turbocompreseurs
sous le capot. Ainsi, comparé à la Phaeton, le W12
développe ici 560 ch à 6 100 tr/mn et 650 Nm de couple
dès 1 900 tr/mn !! Et pour bien comprendre, le résultat
du poids et de la puissance respectable (comme on disait autrefois
à Crewe...) donne tout de même un rapport poids/puissance
de 4,1 ch/litre, soit celui d'une supersportive.
SUR LA ROUTE : UNE PURE GT
Le moins que l'on puisse dire, est que le coupé Bentley
Continental GT en impose dans tous les sens du terme. Design très
classique qui semble déjà hors du temps, proportions
imposantes, poids titanesque et savoir que sous le capot patientent
poliment un haras de 560 yearlings ! J'ouvre la porte et
ouh
! Qu'elle est lourde ! Je me glisse dans cet écrin si britannique
dans lequel on se sent tout de suite à l'aise. Un peu comme
dans les Jaguar ou les Rolls. Cuir et bois précieux à
profusion, finition hors pair et ergonomie, une fois n'est pas coutume,
très améliorée et efficace. Seules petites
touches nostalgiques : la montre Breitling analogique, nous l'avons
vu plus haut, mais également les buses d'aération
rondes chromées avec la tirette traditionnelle. Mais finalement
cette tradition séculaire et les dernières innovations
High-Tech font plutôt bon ménage. Il est heureux que
les designers aient réussi à conserver cette ambiance
si typique des productions britanniques. Bravo !
Pas d'histoire, cette
fois-ci il faut y aller... Pour démarrer, je laisse la boîte
en mode tout automatique le temps de me familiariser avec toutes
les commandes de l'engin et surtout bien appréhender ses
évolutions. J'avoue une certaine crainte d'inertie avec les
2,3 tonnes. Une fois en route,
la sonorité de l'échappement ne laisse aucun doute
sur les caractéristiques du moteur. Première poussée sur la pédale
de droite, deuxième, troisième..., à chaque
fois la sensation de poussée est immédiate et très
forte. Le moteur semble plein à tous les régimes et la boîte enquille
les rapports sans même que je m'en aperçoive. Je reprend
les commandes de la boîte à 6 rapports et j'élève
le rythme sur un parcours sinueux que je connais bien.
Malgré
le poids de l'ensemble, l'auto semble presque légère
et agile. Les 25 ingénieurs châssis qui ont travaillé
des mois sur la Bentley Continental GT peuvent se féliciter
du résultat tant il est réussi. Car si la puissance
de 560 ch permet d'effacer le poids pour la partie accélération,
il faut tout de même un châssis excellent pour maintenir
l'auto au sol et éviter le syndrôme des muscle cars
US dans les seventies (à fond dans les lignes droites, et
pieds sur les freins juste avant les virages !). Un vrai moment
de délectation, la conduite de cette Continental GT. Elle
rappelle, avec cependant plus d'exclusivité et une présentation
plus poussée, le coupé Mercedes CL600 avec le dernier
V12 biturbo. La transmission intégrale fait merveille, permettant
des vitesses en courbes très élevées même
par chaussée dégradée.
:: CONCLUSION
Dans les années 60, Jean Daninos avait rêvé
et conçu une remplaçante aux Bentley Continental des
années 50 avec ses Facel Vega. Depuis, personne hormis Mercedes
n'avais réellement investit ce créneau si particulier
des GT très performantes, luxueuses et efficaces. L'oubli
a désormais été réparé avec cette
Bentley Continental GT terriblement british, belle et surtout efficace.
Elle n'est cependant pas encore à la portée de toutes
les bourses, mais cela est finalement certainement une composante
de son prestige et son aura
"Venus
essayer ce qui promettait d'être une Bentley bien intéressante,
nous découvrons une voiture intéressante tout court.
Puissance très disponible, boîte vive, comportement
neutre, très hautes performances, elle évoque l'ancienne
Aston Martin V8 Vantage, mais avec un comportement bien plus moderne.
La Bentley mérite d'être comparée aux GT les
plus huppées, Ferrari 456 M et Aston Martin DB7."
SPORT AUTO - août 2003. |