ALLER PLUS HAUT !
Avec le retour des beaux jours, les cabriolets
et roadsters repointent le bout de leur capot, même de l'autre
côté de la Manche. Il n'en fallait pas plus pour que
nous soyons séduits par l'idée de prendre contact
avec la dernière née des usines Lotus, l'Elise 111R.
Alors que les puristes pourront se révolter des modifications
apportées à cette sportive "So British",
c'est avec un grand bonheur que nous avons retrouvé la belle
Elise...
Texte :
Sébastien DUPUIS
Photos : D.R.
Apparue en 1995, la petite Lotus Elise est
depuis cette date la référence ultime auprès
des amateurs de sportives sans compromis, adeptes d'une légèreté
qui autorise des performances exceptionnelles malgré un moteur
de puissance modeste. Restylée en 2000, l'Elise était
muée jusqu'alors par différentes déclinaisons
du moteur 1.8L Rover. C'était ainsi une chose qui semblait
immuable, jusqu'à ce que les responsables de la marque décident
de proposer des équipements supplémentaires, ayant
pour conséquence un poids plus élevé qui imposait
d'augmenter la puissance du moteur afin de conserver des performances
de premier ordre. Délaissant progressivement le vieil adage de Colin
Chapman "Light is right", la Lotus Elise 111R cède donc à la course
aux chevaux qui sévit dans tous les créneaux, afin de compenser
un poids en hausse. Alors, révolution ou évolution
?
DESIGN
Difficile au premier coup d'oeil de distinguer la nouvelle Elise
111R de la 111S ou même de la version de base. En effet, tout
est identique, des superbes jantes à 8 branches jusqu'à
la trappe à carburant en aluminium. En y regardant de plus
près, on découvre sur les ailes avant un petit logo
adhésif "111R" au-dessus du rappel de clignotant.
C'est bon, c'est bien la voiture qui nous intéresse ! Pour
le reste, on apprécie toujours autant la ligne plus agressive
de l'Elise depuis son restylage très réussi. La partie
arrière avec ses ailes joufflues et son popotin relevé
laissant admirer un soubassement à effet de sol est vraiment
superbe. L'avant n'est pas en reste, les blocs phares sur fond noir
sont de toute beauté. Il n'y a pas à dire, l'Elise
a du charme, beaucoup de charme.
A BORD DE LA LOTUS ELISE 111R
Mais ne vous y trompez pas. Elle
n'a rien du cabriolet qu'on achète pour sa ligne et cela
serait une grave erreur de se laisser séduire sur ce seul
critère esthétique. Car au fond, il faut avoir à
l'esprit que la vocation de la Lotus Elise est avant tout d'être
une sportive, une pure, une dure, dont le seul but est l'efficacité
sur la route, ou la piste. Pour s'en convaincre, il suffit de s'installer
à son volant. Après avoir enjambé le large
longeron, on se laisse glisser dans le baquet. A cette place, la
vision panoramique sur un habitacle entièrement dépouillé
de toute décorations superflue est sans équivoque
: c'est sport ! Pourtant, Lotus a cru bon, sans doute pour élargir
sa clientèle, d'ajouter plusieurs équipements dits
de confort, et jusqu'alors proscrits à bord. Elise est légère
et prends soin de sa ligne. La chasse aux kilos était son
crédo, jusqu'au point de la rendre trop brute aux yeux de
certains. Grande nouveauté de la 111R, Elise devient plus urbaine
et désormais, on peut enrichir son habitacle de vitres électriques,
d'un autoradio et même... d'une climatisation ! "Shocking
!" vont s'exclamer les puristes... mais après tout, ce ne
sont que des options et le client est libre de ne pas les choisir.
Car il ne faut pas oublier que le confort a un prix, qui se paye
sur la balance. De 860 Kg à vide, l'Elise passe à
916 Kg avec toutes les options, et rappellons qu'à sa sortie
en 95, la première génération pesait 733 Kg
! C'est donc un choix à faire, mais nous ne pourrions critiquer
cette possibilité dans la mesure où elle peut rendre
l'Elise plus vivable au quotidien, tout au long de l'année,
et surtout en dehors des circuits !
MOTEUR
Peu convaincus par la capacité du moteur Rover à délivrer, de façon
fiable, une puissance supérieure aux 160 chevaux de l'Elise 111S
pour faire face au gain de poids, les motoristes se sont mis en
quête d'une mécanique plus puissante, testant plusieurs solutions
à 6 cylindres ou 4 cylindres suralimentés provenant d'autres
marques. Au final, en tenant compte d'un cahier des charges très
exigeant en matière de poids et d'encombrement, les motoristes
se sont tout naturellement tournés vers l'une des marques les plus
réputées, sinon "la" plus réputée, en matière de fiabilité mécanique
: Toyota. Par ce choix, ils ont sans doute blessé la fierté
des fanatiques de cette sportive, jusqu'ici 100% anglaise ! Mais
c'était à priori pour la bonne cause puisque c'est
le 1.8 VVTL des Celica TS et Corrolla TS qui a été
l'heureux élu, chargé de mouvoir la belle anglaise.
D'un encombrement similaire à l'ancien moteur, l'implantation
n'a demandé que de légères modifications sur
le châssis. Adepte des hauts régimes, le moulin atmosphérique
japonais développe 192 chevaux, soit une puissance spécifique
de 106 ch/litre, au régime peu commun de 7800 tr/mn ! Pour
aller si haut, ce petit multisoupapes utilise le système
VVTL-i (Variable Valve Timing and Lift Intelligent) qui fait varier
la levée des soupapes d'admission à partir
d'un certain régime. La gestion électronique de l'injection
est assurée par un boitier spécifique développé
par Lotus pour ce moteur avec courbe de couple mieux remplie. En
ce qui concerne le couple, le petit atmosphérique ne fait
en revanche pas de miracle et délivre 18,5 Mkg à 6
800 tr/mn. Une valeur modeste et haut perchée mais le système
d'admission variable permet aussi une excellent disponibilité
à bas et mi-régime, à l'inverse des anciens
multisoupapes, avant de laisser exploser toute sa fureur vers 6200
tr/mn. A partir de là, le moteur Toyota entre en transe et
se jette vers le rupteur jusqu' au régime
maximum de 8 300 tr/mn (!), avec des montées en régimes
grisantes à donner la chair de poule ! D'autant plus que
côté insonorisation, l'Elise laisse entrer directement
dans vos ouies, quasiment tout ce qui vient de derrière.
Comme nous l'avions observé sur les japonaises dotée
de ce moteur, il va sans dire que le pilote a souvent recours à
la boîte de vitesse pour relancer la machine, même si
le faible poids de l'Elise compense en grande partie un certain
manque de couple. Cette commande de boîte pèche cependant par un
guidage approximatif, de plus les verrouillages étant très fermes
il est très souvent difficile de passer les rapports à la volée
ce qui constitue une ombre au tableau du plaisir de conduire (de
piloter devrai-je dire) même motif même punition pour ce qui est
de la descente où les pignons n'hésitent pas à hurler leur souffrance.
Heureusement, la boîte de vitesse à 6 rapports, également
fournie par Toyota, possède un étagement raccourci
au maximum au bénéfice des accélérations,
le 0 à 100 est ainsi annoncé en 5"2, tout en
autorisant une belle vitesse de pointe supérieure à
240 Km/h ! Dans l'absolu ces performances restent exceptionnelles,
mais elles sont finalement assez proches de celles d'une Elise 111S,
elle-même pas vraiment beaucoup plus performante que l'Elise
de base...
SUR LA ROUTE
Concernant la structure et les liaisons au sol de l'Elise, en revanche,
pas de révolution. On note juste un changement au niveau
du tarage des amortisseurs, plus fermes, qui ne dégradent
pas un confort relativement acceptable compte tenu de la vocation
de l'auto. Longue de 3,75 m, l'Elise repose sur un empattement de
2m30 et des voies de 1m40 et 1m50 de large. Avec le moteur en position
centrale arrière, le comportement routier de la petite Lotus
demeure un vrai régal pour tous les amateurs de pilotage.
Impossible de se lasser de l'agilité de cette authentique
sportive, vive et équilibrée comme un kart. Chaussée
d'une monte pneumatique généreuse 175/55 R 16 à
l'avant et 225/45 R 17 à l'arrière, l'Elise possède
une motricité exemplaire et un freinage diabolique. A ce
propos, il faut préciser que les ingénieurs ont une
nouvelle fois porté atteinte au caractère pur et dur
de l'originale. Et oui, en effet, l'Elise jusqu'alors dépourvue
de toute aide au freinage possède désormais un ABS
et une assistance ! Mais le mal n'est pas trop grave puisque ces
systèmes sont d'une remarquable discrétion et ne perturbent
pas un pilotage des plus actifs.
Le caractère pointu de la
mécanique s'accorde finalement très bien avec le comportement
de la Lotus Elise et, malgré la prise de poids sensible à
la conduite, les sensations demeurent exceptionnelles. Très
performante, l'Elise vous régalera sur les petites routes
sinueuses et vous surprendra sur circuit où elle peut réellement
faire parler la poudre. Mais dans ce cas, si vous ne disposez pas
des connaissances adéquates, prévoyez un budget pour
vous offrir un stage de pilotage, en plus de l'achat de la voiture
!
::
CONCLUSION
Le nouveau moteur Toyota
apporte un gain un peu décevant sur le plan des performances
pures mais ses montées en régime grisantes se marient
à merveille avec la vocation de l'Elise 111R. Bien que plus
lourde et enrichie de nouveaux équipement, la Lotus reste
une pure sportive, très efficace et sans frime. Au menu,
toujours peu de confort, peu d'équipements mais beaucoup de bruit,
de sensations et des chronos d'enfer ! Une telle voiture "passion"
a bien évidemment un prix, qui malheureusement devient de
plus en plus élitiste à l'inverse de l'Elise...
CE QU'ILS EN ONT PENSE :
"La 111R devrait figurer comme l'Elise la plus excitante de
la gamme. Son moteur Toyota, pincée de piment supplémentaire
dans une recette réussie, s'accorde bien au caractère
ultime de l'auto. Reste sa nouvelle définition (freinage
assisté et ABS, climatisation) qui la fait rentrer dans le
rang en devenant une voiture comme une autre. Attention à
ce que l'Elise ne perde pas toutes les saveurs spécifiques
qui en ont fait un mets irrésistible jusqu'à présent."
SPORT AUTO - N°506 - ESSAI LOTUS 111R. |