L'ANGLAISE
DELUREE
Rover et MG ont connu des années particulièrement mouvementées.
Sous la bannière BMC (British Leyland Corporation), encore indépendants
et anglais, les deux marques ont du leur sauvetage à Honda trop
heureux de s'implanter en Europe et accroître sa taille mondiale.
Mais, la tâche était insurmontable pour Honda qui revendit son acquisition
au bout de quelques années à BMW, le performer du moment. Mais,
BMW à son tour ne réussit pas son pari. La revente éclatée et morcelée
de l'ex-groupe BMC rendit Rover et MG aux anglais. La dernière chance
?...
Texte :
Gabriel LESSARD
Photos : D.R.
Avec tant de mouvement et de changements
de propriétaires, Rover et MG ont évidemment souffert
à chaque changement de remises en question techniques récurrentes,
de l'adaptation de nouvelles plate-formes, de nouveaux moteurs communs
et de nouvelles stratégies. Résultat, aujourd'hui
le réseau Rover et MG est déchiré en France,
obligé de céder le panneau Land Rover, seule partie
rentable jusqu'ici. L'image de marque en France est passée
aux oubliettes et peu de personnes envisagent la marque Rover lors
d'un achat de véhicule. Peu de personnes croyaient ou espéraient
un renouveau des restes du groupe Rover aux mains de ce consortium
anglais. Pourtant, aujourd'hui Rover et MG sont toujours présents,
et avec des structures générales adaptées et
réduites au faible volume des ventes et de production, on
se prend à espérer des jours meilleurs pour la marque
au drakkar. Et le groupe Rover joue même à fond la
carte de l'image MG, qui reste encore forte pour encanailler les
berlines Rover.
T'AS LE LOOK COCO !
La Rover 75 est une Rover de l'ère BMW. Particulièrement
bien née, très chic et élégante, elle
affiche une allure bourgeoise sans trop d'ostentation. Le charme
britannique est omniprésent et on ne se lasse pas de cette
calandre et de ses chromes. On en vient même régulièrement
à l'assimiler à une petite Jaguar. Quel plus beau
compliment ! Mais lorsque la noble 75 passe dans le garage MG (les
initiales MG signifient justement Morris Garage), cette statutaire
anglaise change de registre. Fini les Beatles et God Save the Queen,
et bonjour les Sex Pistols ! Avec la suppression de tous les chromes,
excepté sur les poignées de portes, et sa peinture
intégrale, l'auto semble tout droit sortir d'un meeting de
tuning. Bien campée sur des jantes de 18", tout abus
de style a l'air évident sur la MG ZT. Les logos Rover ont
disparu et c'est désormais le Morris Garage qui frappe ces
autos aux couleurs souvent flashies. Globalement, passé l'effet
de surprise, on s'y fait et on se sent vite comme un gamin qui après
être sorti de chez ses parents sur le chemin de l'école
le matin, enfile un jean troué en cachette. La partie arrière
est en revanche restée plus discrète avec un bouclier
d'origine et une simple, mais peu élégante, protection
chromée autour de la sortie d'échappement.
COCON ANGLAIS
En matière d'intérieur, les Anglais ont eu une
longue tradition de réussite et de savoir-faire. Jaguar,
Rover, Rolls
ont toujours su marier à merveille bois
et cuir précieux, sans oublier les moquettes épaisses,
créant ainsi une atmosphère intimiste. Cosy quoi !
Dès qu'il s'agit de sport, il est en revanche plus délicat
d'insérer du bois. C'est pourquoi MG a mis à la place
du plastique métallisé du plus bel effet mettant l'accent
sur la sportivité. Moins de chaleur, plus de sensation. La
planche de bord conserve heureusement son charme so British et les
moquettes et cuirs/Alcantara sont toujours de belle facture. Bien
calé dans le siège conducteur, la position de conduite
est parfaite et les commandes tombent bien sous la main. En revanche,
l'habitabilité arrière est exiguë et il ne faudra
pas être trop grand pour voyager longtemps derrière.
Mais la magie opère toujours et on laisse toujours à
regret cet habitacle pour celui d'autres berlines plus classiques.
UN V6 AMELIORE
D'origine, le V6 Rover KV6 de 2,5 litres n'est pas un modèle
de sportivité. Avec seulement 177 ch, il avait été
volontairement limité par BMW pour que la nouvelle venue
ne vienne pas trop concurrencer ses cousines bavaroises d'alors.
MG s'est donc attelé à le rendre plus performant et
plus sportif. Résultat mitigé puisqu'ainsi modifié,
il ne développe "que" 190 ch à 6 500 tr/mn,
lorsque ses rivales directes développent toutes 200 ch ou
plus. Seule l'Alfa Romeo 156 V6 2,5 litres développe elle
aussi 190 ch, mais elle pèse 285 kg de moins (CQFD). Le régime
élevé du couple maxi donne donc une cartographie moteur
un peu creuse à bas régime. Heureusement, la boîte
de vitesse à 5 rapports seulement, est très bien étagé
et permet de relancer efficacement cette anglaise aux allures de
punk. Enfin, ce qui ne gâche rien, le KV6 de 190 ch nous gratifie
d'une sonorité et d'une onctuosité agréable
à l'usage.
SUR LA ROUTE
Avec 190 ch sous le pied droit, on s'attend à des sensations
vigoureuses à défaut d'être sportives. Pourtant,
le poids élevé de l'auto et l'inertie du V6 à
bas régime pénalisent les performances de la ZT 190.
Vraie routière, on en vient à regretter son look tapageur
pour des performances si sages (près de 30 secondes pour
le kilomètre départ arrêté). Elle se
rattrape par son comportement routier facile et précis qui
est à la portée du conducteur lambda. Comme on pouvait
s'en douter, les jantes de 18" avec pneus en 255/45 alliées
aux suspensions raffermies altèrent quelque peu le confort,
surtout sur chaussée inégale ou dégradée.
Bonne surprise également, le freinage optimisé nous
est apparu efficace et endurant. Avec près de 1,6 tonnes
à mouvoir, on aurait pu craindre le contraire.
::
CONCLUSION
Finalement elle n'est pas la bombe que son
physique laissait présager : Plus Beatles que Rolling Stones. On
en vient alors à regretter que les dirigeants de Rover n'aient pas
réservé un tel look exclusivement à la version V8 en préparation
qui devrait délivrer 260 ch puis 380 ch avec compresseur aux roues…
arrière ! Si la Rover 75 recevait ce même moteur de 190 ch en conservant
sa définition d'origine, elle n'en serait que plus attachante encore.
Son prix de 33 000 € est élevé au regard des performances mais donné
par rapport à l'atmosphère et à l'équipement proposé en série. En
somme, une belle alternative peu rationnelle mais charmeuse qui
s'offre à vous, si l'avenir incertain de Rover ne vous fait pas
peur… |