LIBEREZ SEAT SPORT !
Seat n'en finit plus de travailler
à son image sportive, malgré une légitimité
contestée par un engagement modeste en sport automobile.
En revanche, pour ce qui est du marketing la marque est au top.
L'Ibiza Cupra voit désormais son appellation partagée
et contestée par une motorisation TDI, tout comme le fut
avant lui le mythique emblème "GTI" de la Volkswagen
Golf...
Texte :
Sébastien DUPUIS
Photos : D.R.
En découvrant la Seat Ibiza Cupra
au mondial de l'automobile à Paris, vous aurez sans doute
remarqué que le modèle exposé dans un beau
jaune vif possédait un compte-tour avec des chiffres peu
habituels. Une zone rouge à 5000 tr/mn, voilà qui
est bien surprenant sur une sportive, de surcroit espagnole, au
sang théoriquement chaud. En réalité, il s'agissait
bien évidemment d'une version TDI enfilant le même
survêtement que sa soeur nourrie au sans plomb, à ce
détail près du compte-tours. Une parité esthétique
d'autant plus destabilisante que les performances annoncées
sont sensiblement comparables... Mais alors, qu'a-t-on fait de l'auto
emocion chez Seat ?
DESIGN
Par son positionnement marketing au sein du groupe VAG, Seat incarne
la sportivité, le dynamisme et l'émotion. On trouve
ainsi plusieurs niveaux de sportivité au sein de la gamme
Ibiza, dont les versions "FR" et "Cupra", cette
dernière développée avec Seat Sport en étant
la plus belle représentante. Supervisé par Walter
Da Silva, ex designer Alfa Romeo, le style de la 3ème génération
d'Ibiza est moins germanique que ne pouvait le laisser craindre
la filiation directe avec le groupe VAG. Les allemands ont donc
bien compris que les acheteurs de Seat avaient des besoins et des
goûts spécifiques et qu'il valait mieux aller empieter
sur les plates-bandes d'Alfa Romeo que sur celle de Volkswagen...
Plus large (1m69) et plus longue (3m95) que l'ancienne génération,
la nouvelle Ibiza se distingue par une silhouette plus aggressive
et un dynamisme renforcé par une ceinture de caisse très
haute qui compense en partie, du moins visuellement, une hauteur
de caisse assez importante (1m44). Les formes plus complexes et
organiques tranchent radicalement avec le design très géométrique
des vieux modèles. Si le résultat divise les avis,
on peut se réjouir que les modèles Seat possèdent,
de plus en plus, leur propre personnalité stylistique. Avec
ses grandes entrées d'air dans le bouclier avant, ses larges
roues de 17" de couleur sombre chaussés de pneus très
bas et sa sortie d'échappement chromée l'Ibiza Cupra
1.8 20 VT adopte une sportivité sobre et sans fioriture mais
se distingue au premier coup d'oeil du reste de la gamme. Le logo
"cupra" posé sur le hayon est comme la signature
de cette exclusivité esthétique.
HABITACLE
A l'intérieur,
le pilote est moins à la fête. les couleurs sombres
et l'agencement très conventionnel de l'habitacle s'opposent
radicalement à l'originalité et aux teintes vives
de la carrosserie. Seule une surpiqûre rouge sur les coutures
des sièges égayent un univers massivement teinté
de noir et de gris. En revanche pour ce qui concerne l'ergonomie
et l'équipement, la Seat Ibiza Cupra figure parmi les meilleure
de sa catégorie. Volant, levier de vitesses, commodos et
console centrale forment un poste de pilotage plutôt agréable.
Côté finition et qualité des matériaux,
l'appartenance au groupe VAG se fait nettement sentir également,
même si la hiérarchie est bien respectée. Impossible
en effet de se croire à l'intérieur d'une Audi.
MOTEUR
Avant dernier maillon dans la hiérarchie du groupe VAG, Seat
se contente généralement des "miettes" laissées
par les ténors Audi et VW. Il en va ainsi pour chaque motorisation,
histoire de préserver un léger avantage à ceux
qui dépensent plus cher... Sous le capot de l'Ibiza Cupra,
pas de surprise ni d'effet d'annonce. Alors que la Golf et l'A3
peuvent se targuer en première mondiale d'un inédit
2.0 turbo FSI de 200 chevaux, l'acheteur de Seat n'a, lui, rien
de bien croustillant à se mettre sous la dent. Dommage, car
on imagine que chez Seat il existe bien quelques ingénieurs
compétents pour nous concocter uen mécanique un peu
plus exclusive et pimentée... Pour nous qui aimons tant les
beaux moteurs, c'est une véritable frustration ! Dès
la lecture de la fiche technique, les présentation avec l'Ibiza
Cupra sont faites. En effet, la mécanique qui anime la petite
espagnole est une vieille connaissance du groupe VAG et motorise
depuis de longues années, moultes modèles Seat, Audi,
Volkswagen et même Skoda. Il s'agit du sempiternel 4 cylindres
turbocompressé à 20 soupapes, décliné
dans de multiples puissances et livré ici dans sa version
"180" ch à 5800 tr/mn. Une puissance maxi, respectable
dans la catégorie, et obtenue de façon très
linéaire grâce à un couple de 245 Nm délivré
constamment de 1500 à 4000 tr/mn. On se doute que, là
encore, le choix de moteur a été bien pensé
pour ne pas faire trop d'ombre à une autre Seat Cupra, la
Leon, dotée du 1.8 turbo de 225 ch après avoir récupéré
un temps l'ancien 1.8T 210 de l'Audi S3. Car au niveau des performances,
la petite Ibiza s'envole et colle au train des meilleures de la
catégorie des "GTI", Renault Clio RS en tête.
Bien aidée par sa boîte manuelle à 5 rapports
bien étagés, elle passe de 0 à 100 km/h en
7,3" et pointe son museau sur la ligne du 1000m en 28,4"
quelques secondes avant d'atteindre sa vitesse maxi de 229 km/h.
Son terrain de prédilection est bien entendu les reprises
où son turbo fait des merveilles : de 60 à 100 km/h
en 7,3" sur le quatrième rapport, c'est aussi bien que
la version Cupra TDI forte de 330 Nm de couple et d'une boîte
6 à rapports. Avec une consommation mixte pouvant se limiter
à 8L/100, l'Ibiza profitede son poids contenu (1170 kg) pour
ne pas se montrer trop dure avec le portefeuille. Néanmoins,
dans ce domaine aussi, une Clio RS fait mieux car elle sait aussi
se montrer relativement sobre en usage sportif, là où
le turbo de la Seat la rend plus gloutonne. Mais c'est bien connu,
on voudrait toujours le beurre, l'argent du beurre et les douceurs
de la crémière...
CHASSIS
Sans un châssis efficace, une voiture de sport n'a pas besoin
d'un moteur puissant. Une évidence au sein du sport automobile
qui a toutefois mis un certain nombre d'année avant d'être
inculquée aux ingénieurs du groupe VAG. Il aura fallu
attendre l'intervention du département compétition
de la marque Catalane, Seat Sport, pour découvrir avec bonheur
sur la Leon Cupra R, qu'à force de ténacité
et d'espoir on finit par avoir ce que l'on veut ! Etudiée
par la même équipe, l'Ibiza Cupra se distingue de ses
soeurs moins puissantes par des trains roulants plus adaptés
à une conduite dynamique. Comme les dernières réalisations,
l'Ibiza Cupra reçoit le "Dynamic Steering Response"
(DSR), autrement dit, une assistance variable de direction. Tout
l'ensemble de la suspension a été repensé pour
la Cupra, ressorts, amortisseurs, silent blocks, barres anti-roulis,
etc. Le système de suspension combine des ressorts plus doux,
des amortisseurs plus courts et raides, des silent-blocs qui transmettent
plus rapidement l'appui de compression du châssis, des pneus
à profil bas et une direction plus ferme. Les ressorts plus
doux sur l'Ibiza Cupra, comparé à la versions FR essayée
précédemment dans notre guide d'achat, sont un aspect
essentiel des caractéristiques du châssis. Les amortisseurs
plus fermes en compression augmentent la stabilité. Les resorts
sont 8 millimètres plus court, et contribuent ainsi à
une meilleure tenue en conduite sportive dans les courbes et la
barre anti-roulis de 20 mm de diamètre est légèrement
plus large que sur la FR (19 mm). L'ancrage de silent-blocs a été
changé du triangle aux sous-châssis avant. Leur structure
en caoutchouc est plus rigide, transférant l'appui immédiatement
aux châssis comme les joints utilisés dans le groupe
N des voitures de rallye, mais avec un confort de conduite tout
de même préservé. Les modifications au puits
arrière incluent des suspensions 20% plus fermes que sur
la FR pour contribuer au placement et à l'incisivité
du train avant. L'Ibiza Cupra a aussi un centre de gravité
inférieur à la FR. Le train avant a été
baissé de quatre millimètres et l'arrière par
13, les plaçant au même niveau. C'est bien, mais il
faut en contrepartie composer avec un confort restreint, les mousses
très denses des sièges faisant par moments ressembler
le siège à bancs d'école. Egalement responsable
de cette rigidité, les jantes de 17" de couleur anthracite
sont chaussées de pneus tailles basses en 205/40. Des pneus
hiver développés par SEAT Sport sont également
disponible dans ces dimensions. Bien secondée par un dispositif
de freinage composé de disques ventilés de 312 mm
à l'avant et de disques pleins de 232 mm à l'arrière,
l'Ibiza contient dans une rigueur toute germanique, la puissance
de son moteur. En adoptant les étriers optionnels à
4 pistons, reconnaissables à leur couleur rouge, le freinage
de l'Ibiza gagne en endurance et en efficacité lors d'un
usage répété. Si votre souhait est d'aller
traîner un peu vos pneus sur circuit, nous vous conseillons
vivement cet équipement. Malheureusement, si tel était
le cas, vous pourriez bien être déçu par le
comportement trop rigoureux de l'Ibiza. Car au final, si l'ensemble
des modifications apportées au châssis de l'Ibiza ont
incontestablement été bénéfiques à
la rigidité et à l'efficacité, il faut reconnaître
que le coktail manque de saveur. Pour préciser notre grief,
sachez que les systèmes de contrôles électroniques
DSR, ABS, TCS et ESP de dernière génération
baptisé EBA (intégrant un amplificateur de freinage)
ne laissent pas vraiment de place à l'amusement sur circuit.
Implacablement soudée au bitume, l'Ibiza conserve par ailleurs
le handicap naturel de la traction avant pour passer le couple aux
roues.
:: CONCLUSION
Malgré sa fraîcheur, la nouvelle Ibiza Cupra ne déclenchera
pas les passions les plus exacerbées. Joliment présentée,
bien construite, offrant un châssis efficace et un moteur
performant, on regrette le manque de fun, malheureusement prévisible,
de cette auto et, surtout, que Seat soit contraint d'accomoder à
chaque fois les restes mécaniques d'Audi et Volkswagen pour
composer une sportive qui mériterait une technologie et une
mécanique plus abouties. Dès lors, nous nous prenons
à rêver d'une auto entièrement conçue
chez Seat Sport et autrement plus amusante à piloter... histoire
également qu'elle se démarque plus nettement de sa
soeur, et néanmoins rivale, à gazole. |