HONDA CR-Z (2010 - )
TRANSITION DE GENRE
Soichiro Honda a dit : "nous n'avons qu'un seul avenir et il sera à l'image de nos rêves, si nous avons le courage de briser les idées reçues". Si pour l'heure voiture hybride rimait presque toujours avec ennui mécanique et atrocité visuelle, Honda entend bien bousculer les codes en proposant le premier petit coupé sportif réussissant le difficile mariage de la performance énergétique et du plaisir de conduite. Le Honda CR-Z s'inscrit-il dans la continuité du CR-X ?
Texte :
Sébastien DUPUIS
Photos : Thomas POSLUSZNY
Apparu en 1983 le coupé Honda CR-X, dérivé de la Civic, a marqué sa génération comme le premier petit coupé sportif de Honda. Mais depuis plus de 10 ans, le CR-X avait laissé un grand vide au sein de la gamme Honda, que la Civic 3 portes n'avait pu combler dans le coeur des fans. Aussi, lorsque fût présenté le concept car CR-Z en octobre 2007 au Tokyo Auto Show, les plus grands espoirs ont commencé à renaître. La renaissance, c'était précisément le thème du CR-Z, trois lettres pour signifier Compact Renaissance Zero.
En effet, en dehors du gabarit et de son architecture de coupé 2+2 compact, le CR-Z semble avoir fait table rase du passé. Un vrai changement de millénaire opéré par le biais d'une mutation technologique profonde : l'hybridation. A ce titre, et au vu de la seule fiche technique mettant peu en valeur le caractère sportif vanté par Honda, nous aurions pu passer notre chemin. Mais à la réflexion, le CR-Z de Honda méritait bien plus notre attention que n'importe quel réchauffé de sportive traditionnelle. Pas seulement pour se donner bonne conscience, les écolos trouveront toujours à redire de toute façon vu que ça n'avance pas avec le vent ni le soleil, mais simplement pour encourager une initiative qui prend de court la concurrence et dans un certain sens aussi, les mentalités. Et puis histoire de briller en société, vous pourrez dire à vos amis que oui, il y a un hybride dans le guide de L'Automobile Sportive.com...
PRESENTATION
Reprenant les grandes lignes du concept-car CR-Z et, de façon plus lointaine, celles du coupé CR-X, le coupé Honda de série affiche une silhouette trapue et compacte : 4,08 m de long sur 1,74 m de large et 1,39 m de haut. La face avant au style plongeant et le regard acéré, souligné par des feux de jour à LED, contrastent avec un arrière en pente douce qui s'achève sur un pan abrupt au dessin très personnel. La lunette arrière prend toute la surface du hayon, y compris le retour sur la face arrière, ce qui amène beaucoup de lumière dans l'habitacle. En revanche, les custodes très petites ne facilitent pas la rétrovision pour les manoeuvres.
Le coup de crayon est original, le CR-Z sait susciter la sportivité dans son aspect sans pour autant utiliser les clichés du genre, aileron, jupes, faux diffuseur, par ailleurs disponibles dans le catalogue des accessoires qu'on évitera donc soigneusement !
On regrette en revanche que la palette de coloris soit réduite à seulement quelques teintes des plus classiques : un gris sombre, un bleu turquoise, un rouge, un noir et un blanc. Notez que toutes ces couleurs sont métallisées et donc facturées 400 € en supplément, à l'exception du rouge.
HABITACLE
En ouvrant la porte, on s'installe dans un siège semi-baquet au maintien sportif. Ils permettent une position de conduite au ras du sol, bien à l'encontre de la tendance d'élévation du conducteur (et non de son niveau de conduite...) de ces dernières années. Le volant, très vertical selon la tradition Honda, trouve naturellement sa position grâce à des réglages en hauteur et en profondeur. Vient ensuite la découverte du tableau de bord. Et là, croyez-moi, si vous n'étiez jamais monté dans une Honda Civic fn2 en guise de préambule, c'est le choc ! Orientées vers le conducteur, les commandes et boutons affluent. L'ergonomie n'est pas spécialement intuitive au premier abord, il y'en a partout autour et sur le volant ! On croirait ces chaînes hifi qui multiplient les boutons pour se donner une allure high-tech, même si la plupart ne servent à rien. Amateurs de simplicité, le CR-Z n'est pas pour vous. En revanche, si tout petit vous rêviez du vaisseau des frères Bogdanoff dans Temps X et de montre calculatrice, vous allez a-do-rer ! C'est en effet très " spécial", pour ne pas dire spatial. Face à vous, derrière le volant multifonctions (tiens, encore des boutons...) le compte-tours. Il s'illumine de bleu à la mise en contact, avec la vitesse indiquée en chiffres numériques en son centre. A gauche, trois boutons, un pour chaque mode de conduite : econ (économique), normal (par défaut) et sport (qui fait changer l'éclairage du compte-tour en rouge). C'est bien sûr ce dernier que nous nous empressons d'activer aussitôt le démarreur lancé à l'aide du bouton "start", comme sur une S2000. Whaou, c'est sport ça, non ?
En revanche, la qualité des matériaux apparaît assez inégale dans l'habitacle et la présence de plastiques durs et granuleux dénote avec les habitudes de la maison Honda. Entre le dessin torturé et les nombreux types de revêtements, l'ensemble est tout de même très chargé visuellement. Il faut un certain temps pour s'habituer à la disposition des commandes, mais au final, tout tombe presque idéalement sous la main. Une fois au volant, il n'y a pas de doute en revanche concernant l'habitabilité à l'arrière. A part un cul-de-jatte ou un enfant en très bas âge, difficile d'exploiter le "+2" de ce coupé 2+2.
On se console égoïstement avec un vaste coffre et une équipement de série généreux, dès la finition de base appelée "Sport". Le client y reçoit déjà la climatisation automatique, la condamnation centralisée à distance, les vitres avant électriques à impulsion conducteur et passager, l'ordinateur de bord multifonction, les rétroviseurs extérieurs électriques et chauffants et un système audio CD MP3 6HP avec commandes au volant, prise auxiliaire jack et USB, volant en cuir 3 branches réglable en hauteur et en profondeur, pommeau de levier de vitesses aluminium et cuir, le pédalier aluminium, le siège conducteur réglable en hauteur, les sièges arrière rabattables, le cache-bagages à enrouleur, sans oublier l'indispensable lumière d’ambiance aux pieds. Au-dessus, la finition GT qui devrait représenter le gros des ventes ajoute le régulateur de vitesse, le détecteur de pluie et l'allumage automatique des phares, le système Bluetooth avec commandes au volant, les phares au Xénon, l'aide au stationnement arrière graphique et sonore, un subwoofer, des rétroviseurs rabattables électriquement, les sièges avant chauffants et l'alarme. Enfin, summum de la gamme CR-Z, la finition Luxury habille la sellerie de cuir et le toit d'un large vitrage teinté, mais désespérément fixe.
MOTEUR
Nous abordons ici le point le plus passionnant de cet essai, d'un certain point de vue. Car soyons clair, les performances très quelconques du CR-Z n'ont rien à voir avec ce commentaire. Non, il ne s'agit pas d'adrénaline, mais de technologie pure. La base thermique de la motorisation, le 1.5 i-Vtec de 114 ch de la Jazz, n'a pas d'intérêt particulier en soit, excepté pour son original système qui maintient fermée à bas régime l’une des deux soupapes d’admission au bénéfice du remplissage des cylindres et du couple à bas régime. Il convient donc de considérer la motorisation hybride Honda IMA (Integrated Motor Assist) dans son ensemble, avec le renfort du moteur électrique accolé au moteur thermique. Car il s'agit bien d'un renfort, dans la limite de la charge des batteries, les deux moteurs fonctionnant en parallèle contrairement au système hybride de Toyota qui offre aussi un mode tout électrique. Fort de 14 ch et surtout de ses 78 Nm, le petit moteur électrique peut porter de façon totalement transparente à la conduite la puissance combinée du système à 124 ch à 6100 tr/mn et le couple à 174 Nm de 1000 à... 1500 tr/mn ! Honda prend le 1.8 de la Civic pour comparaison mais en pratique, la souplesse de ce moteur hybride est réellement bien plus impressionnante que celle d'un 1800 cm3 atmo.
Capable de rouler sur un filet de gaz sur n'importe quel rapport, le CR-Z rend la boîte mécanique à 6 rapports presque archaïque dans ce havre de modernité, malgré l'aspect inédit de sa présence. En effet, bien étagée, précise mais un peu accrocheuse, elle ne participe pas autant que promis au plaisir de conduite. C'est bien sûr mieux que la CVT Honda (à variation continue), mais une boîte à double embrayage avec palettes au volant se serait certainement montrée plus en phase avec le caractère moderne, doux et linéaire du moteur IMA qui n'incite pas franchement à jouer des hauts régimes. Encore que, pour doubler, il sera néanmoins indispensable d'y recourir, à la boîte. Car comparé au downsizing "turbo", le downsizing "électro" avoue ici un cruel déficit de couple en reprises à mi-régime. Le poids du CR-Z, travaillé dans les moindres coins pour s'en tenir juste sous la barre des 1200 Kg est le premier ennemi d'une mécanique qui apparaît rapidement sous-dimensionnée pour procurer le moindre frisson à ce niveau là. Oubliez les VTEC "à l'ancienne", tout est ici très domestiqué et il n'y aura pas de folles envolées passé les 6000 tr/mn ! Au contraire, après les 6000, inutile de trop insister. Pourtant, le mode « Sport » procure une réponse plus franche de l’accélérateur et fait bonne impression sur le début de la plage de régimes, d'autant que la sonorité du moteur devient plus rauque et sympathique par ce biais.
Toutefois, l'objectif de Honda de rester sous la barre des 120g de CO2/km a été atteint au sacrifice des très hautes rotations. Le CR-Z se place à 117 g/km exactement, soit une consommation moyenne étonnante de 5.0L/100 km, pour qui sait avoir le pied léger en permanence. Sans tenir compte d'un tel obstacle au plaisir, nous pouvons toutefois vous annoncer qu'avec une moyenne de 7,5L/100 en conduite "dynamique" sur le mode sport, la concurrence reste rare chez les moteurs à essence de performances équivalentes. En ville, on appréciera le silence aux feux rouges grâce au système start & stop qui ne perturbe pas les habitudes de conduite par sa grande réactivité.
SUR LA ROUTE
Oubliez les lieux communs sur les hybrides de 2 tonnes, le Honda CR-Z fait aujourd'hui exception à la règle. Il n'est pourtant pas spécialement léger non plus, malgré ses bras de suspension en aluminium et d'autres petites attentions visant à réduire l'embonpoint. La batterie Nickel Metal Hydride n'est pas là pour aider, sauf à rajouter son lest sur l'arrière pour une meilleure répartition des masses. Basé sur une plateforme d'Insight, le CR-Z accuse une réduction de 115 mm de son empattement au bénéfice de l'agilité. A contrario, la largeur a été augmentée de 20 mm à l'avant et 25 mm à l'arrière pour garantir une stabilité optimale. De même, les porte-à-faux assez courts permettent d'avoir les roues dans les coins, ce qui influe directement sur le plaisir au volant.
Chaussée en 16" de série (195/55), ou 17" en option comme sur notre modèle d'essai (205/45), la Honda met en valeur dès les premiers kilomètres un comportement joueur mais équilibré et un amortissement bien calibré, suffisamment ferme pour limiter la prise de roulis et confortable pour affronter les mauvais revêtements sans séance hebdomadaire chez un kiné. La direction à assistance électrique est l'autre bonne surprise. Directe (2,48 tours de butées à butée), précise, plus ferme en mode sport, elle égale quasiment les vieux systèmes hydrauliques auxquels nous restons très attachés en matière de feeling. Remarquable, tout comme l'efficacité et le mordant du freinage (attention au dosage...) qui permet de récupérer de l'énergie en phase de décélération. Pour parfaire le tout, la position de conduite basse contribue également aux sensations de conduite sportives et au plaisir bien réel pris au volant dans les enchaînements de courbes. Sur ces aspects avant-gardistes et visionnaires, le coupé Honda CR-Z nous rappelle les défunts roadster et coupés Smart. Des petites sportives très en phase avec notre époque mais capables de procurer du plaisir avec des performances parfaitement ordinaires. Seulement voilà, avec un tel châssis, on rêve assez vite de 50 ch supplémentaires, au minimum...
CARACTERISTIQUES TECHNIQUES
HONDA CR-Z
MOTEURType : 4 cylindres en ligne, 16 soupapes + moteur électrique (10 kW)
Position : transversal AV
Alimentation : Injection électronique + calage variable i-Vtec
Cylindrée (cm3) : 1497
Alésage x course (mm) : 73 x 89.4
Puissance maxi (ch à tr/mn) : 124 à 6100
Couple maxi (Nm à tr/mn) : 174 de 1000 à 1500
TRANSMISSION
AV
Boîte de vitesses (rapports) : manuelle (6)
POIDS
Données constructeur (kg) : 1190
Rapport poids/puissance (kg/ch) : 9,6
ROUES
Freins Av-Ar (ø mm) : Disques ventilés (262) - Disques (260)
Pneus Av-Ar : 195/55 R 16
PERFORMANCES
Vitesse maxi (km/h) : 200
1 000 m DA : ND
0 à 100 km/h : 9"9
CONSOMMATION
Moyenne normalisée (L/100 Km) : 5
Moyenne de l'essai (L/100 Km) : 7,5
PRIX NEUF (06/2010) : 22.500 €
PUISSANCE FISCALE : 6 CV
CONCLUSION
:-) Style atypique Position de conduite Moteur très souple Consommation Châssis réussi et plaisant Vision d'avenir intéressante |
:-( Performances quelconques Manque de caractère mécanique Dessin de planche de bord très "spécial" Places arrières inutilisables Le prix de la bonne conscience... |
Un vieil adage dit que C'est avoir tort que d'avoir raison trop tôt. Une vérité qui s'est malheureusement vérifiée plusieurs fois par le passé. Victime du même handicap de puissance, le Honda CR-Z propose lui aussi une vision d'avenir, celle d'une sportivité plus écologique mais qui ne fait pas complètement l'impasse sur le plaisir de conduire. Mais ces arguments parlent-ils aujourd'hui aux amateurs de voitures sportives ? Honda le pense, au point de ne pas prévoir de version "type R"...
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C'est une sorte de petite gti avec une super position de conduite et un tout petit habitacle, mais superbe, lumineux et bien fini. J'ai bien aimé le bruit, travaillé à bas régime, ce qui couplé à la grande souplesse fait qu'on prend déjà du plaisir dynamique à 2000-2500tr, donc avant que les concurrentes en turbo soufflent, et que les petits atmo classiques se réveillent. A haut régime le moteur gueule comme un 4cyl sportif à l'ancienne, grâce à peu d'insonorisants, on a donc une vraie ambiance sportive sur toute la plage de régimes. Avec le poids contenu et la faible hauteur, les suspensions n'ont pas eu besoin d'être super raides, la voiture respire bien sur le bosselé, et le couple train avant/direction incisive est bien. La commande de boite est superbe, avec un petit bruit, rendant un simple passage 3>4 orgasmique. J'ai pris du plaisir avec cette caisse, le défaut de cette ambiance c'est que sur autoroute sur longs trajets c'est très bruyant. Ca m'a pas empêché d'aller jusqu'en Croatie avec, avec une conso étonnante en traversant l'Italie à plusieurs reprises sans me priver. Et la batterie est de petite capacité, sur les longues côtes sur autoroute elle va s’épuiser et il faudra repasser en 5, pareil dans un col si vous restez trop à bas régimes, là où le moteur électrique compense le plus. Je recommande cette caisse si vos critères pratiques arrivent à matcher avec. J'en garde un bien meilleur souvenir que de ma mx-5 NC 160, et malgré mon passage sur une gti moderne turbo bien plus performante, petit pincement au coeur en repensant à cette petite honda, qui a des qualités bien à elle. Bien sûr ça rame, mais de toutes façons, cr-z ou nsx on est condamnés à se faire passer par le premier suv électrique croisé sur la route, on s'en fout.