KIA STINGER 2.0 T-GDi (2017 - )
Lâcher la bride
En annonçant une berline propulsion aux allures sportives, Kia avait surpris son monde. Déclinée en plusieurs motorisations avec jusqu'à 370 chevaux pour le V6, le constructeur allie les actes aux paroles. C'est la motorisation intermédiaire 2.0 T-GDI, récemment importée dans l'Hexagone, que nous essayons en premier…
Texte : Maxime JOLY
Photos : Julien DEMAIN
Attention, l'écart se creuse. Alors que nos berlines françaises utilisent des plateformes de compactes et ont, depuis longtemps fait une croix sur les six cylindres, voilà qu'un généraliste asiatique n'hésite pas à s'essayer à la berline-coupé cinq portes à moteur longitudinal. Même Volkswagen n'ose plus en faire autant comme le démontre son Arteon qui n'aurait presque de premium que ses tarifs. Mais là où Volkswagen a jeté l'éponge, est-ce raisonnable d'imaginer Kia réussir ?
Cette motorisation 2.0 T-GDI n'était pas censée voir le jour en France car, comme le V6, elle est sujette au malus maximum. Kia France l'avait d'abord refusée, ne souhaitant proposer que le diesel et le V6. Finalement, il a fallu revoir les prétentions à la baisse, entre la dégringolade du diesel et le tarif prohibitif du V6 qui n'aura amené qu'une soixante de clients depuis le début de la commercialisation, cet "entre-deux" trouve une certaine pertinence.
Les objectifs de vente sur le marché français sont assez simples, il n'y en a aucun. Et c'est probablement la bonne marche à suivre. Sans image, il est inconcevable d'imaginer un succès pour la Stinger, surtout sur un segment sinistré à cause des SUV. En gros, les Coréens font ce qu'Audi a réalisé autrefois et tout ce que nos Français se refusent à accomplir, en laissant tomber les tentatives de haut de gamme au premier échec survenu. Que dire du dernier exemple en date, la Peugeot RCZ, qui n'aura d'ailleurs même pas été un échec commercial ?
PRESENTATION
Vue comme un objet de curiosité par les passants, la Stinger attire les regards et les questions sur le cheptel disponible à la vue des doubles sorties d'échappement. Puis les compliments. Extérieurement, on peut dire qu'elle ne fait pas dans la demi-mesure. Quoiqu'avec ses 4830 mm, elle a justement choisi d'éviter l'opposition frontale avec les trois ténors allemands et s'est davantage calquée sur les dimensions des autres berlines généralistes. L'Alfa Romeo Giulia, plus petite, n'est pas non plus comparable. N'hésitant pas à piocher à droite et à gauche ce qui fonctionne en matière de design jusqu'aux inserts noir laqués sur le capot façon prise d'aération, la Stinger ajoute une touche touche d'originalité avec le retour des feux loin sur les ailes arrière. Capable de plaire à un grand nombre d'acheteurs à travers la planète qui y verront une rivale de l'Audi A5 Sportback, un peu de BMW Série 4 ou même un air de Maserati 3200 GT à l'arrière, elle pourait être aussi bien allemande que japonaise ou même américaine. Une force qui pourrait aussi être sa principale faiblesse dans une époque où l'identité des marques tourne parfois à leur propre caricature. Pour l'identification, elle peut toutefois compter sur sa calandre "Tiger Nose" de plus en plus reconnaissable.
En France, seule la finition GT Line "Pack Premium" est proposée sur le 4 cylindres essence, la finition supérieure GT étant réservée au V6. La GT Line déjà richement pourvue inclut les phares full LED adaptatifs, le toit vitré électrique. La GT Line Premium y ajoute les deux doubles sorties d'échappement chromées de chaque côté du bouclier et des jantes 19" avec dessin exclusif pour la motorisation essence seulement. La peinture métallisée est la seule option du catalogue avec des teintes de carrosserie allant des classiques blanc-gris-noir aux exubérants rouge "Performance" (peinture spéciale en supplément), bleu "Cobalt" ou jaune "Racing", seule couleur gratuite.
HABITACLE
La présentation intérieure de la Stinger est plus que correcte. Pour le ratio prix/équipement/performances proposé, il n'y a pas grand-chose à reprocher. Trois coloris existent pour la sellerie en cuir véritable tendu et perforé, livrée de série. On appréciera la dotation de série très riche comprenant des sièges avant à réglages électriques, ventilés et chauffants (tout comme la banquette arrière) avec fonction mémoire et longueur d'assise réglable côté conducteur, des rétroviseurs extérieurs anti-éblouissement, des palettes de vitesses au volant, lequel est aussi chauffant et réglable électriquement en hauteur et en profondeur, une instrumentation tête-haute (HUD), une système de navigation, écran tactile couleur 8'', l'ouverture et démarrage sans clé SmartKey, la caméra de recul la surveillance des angles morts (BCW), le détecteur de trafic arrière, le chargement du smartphone par induction, l'ouverture du coffre mains-libres, un système audio premium Harman/Kardon de 720W, etc. etc. Bref, Kia offre beaucoup de ces petites attentions qui alourdissent très vite la facture côté allemand...
MOTEUR
Le hasard du calendrier fait que l'on vient de parler du 2.0 litres T-GDi lors de l'essai de la Hyundai i30 N. Les deux Coréens faisant partie du même groupe, il n'y a rien d'étonnant au partage de ce bloc tout alu issu de la famille Theta II. La principale différence entre les deux versions de cette mécanique est que sur la Stinger, le 1998 cm3 est installé en position longitudinale. Annoncé pour 255 chevaux, ce 2 litres turbo délivre 353 Nm comme l'i30 N mais sans l'overboost de la déclinaison "Performance Pack". La clientèle n'étant pas la même que pour une compacte énervée, Kia a été plus sage en matière d'échappement bien que cela ne se voit pas forcément avec les quatre sorties imposantes. La sonorité est plutôt discrète à régime stabilisé mais le quatre cylindres se fait tout de même entendre en phase d'accélération.
Question caractère, pas de bouleversement. Ce deux litres tire profit de son gros couple et de sa cylindrée pour tracter plus de 1600 kg à vide. Si vous permettez une métaphore footballistique, on est plus dans le registre d'un besogneux milieu défensif que dans celui d'un flamboyant numéro 10. Le travail est fait et les reprises sont suffisantes pour s'extraire du flot de circulation en toute décontraction mais il n'y a pas de quoi lever les foules. Le poids se ressent à bas régime où le 4 cylindres turbo ne peut prétendre à la souplesse d'un V6 atmosphérique. En revanche, il peut se faire pardonner avec une consommation tournant autour de 8 L/100 km sur un parcours mixte.
Enfin, la boîte automatique maison à huit rapports est imposée. Il est vrai que dans les temps actuels, une boîte manuelle sur ce type de véhicule ne trouve plus preneur. Rapide dans son exécution, elle est agréable. Dommage que la gestion soit trop typée selon les modes de conduite : pas assez réactive en Comfort et trop agressive en Sport et Sport+. S'ajoutent à eux les modes Eco et Smart, ce dernier étant censé s'adapter de façon "intelligente" à la conduite du chauffeur. Nous sommes moyennement convaincus sur ce point…
NOTE :
La dernière documentation KIA ne fait plus mention de 255 ch pour le 2.0 T-GDi mais de 240 ch. Il s'agit bien du même moteur mais entre notre essai et sa publication, KIA a dû procéder avant le 1er septembre à une nouvelle homologation pour la norme EURO 6d-TEMP. Ceci se traduit par la pose d'un filtre à particules sur les moteurs T-GDI, entraînant la perte de 10 ch DIN et un niveau de Co2 de 188 g/km ainsi qu'une légère baisse des performances que nous n'avons pas pris en compte dans notre fiche technique. Le couple est pour sa part inchangé, ni le poids officiellement.
SUR LA ROUTE
Outre la motorisation, les Stinger 2.0 T-GDI GT Line et V6 GT diffèrent sur trois éléments fondamentaux. Tout d'abord, la première n'existe qu'en propulsion. Pour la seconde, c'est plus complexe. Elle est uniquement équipée d'une transmission intégrale en conduite à gauche, transmission qu'elle laisse de côté avec le volant à droite – la finition s'appelle alors GTS. Ensuite, la V6 utilise les services de suspensions pilotées contre un amortissement passif sur la 2 litres. Enfin, la différence de poids entre les deux modèles est d'au moins 150 kg et donc conséquente. C'est pourquoi la GT a d'office le kit de freinage Brembo. Cela dit, il faut préciser que le diamètre des disques de frein est majoré sur le quatre pattes essence par rapport à son homologue diesel qui propose, en outre, la transmission intégrale en option.
Maintenant que les présentations sont faites, place au roulage. Sur les premiers kilomètres, la direction se montre vraiment légère. Très agréable pour manœuvrer en ville mais quand même, mettons le mode Sport. Elle gagne immédiatement en consistance mais ce n'est pas encore tout à fait ça côté feeling. On en viendrait à hésiter à le mettre dans les défauts tant c'est récurrent en 2018. Cependant, dans un souci d'équité, nous n'avons guère d'autre choix.
Longue et lourde, difficile de croire à du sport derrière le cerceau. Pourtant, la dotation de série comprend le différentiel à glissement limité ! Un accessoire bien utile et pourtant très rare dans cette catégorie de puissance. Hormis la Giulia TBI 200 Q2 et la Skoda Octavia RS 245 (actuellement en cours de ré-homologation), nous n'en voyons pas d'autres. Dites-nous si nous en oublions ! Propulsion + autobloquant, voilà donc un duo qui sent bon. Vivement le premier enchaînement de virages. Il approche de plus en plus près, de plus en plus vite. Puis, puis…
Pas grand-chose finalement. Le train avant est difficile à poser exactement où on le souhaite et semble un peu paresseux dans l'effort, vraisemblablement la faute à une rpise de roiulis importante. Dommage car, à la conduite, l'amortissement se montre au contraire plutôt ferme comparativement à la suspension pilotée qui équipe la V6. Mais cette dernière étant moins sportive, c'était un prix à payer acceptable pour gagner en précision de toucher de route. Le manque de ressenti dans la direction n'aide pas à « sentir » la voiture.
Ce manque de tranchant ne castre pas fondamentalement le potentiel dynamique de la Stinger qui reste plus qu'honorable. La conduite est aisée et les vitesses atteintes déjà largement répréhensibles. Le freinage est suffisamment puissant pour ne pas se faire de frayeur. Nous n'avons pas eu la possibilité de juger pleinement de son endurance mais il est peu probable que beaucoup de propriétaires en demandent davantage. Sportive ? Non. Dynamique et performante ? Oui et, dans le fond, c'est déjà pas mal…
CARACTERISTIQUES TECHNIQUES
KIA STINGER 2.0 T-GDi
MOTEURType : 4 cylindres en ligne, 16 soupapes avec calage variable continu à l'admission
Position : transversal AV
Alimentation : Injection directe + turbo Mitsubishi TD04
Cylindrée (cm3) : 1998
Alésage x course (mm) : 86 x 86
Puissance maxi (ch DIN à tr/mn) : 255 à 6200
Couple maxi (Nm à tr/mn) : 353 de 1400 à 4000
TRANSMISSION
AR
Boîte de vitesses (rapports) : automatique (8)
ROUES
Freins Av-Ar (Ø mm) : disques ventilés (345-330)
Pneus Av-Ar : 225/40 - 255/35 R19
POIDS
Donnée constructeur (kg) : 1642
Rapport poids/puissance (kg/ch) : 6,4
PERFORMANCES
Vitesse maxi (km/h) : 232
0 - 100 km/h : 6"
80 -120 kmh : 4"4
CONSOMMATION
Moyenne cycle mixte (L/100 km) : 8.3
Moyenne de l'essai (L/100 km) : 10
CO2 (g/km) : 190
PRIX NEUF (09/2018) : 50 400 €
PUISSANCE FISCALE : 16 CV
CONCLUSION
Sans être parfaite, la Kia Stinger 2.0 T-GDi est une alternative crédible et plus abordable à l'hégémonie allemande. Parfaite pour rouler différemment, tout en offrant de belles prestations en termes de performances et de ressenti, elle n'est en rien moins dynamique que les motorisations intermédiaires venant d'Outre-Rhin. Restent ses dimensions à mi-chemin entre deux segments et un déficit d'image à intégrer avant la revente…
Design plutôt séduisant
Tarifs / équipements
Autobloquant en série en France
Reprises
Consommation
Garantie 7 ans
Train avant manquant de précision
Direction légère
Poids
Malus maximum
Boîte automatique perfectible
Quelle image ?