GP, COMME GROS PLAISIR
La Mini Cooper S est une petite GTI qui a toujours joué la carte de la différence. Différence par un style très travaillé, un positionnement haut de gamme et une motorisation compressée, la Mini de BMW n'a plus grand chose à voir avec son ancêtre. Mais il y a fort à parier que Sir Alec Issigonis lui-même n'aurait pas pu renier cette diablesse sortie de l'atelier Cooper avec un kit "GP" au nom évocateur...
Texte :
Sébastien DUPUIS
Photos : D.R.
Créée à la fin des années 40 par Charles Cooper et son fils John, la Cooper Car Company est devenue une véritable référence en matière de course automobile. Depuis que Mini existe, les deux noms sont étroitement liés. Après les courses brillantes en Formule 1 au début des années 1960, John Cooper s’intéressa rapidement aux rallyes. La petite Mini, agile, remportera ainsi le Rallye de Monte Carlo 1964, 1965 et 1967. Des succès qu'elle exploitait pleinement pour promouvoir la réputation de la Mini classique d’être un petit bolide aux qualités routières éblouissantes. Dès le début du lancement du nouveau modèle en 2001, BMW a impliqué Mike Cooper, le fils de John, et sa société John Cooper Works dans le développement de nouveaux modèles performants. Inspirée de la voiture de course au volant de laquelle jeunes loups et personnalités éminentes disputaient le MINI CHALLENGE sur les circuits, la Mini Cooper S John Cooper Works GP Kit (ouf ! appellons-là Cooper GP si vous voulez bien...) a été construite en une petite série exclusive de 2000 pièces juste avant le remplacement de la "nouvelle Mini" par la "nouvelle" nouvelle Mini... Vous suivez ? Les lettres GP signifient bien sûr «Grand Prix». «J’ai voulu honorer les voitures de Grand Prix couronnées de mon père», explique Mike Cooper. Et il est certain que le plaisir au volant de cette Mini GP est un plaisir exclusif !
DESIGN
Le pack aérodynamique spécifique, la peinture métallisée exclusive et les jantes noir et alu de 18 pouces permettent d’identifier cette Mini Cooper S GP comme un modèle peu ordinaire. A la limite, le néophyte y verra un fort goût de tuning, ce qui n'est pas faux et peut ne pas plaire à tout le monde. Le "setup" de la GP se voit complété par un pack aérodynamique fignolé lors d’essais complexes dans la soufflerie aérodynamique. L’allure originale et marquante, plus sportive qu'élégante, qu’arbore ce bonbon acidulé témoigne de l'état d'esprit qui habite les gens du "Cooper Works". Plus "British" tu meurs ! Mais plus encore que par le côté esthétique, le temps et le savoir-faire investis dans le pack aérodynamique de la plus puissante des Mini jamais produites ont été motivés par des questions de fonctionnalité. Les spécialistes ont développé des éléments de carrosserie augmentant sensiblement la déportance au niveau des essieux tant avant qu’arrière tout en optimisant le coefficient de pénétration dans l’air et surtout le comportement routier à grande vitesse, au détriment du Cx qui est de 0,35. Le bouclier avant a été entièrement redessiné : il revient sur les côtés pour se raccorder aux passages de roue avant. En bas, il se termine par une lèvre aérodynamique noire devant les roues. La prise d’air de refroidissement inhabituellement grande pour une Mini et les éléments de style couleur argent intégrés de part et d’autre de celle-ci dans le bouclier avant confèrent une largeur peu commune à la bestiole, vue de face. Les bas de caisse descendent également très bas. Se bombant directement devant les roues arrière, comme sur une grosse supercar, ils favorisent l’aérodynamique. Le flux d’air est canalisé de manière idéale à ce niveau. Le travail sur mesure et le réglage minutieux en soufflerie ont aussi influencé la forme de l’aileron arrière en carbone apparent et ont finalement débouché sur un apendice très marqué. Pour des raisons fonctionnelles, l’aileron arrière est monté sur le haut du volet arrière. De ce fait, le troisième feu stop qui occupe cette place sur les autres modèles, a été déporté sur le bord inférieur de la lunette arrière spécialement conçue pour ce modèle. Les spécialistes ont saisi cette occasion pour grappiller quelques grammes en renonçant au montage de l’essuie-glace arrière. Les 2000 exemplaires de la Mini Cooper Works GP ont toutes reçues les mêmes couleurs. La carrosserie est peinte en Thunder Blue, une teinte spécifique, tandis que fidèle à la tradition, le toit se détache de cette robe bleue par sa couleur "Pure Silver". Sur le côté du toit, directement au-dessus de la porte du conducteur, chaque exemplaire de cette édition arbore un monogramme GP associé au numéro de production individuel à quatre chiffres – de 0001 à 2000. Le look "tuning touch" est aussi souligné par les vitres latérales arrières et la lunette surteintées, les étriers de freins rouges (à l'avant uniquement !) ainsi que les coquilles de rétroviseurs peintes en Chili Red et qui semblent arrivées ici à la suite d'une erreur sur la chaîne de montage... mais non ! C'est juste du raffinement, à l'anglaise !
HABITACLE
L’habitacle de la Mini Cooper Works GP dégage la même ambiance de course qui rompt avec le "chic cosy" habituel de la Mini. Le pilote et le copilote, seulement, s’installent à bord dans des sièges baquets spécifiques, fournis par Recaro, recouverts de cuir souple avec de jolies surpiqûres rouges. Maintien latéral parfait grâce aux nombreux réglages, la position de conduite avec le petit volant cuir multifonctions à trois branches qui tombe bien en mains éveille le pilote qui sommeille en vous. Le confort n’est pourtant pas négligé, car le chauffage des sièges fait partie de la dotation standard. Si on avait voulu gagner encore un peu de poids, ça aurait pu faire partie de la liste ! Le Pure Silver fait chatoyer le tableau de bord. Du côté passager, une plaquette GP associée au numéro de série de la voiture ajoute encore un peu au caractère exclusif de l'auto. Assez de place pour les bagages et une barre anti-rapprochement en alu poli derrière les sièges avant, voilà ce qu'on trouve en lieu et place de la banquette ! Allez hop, pas de chichi. Du coup, la petitote se retrouve en catégorie "coupé 2 places". La surface de chargement plane augmente la valeur utile de la Mini qui se découvre des vertues insoupçonnées e déménageuse (670L !)... Le plancher du coffre peut être déplié en Z vers l’avant et ouvre alors l’accès à deux compartiments de rangement et au triangle de signalisation. Toutefois, un tantinet paradoxale, cette version ultra sportive et dépouillée s'offre l’ordinateur de bord, la chaîne audio Boost avec lecteur CD, les tapis de sol en velours, le régulateur de vitesse et la climatisation mais qui n’est installée sans supplément qu’à la demande expresse du client.
MOTEUR
Jamais, une Mini de série n’a été aussi puissante que celle-ci, qui fait 55 ch de plus lors de son lancement en 2002. Le petit 1.6 L à compresseur de la Mini Cooper S délivre déjà 210 ch avec le kit de préparation John Cooper Works, contre 170 dans sa version de base. Pourtant, les motoristes n'avaient pas encore dit leur dernier mot et pour cette ultime série limitée lancée avant son remplacement, le seize-cent s'offre encore une poignée de chevaux supplémentaires, soit 218 au total, obtenus au régime de 7100 tr/mn pour 250 Nm de couple à 4600 tr/mn. Des modifications sur l’échangeur de l’air de suralimentation et la gestion moteur électronique ont permis d'obtenir ces valeurs. Exactement 100 kW par litre de cylindrée, c’est ce que les motoristes ont arraché au moteur. Pression de suralimentation plus élevée (1 bar), grâce à un nouveau compresseur fonctionnant à un régime plus élevé, combinée à une admission en air frais supplémentaire fournie par un filtre à air doté d'un volet supplémentaire qui s’ouvre à 4500 tr/mn et un échangeur air/air. Les conduits d’échappement ont été adaptés aux nouvelles conditions, ce qui a à son tour nécessité des injecteurs autorisant un débit supérieur. Des bougies hautes performances et des modifications sur la gestion moteur assurent une combustion encore plus précise. De plus, le silencieux arrière a été adapté à la contre-pression accrue des gaz d’échappement. Sans perdre de sa souplessse à bas régime, c'est entre 4600 et 7100 tr/mn que le nouveau caractère du 1.6L se fait particulièrement sentir – et entendre. La sonorité sportive accentuée par l'échappement plus libéré et les isolants supprimés est un vrai ravissement des oreilles et couvre un peu plus le sifflement de perceuse du compresseur. D'après la fiche technique, la vitesse maximale atteindrait 240 km/h, une donnée que nous nous garderons bien de vérifier, sur les routes françaises en tout cas. Plus concret, 0 à 100 km/h annoncé en 6,5 secondes positionne cette Mini au sommet de la catégorie des petites GTI. D'ailleurs, en est-ce vraiment encore une ? Rappellons quand même que, à l’instar de toute Mini, la Cooper S GP transmet tout aux seules roues avant ! Pour que cette puissance ne s'évapore pas, comme souvent sur les tractions puissantes, dans l'antipatinage (ASC+T livré de série) ou la fumée des pneus, la dotation standard de la voiture comprend un différentiel autobloquant. Belle idée. La force de son moteur associée à un poids réduit de 50 Kg (1120 Kg toute nue) lui permettent désormais de distancer sans complexe des voitures de sport de catégories supérieures avec son rapport poids/puissance remarquable de 5,2 Kg/ch. Grâce à la boîte à six rapports aux verrouillages fermes, on prend encore plus de plaisir à sonder les limites du moteur. L'étagement bien étudié offre ainsi accélérations et reprises des plus fulgurantes. En cinquième, la Mini Cooper S GP se catapulte en 6,6 secondes de 80 à 120 km/h. Celui qui rétrograde en quatrième, pourra s’acquitter de la même manoeuvre en 5,3 secondes. Même en sixième, 8,8 secondes suffiront. Des comparatifs effectués sur la boucle Nord du Nürburgring ont montré que la Cooper S GP distançait le modèle de série de près de 14 secondes.
CHASSIS
Outre la puissance du moteur, c’est un comportement routier extrêmement sûr et stable qui caractérise la Mini GP. Même à vitesse élevée, les réactions aux transferts de masses et les manoeuvres de freinage restent faciles à maîtriser, sans pour autant renier toutes sensations. C’est avant tout le résultat des optimisations aérodynamiques et du gain de poids, pas que sur l'habitacle comme nous l'avons vu, mais aussi sur les bras de suspension en alu et la réduction de smasses non suspendues. Avec ses roues aux quatre coins, son comportement en virage et son confort (ou plutôt son absence de), la Mini GP ne trahit pas l'esprit kart de la toute première Mini. En revanche les technologies sont bien différentes. En option "gratuite" (c'est assez rare chez BMW pour être souligné !), la Mini GP embarque le contrôle dynamique de la stabilité DSC. Dès qu’il y a une tendance au survirage, le boîtier déclenche le freinage de la roue avant extérieure au virage. Si le conducteur appuie déjà sur la pédale de frein, l’électronique augmente la pression de freinage sur cette roue et la diminue en même temps sur les roues intérieures au virage. En cas de sous-virage, le boîtier DSC déclenche le freinage de la roue arrière à l’intérieur du virage. Si le conducteur a déjà réagi, la pression de freinage est dans ce cas aussi relevée sur la roue intérieure au virage, alors qu’elle est réduite sur les roues extérieures au virage. Grâce à sa direction à démultiplication directe (2,3 tours de butée à butée) et plutôt ferme, la Mini GP négocie chaque virage avec une précision millimétrique, bien que manquant un peu de feeling en raison de son assistance électrique. Naturellement sous-vireuse, la Mini GP ne surprendra pas son pilote par un décrochement brutal de l'arrière. Elle ne le laissera pas non plus tomber en exploitant à fond la pédale de freins. Les étriers peints en rouge à l'avant signalent l'appartenance de ces pièces à la maison John Cooper Works. Il en va de même pour les plaquettes typées "racing". Cet excellent freinage contribue aussi pleinement à une utilisation optimale du potentiel dynamique de la Mini. Une kyrielle de systèmes électroniques embarqués de série se charge de vous assister dans la tâche et laisseraient presque à penser qu'on a un vrai talent de pilote au freinage (hum...). Ainsi on trouve, outre l'ABS, le répartiteur électronique de puissance (EBD) et le contrôle du freinage en courbe Cornering Brake Control (CBC) livrés en série. Alors que l’EBD veille à la bonne répartition de la force de freinage entre les roues avant et arrière, le CBC gère pour sa part la répartition entre les roues d’un même essieu. Les pneus taille basse (205/40) posés sur les grandes jantes de 18" de type antidéjantage tranchent avec le souvenir ému des roues de 13 pouces des premières Cooper S 1.3L. Le dessin exclusif de ces jantes n'est pas qu'esthétique puisqu'il favorise l’arrivée d’air de refroidissement sur les disques de frein qui conservent toute leur efficacité. Au final, cette Cooper S démontre une fibre sportive très afirmée et jamais l'électronique ne vient trop entraver la recherche du plaisir au volant. Rapide, efficace, sûre et très agréable, elle s'inscrit parmi les meilleures petites sportives de sa génération, en ajoutant une exclusivité certaine à ce cocktail réussi.
:: CONCLUSION
Cette Mini Grand Prix porte bien son nom. Vendue 32400 euros et produite à seulement 2000 exemplaires, elle devrait conserver une côte soutenue, et bien déraisonnable pour "petite sportive". Mais que voulez-vous, au-delà de son look très tuning qui rompt un peu le pouvoir de séduction naturel pour fashion victime de la Mini Cooper S standard, cette John Cooper Works GP ajoute une dose de piment tout à fait irrésistible pour l'amateur de voitures sportives. Mélange de GTI nerveuse, tape-cul et bruyante à l'ancienne et de sportive moderne dotée de l'équipement de confort et de sécurité d'un vrai haut de gamme, la Mini GP tient parfaitement son rôle de collector, avec une vraie personnalité. Et comme on dit, le coeur a ses raisons que la raison ignore.. |