© L'AUTOMOBILE SPORTIVE (05/06/2008)
L'EXCEPTION FRANCAISE !
La mode GTI
bat son plein dans l'hexagone au début des années 80 et bien que
leader et plébiscitée en France, la Golf GTI est attaquée
de toute part. La presse et les amateurs en voulaient plus mais Wolfsbourg fait
la sourde oreille. Contre toute attente, c'est VAG France qui va étonner
avec une série limitée spécifique au marché français
réalisée par le sorcier allemand Oettinger. Et pour leur "
super Golf GTI " c'est une culasse spécifique à 16 soupapes
qui est au programme sans compter sur la présentation spécifique.
Voilà l'arme absolue pour VAG France pour reprendre de l'avance sur la
concurrence. Pas de doute, c'était pourtant facile de ne pas se tromper...
Texte : Nicolas LISZEWSKI
Photos : Bruno CARTERET
Best seller dans sa catégorie,
la Volkswagen Golf GTI 1600 et ses 110 ch étale
son homogénéité sans faille qui fait référence,
mais la concurrence fait rage. Les nouvelles venues tentent toutes de détrôner
la référence mais sans trop de succès. Pourtant, VAG France
qui contribue pour une grosse part des ventes de la production des Golf GTI, souhaite
mettre tout le monde d'accord en prenant une longueur d'avance. En confiant la
GTI aux bons soins du " docteur " Oettinger,
VAG France va mettre sur le marché français uniquement une Golf
GTI 16 Soupapes Oettinger qui fera date. Limitée à 1 250 exemplaires,
vendue très chère à l'époque, elle se permettra le
luxe de doubler l'usine dans l'élaboration d'une culasse à 16 soupapes
pour sa compacte sportive
PRESENTATION
On
ne présente plus la plastique de la Golf GTI dont le dessin initial est
l'uvre du trait de Giugiaro. Un Giugiaro particulièrement inspiré
qui saura mettre en avant un concept relativement simple, mais compact et dynamique
et qu'il reprendra dans les mêmes thèmes avec la Lancia
Delta. Mais dans le cas de notre Oettinger, alors que le tuning est florissant
en Allemagne et que la France se laisse tout doucement prendre au jeu de l'embellissement
ou enlaidissement des carrosseries (c'est selon vos goûts !), elle a revêtue
sa panoplie de sportive accomplie des eighties avec un kit complet BBS ! Spoiler
avant, élargisseurs d'ailes, bas de caisse façon marchepieds sans
compter les jantes ATS en 14 pouces qui feront tant d'émules parmi les
propriétaires de Golf 1 et même 2 ! Deux teintes étaient disponibles
: le blanc ou un gris anthracite. Un liseré parcourait les flancs de la
caisse avec l'inscription " 16 soupapes " tandis que des logos "GTI 16S " étaient fièrement
apposés sur la calandre et sur le hayon. C'était pour ceux qui la
confondraient avec une GTI normale à la sauce tuning. Bien que 1600 cm3,
la Oettinger dispose déjà des gros blocs optiques arrière,
et adopte une calandre double optiques rondes. Des accessoires montés de
série, qui, en plus de la mécanique et le châssis, qui se
paient au prix fort avec 75 000 F à l'époque soit 47% plus cher
qu'une " GTI de base " !! L'habitacle demeure inchangé à
quelques détails près, notamment le logo " GTI 16S " sur
le volant. Les fonds de compteurs sont spécifiques. Pour le reste, c'est
comme la série avec toujours ces très bons sièges baquets
qui mêlent position de conduite optimale et maintien efficace. Même
le tissu des sièges est toujours à rayure
MOTEUR
Véritable
justification de cette série limitée, la 16S Oettinger s'offre une
mécanique évoluée et raffinée sur laquelle il est
utile de s'attarder tant les modifications sont nombreuses. En partant du bloc
de la Golf GTI " standard " en 1600 cm3, le sorcier allemand qui a donné
son nom à cette série spéciale, a conçu une culasse
spécifique. Frappée " Oettinger ", elle est réalisée
en alliage léger et abrite deux arbres à cames en tête. Ces
derniers offrent la particularité de tourner en sens inverse ! L'arbre
à cames gérant l'ouverture des soupapes d'admission est entraîné
par une courroie crantée animée par le vilebrequin. Un système
repris du moteur de la GTI de série. Le deuxième arbre (échappement)
à cames tourne en sens inverse animé par un pignon métallique.
Oettinger a effectué un travail remarquable puisqu'il a conjugué
compacité, efficacité et performances. Malgré une culasse
double arbres 16 soupapes, elle est à peine plus large que celle à 8
soupapes de la GTI, tout en offrant entre 25% (admission) et 50% (échappement)
d'amélioration en section de passage. Pour gagner de la place sur si peu
d'espace, les soupapes sont de moins forte section (30 mm contre 38 mm à
l'admission et 27 mm contre 31 mm à l'échappement) et le culot des
bougies passe de 14 à 10 mm. Ces dernières sont désormais
situées au centre de la chambre de combustion. Pour poursuivre ce travail
d'optimisation, Oettinger a employé de nouveaux pistons en alliage léger
forgés plus léger de 25%. Ils ne pèsent plus que 400 grammes.
Le rapport volumétrique en est ainsi modifié en passant de 9,5 à
10,2. Histoire que tous les éléments de cette brillante mécanique
soient au diapason, le bas moteur est équilibré et la lubrification
est dotée d'un carter en alliage léger cloisonné contenant
près de 5 litres de lubrifiant complété d'une pression d'huile
plus conséquente avec 7 kg dès 2 000 tr/mn. Avec une telle mécanique,
on voit clairement que le travail apporté a donné beaucoup plus
d'allégresse pour les montées en régimes avec plus de 7 500
tr/mn ! Du coup, l'heureux conducteur de ce bolide peut compter sur les 136 ch
à 6 500 tr/mn et les 16 mkg à 5 500 tr/mn. Des chiffres très
éloquents pour l'époque puisque le rapport de 85,64 ch/l est proche
de celui de sa rivale de l'époque, la Ford Escort RS Turbo qui elle n'était
pas atmosphérique. Chapeau ! On pourrait craindre que comme les 16 soupapes
des années 80, les bas régimes mettaient à mal la souplesse
des mécaniques. Sauf qu'ici, la 16 Oettinger étale une homogénéité
exceptionnelle en partant dès les bas régimes et semble monter sans
jamais s'arrêter. On reste loin cependant de la souplesse à bas régime
d'un 8 soupapes, mais les montées en régime donnent la sensation
d'une élasticité réelle. Il faut avouer qu'il est bien aidé
par une boîte idéalement étagée, au maniement précis
et ferme, complété d'un embrayage renforcé et surtout d'un
pont plus court (27,7 km/h au 1 000 tr/mn contre 30 km/h sur la GTI). VAG France
a préféré privilégier le brio de la mécanique
expliquant ainsi le 200 km/h en vitesse maxi. En revanche les performances sont
réelles et en très net progrès avec moins de 30 secondes
pour le kilomètre départ arrêté et un 0 à 100
km/h mesuré en 8,9 secondes par la presse de l'époque!
CHASSIS
La base était
déjà excellente et laissait augurer un potentiel bien supérieur.
La version Oettinger donnera raison aux estimations et jugements des amateurs
de l'époque. L'ensemble des liaisons au sol reprend donc le schéma
de la coque autoporteuse sur laquelle sont fixées les suspensions. L'ensemble
McPherson est toujours de la partie à l'avant avec triangle inférieur,
tandis que l'essieu arrière est déformable avec des combinés
ressorts et amortisseurs. Evidemment, la Oettinger possède quelques recettes
secrètes pour sublimer encore plus le comportement routier de la Golf GTI
et passer de manière optimale les 136 ch sur le train avant. Une barre
anti-rapprochement inférieure est de série avec en prime une monte
pneumatique majorée en 185/60 HR 14 qui chaussent les jantes ATS en 6 x
14. Ainsi gréée, la Golf GTI 16S Oettinger confirme son efficacité
mais met votre confort à rude épreuve tant pour le dos que les oreilles.
Un confort quasi absent, mais c'est pour votre bien ! En effet, une fois au volant,
le comportement routier de cette " super Golf " reste exceptionnel et
surtout homogène, même si on peut reprocher le peu d'évolutions
face à l'augmentation de la puissance. L'auto vire à plat, elle
garde toujours sa trajectoire, et si votre optimisme vous dépassait, il
suffit juste de soulager l'accélérateur pour que l'arrière
se remette dans l'alignement. D'une manière générale, le
train arrière suit fidèlement le placement du train avant et la
motricité très réussie permet d'accélérer assez
tôt dans la courbe. Avec de l'habitude, il est même possible de la
faire glisser un peu, mais la technique du transfert des masses est recommandée
Un tableau qui semble idyllique jusqu'au premier coup de freins qui rappelle que
seul un liquide de frein de meilleure qualité a remplacé celui d'origine.
Pour le reste c'est la même chose qu'avec la GTI standard de 110 ch, sauf
qu'ici les performances ont progressé. L'inefficacité du freinage
en est d'autant plus criante..
ACHETER UNE VOLKSWAGEN GOLF (1) GTI 16s Oettinger
Autant l'avouer tout de suite, une Golf GTI 16S Oettinger ne s'achète
pas mais se mérite. La faible production et les modèles survivants
en bon état ne courent déjà pas les rues. Ajoutez à
cela une mécanique très évoluée qui ne supporte pas
l'à peu près en entretien et règles d'usage (huile de très
bonne qualité, vidanges régulières, ne pas " tirer "
dedans à froid
) et qui risque de mal le vivre, sans compter les nombreuses
pièces spécifiques qui sont rares et chères et vous comprendrez
pourquoi vous n'achetez pas une " simple " Golf GTI 1600 d'ordinaire
indestructible et dure au mal. Les gros kilométrages ne font pas peur à
l'Oettinger certains ayant déjà dépassé les 200 000
km, mais à la seule conditions de respecter les règles énoncées
plus haut. Le remplacement de la courroie de distribution (tous les 30 000 km)
est vitale et peu savent la pratiquer sans peine (il faut même utiliser
des comparateurs de calage des arbres à cames en cas de dépose de
ces derniers. Les vidanges moteur doivent intervenir tous les 7 500 km. Une Oettinger,
cela se mérite, on le répète
D'ailleurs ses prix sur
le marché indiquent cette tendance avec des modèles en mauvais états
ou incomplets autour des 2 000 euros, mais à fuir assurément en
raison du coût de restauration mécanique (pas de pièces chez
VAG, approvisionnement directement chez Oettinger). Heureusement, pour les problèmes
de porosités des spécialistes peuvent désormais les réparer
à moindre coût. Mais dans tous les cas on doit rester vigilant. De
nombreux accessoires sont spécifiques et par conséquent introuvables
si on ne connaît pas les " clans " amateurs et éclairés.
Le Golf GTI Classic Club propose en effet tous les logos ainsi que les bougies,
dures à trouver. Les exemplaires en état proche du neuf, avec tout
l'historique, sont très rares, donc ils se monnaient cher (entre 8000 et
10000). Si cela peut paraître cher dans l'absolu pour une Golf GTI des années
80, au regard du risque des factures d'entretien et de remise en état,
c'est de loin l'option la plus intelligente si vous n'êtes pas mécanicien.
Mais il faut être certain de l'état de l'auto et ne pas se laisser
abuser par certains vendeurs peu scrupuleux qui profitent de la rareté
et notoriété des Oettinger, surtout sur certains sites d'enchères
bien connus. Attention à ne pas acheter une Oettinger équipée
d'une mécanique de 8 soupapes. Il n'est pas interdit de se faire conseiller
par des connaisseurs et de contacter les clubs et sites spécialisés
intarissables sur les Golf GTI mk1, Oettinger comprises
L'AVIS
DU PROPRIETAIRE
"Il
semble très difficile au passionné que je suis de vous décrire
ma passion pour cette voiture en seulement quelques lignes. En revanche je vais
essayer de vous donner un aperçu du plaisir que peut susciter une telle
voiture auprès d'un amateur de voitures sportives des années 1980.
Je venais tout juste de prendre en main ma nouvelle Golf GTI qu'un de mes collègues
de travail me demanda de lui faire faire un galop d'essai. L'amateur en question
se servait d'une 205 GTI 1.6 préparée PTS (excusez du peu !) comme
daily-driver. Nous avons rapidement fait un petit tour loin du trafic des grandes
villes, dans ces petites routes des Monts du Lyonnais que le " 16 Soupapes
" apprécie tant. Je garde un souvenir très vivant de ce premier
essai qui se déroula haut dans les tours. Après des montées
en régimes flirtant les 8000 trs/mn, mon copilote du jour aura ces mots
en guise de conclusion : " C'est une vraie voiture de course ! ". Et
il finit par me jurer qu'il devait s'en trouver une ! Voilà ce que cela
fait de se retrouver dans une Golf GTI 16 Soupapes " Oettinger ", on
ne peut que tomber amoureux de cet extraordinaire moteur qui est l'âme même
de cette fantastique voiture. VAG France aura réussi à sublimer
la Golf GTI première du nom en s'associant avec le sorcier de Friedrichsdorf
pour le plus grand plaisir des amateurs de " bombinettes "."
PRODUCTION
Volkswagen Golf GTI 16S Oettinger (1981-83)
: 1 250 exemplaires
::
CONCLUSION
L'initiative est venue de VAG France directement, mais elle
fut heureuse car elle donna naissance à une Golf GTI " plus "
qui su s'imposer dans la catégorie avec brio et performances. Même
plus que s'imposer, car elle pris de l'avance sur la concurrence, freinage excepté.
Il faudra attendre quelques années plus tard avec la Golf GTI 16S Mk2 pour
que Volkswagen réagisse réellement. Aujourd'hui la Oettinger est
pleine de charme avec son look daté et ses performances toujours dans le
coup, mais son exclusivité et son exigence d'entretien et d'attention au
quotidien la réserve aux amateurs les plus connaisseurs et motivés.
Pour les autres, la GTI 8 soupapes fera déjà largement l'affaire
et coûtera moins cher en prime !
CE
QU'ILS EN ONT PENSE :
"Avec un peu d'habitude, cette Golf devient
un vélo, un vrai jouet, mais attention, un jouet qui va vite, très
très vite. Un seul point noir à ce tableau époustouflant
: le freinage. Ce dernier n'a jamais été vraiment le point fort
de la Golf GTI même dans sa version normale. Il ne l'est toujours pas sur
la 16 soupapes. Pas de problèmes pour les premières décélérations.
Tout se passe normalement mais rapidement, la course de la pédale s'allonge.
Elle devient spongieuse et les distances de freinage augmentent considérablement.
Dommage, car sans cela, on assisterait à un sans-faute presque absolu."
Echappement - août 1981 - Volkswagen Golf GTI 16S Oettinger. |