L'UE autorise les carburants de synthèse (ou quand Porsche sauve Ferrari...)
28/03/2023
L'Union européenne a apporté une ultime révision à son plan d'élimination progressive des nouveaux véhicules à moteur à combustion interne d'ici à 2035 en ajoutant toutefois une exception pour les véhicules alimentés par des carburants de synthèse, ou tout autre carburant neutre en CO2. S'il est certain que Porsche peut s'estimer heureux d'avoir réussi à faire entendre ses arguments, certains de ses rivaux doivent secrètement remercier aussi le constructeur Allemand pour son lobbying efficace...
Samedi dernier, l'Union européenne et l'Allemagne sont parvenues à un accord autorisant les nouvelles voitures à moteur à combustion après 2035. Selon le ministre allemand des transports, Volker Wissing, cet accord stipule que les véhicules devront être alimentés exclusivement par des carburants neutres en CO2. Ces carburants comprennent l'e-kérosène, l'e-méthane ou l'e-méthanol.
Voulue et obtenue essentiellement par l'Allemagne qui menaçait d'apposer son veto à la nouvelle législation, cette exception (culturelle pourrait-on dire) est le fruit d'un lobbying efficace mené par les rares derniers défenseurs du moteur à combustion. Parmi eux, on trouve la maison Porsche évidemment, le constructeur ayant beaucoup investi dans cette technologie avec une usine de production pilote au Chili qui se veut neutre en CO2.
En autorisant indirectement tous les autres constructeurs de supercars à poursuivre le "business as usual", c'est l'un des plus ancien rivaux de Porsche, alias Ferrari, qui préserve également une grande partie de son "business model" au-delà de 2035. Le PDG italien s'est d'ailleurs exprimé sur cet accord, se réjouissant bien entendu d'un possible avenir automobile qui ne serait pas purement électrique.
"La bonne nouvelle pour nous, en tant qu'entreprise, c'est qu'en plus des voitures électriques, nous pourrons également continuer à utiliser nos moteurs à combustion interne... Cette décision est très intéressante pour nous car elle permet aux moteurs à combustion interne d'aller au-delà de 2036", a déclaré Benedetto Vigna, PDG, à Reuters. Néanmoins, Ferrari devrait maintenir son plan d'électrification de sa gamme. La SF90 et la 296 GTB utilisent déjà des moteurs électriques. Outre l'hybridation, un modèle 100% électrique est également prévu.
Mais on peut maintenant se dire que le mythique V12 de la marque devrait rester encore longtemps au catalogue. Et il y a fort à parier que Ferrari aurait probablement perdu de son aura avec un passage au tout électrique !
Selon M. Vigna, cette évolution se poursuivra, en partie en raison de la volonté de nombreux constructeurs d'offrir aux clients la liberté de choix. "Nous ne voulons pas dire aux clients quelle voiture utiliser. Nous voulons mettre à leur disposition trois types de propulsion - hybride, électrique et à combustion interne - et ils choisiront." Cette stratégie multi-énergie, déjà promue largement par Toyota ou BMW, semble en effet plus raisonnable qu'une marche forcée vers l'électrification globale du parc, avec les problèmes de ressources induits, dans un délai de toute façon trop court aux yeux de nombreux experts.
Reste toutefois à savoir quand et de quelle manière seront disponibles les carburants de synthèse car aujourd'hui cette filière en est encore au stade expérimental, loin de pouvoir alimenter des millions ou même quelques milliers de véhicules. Reste aussi à savoir à quel prix ces carburants propres miraculeux seront commercialisables. Certains experts évoquent le prix de 3 €/litre environ et dans tous les cas, on peut penser qu'ils seraient assez nettement plus cher que les carburants fossiles actuels si le mode de taxation venait à évoluer lui aussi. Et c'est précisément la contrepartie de l'autorisation des e-fuels qui a été mise sur la table. Le FDP, parti libéral allemand, a en ainsi fait une proposition choc : revoir le système de taxe carbone en supprimant son plafonnement. En Allemagne d'abord, et pourquoi pas ensuite dans toute l'Europe.
L'avenir du moteur à combustion après 2035 reste encore soumis à plusieurs inconnues mais on peut d'ores et déjà penser que même à 5€ du litre, il y aurait encore bon nombre d'acheteurs pour une supercar, qu'elle soit motorisée par un flat six ou un V12 ! De même que le mp3 n'a pas tué le disque vinyle, on peut se réjouir que le moteur électrique ne soit finalement pas désigné comme unique remplaçant du moteur à combustion, lequel a accompagné le développement de l'humanité depuis plus d'un siècle et peut encore évoluer pour s'adapter.
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