BMW I4 M50 (2021 - )
La voie verte
Avec l'i4, BMW veut montrer que sa gamme électrique peut devenir une alternative réelle au thermique tout en proposant un design plus conventionnel. A ce titre, c'est la première berline électrique qui a l'honneur de porter le label M. En est-elle vraiment digne ?
Texte & photos: Sébastien DUPUIS
La part des modèles électriques dans les ventes de voitures neuves ne cesse d’augmenter et ce n'est que le début de l'énorme bouleversement qui nous attend. Ainsi, en décembre 2021, BMW célébrait déjà son premier million de véhicules électriques produits. Un an plus tard, ces modèles représentent plus d'un tiers des ventes du constructeur en France. Plus étonnant encore, alors le département M se félicite d'avoir réalisé une année record en 2022, fêtant dignement ses 50 ans avec une pluie de nouveautés, il se trouve que le modèle le plus vendu par la branche sportive de BMW n'est autre que... l'i4 M50 ! Même les "entrées de gamme" que sont les M135i et M240i sont battues...
Contraint de se convertir à marche forcée vers le tout électrique comme tous les constructeurs, BMW fait pourtant preuve de prudence et de réalisme concernant l'après 2030. Car contrairement à d'autres, le constructeur munichois a fait le choix de maintenir à son catalogue aussi longtemps que possible une offre multi-énergies. Néanmoins, l'i4 poursuit le même but que la révolutionnaire i3 lancée 10 ans plus tôt : faire de BMW un leader de la mobilité électrique. Pour cela, toute la gamme électrique a été renouvelée en 2021 avec le lancement simultané de la berline-coupé i4 et du SUV iX. Cette année, c'est au tour des iX1, iX3 et i7 de venir renforcer les rangs. Des modèles dont l'utilisation ne se cantonne plus à des trajets urbains mais évolue au contraire vers une vraie vocation familiale en tant que véhicule principal. Pour assumer ce rôle, l'enjeu majeur est plus que jamais l'autonomie. Surtout que s'ajoute une contrainte supplémentaire en adoptant le blason M : les performances ! Aussi, nous attendions de l'i4 M50 qu'elle parvienne à nous convaincre, non seulement sur le plan technologique mais aussi sur celui de l'agrément de conduite pour se montrer digne du célèbre slogan "freude am fahren"...
PRESENTATION
L'i4 a été dévoilée lors de la conférence annuelle de BMW Group en mars 2021 et commercialisée à la fin de la même année. Son design découle directement du concept-car BMW concept i Vision Dynamics présenté au salon de Francfort 2017, lequel donna naissance au Concept i4 présenté en mars 2020 pour préfigurer le modèle de série. Pour faire simple, l'i4 est la version électrique de la Série 4 Gran Coupé, bien que n'en portant pas la dénomination, et son code interne identique (G26) trahit d'ailleurs cette filiation directe avec la 5 portes thermique. En effet, grâce à un investissement sans précédent de 200 millions d'euros dans son usine historique de Munich, BMW peut désormais assurer l'assemblage de motorisations électriques avec la même facilité que celle des blocs diesel ou essence. Pour y parvenir, l'i4 ne repose donc pas sur une structure spécifique comme l'i3 mais sur la plateforme CLAR, commune aux autres modèles du groupe, pour optimiser le coût de fabrication et accroître les capacités de production.
Si vous aimiez le côté extraverti des modèles "i", vous serez peut-être déçu que l'i4 ne se distingue pas plus de la Série 4 thermique hormis quelques retouches sur les boucliers et la calandre. C'est un fait, la gamme électrique va de plus en plus rentrer dans le moule des modèles classiques de BMW. L'adoption d'un style plus consensuel a bien évidemment pour objectif de plaire à un public plus large. Néanmoins, la carrosserie profilée de l'i4, doublée d'un fond plat, se distingue par un excellent Cx de 0.25 sur la version M50. Et rappelons que, une fois n'est pas coutume, la BMW i4 possède un hayon de coffre bien pratique contrairement à sa principale rivale, la Tesla Model 3.
Concernant les particularités de la version M50, seul modèle portant la finition "M Performance", elles se listent comme suit : Des coques de rétroviseurs et la désignation du modèle en gris "Cerium", "shadow-Line" brillant, des jantes en alliage de 18” style 858 M bicolores à rayons doubles, une lame aérodynamique M et un pack aérodynamique M. En option, pour le look, on pourra encore ajouter le Pack extérieur M Carbone (2950 €) comprenant les coques de rétroviseurs, les entrées d’air, la lame aérodynamique et le diffuseur arrrière en fibre de carbone apparente. Enfin, les teintes de carrosserie "Alpinweiss", "M Portimaoblau" et "M Brooklyn Grey" lui sont spécifiques. Parmi les peintures métallisées proposées, saluons l'élégance du "Sanremo Green" qui habille notre modèle d'essai.
HABITACLE
La BMW i4 dispose d'une version remaniée de la planche de bord des Séries 3 et 4, caractérisée par un large panneau tactile incurvé composé de deux écrans au lieu du bloc à casquette d'antan. Même si ce n'est plus une exclusivité avec le restylage des versions thermiques qui arrive, le "Curved Display" contribue à apporter une touche de modernité à un intérieur qui reste, par ailleurs, très classique dans son agencement et sa présentation. En pratique, cette nouvelle ergonomie basée sur le digital n'a pas que des avantages. Certes, l'interface est réactive, la commande vocale plutôt efficace et l'affichage tête haute très lisible (option) mais cela ne contribue pas vraiment à rester concentré sur la route. Que de temps passé dans les menus pour configurer la voiture ou trouver des fonctions standard au milieu d'une forêt d'informations et icônes en tous genres... Cependant, contrairement à une Tesla où tout passe par un unique écran central, on conserve ici un peu de lien physique, que ce soit à travers l'indémodable molette iDrive, la console centrale, les commodos ou le volant M multifonction.
Pour le reste, l'i4 présente exactement les mêmes caractéristiques qu'une Série 4 Gran Coupé. A savoir que c'est une grande berline avec un coffre généreux et pratique mais pas si accueillante pour les passagers arrière. La faute notamment à un tunnel de transmission qui n'a pourtant pas d'utilité ici et à une découpe de portière arrière peu favorable aux grands gabarits. Il nous faut toutefois souligner qu'on est heureusement toujours aussi bien reçu à l'avant avec une position de conduite parfaite qui a fait la réputation de la marque. Enfin, la finition et la qualité perçue sont de haut niveau, à l'exception des inserts noirs brillants toujours aussi fragiles et salissants. Pour seule exclusivité à bord, la finition M Performance reçoit un ciel de pavillon anthracite et, par défaut, une sellerie Alcantara-Similicuir "Sensatec" noire avec surpiqûres contrastantes Bleues. Comme vous pouvez le voir sur nos photos, "premium" oblige, de nombreux autres habillages en cuir véritable sont possibles parmi 6 coloris de cuir "Vernasca", 5 coloris BMW Individual en cuir "Merino" et 7 sortes d'inserts décoratifs permettant de créer moultes configurations.
MOTEUR
La technologie BMW eDrive de cinquième génération utilisée sur la BMW i4 s’appuie sur deux moteurs électriques : l’un sur l’essieu avant et l’autre sur l’essieu arrière. Ces moteurs sont conçus sur le principe d’une machine synchrone à électroaimant, ce qui permet d’optimiser le développement de la puissance et d’éviter tout recours aux terres rares. La version de pointe M50, servie par un mode Sport-Boost, crache au maximum 544 ch et un couple cumulé maximal de 795 Nm, soit bien davantage que la dernière M3 !
La poussée franche et instantanée des moteurs électriques s'accompagne d'une sonorité artificielle dont la tonalité évolue avec la mise en vitesse pour participer, à sa manière, aux sensations. Baptisé "Iconics Sounds", ce bruit de synthétiseur assez théâtral, à mi-chemin entre le vaisseau spatial et le jeu vidéo de simulation, a été créé par le compositeur Hans Zimmer, habitué des films à grand spectacle. Il est diffusé dans l'habitacle à des volumes variables selon le mode de conduite choisi mais sachez que si vous n'aimez pas du tout ça - ce qui entre nous est assez probable - la fonction est heureusement désactivable pour profiter de la sérénité d'une conduite électrique...
Evidemment, tous les puristes du thermique vous dirons que les sensations ne valent rien face à une M4 mais lorsqu'il s'agit d'écraser l'accélérateur à fond, même avec son surpoids conséquent, l'i4 M50 ne craint pas la comparaison ! Grâce à la transmission intégrale, elle se permet d’abattre le 0-100 km en 3,9 secondes, ce qui est à peine moins bien qu'une M4 CSL, excusez du peu... De fait, l'utilisation du badge M ne semble pas usurpée sur le plan des performances.
Pour continuer dans les chiffres, ajoutons que la capacité brute de la batterie de 83,9 kWh offre une autonomie théorique allant jusqu’à 590 km. Malheureusement, ceci reste de la théorie et dans le cadre d'une utilisation sportive, la jauge de charge fond comme neige au soleil. Pas simple dès lors d’envisager des sorties sur circuit pour aller s'amuser avec les frangines thermiques du département M. S'il n'y a pas une borne rapide en courant continu à proximité, mieux vaut oublier cette idée ! Cependant, en usage plus raisonnable, vous pourrez parcourir au moins 400 km sur une charge complète, ce qui est plutôt correct même si Tesla (encore lui) fait mieux.
RECHARGER UNE BMW I4
Une prise domestique suffit pour recharger l'i4 avec le câble de recharge BMW Flexible Charger. Pour plus de confort et de rapidité, vous pouvez opter pour l’installation d’une Wallbox à domicile. Avec un courant de charge en 11 kW, il faut tout de même 8h25 pour passer de 0 à 100% mais ce cas de figure ne se présente pour ainsi dire jamais. La batterie, compatible avec les stations de recharge rapide DC jusqu’à une puissance de 205 kW, accepte de son côté de recharger l’équivalent en énergie de 140 km d’autonomie en seulement 10 minutes. Reste à prévoir son itinéraire en conséquence car les bornes offrant une telle puissance restent rares...
SUR LA ROUTE
Bien que reposant sur la même plateforme que ses soeurs thermiques ou hybrides, l'i4 possède des différences techniques significatives qui passent inaperçues à l'oeil nu. Tout d'abord, il y a les 500 kg de batterie planqués dans le plancher et ce n'est pas rien car la masse totale atteint par conséquent près de 2,3 tonnes ! En revanche, ce qui ne change pas beaucoup c'est sa répartition à raison de 48:52. Conçue spécifiquement pour l'i4, la batterie très fine (110 mm de haut) permet d'abaisser le centre de gravité de 34 mm par rapport à une Série 3 G20 et s'avère donc au final ne pas être qu'un inconvénient...
Bon, si ce n'est pas exactement de nature à nous réjouir, il faut encore prendre en compte l'adaptation des trains roulants. Par rapport à la Série 3 G20, toujours, l'i4 possède des voies avant plus larges de 26 mm et des voies arrière plus larges de 13 mm. La version M50 dispose également en série de la Direction DirectDrive à démultiplication variable qui permet d'avoir un train avant plus réactif aux changements de cap. La suspension pilotée SelectDrive M est également livrée en série.
Alors concrètement, comment tout ceci se traduit-il sur la route ? L'expérience nous a déjà montré qu'il ne faut pas juger trop vite une voiture sur sa fiche technique et que les surprises, bonne sou mauvaises, restent possibles. L'i4 M50 fait partie de la catégorie des bonnes. Certes, il y a beaucoup de couple à gérer mais c'est aussi ce qui rend vivante la conduite de cette M "pas comme les autres". Une remise des gaz trop généreuse avant la sortie du virage et l'arrière ne demande qu'à vous gratifier d'une figure de style, de surcroît si le sol est un peu "gras mouillé". Glissant un peu de l'avant mais surtout de l'arrière, en fonction du mode choisi, l'i4 présente un caractère finalement assez typique des BMW classiques. La direction, raffermie en mode Sport Plus, reste un peu avare en informations mais ce reproche concerne aussi beaucoup de modèles thermiques actuels malheureusement. Compte tenu de la masse à porter, le châssis se montre étonnamment bien amorti et efface une bonne partie des kilos. Enfin, des freins M Performance en acier se chargent à la fois de récupérer de l'énergie et de ralentir l'ensemble avant chaque courbe. On prie secrètement pour qu'ils tiennent le choc...
Au final la BMW i4 M50 s'avère une partenaire de jeu tout à fait plaisante et performante. On en vient vite à se demander ce qui reste vraiment aux M thermiques, hormis la mélodie du moteur. Est-ce que ce n'est pas déjà un combat d'arrière-garde ?
ACHETER UNE BMW I4 M50
Et oui, même chez BMW M la fin de l'hégémonie du thermique a sonné et il y a plusieurs raisons tout à fait objectives à ce succès sans précédent. Tout d'abord, en attendant les versions 100 % électriques des Audi A4 et Mercedes Classe C (pas avant 2024), la BMW i4 n’a qu’une seule véritable concurrente sur son chemin : la Tesla Model 3. Et face à la version M50, la Model 3 Performance est une rivale sacrément coriace, à la fois sur le terrain des performances et sur celui des tarifs. Affichée en ce début d'année 2022 à 59 990 € contre 74 900 € pour la BMW, l'américaine réclame près de 15 000 € de moins ! Et ce sans compter les options nécessaires pour obtenir un équipement équivalent sur l'Allemande. Enfin, il convient de rappeler que la BMW n'a pas droit au bonus écologique de 2 000 € pour les versions au tarif inférieur à 60 000 €, ce qui vient encore creuser l'écart. Bien que pouvant compter sur certains atouts de sa berline, notamment en matière de finition et de réseau de distribution/entretien, BMW France offre depuis peu « 1 an de recharge IONITY illimitée » à ses clients de la gamme i4. Un moyen de répondre à Tesla qui offre son excellent réseau de Superchargeurs à tous ses clients.
Malgré cette rude concurrence claifornienne, l'i4 demeure étonnament compétitive quand on l'oppose à ses soeurs thermiques. En effet, pour le même budget la gamme M vous propose certes la M440i Gran Coupé pour alternative au prix de base de 73 150 €. Mais en ajoutant le malus (17 490 € au 1er janvier 2023) et la carte grise (dont est exonérée l'i4 dans la plupart des départements), l'effort à consentir pour substituer la douce mélodie du 6 cylindres en ligne à la bande son d'Hans Zimmer devient un peu difficile à justifier... d'autant plus que ses performances sont inférieures. L'i4 enfonce le clou dans le cadre d'une utilisation professionnelle puisque qu'elle se voit également exonérée de Taxe sur les Véhicules de Société (TVS) tandis qu'à l'achat, le plafond d’amortisement est réhaussé du prix de la batterie. On passe alors de 30 000 € (de base pour toute électrique) à 53 976 €. Là, ça va devenir franchement compliqué d'expliquer à votre comptable pourquoi vous teniez absolument à acheter une BMW essence...
CARACTERISTIQUES TECHNIQUES
BMW I4 M50
MOTEUR
Type : Moteur électrique synchrone (x2)
Position : Essieux AV + AR
Alimentation : Batterie lithium-ion (80.7 kWh)
Puissance maxi (ch DIN) : 544
Couple maxi (Nm) : 795
TRANSMISSION
Intégrale
Boîte de vitesses (rapports) : automatique (1)
ROUES
Freins Av-Ar (Ø mm) : disques ventilés, étriers fixes 4 pistons - disques ventilés, étriers flottants 1 piston
Pneus Av-Ar : 245/45 R18 100Y XL - 255/45 R18 103Y XL
POIDS
A vide constructeur (kg) : 2215
Rapport poids/puissance (kg/ch) : 4.1
PERFORMANCES
Vitesse maxi (km/h) : 225
1000 m DA :
0 - 100 km/h : 3"9
0 - 200 km/h :
CONSOMMATION
Moyenne WLTP (kWh/100 km) : 18-23
Moyenne de l'essai (kWh/100 km) : 24
CO2 (g/km) : 0
PRIX NEUF (10/2022) : 74 900 €
PUISSANCE FISCALE : 9 CV
CONCLUSION
Avec ses 544 ch et ses quatre roues motrices, la BMW i4 M50 est en mesure de bousculer bien des sportives thermiques, y compris celles du département M. Bien sûr, cela implique de composer avec un poids franchement déraisonnable mais comme elle parvient à le faire oublier en grande partie, le plaisir de conduire est bien au rendez-vous ! Vous rêviez d'une berline sportive confortable et performante qui ne consomme pas une goutte de pétrole ? BMW l'a fait.
Présentation soignée
Performances
Confort / amortissement
Comportement dynamique
Charge rapide...
... mais autonomie réelle décevante
Poids indécent
Sonorité artificielle vite fatiguante...