© L'AUTOMOBILE SPORTIVE (09/02/2013) 
	
 
 
            IL 
              ETAIT UNE FOIS DANS L'EST... 
            ...une petite 
              équipe d'ingénieurs à laquelle on avait confié 
              la responsabilité de développer les voitures de compétition 
                de la marque Bmw. Ce département compétition, filiale 
                de la marque, était appellé Motorsport. Grâce 
                au projet e26 - plus connu sous le nom de M1 - Motorsport va concevoir 
                une voiture de course produite en série limitée pour 
                l'homologation en Groupe 4. La légende des Bmw "M Power" 
              était née... 
             
               Texte : 
              Sébastien DUPUIS 
              Photos : D.R. 
            Contrairement à des idées reçues, 
              Bmw n'a pas toujours été un grand fabricant de voitures 
              de sport. Tout du moins, pas aussi reconnu qu'aujourd'hui. Le point 
              de départ du projet e26 était de perpétuer 
              l'engagement sportif de Bmw qui avait alors était très 
              profitable à l'image de la marque en raison de ses fréquents 
              succès, notamment avec les célèbres coupés 
              3.0 CSL, surnommés "Batmobile". En 1976, Jochen 
              Neerpasch, ancien pilote professionnel devenu responsable du département 
              compétition de la marque, se voit confier le développement 
              d'une voiture entièrement nouvelle, qui serait pour la première 
              fois conçue sous la responsabilité de Motorsport. 
              Elle devait concourir en groupe 4 et 5 mais pour recevoir l'homologation, 
              être produite à au moins à 400 exemplaires... 
             BMW TURBO 
La genèse de la BMW Turbo tient à la volonté de Eberhard von Künheim, président de BMW de l'époque,  de présenter un concept-car à l'occasion des Jeux Olympiques de 1972 à Munich. La voiture est l'oeuvre de Paul Bracq, grand designer français auteur notamment de la Mercedes Pagode, qui, après dix ans passés au service de l'étoile à Stuttgart et un bref séjour chez Brissonneau & Lotz, a pris la tête du Centre Style BMW à Munich. C'est sous l'impulsion de Bob Lutz, arrivé chez BMW un an après Paul Bracq, que va être réalisée la Turbo, en seulement 6 mois. Paul Bracq imagine un habitacle spacieux " Pas dans le style de la De Tomaso Mangusta où l'on a la tête dans le pare-soleil ! " dira-t-il.  Il détermine lui-même les dimensions et crée des volumes souples, à contre-courant des lignes agressives alors en vogue. La voiture est dessinée en une nuit et la réalisation en est confiée au carrossier italien Michelotti. Mettant l'accent sur la sécurité, la BMW Turbo est dotée d'un " soft nose " d'inspiration américaine constitué d'un bouclier amortisseur d'impact intégré à la face avant. Elle reçoit également un radar d'approche. Cette audacieuse proue est peinte en rouge fluorescent, une idée inspirée à Paul Bracq par les avions de chasse de la base de Creil (à l'époque où il travaillait pour Brissonneau & Lotz). Côté mécanique, la Turbo reçoit le  moteur de la BMW 2002, augmenté d'un turbo, implanté en position centrale arrière ce qui est un fait nouveau chez BMW. Très bien accueillie lors de sa présentation le 23 août 1972, la BMW Turbo ne sera pourtant jamais produite en série. 30 ans plus tard, cette voiture est toujours moderne... 
            DESIGN
                          Le projet e26, plus connu sous le nom de baptême "M1", 
              fut étudié en partenariat avec des spécialistes 
              de la voiture de course, capables de concevoir une base roulante 
              plus performante qu'une simple évolution d'un modèle 
              de série. Bien que le style de la M1 s'inspire fortement 
              du prototype Bmw Turbo réalisé par Paul Bracq, la paternité 
              des lignes de la M1 revient à Giugiaro, patron du bureau de style 
              italien "Ital Design". Il devait en outre réaliser 
              la carrosserie et l'assembler sur un châssis étudié 
              par Lamborghini. Quand à Motorsport, maître d'ouvrage 
              du projet, son rôle était principalement centré 
              sur le moteur. La carrosserie est réalisée en fibre 
              de verre. La forme générale privilégie fortement 
              l'aérodynamique avec en ligne de mire une vitessse maximale 
              élevée et des consommations faibles en regard du niveau 
              de performances. Très basse (1m14), la Bmw M1 possède 
              un profil caractéristique des sportives des années 
              70. Son allure trappue et fluide est également dûe 
              à sa largeur de 1823 mm pour une garde au sol de 124 mm et 
              à ses grandes roues en alliage de 16" de diamètre. 
              A l'arrière, on découvre une grille à lamelles 
              sur le capot moteur qui ne sera pas sans influencer bon nombre d'accessoires 
              auto durant les années 80. Sur les flancs de l'auto, les 
              extracteurs d'air chaud en plastique noir ajoutent encore un peu 
              de charme à cette auto très typée "seventies". 
              Mais comme pour la Lamborghini Countach, ce design acéré 
              signé Giugiaro conserve un charme et une élégance 
              naturelle qui perdure avec le temps. Sur les versions Groupe 4 et 
              5 ou Procar (voir encadré plus bas), une augmentation sensible des appendices aérodynamiques 
              augmente l'appui sur l'avant grâce au spoiler qui descend 
              très bas et à l'arrière avec un imposant aileron. 
              Les radiateurs d'huile installés à l'avant ont une 
              entrée d'air élargie. Le poids maximal autorisé 
              en groupe 4 est de 1000 Kg, une valeur que même les voitures 
              préparées pour la course auront du mal à respecter...               
            HABITACLE
            A l'intérieur, l'ambiance est tout aussi caractéristique 
              d'une époque. Le tableau de bord assez dépouillé 
              possède un combiné de compteurs ave cune vaste casquette. 
              Quelle ambiance ! Le projet e26 quasi définitif fut finalement 
              présenté au public en Octobre 1978 au salon de Paris. 
              Initialement prévue pour la commercialisation à la 
              fin de l'année 1978, l'homologation n'eu lieu qu'en 1979 
              mais la production de la M1 n'était alors pas suffisante 
              pour lui permettre de courrir en groupe 4 et 5. Entre temps, Bmw 
              avait changé ses orientations sportives, souhaitant privilégier 
              la Formule 1 et la FIA était sur le point de supprimer les 
              groupes en vigueur, condamnant à mort du même coup 
              la M1. 
            MOTEUR
                          Il a fallu attendre 16 ans après la création de la société Bayerische 
              Motoren Werke GmbH en 1917 avant de pouvoir accueillir sur le marché 
              la première automobile BMW équipée d'un moteur à six cylindres en 
              ligne. Depuis cette date, Bmw s'est fait le grand spécialiste 
              du moteur 6 cylindres en ligne. Ce ne fut qu'en 1968 que le premier 
              six cylindres en ligne BMW de conception entièrement nouvelle vit 
              le jour. Ce moteur monté incliné de 30 degrés était tellement en 
              avance sur son temps qu'il se posa en référence dans la construction 
              de moteurs pour plusieurs décennies. Et qu'il fut à l'origine d'innombrables 
              victoires de course. Le M06 reposait sur les principes de conception 
              des quatre cylindres extrêmement convoités de la "Nouvelle Classe" 
              : culasse à flux transversal avec arbre à cames en tête et soupapes 
              en V. Parmi les innovations, BMW présenta la chambre de combustion 
              "à turbulence trisphérique", une évolution des chambres de combustion 
              du quatre cylindres. Cette conception inédite produisait une turbulence 
              définie, ce qui, liée à une concentration du mélange au niveau de 
              la bougie d'allumage, assurait une combustion très efficace, mais 
              pourtant douce. Associé au vilebrequin matricé logé sur sept paliers 
              et présentant deux contrepoids par maneton, il en résultait un fonctionnement 
              d'un formidable velouté : pour la première fois, le fonctionnement 
              du six cylindres BMW fut comparé à celui d'une turbine. Le M06 existait 
              en une variante de 2,5 litres et une autre de 2,8 litres, puis de 
              3,0 L. Ainsi, les six cylindres firent fureur sur les nouvelles 
              berlines et surtout sur les coupés de la marque, comme le 3,0 CSi. 
              La BMW M1 (projet E26) utilise sous son capot arrière, un 
              6 cylindres en ligne de 3453 cm3 (alésage de 93.4 x course 
              de 84 mm). Ce moteur appelé M88 repose sur le bloc M06 et 
              posséde une culasse à quatre soupapes par cylindres, 
              ce qui était à l'époque une rare exception, 
              gravée du logo "Motorsport". Cette culasse est 
              divisée en deux : la partie inférieure forme la chambre 
              de combustion et le circuit d'eau, alors que la partie supérieure 
              comprend les logements de l'arbre à cames et les poussoirs 
              à coupelle. Six papillons individuels se trouvent à 
              l'extrémité des six tubulures d'admission, et l'alimentation 
              est assurée par un système d'injection mécanique 
              Kugelfischer Bosch. La lubrification est par carter sec. En ce qui 
              concerne les performances, la M1 vous propulse de 0 à 100 
              Km/h en 5"6 et atteint la vitesse maxi de 262 Km/h grâce 
              à son aérodynamique soignée. Le taux de compression 
              est de 9.0:1, ce qui à l'époque est gage d'un très 
              bon rendement. Et en effet, le 6 en ligne bavarois développe 
              la puissance maximale de 277 chevaux à 6500 tr/mn. Le couple 
              maxi de 33,7 Mkg à 5000 tr/mn trahit quand à lui un 
              tempérament résolument sportif. Pour la course, l'extrapolation 
              Groupe 4 du M88 repassait entre les mains des motoristes. L'équipant 
              d'un nouvel arbre à cames, de soupapes plus grandes, de pistons 
              matricés et d'autres détails, ceux-ci poussaient sa 
              puissance jusqu'à 490 ch afin qu'il propulse les bolides 
              de course de la série "Procar". Grâce à 
              d'autres mesures d'optimisation et à deux turbocompresseurs, 
              la puissance atteignait finalement plus de 850 ch en groupe 5 ! 
              De 1983 à 1989, la variante "civilisée" 
              du M88 (286 ch) tourna sous le capot de la M635CSi et de la M5 e28. 
            Belle lignée n'est-ce pas ? 
            CHASSIS
                          Comme sur toute voiture véritable de course depuis la fin 
              des années 60, le moteur 6 cylindres est implanté 
              en position centrale arrière avec la boîte de vitesses 
              ZF à 5 rapports dans une structure multi-tubulaire de type 
              space frame. Pour ce travail, Bmw contacte Lamborghini, grand spécialiste 
              de l'époque en matière de structure tubulaire à 
              moteur central arrière, dont la Countach était la 
              plus brillante représentante. Malheureusement, la collaboration 
              fut plus difficile que prévu. Lamborghini rencontrant d'importantes 
              difficultés financières suite à la crise pétrolière 
              se voit contraint de rompre le contrat qui l'unissait à Bmw, 
              malgré une subvention de l'état italien pour remettre 
              l'entreprise à flot. Livré de quelques prototypes, 
              Motorsport se tourne donc vers Baur, carrossier de Stuttgart, spécialiste 
              des petites productions et des transformations de berlines en cabriolets, 
              qui va prendre en charge le montage et la réalisation de 
              la structure de la M1. L'empattement est de 2560 mm pour une longueur 
              totale de 4346. Les voies avant et arrière sont particulièrement 
              larges, respectivement 1549 mm et 1578 mm. La suspension à 
              quatre roues indépendantes est assurée par des bras 
              triangulés de longueur différentes, des combinés 
              ressorts-amortisseurs et des barres anti-roulis. Le freinage est 
              confié à d'énormes freins à disques 
              ventilés à l'avant et l'arrière (330 et 287 
              mm). Pour passer la puissance aux roues arrières, les jantes 
              en alliages léger sont chaussées de pneus 225/50 VR 
              16 contre 205/55 VR 16 à l'avant. La direction à crémaillère 
              procure une agilité incroyable, grâce notament à 
              une répartition des masses favorable. Le poids total atteint 
              1361 Kg, répartit à 50% sur l'avant et l'arrière. 
            LA BMW M1 EN COMPETITION
                         Le changement de règlement par la FIA en 1977  contraint BMW à une production minimale de 400 exemplaires de sa M1 pour  l'homologation groupe 4, puis en groupe 5. Le développement de la M1 de course étant déjà en cours au moment du changement de réglementation, Jochen Neerpasch, directeur de BMW Motorsport, va avoir l'idée de proposer un championnat monotype ouvert aux pilotes professionnels des championnats du monde de F1, des voitures de sport et de Tourisme, ainsi que d'autres championnats internationaux.  Techniquement, la M1 Procar est très éloignée du modèle de série, bien qu'elle en conserve la structure. Tout est revu pour la course et son 6 cylindres  M88/2 développe 470 ch à 9000 tr/min. Le Championnat BMW M1 Procar ne connaîtra que deux saisons, en 1979 et 1980, remportées respectivement par  par Niki Lauda puis  Nelson Piquet. La M1 est finalement homologuée en Groupe 4 le 1er décembre 1980  mais BMW qui avait initialement pour objectif l'entrée en groupe 5, va changer ses plans pour se consacrer à la Formule 1. Les M1 de Procar seront revendues à divers acheteurs privés et seulement deux M1 groupe 5 seront produites.  
            ACHETER UNE BMW M1
                          Commercialement, la M1 fut un flop tragique et les comptables de 
              Bmw s'en souviennent sans doute encore... Excessivement chère 
              à produire, elle eu bien du mal à convaincre la clientèle 
              que son prix supérieur à celui d'une Ferrari Boxer 
              ou d'une Lamborghini Countach était totalement justifié. 
              Produite de juillet 1978 à février 1981, la M1 n'exista 
              officiellement qu'à 477 exemplaires, dont 399 seulement étaient 
              des autos homologuées pour la route. Selon le site Internet 
              "the M1 Register", 455 voitures (route et course) ont 
              encore une trace de production. Les numéros de châssis 
              se présentent sous la forme (WBS59910004301XXX), les XXX 
              allant de 1 à 460. Mais 7 numéros ne furnet jamais 
              utilisés (045 à 049, 428, 431) et 5 voitures de course 
              furent apparemment produites sans numéro de châssis. 
              Vendue 310 000 FF en 1979, on a en effet aucun mal à comprendre 
              le peu d'engouement suscité par la M1 à l'époque, d'autant qu'elle ne pouvait en 
              outre pas se prévaloir de succès en compétition. 
              Un 6 cylindres en ligne, plus cher qu'un 12 cylindres ? Qui y aurait 
              cru ? A priori chez Bmw, on avait mal apprécié le 
              contexte économique de l'époque et surestimé 
              l'image de la marque. De plus, si la voiture n'est pas laide, il 
              faut reconnaitre que son physique ne possède pas le charme 
              d'une Ferrari 512, ni le spectaculaire d'une Lamborghini Countach. 
              Aujourd'hui, la M1 séduit quelques collectionneurs avertis 
              pour un prix qui demeure celui d'une supercar. Comptez au moins 
              50.000 euros pour une version route en état moyen et jusqu'à bien plus 
              de 150.000 euros pour une M1 en état concours. Quant aux versions  course, affectionnées par notre ancien premier ministre François Fillon, les cours peuvent grimper à près de 500.000 €
              ! Autant dire intouchable. Mais quoi qu'il en soit, la BMW M1 continuera 
              longtemps de nous faire rêver, comme étant la première 
              ancêtre de la splendide lignée des Bmw "M-powered". 
              BMW M1 ART CAR  
              C'est une tradition chez Bmw dans les années 70, les sportives 
              engagées en compétition sont décorées par d'illustres artistes. La M1 Procar sera élevée au rang d'oeuvre d'art par le coup de pinceau aux couleurs "Pop Art" d'Andy Warhol ! 
            PRODUCTION BMW M1 
              1979 : 79 exemplaires (41 route, 38 course)  
              1980 : 188 exemplaires (178 route, 10 course)  
              1981 : 188 exemplaires (180 route, 8 course)  
              TOTAL : 455 exemplaires (399 route, 56 course) 
            :: CONCLUSION 
              La BMW M1 est dorénavant un véritable collector et, 
              en dépit d'une puissance "modeste", elle procure 
              le plaisir au volant d'une authentique supercar des annéees 
              80. Hors de portée financièrement, pour bon nombre 
              d'entre nous, la M1 se laisse néanmoins admirer à 
              travers quelques musées ou meetings. Mais sa meilleure place 
            est incontestablement sur la route... 
            CE QU'EN DISAIT LA PRESSE : 
              "Dommage: le "décor" 
              intérieur manque singulièrement de fantaisie. Les 
              matières synthétiques prédominent dans une 
              palette de coloris qui va du gris ouris eu noir charbon. Dans cet 
              environnement plutôt froid et très impersonnel, on 
              se console tout de même en faisant chanter le 3,5 litres multisoupapes 
              qui ne demande d'ailleurs qu'à faire partager sa joie de 
              vivre au conducteur. A demi couché au ras du plancher, la 
              route semble défiler plus vite. Plus sport que Grand Tourisme 
              (l'équipement est ici réduit au strict minimum), la 
              M1 n'est cependant pas une brute sans nuances. D'une grande douceur, 
              les commandes se laissent facilement apprivoiser et la voiture fait 
              preuve d'une étonnante docilité dans la circulation 
              quotidienne." 
              RETROVISEUR - N°180 - Dossier Bmw M. 
            "Lorsque l'on 
              prend le volant de la M1 après avoir conduit les plus anciennes 
              Miura, Bora ou Pantera, le progrès est spectaculaire. La 
              Bmw est d'un autre mondre et doit être considérée 
              comme la McLaren F1 de son époque. Je ne partage d'ailleur 
              spas la critique qui touche au fait qu'elle n'est animée 
              "que" par un 6 cylindres. Non pas qu'elle n'ait pas mérité 
              100 chevaux de plus, mais il s'agit là d'un moteur particulièrement 
              agréable. En ligne droite, on ne ressent bien évidemment 
              pas cette puissante poussée dans le dos, mais la voiture 
              est si raffinée, si équilibrée..." 
              LE MONITEUR AUTOMOBILE - HORS SERIE - Bmw M1.            |