PREMIERES REVOLUTIONS
La sportive par excellence chez
les GT, c'est la Porsche 911. Au fil des millésimes, elle
n'a cessé de servir d'étalon pour juger ses rivales.
La 911 possède d'ailleurs quelque chose de magique, de mystique
même puisque depuis 40 ans, elle ne cesse de se bonifier en restant toujours hors de portée de ses rivales.
C'est avec la 911 type 964 que Porsche va amorcer un chyangement de cap important pour la 911, plus technologique tout en conservant une plastique traditionnelle
Texte :
Sébastien DUPUIS
Photos : D.R.
L'histoire des Porsche 911 n'est pas
réellement un long fleuve tranquille, ni une success story
programmée. En effet, si jusque dans les années 70,
la Porsche 911 n'a cessé de se bonifier avec en filigrane
des variantes mythiques (2.7 RS, Turbo 3.0, 2.4 S
), dans le
courant des années 70, les dirigeants
de Porsche envisagèrent pourtant très sérieusement de ranger la 911 au placard.
L'heure était aux modèles plus dociles, mais tout aussi efficaces.
C'est précisément dans ce but que seront développées et commercialisées les
924, 928 et par la suite la 944. Mais pour les porschistes de la première heure, une Porsche ne
doit pas être uniquement efficace, elle doit avoir du caractère.
C'est la génération Carrera 3.2 qui va donc sauver la 911. Pourtant, avec la génération 964, la 911 va démarrer
sa mutation et devenir elle même la grande GT dont on rêvait déjà chez Porsche avec la 928...
UNE TRANSMISSION INTEGRALE !
En septembre, au Mondial de l'automobile de Paris,
Porsche présente la remplaçante
de la 911 Carrera 3.2 : la 911 type 964. Stupeur ! Si la ligne est presque inchangée
(à part les boucliers AV et AR), les jantes Fuchs sont abandonnées
au profit des Speedline en 16" et la nouvelle venue est disponible
uniquement en transmission intégrale ! D'où
son appellation "Carrera 4". En réalité,
il ne faut pas se fier aux apparences, car la 911 type 964 (c'est
sa dénomination usine) est nouvelle à 87%. Aucun élément
mécanique n'est repris de la Carrera 3.2. Le flat 6 a évolué
pour voir sa cylindrée grimper à 3,6 litres (type M64/01) et sa
puissance à 250 ch, la boîte est toujours la G50 des
dernières Carrera 3.2 mais a été revue
pour l'occasion et porte le code G64, les trains roulants sont totalement revus,
l'électronique débarque en force, la transmission
est désormais intégrale de façon permanente. Et à la conduite,
la 911 Carrera 4 est bien évidemment transfigurée. Son comportement
s'est assagi et simplifié pour le commun des mortels notamment
grâce à sa transmission intégrale répartie à 31% sur l'avant et 69% sur l'arrière via des embrayages pilotés électroniquement. Toutefois,
n'allez pas croire qu'elle demeure reposante en toute circonstance
et que votre complet ne sera pas froissé à allure
soutenue. Heureusement, le sport est toujours là, de même
que les sensations et la sonorité mythique du Flat Porsche.
A propos, pourquoi une transmission intégrale ? Porsche tient
en réalité à miser sur l'image technologique
très forte de la transmission intégrale qui avait
court dans les années 80. Il faut en effet se rappeller pour cela du prototype de 911 Cabriolet à 4 roues motrices exposée au Salon de Francfort en Septembre 1981, puis de l'engagement du constructeur en rallye raid avec la 911 SC Safari (type 953) en 1984. Certains prédisaient même
qu'un jour, toutes les voitures seraient équipées
de série de la transmission intégrale, notamment en compétition. La Porsche
959, bien que coûteuse pour Porsche, fut un formidable laboratoire
roulant et un véhicule image très bénéfique
pour la marque, et en rallye, on ne jurait que par la transmission
intégrale. Porsche s'essaya même à l'intégrale sur piste avec la 961 engagée au Mans en 1986 et 1987. Tout semble donc très rose pour Porsche
et sa nouvelle génération de 911, qui sort l'année
suivante la 2 roues motrices (Carrera 2), qui peut bénéficier
en option d'une transmission automatique ou (presque) manuelle avec
la boîte Tiptronic. Seulement, l'usine avait négligé
que le passage d'une Carrera 3.2 dont l'électronique embarquée
et à la technologie étaient simplistes, au 911 type
964 entièrement novatrices sur ces mêmes thèmes
ne se ferait pas sans quelques accrocs. Ainsi, nombre de 911 type
964 durent revenir en concession pour de nombreux rappels techniques
: embrayages faiblards, casse moteur (!), soucis électriques,
direction assistée
C'est tout le mythe de la 911 et
de son incroyable robustesse qui est attaqué. Heureusement,
l'usine réagit vite, mais pendant longtemps, les 911 type
964 auront une étiquette de véhicules peu fiables
dans l'esprit des Porschistes.
EVOLUTIONS ET SERIES SPECIALES
Outre l'anecdotique 964 Carrera 4 RS de 1991 (voir encadré plus bas), l'année 1992 représente les premiers mouvements dans la gamme 911 type 964. Toute la gamme en profite pour échanger
ses rétros carrés contre ceux en forme d'obus des Carrera 2 RS, le
volant reçoit un Airbag proéminent et les jantes Speedline
16" au goût discutable contre des Cup allégées
dans leur dessin en 16". Notons au passage que le cabriolet
Carrera 4 peut bénéficier désormais de l'option Turbolook
avec châssis et ailes des versions Turbo. Les moteurs sont revus après avoir connu de nombreux soucis de jeunesse. L'étanchéité est renforcée, le volant bimasse change de fournisseur (LUK) et les distributeurs de double allumage refroidis pour éviter les casses de courroie. L'année suivante
marque les 30 ans de la 911 qui est commémorée par
une série spéciale anniversaire numérotée à... 911 exemplaires. La 964 anniversary "30 jahre" est basée sur la C4 avec l'option Turbolook et autres nombreux équipements (voir "liens conseillés" plus bas).
964 CARRERA 4 RS LIGHT
Dans ce projet initié par Jürgen Barth l'idée était de produire par le département compétition de Porsche une Carrera 4 spécialement destinée au circuit. Le moteur 3600 cm3 dépourvue de catalyseur permet de gagner 15 ch, soit 265 au total. La Carrera 4 est aussi considérablement allégée et perd près de 350 kg en se séparant notamment de toute insonorisation. La 964 C4 RS Leichtbau ne sera produite qu'à 11 exemplaires non homologués sur route et vendus 285.000 DM (environ 150.000 €). Réservée aux circuits elle ne connaitra toutefois jamais la compétition de manière officielle...
En savoir plus : Porsche 964 Carrera 4 RS Leichtbau
ACHETER UNE PORSCHE 964 CARRERA 4
La cote n'est encore pas trop élevée pour des
autos fantastiques dont on ne se lasse toujours pas de voir leur
grille de capot moteur se relever dès 80 km/h pour faire
office d'aileron. On commence à trouver sur le marché
les premières Carrera 4 à partir de 21 000 €.
Mais à ce prix-là, l'historique n'est pas toujours
limpide. Alors, les 911 Carrera 4 sont-elles intéressantes à acheter
? Assurément, mais si vous suivez nos conseils
Pour
trouver votre belle allemande, sachez qu'il faut impérativement
éviter les importations en provenance de Belgique, d'Allemagne
ou du Luxembourg, à moins d'être certain du vendeur
et de l'origine de l'auto. Il existe des réseaux peu scrupuleux
qui maquillent les autos ou délestent les compteurs pour
faire des bonnes affaires au dépend de passionnés
trop crédules. Lors de l'achat, surtout pour les premiers
millésimes, il faut bien s'assurer que les campagnes de rappels
techniques ont été effectuées. Si ce n'est
pas le cas des risques de casses moteurs (fuites d'huile sur les culasses et carter de distribution avant 92) , d'embrayages faiblards,
de volants moteurs fragiles
sont à prévoir.
Dans ce cas, il va falloir casser la tirelire, car Porsche ne prend
évidemment plus ces casses à sa charge. N'oubliez
pas également que l'électronique est désormais
très présente sur les générations 964
et que l'entretien et le coût de réparation est bien supérieur
à celui d'une Carrera 3.2. A titre d'exemple, il faut compter
850 € pour une révision majeure et 230 € pour une
petite révision. Pour le chapitre des réparations,
une intervention pas trop importante avoisine en général
les 800-900 € et une plus conséquente telle que l'embrayage peu allégrement
dépasser les 2000 €. Avouez que si vous abîmez
votre aile en manuvrant, à 900 € la pièce
sans démontage et sans peinture, il n'y a pas qu'elle qui sera froissée
CHRONOLOGIE
1988 : En septembre, prészentation au Mondial de l'automobile de Paris de la nouvelle Porsche 911 type 964 Carrera 4.
1989 : Fin des 911
Carrera 3.2 après 6 années de règne. En septembre, commercialisation de la 911 Carrera 4 (type 964).
1990 : 3 choix de carrosseries
sont offerts désormais au client pour sa 911 : coupé,
targa ou cabriolet.
1992 : Nouvelles jantes alu 16" pour les
C2 et C4 qui reprennent le dessin allégé des RS et
nouveaux rétros en forme d'obus. Apparition de l'Airbag.
1993 : Commercialisation d'une série limitée
"30 Jahre" sur base Carrera 4 pour fêter les 30 ans d'existence de
la 911.
1994 : Arrêt des 911 type 964.
PRODUCTION
911 Carrera 4 : 15121 exemplaires
911 Carrera 4 "Anniversaire" : 911 exemplaires
:: CONCLUSION
Coincée entre les 3.2 et les 993, la 964 souffre d'un manque d'image évident et d'une rude concurrence au sein même de la famille 911 ! Et à fortiori en version Carrera 4, la cote d'amour de cette génération n'est pas des plus élevées. Alors bonne affaire du moment la Porsche 964 Carrera 4 ? Oui, si vous l'achetez bien, mais attention à l'entretien qui reste conséquent,
quoiqu'il arrive et le comportement routier qui perd le "charme" typique de la 911. Le mythe n'est pas forcément à la
portée de tous, le blason Porsche se méritant financièrement, mais la 964 Carerra 4 reste une auto exceptionnelle.
Nos remerciements à Alex de Bahman Cars pour les photos de la 964 C4 verte illustrant ce dossier.
CE QU'ILS
EN ONT PENSE :
"Le résultat
est une voiture (la 911 Carrera 4 NDLR) dont les limites sont hors
de portée du commun des conducteurs. La voiture est littéralement
soudée à la route. La Carrera 4 passe les courbes
avec une aisance déconcertante et, tandis que l'on absorbe
chaque virage avec le net sentiment d'être plus "vite"
qu'avec une berline, même de très haut niveau, on en
sort en constatant que la voiture est loin de ses limites."
L'AUTOMOBILE MAGAZINE N°516 - JUIN 1989.
"Avec
l'intégrale (la 911 Carrera 4 NDLR), c'est carrément
" godasse " sans se poser de question. Bien sûr,
elle est sans doute un peu moins passionnante en pilotage pur, mais
soyons objectifs : la passion a des exigences que n'exige pas la
raison. En d'autres mots, la Carrera 4 est plus accessible à
tous. Au contraire, elle peut décevoir le Porschiste puriste,
qui ne retrouvera ni l'équilibre (?) ni la maniabilité
de la 911 pure et dure. Cette Carrera 4 possède une tenue
de route qui la rend accessible à la plupart. Talent de pilote
facultatif."
LE MONITEUR AUTOMOBILE - GUIDE D'ACHAT 92/93. |