© L'AUTOMOBILE SPORTIVE (22/12/2011)
L’ANTICONFORMISTE
Volvo avait fait le pari de faire courir son break 850 en British Touring Car Championship. Profitant de cette exposition médiatique, ils décidèrent de sortir une version plus poussée de la 850 T5. Au programme, toujours le méchant 5 cylindres turbocompressé et un gros succès commercial à la clé...
Texte :
Maxime JOLY
Photos : D.R.
Redynamiser et rajeunir l'image de Volvo, tel était le défi qui se présentait avec le lancement de la 850 en 1992. Avec ce modèle, Volvo confirmer son savoir-faire dans le haut de gamme notamment aux USA, où il s'agissait de sa première berline traction avant. Souhaitant conforter les qualités de son modèle, le constructeur suédois s'associa au Tom Walkinshaw Racing (TWR) en 1994 pour mettre au point une 850 de type Super Touring Car engagée dans le populaire championnat anglais BTCC (British Touring Car Championship). En dépit de nombreuses critiques, notamment sur le choix osé d'utiliser une coque de break 850 (!), décrocha une qualification en 3ème place et une belle 5ème place en course pour meilleurs résultats. Le break 850 Racing piloté par Rickard Rydell et Jan Lammers permit à Volvo de finir 8ème au classement constructeurs de l'année 1994. Pour 1995, TWR se résolut à utiliser une berline, en raison d'un changement sur l'aérodynamique dans le règlement du BTCC. Avec les pilotes Rickard Rydell et Tim Harvey, la 850 se qualifia 12 fois en pôle position et remporta 6 courses, permettant à Volvo de terminer sa seconde année en BTCC sur la 3ème marche du podium. Cette même année, une version plus méchante de la 850 T-5, à la fois disponible en berline et en break, vit le jour pour célébrer cet évènement : la T-5R.
PRESENTATION
Basée sur la Volvo 850 T-5 Sport commercialisée un an auparavant, la 850 T5-R est l'attraction du stand Volvo au salon de Londres 1995, aux côtés de sa soeur de compétition engagée dans le championnat anglais BTCC. Mais la 850 T-5R est une série très limitée, à 2500 exemplaires uniquement pour le monde. Seuls trois coloris furent proposés : le jaune cream yellow 609 qui est une exclusivité du 2.3, le noir et le vert qui fut essentiellement vendu en Italie. Les boucliers les bas de caisse étaient peints de la couleur carrosserie et on retrouvait de série les jantes 17 pouces couleur titanium tandis qu’il était étonnamment possible d’opter pour du 16 pouces en option gratuite.
A BORD DE LA VOLVO 850R
Des options il y en avait finalement très peu puisque la finition de la R était basée sur la Summum. Elle correspond à l’équipement le plus complet avec entre autres les sièges chauffants en cuir, la climatisation et le ronce de noyer sur la console centrale. La seule autre option était le chargeur 6 CD mais il y avait aussi le catalogue d’accessoires Sport qui comprenait la double sortie d’échappement et les barres anti-rapprochement avant et arrière. L’espace disponible à l’arrière et le coffre gigantesque du break ont de quoi rendre jaloux beaucoup de monospaces…
MOTEUR
Sous le capot de la suédoise, pas de modification majeure par rapport à la 850 T-5 puisqu’il s’y loge toujours le 2.3 turbo à première vue. Dans les faits, le 5 cylindres, toujours monté transversalement, a été légèrement remanié. Afin de faire progresser ce moteur, qui à la base sortait 225 chevaux, Volvo fit appel à Porsche. Cette démarche n’est pas si singulière que ça puisque quelques années plus tard, Peugeot et Renault allaient faire de même pour les 406 Coupé V6 et Clio V6 phase 2. Les allemands ne se sont pas trop foulés. Ils ont simplement mis en place un overboost, permettant un gain temporaire de 15 ch. La pression du turbo passe de 0.73 à 0.82 bar pendant 30 secondes en maintenant fermée la wastegate. Les 240 ch sont obtenus à 5.600 tr/min et le couple passe alors de 300 à 330 Nm de 3.000 à 4.800 tours. Les mordus de détails apprécieront de savoir que le moteur pèse 190 kg et que son ordre d’allumage est 1-2-4-5-3, soit le même que celui d’un autre 5 pattes, allemand celui-là. Je veux parler du 2.5 TFSI de l’Audi TT-RS. La première satisfaction de la Volvo réside dans la boîte mécanique utilisée. Précise et ferme, les rapports s’enquillent à la volée et mieux vaut ne pas regarder le compteur, sous peine de prendre peur pour son permis de conduire. Les performances sont impressionnantes pour une telle familiale, le 0 à 100 km/h se fait sous le cap de 7 secondes. Cela a un coût comme en atteste la jauge d’essence qui se vide elle aussi à allure supersonique… Les habitants frontaliers de l’Allemagne pourront goûter au plaisir du no-limit avec une vitesse maximale atteignant les 240 km/h. Mais pas besoin de rouler à des allures délirantes pour profiter du 20V, lui qui ne rechigne pas à la tâche lorsque vous passez la 5ème en ville. Presque aussi souple à l’usage que les 6 cylindres concurrents, il jouit également d’une sonorité typique de son architecture. Dommage qu’elle soit quelque peu atténuée par le turbo… Avant d’en finir, il est important d’être au courant que les versions équipées de la boîte automatique ne disposaient pas de l’overboost. Retour à la case départ avec 225 ch et 300 Nm.
CHASSIS
Pour améliorer sa grande routière, Volvo ne se contenta pas de toucher au moteur. En plus d’abaisser la suspension, ils modifièrent les réglages de châssis en utilisant des ressorts plus durs et une barre anti-roulis plus large. Pas facile de concilier la philosophie d’une familiale avec les aptitudes d’une sportive, du coup, un compromis a dû être trouvé. Préférant un amortissement souple à un châssis dur comme du bois, il en résulte une naturelle prise de roulis et un sous-virage engendré par les 1400 kg à vide du véhicule. A quatre dans la voiture et avec le chien dans le coffre, mieux vaut ne pas trop arsouiller dans les virages… A l’époque, Volvo n’était pas encore le constructeur spécialisé de quatre roues motrices qu’il est aujourd’hui, justifiant le choix de rester à la traction pure. Vu l’abondance de couple, il fallut trouver un moyen de tout faire passer sur le train avant. Alors, pour assurer une motricité hors pair, les ingénieurs ont opté pour le système Tracs qui empêche les roues de patiner sous 40 km/h. Les amateurs de crissements de pneus en seront pour leurs frais. Pas réellement sportive donc, mais suffisamment performante pour mettre en danger son permis de conduire et se défaire de situations périlleuses sur la route. Pour une famille, c’est bien là le principal…
850 T5R ITALIENNE
L’Italie connut longtemps une fiscalité contraignante vis-à-vis des cylindrées supérieures à 2 litres. C’est pourquoi les constructeurs locaux sortaient des modèles spécifiques à leur marché. Et ceci ne concernait pas que les constructeurs généralistes puisque même Ferrari, Lamborghini et Maserati tentèrent l’expérience avec plus ou moins de succès. Ce que l’on sait moins, c’est que certaines marques étrangères firent de même. Il y eut la M3 e30 qui connut une version dégonflée via la 320 is et dans le cas qui nous intéresse ici, la 850 T5-R. Pas si bête de passer au 2 litres quand on y pense puisque le break 850 Racing du British Touring Car Championship disposait lui aussi d’un 2 litres, sans suralimentation, délivrant 280 ch à 8500 tr/mn. C’est donc le B5204T qui prend la place du B5234T5 grâce à une réduction de la course de 13 mm. La seule différence entre les deux moteurs est la taille des pistons. La diminution de la cylindrée fait que la puissance est abaissée à 211 chevaux à 5.000 trs/min tandis que le couple est maintenu à 300 Nm de 2.200 à 4.900 tours.
EVOLUTIONS
La Volvo 850 T5-R ayant été une série limitée au succès fulgurant, Volvo décida finalement de l'intégrer dans la gamme en 1996 (et jusqu'en 1997, date d'arrêt de production de la 850) moyennant quelques aménagements. Rebaptisé 850 R, le modèle disponible en berline et en break, adopte de nouvelles jantes à bâtons plus fins, toujours peintes en couleur anthracite. Le 5 cylindres 2.3 gagne 10 ch au passage grâce à un turbo plus gros et son couple atteint 35,7 Mkg de 2400 à 5000 tr/mn. La 850 R gagne également un DGL pour mieux canaliser sa fougue. L'équipement de série très généreux correspond à la finition Summum et la palette de coloris est élargie.
ACHETER UNE VOLVO 850 T-5R
320.000 km. Loin d’être une exception, c’est le kilométrage qu’affichait fièrement notre modèle d’essai, avec tout d’origine : moteur, turbo et boîte. La fiabilité des Volvo 850 T5-R et des 850 en général n’est plus à prouver. On comprend donc pourquoi Ford a jeté son dévolu sur cette lointaine base moteur pour sa méchante Focus 2 RS. La majorité des pièces est encore facile à trouver, sauf celles qui concernent les plastiques intérieurs qui peuvent poser plus de soucis. La cote d’un modèle propre tourne autour d'un prix plancher de 5.000 €. Attention de bien s’assurer qu’il s’agit d’une vraie R et pas d’une simple T-5, sachant que de toute façon il reste peu de modèles strictement d’origine. L’entretien doit avoir été correctement fait, en particulier la distribution pour laquelle il faut compter un budget de 700 € chez Volvo, sans la pompe à eau. Cette opération est à faire tous les 120.000 km.
:: CONCLUSION
Parfaite pour ceux qui refusent de rouler comme tout le monde, la Volvo 850 T-5R est un drôle d’engin. Plus habitable qu’un monospace tout en étant assez performante grâce à son vaillant 5 cylindres, son principal intérêt est sa fiabilité à toute épreuve compensant une consommation excessive de super. Elle restera le symbole d’un autre temps, où le succès permettait à Volvo de s'offrir une incursion sportive…
Nous remercions Bruno du forum volvo-r.niceboard.com pour la présentation de sa 850 T-5R Italienne.
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