L'HABIT NE FAIT PAS LE MOINE
En attendant la prochaine Audi S3,
il faut patienter avec une A3 Quattro V6 qui poursuit la course
à l'embourgeoisement et à la puissance. En effet,
cette sportive aussi discrète qu'une TDI de base dissimule
sous son capot un gros V6, plus puissant que le 1.8T de l'ancienne
S3 ! L'Audi A3 V6 3.2 enfile donc la tenue de camouflage idéale
face à la répression routière
Texte : Sébastien DUPUIS
Photos : D.R.
PRESENTATION
Renouvelée au cours de l'année 2003, l'Audi A3
reste fidèle à l'esprit maison. En effet, la précédente
génération avait réussi à s'imposer
sur un nouveau segment de marché: les berlines compactes
de luxe. En dépit d'une ligne sobre et passe-partout, l'Audi
A3 misait principalement sur sa finition excellente, son confort
et... ses moteurs TDI. Construite sur une plate-forme de Golf V,
la nouvelle génération d'A3 entend bien confirmer
l'essai en ne remettant pas en cause une recette qui a bien porté
ses fruits. Sur la nouvelle A3, l'avant fronce les sourcils et se
donne un regard plus méchant et agressif. Légèrement
inspirée de l'original concept car Steppenwolf sa partie
arrière assez haute n'est pas la plus agréable à
regarder. L'empattement allongé de 5,9 cm a permis d'étendre
la silhouette qui semble indiscutablement plus imposante. L'A3 va
même à l'encontre des modes actuelles puisqu'elle est
plus basse que l'ancienne ! 1m42, mais avec une ceinture de caisse
assez haute, l'impression de compacité est évidemment
accentuée. Massive, râblée, l'A3 transpire la
robustesse à travers toute sa carrosserie. C'est aussi une
berline compacte classique et élégante pas désagréable
à regarder mais pas spécialement séduisante
non plus.
HABITACLE
A bord, l'ambiance cocon rassurant de l'ancienne laisse
place à un sentiment de confinement plus important, pas forcément
plus agréable. Au niveau design, le tableau de bord qui semble
moulé d'un bloc (!) s'inspire clairement de celui du coupé
Audi TT plus sportif. Les grilles d'aération s'arrondissent
et de part et d'autre de la console centrale deux petits montants
obliques encadrent le levier de vitesse. Etrangement, la qualité
perçue et la finition de l'A3 semblent en léger recul,
mais heureusement, toujours au-dessus de la moyenne. L'habitacle
de la nouvelle A3 offre aussi un peu plus de place à ses
occupants, l'ergonomie est au top et les sièges Recaro ne
sont pas trop fermes. On trouve rapidement une excellente position
de conduite. De plus, l'équipement de série se montre
assez généreux, même sur la version de base
Ambition, ce qui nous change des habitudes maison. Mais ne rêvez
pas trop, le cuir de qualité reste une option tout comme
les phares au Xénon... Cependant, rien de chaleureux ne vient
égayer une ambiance particulièrement quelconque. Le
juste revers de la médaille puisqu'Audi cultive toujours
soigneusement son image de sobriété et de perfection.
Ah, cette traditionnelle rigueur germanique... Un conseil pour briser
cette triste monotonie de teintes, préférez une sellerie
claire ! Globalement, absolument aucun signe "ostensible"
(un mot très à la mode) de "puissance" (un
mot moins à la mode...) ne distingue l'A3 V6 de sa soeur
équipée du placide moteur 2.0 TDI 140 chevaux. Et
c'est bien là qu'est l'os... D'instinct, nous sommes donc
contraint de penser que l'A3 V6 3.2 Quattro ne souhaite donc pas
revendiquer trop clairement le statut de sportive. Sans doute pour
mieux laisser la place à la torride version S3 qui devrait
chapeauter la gamme dans quelques mois. Quoiqu'il en soit, nous
regrettons que cette automobile de 250 chevaux n'ait rien de plus
folichon à offrir pour le plaisir des yeux que la banale
berline Diesel du bon père de famille. C'est toutefois un
bon point pour ne pas attirer la convoitise des individus malveillants
mais les assureurs en tiendront-ils compte ?
MOTEUR
Chez VAG, depuis la fameuse Volkswagen
Golf VR6, cette mécanique innovante aux cylindres en
quinconce n'a cessé de rugir et évoluer sous les capots
des sportives (et moins sportives) de la marque. Sous le capot de
l'A3 V6, le VR6 (puisque c'est bien un VR contrairement à
l'appellation commerciale), cube 3,2 litres. C'est en fait le même
que celui qui officie depuis quelques mois déjà sous
le capot du coupé TT
V6, lui-même étant une version légèrement
modifiée de celui apparu précédemment sur l'éphémère Volkswagen
Golf R32. Ce qui nous intéresse plus précisément,
c'est sa puissance de 250 ch à 6300 tr/mn et le couple maxi
de 320 Nm quasiment disponible de 2800 tr/mn à 3200 tr/mn.
L'autre intérêt du passage au VR6 pour l'Audi A3 est
une sonorité plus agréable que le 4 cylindres 1.8
turbocompressé, bien qu'elle soit extrêmement feutrée.
Ce VR6 conserve une spontanéité frappante, sa courbe
de couple bien remplie et disponible très tôt lui conférant
presque un tempérament rappelant un peu celui des moteurs
TDI du même constructeur, la sonorité en plus. Déformation
professionnelle des motoristes ? Hum... rassurez-vous, impossible
de confondre ce 6 cylindres avec une quelconque chaudière,
mais avouons qu'il n'a pas spécialement la fibre sportive.
En revanche, il a de l'appétit et le petit réservoir
de 60 L semble bien dérisoire. Propre, puisqu'il respecte
d'ores et déjà les futures normes Euro 4, le nouveau
V6 Volkswagen est un moteur moderne et dynamique mais finalement
pas véritablement passionnant. Il permet de donner à
la compacte d'Audi ses lettres de noblesse qui lui confèrent
cependant le statut de routière bourgeoise compacte plus
que le titre de sportive de l'année... Pour autant, l'habit
ne fait pas le moine et l'A3 V6 est une auto très performante.
Parfaitement bien étagée, la boîte manuelle à 6 rapports
de l'A3 V6 permet de disposer idéalement du couple généreux
du V6 et les relances sont particulièrement énergiques sur
tous les rapports malgré le poids conséquent de la
bête qui s'établit à 1485 Kg ! Et mis à part
une certaine lourdeur de maniement du levier le couple moteur/boîte
est une réussite d'efficacité et les performances
de l'A3 le prouvent : 6"5 pour passer de 0 à 100 Km/H
et l'A3 V6 passe la borne en moins de 27". Ces chiffres sont
meilleurs que ceux de la Volkswagen Golf R32 dont le look est pourtant
bien plus tapageur et surtout place la nouvelle A3 au-dessus de
l'ancienne Audi S3 qui,
elle, était officiellement présentée comme
une sportive !... Vous avez dit paradoxal ?
COMPORTEMENT ROUTIER
Tout d'abord, la direction assistée par commande électromécanique
n'offre pas une sensation très agréable. En revanche,
dès les premiers tournants, on remarque l'agilité
évidente de la nouvelle Audi A3, bien moins pataude que l'ancienne
dans le même exercice. Il est vrai que la partie châssis
constituait le plus gros défaut de l'ancienne génération.
Et là... oh surprise ! Audi est reparti d'une feuille blanche
et ça se voit, ou plutôt se ressent ! En effet, on
se surprend désormais à pousser l'Audi A3 V6 de courbe
en courbe tant sa tenue de route et son amortissement semblent inébranlables.
Finis les pompages, même sur mauvaises routes ! Comme sur
l'ancienne, le système Quattro est ici la transmission intégrale
non permanente Haldex, qui n'exploite la motricité des roues
arrière que lorsque celles de devant sont débordées.
La voiture conserve donc invariablement un tempérament légèrement
sous-vireur par nature. Le train arrière à quatre
bras supervisé par l'armada électronique désormais
habituelle chez Audi - le programme électronique de stabilisation,
ESP avec amplificateur hydraulique de freinage d'urgence, relie
ABS, ABV, ASR (antipatinage) et EDS (blocage de différentiel
électronique), ASR, à ses propres capteurs - suit
le mouvement sans faillir, sans jamais perturber un équilibre
ou plus exactement une neutralité quasiment parfait. Les
pneumatiques Michelin Premacy de dimensions généreuses
(225/45 R 17) sont dans la bonne logique du reste, confortables,
adaptés à presque toutes les conditions météo,
mais pas sportifs. Enfin, le dispositif de freinage à double circuit
réparti en diagonale se compose de quatre disques ventilés
de gros diamètre (345/256 mm) et d'un ABS 5e génération avec
répartiteur électronique de freinage EBV. Toujours rassurante, facile
(trop ?), l'A3 incite à hausser le rythme tant l'ambiance
qui règne à bord est sereine et... endormante aux
allures réglementaires. Malheureusement, la marée-chaussée
risque de ne pas apprécier l'argument ! Il vous faudra donc
lever le pied et profiter du bon confort d'amortissement et du niveau
sonore masquant efficacement les vocalises du V6, ce qui vous permettra
d'apprécier la qualité du système Hi-Fi signé
Bose. Bref, Audi vous souhaite la bienvenue dans le 21ème
siècle, le siècle des salons roulants sous surveillance
électronique !
:: CONCLUSION
Hypocrite, la nouvelle A3 dissimule sous sa robe discrète
et classique des performances et une efficacité supérieures
à l'ancienne Audi S3. Pour autant, elle n'en mérite
pas plus le titre de véritable sportive tant sa conduite
est aseptysée. Elle confirme de ce fait que les performances
seules, ne peuvent suffir à faire d'une automobile une voiture de
sport. Non, en fait Audi invente à sa manière le créneau des GT
compactes. Et pour aller jusqu'au bout du concept, vous pourrez
même vous offrir (contre 2070 euros) la boîte de vitesses DSG. Mais
une question se pose alors très vite à nous : que
nous réserve Audi pour sa future S3 quand on voit le niveau
des performances de cette A3 V6 3.2 ???
CE QU'EN PENSENT
NOS CONFRERES :
"Malgré les
dires, la nouvelle A3 reste une Audi à part entière.
Sa qualité de fabrication ainsi que ses réactions
dynamiques répondent aux canons de la marque. Quant à
la 3.2 V6 plus précisément, elle décevra peut-être
les inconditionnels de la conduite sportive mais comblera, en revanche,
les gros rouleurs. D'autant qu'elle n'est pas si chère...
pour une Audi."
ECHAPPEMENT - Octobre 2003.
"Austère dans sa présentation,
l'A3 3.2 ne joue pourtant pas les faux-semblants. Elle ne se donne
pas l'air d'une sportive parce qu'elle n'en est pas une ! C'est
une compacte luxueuse et confortable, très performante et
très sécurisante, quelles que soient les conditions."
SPORT AUTO - Octobre 2003. |