MCLAREN 650S Spider (2014 - )
Une certaine idée de la perfection
Bon nombre de propriétaires de McLaren utilisent leur voiture au quotidien mais aussi à l'occasion d'événements sur circuit. La McLaren 650S est conçue pour les deux, ce qui fait d'elle une sportive accomplie et pour beaucoup d'entre nous, la voiture parfaite...
Texte :
Sébastien DUPUIS
Photos : Thomas POSLUSZNY
Six ans déjà ont passé depuis la première apparition de la MP4-12C, première véritable McLaren de grande diffusion ayant fait entrer le constructeur anglais dans une nouvelle dimension. Lorsqu'on a marqué son temps avec un modèle aussi extraordinaire que la McLaren F1, cela confie quelques prédispositions. Mais devenir l'égal de Ferrari ou Lamborghini n'est pas un mince défi. Ron Dennis le savait mais il l'a relevé avec rigueur et ambition, et de gros moyens aussi puisqu'il a pour cela fait construire une nouvelle usine...
PRESENTATION
Présentée au Salon de Genève 2014, la 650S a été introduite entre la MP4-12C, renommée 12C en 2011, et la monstrueuse P1. Proposée à la fois en Coupé et en Spider, elle a pourtant rapidement devancé les ventes de la 12C que nous avions essayée en 2013. A tel point, que la 650S a fini par la remplacer avant que l'entrée de gamme ne soit confiée à la nouvelle 570 Sport series. Plus séduisante, la 650S profite surtout de sa face avant inspirée de la P1, avec ses phares à LED en forme de boomerang comme le logo McLaren. Sur le capot trône un nouveau badge McLaren inspiré par celui de la légendaire F1. Une retouche qui renforce l'identité de marque et fait qu'on ne peut désormais plus reprocher à la petite McLaren de manquer de personnalité, si tel était vraiment le cas. Au passage, le splitter avant intégré contribue à l'augmentation de l'appui aérodynamique. Les niveaux d'appuis ont progressé de 24% à 241 km/h, sans pénaliser la traînée. A l'arrière, le nouveau pare-chocs en trois pièces est inspiré de la 12C GT3 et met bien en évidence les larges diffuseurs. Enfin, les nouvelles jantes forgées offrent un gain de 6 kg par rapport à celles de la 12C.
Moyennant un "léger" supplément de 23.000 €, la 650S Spider renforce incontestablement le pouvoir de séduction de la supercar anglaise. L'impact visuel est puissant et immédiat avec la superbe robe "Volcano Yellow" (un jaune métallisé très travaillé qui n'est pas sans rappeler la célèbre teinte jaune Sirius de Renault Sport) de la 650S Spider mise à notre disposition par McLaren Paris. Tout simplement à tomber (amoureux) ! Où que l'on pose son oeil, l'anglaise dévoile une ligne à la fois très pure et travaillée, avec des détails raffinés. Sans ostentation, rien d'artificiel ou superflu ne vient parasiter une sportivité innée et sincère. Même les sorties d'échappement ne sont pas de vulgaires canules mais des pièces d'inox anodisé parfaitement réalisées et soudées au silencieux.
HABITACLE
Qui dit polyvalente, dit pratique. Et pour cela, on a beau monter à bord d'un cabriolet 2 places à moteur central, le coffre aménagé sous le capot avant se montre bien pensé pour accueillir les bagages indispensables à un petit roadtrip entre amis. Pour autant, s'installer dans l'habitacle de la 650S n'est pas vraiment aussi simple que s'asseoir dans une berline de luxe. Une fois trouvé la commande d'ouverture de la spectaculaire porte en élytre, il faut enjamber l'épais longeron de la cellule MonoCell en carbone, tout en faisant attention de ne pas se cogner la tête dans la porte. La petite gymnastique imposée se fait heureusement vite pardonner en prenant place dans le superbe baquet en carbone qui fait face au cadran central. Le dessin épuré de la planche de bord est repris sans modification de la 12C. Il a globalement bien vieilli, même si la finition impressionne moins qu'à ses débuts. Le style intérieur demeure plaisant à regarder et les matériaux nobles - cuir, alcantara, carbone, aluminium - sont prédominants. Cela crée une atmosphère assez stricte mais à la fois moderne, luxueuse et sportive. L'ergonomie garde des particularités très anglaises, à l'image du réglage de rétroviseur situé à droite du volant par exemple. On pourra aussi trouver l'ordinateur de bord austère et pas assez intuitif. Mais au final, on est tellement bien assis qu'on a juste envie de prendre la route ! Les nouveaux sièges baquets en fibre de carbone pèsent d'ailleurs 15 kg de moins tout en offrant un maintien idéal et une assise confortable. Leur réglage électrique, à mémoire, permet un ajustement précis. Les clients peuvent également choisir en option des baquets à dossier fixe inspirés de la P1. Le réglage de colonne de direction électrique, optionnel, intègre un mode « confort » pour faciliter l'entrée et la sortie. Une option tout à fait recommandable.
En dépit de sa chasse aux kilos, la McLaren 650S n'a rien d'une sportive radicale et spartiate. De série, le modèle est équipé des mêmes raffinements qu'une berline haut de gamme. Cela va de la navigation par satellite à la téléphonie Bluetooth à commande vocale en passant par le système audio numérique développé sur mesure par le spécialiste britannique Meridian. Sur la 650S Spider, le système de contrôle de la température est également recalibré afin de s'ajuster automatiquement lorsque le toit est abaissé. L'arrivée d'air est réduite sur le pare-brise et renvoyée vers les orifices de ventilation inférieurs. La caméra arrière d'aide au stationnement dissimulée dans le pare-chocs s'avère aussi d'une précieuse aide lorsqu'il est nécessaire de reculer, la visibilité de 3/4 étant quasiment nulle. Une simple pression sur un bouton et le toit en deux parties disparaît en 17 secondes sous le double bossage du capot moteur. Cette fois, je suis bien au volant d'une Supercar...
MOTEUR
De fait, avec la gamme "Super series", McLaren positionne comme telle sa berlinette V8. Bloc en aluminium coulé chez Grainger & Worrall puis traité au Nikasil, cotes hyper carrées, carter sec, vilebrequin à plat, pistons forgés, levée variable des soupapes en continu, collecteur d'admission composite, double turbo, échangeur huile/eau, échappement inox, la fiche technique de la 650S à elle seule dresse les poils et transpire la compétition. Rien d'étonnant à cela, car il faut rappeler que le V8 M838T a été conçue chez Ricardo, sur la base de l'ancien V8 Nissan VHR ayant couru dans les années 90 (cf. notre essai de la 12C).
Par rapport à la 12C, la 650S reçoit de nouveaux pistons, culasses et soupapes ainsi qu'une levée d'arbres à cames revue, tout ceci pour doper la puissance et le couple. Le V8 McLaren développe aujourd'hui la bagatelle de 650 ch dans la 650S, comme vous l'aviez deviné, au régime de 7200 tr/mn. Plus intéressant encore pour un moteur turbo, le couple maximal de 678 Nm est obtenu à 6000 tr/mn et la courbe de couple grimpe sur un large intervalle de rotations (3000-7000), plutôt que d'être plate.
Evidemment, c'est en matière de caractère moteur que cela s'interprète et s'apprécie le mieux. Souple à bas régime, le V8 McLaren se montre étonnamment docile. Capable de descendre à 600 tr/mn au ralenti en vibrant comme un moteur de course (Ricardo n'a pas voulu utiliser d'arbres d'équilibrage) et de repartir quasiment sans temps de réponse, il monte le tempo crescendo à partir de 4000 tr/min pour aller finir de hurler à 8500 tr/mn comme un prototype dans la ligne droite du Mans. Soyons clairs, ce V8 est réellement grisant. Fascinant, captivant, envoûtant, intimidant aussi, les superlatifs ne manquent pas pour décrire cette furie mécanique, ce bijou de technologie et de savoir-faire pour lequel la passion et le plaisir ont prédominé le développement.
Critiquée à sa sortie, la sonorité a été retravaillée en 2013 et se montre aujourd'hui absolument fantastique. Décuplée par l'absence de toit, la sonorité est véritablement puissante, et ce, dès la mise en route où le V8 rugit littéralement à travers ses deux sorties d'échappement. Il faut vraiment fermer le toit et la vitre arrière pour retrouver un peu de calme, et encore, le niveau sonore reste de toute façon relativement élevé. Mais c'est tellement bon ! C'est aussi ce qui rend la 650S aussi sportive et attachante. Le bruit des turbos, audible seulement par moments, parasite à peine une partition qui pourrait être celle d'un V8 atmosphérique ou à compresseur. A ceux qui pensent que le turbo a tué les beaux moteurs, McLaren répond que ce n'est pas une fatalité.
Toujours fournie par les italiens de Graziano, la boîte à double embrayage SSG à 7 rapports, commandée uniquement par les palettes au volant, a encore été rendue plus rapide dans sa gestion. Pour autant, elle pourra paraître aujourd'hui un peu dépassée mais McLaren a bien compris que le plaisir ne réside pas dans la seule vitesse de passage. Ainsi, la technologie de "cylinder cut" interrompt momentanément l'étincelle puis libère vigoureusement le carburant au redémarrage. Cette opération contribue à ne pas ressentir des accélérations trop linéaires comme c'est souvent le cas avec les boîtes double-embrayages, tout en produisant de magnifiques étincelles à l'échappement ! Enfin, il convient d'ajouter que cette boîte est parfaitement étagée, même le 7ème rapport n'est pas excessivement long pour abaisser le co2 en laboratoire. Il en résulte d'excellentes reprises et une très bonne perception de la vitesse.
Parlons vitesse justement, même si ce mot est devenu un affreux tabou dans le monde automobile. Les performances de la 650S Spider sont à couper le souffle. Précisons au passage que le poids total de la Spider excède de seulement 40 kg celui du Coupé, ce qui n'a donc quasiment pas d'impact sur les chronos. Les accélérations demeurent phénoménales. Bien plus encore que le 0 à 100 km/h dégommé en 3 secondes, le catapultage à 200 km/h en seulement 8,6 secondes impose de bien conserver tout son sang froid... De ce fait, à aucun moment la 650S ne nous a fait regretter l'absence de boîte de manuelle. Le paysage défile si vite au volant qu'on préfére se concentrer pleinement sur les trajectoires et tenir le volant bien fermement ! Et le champ de vision qui se réduit à mesure qu'on se projette dans l'horizon, façon "hyper espace", rend superflue la lecture du compteur de vitesse...
Puisqu'il faut malgré tout rester terre à terre, vous n'échapperez pas au super-malus de 10.000 € l'an prochain avec les 275 g de CO2 affichés. Mais la consommation, mesurée à 14L sur notre essai, se montre vraiment raisonnable pour une sportive de ce calibre. Et puis rien que pour admirer un peu plus ses lignes, on prendrait presque plaisir à refaire le plein.
SUR LA ROUTE
Construire une voiture capable de produire d'excellents chronos ET un confort d'utilisation irréprochable, était l'objectif prioritaire de la MP4-12C. Objectif atteint avec brio, mais la 650S se devait de relèver encore le curseur d'un cran. La fermeté des ressorts s'est pourtant accrue de 22% à l'avant et de 37% à l'arrière. On aurait pu craindre au redouté effet "bout de bois", mais ce n'est pas le cas. La 650S paraît solidement collée au sol, imperturbable, c'est un fait. Mais les nouveaux supports d'amortisseurs améliorent le confort en minimisant les bruits et vibrations dans l'habitacle, tandis que les amortisseurs et ressorts retravaillés sont couplés à une colonne de direction plus précise. Les impacts transmis au châssis sont maintenus à un niveau minimum grâce aux améliorations apportées aux bagues supérieures. Enfin, le ProActive Chassis Control (PCC), système d'amortissement piloté de McLaren, a bénéficié de nouvelles améliorations pour la 650S. En comparaison de la 12C, la suspension est plus ferme dans tous les modes, même si c'est surtout en mode Sport qu'on remarque la différence. Débarrassé des barres anti-roulis mécaniques traditionelles, il permet plus de souplesse par rapport aux systèmes classiques tout en réduisant le roulis à sa plus simple expression. Les modes (Normal / Sport / Track) sont paramétrables indépendamment du système de transmission, ce qui offre la liberté de se configurer une voiture à la carte. Au final, le mode Normal est celui qui convient le mieux à un usage sur route et malgré une fermeté accrue, les modifications apportées à la suspension ont amélioré le confort global. Un vrai tour de magie.
La direction est restée la même que sur la 12C. Plutôt ferme sur tous les modes, l'ensemble des modifications amène cependant plus de précision. Avec un peu plus de 57% du poids sur l'arrière, la 650S se place idéalement en engageant sur les freins jusqu'au point de corde, bien que le sous-virage soit inexistant. Le Brake Steer, développé à l'origine par McLaren pour la Formule 1 durant la saison 1997 avant d'être interdit, augmente en effet l'agilité en virage en ramenant le nez vers le point de corde via une force de freinage supplémentaire à l'arrière. Cela permet ainsi de freiner plus tard et de réaccélérer plus tôt. On obtient les avantages d'un différentiel à vecteur de couple mais en utilisant le système ESP. L'ESP a d'ailleurs été recalibré pour rendre son intervention un peu moins agressive, notamment sur circuit.
Une attention toute particulière a été accordée aux freins carbone-céramique, livrés de série, pour aboutir à un freinage plus fluide et efficace. Le résultat est remarquable, autant pour sa force inépuisable que sa finesse de dosage. Et puisqu'on parle de freinage, l'effet procuré par l'Airbrake (aérofrein McLaren) qui s'agite dans le rétroviseur est aussi particulièrement saisissant ! En plus d'être plaquée au sol, la 650S donne l'impression d'agir comme un être "vivant" accompagnant le pilote plutôt que bridant ses erreurs éventuelles.
On pourrait en effet reprocher à McLaren de trop compter sur l'électronique pour offrir un comportement néanmoins remarquable d'efficacité et de facilité. Mais en vérité, toute cette débauche de technologie réussi le tour de force de se rendre transparente et imperceptible, les réactions de la voiture semblant toujours naturelles. En plus de faire oublier ses kilos, la 650S procure des sensations incroyablement fines et communique énormément sur le relief de la route, ce que font les roues et comment réagit la voiture dans son ensemble. L'expression faire corps avec la machine trouve vraiment son sens, de la même manière qu'à bord d'une Lotus Elise. Une Elise qui serait poussée par un V8 de 650 ch et ne perdrait rien de son feeling, c'est ça la prouesse de McLaren.
Même à faible allure, la 650S change de direction avec précision et il n'est nullement indispensable d'ouvrir comme un sourd en permanence pour prendre son pied derrière le volant. Un petit enchaînement de virage abordé à allure raisonnable suffit au bonheur du conducteur. Quand on constate, souvent, que la technologie peut devenir un frein au plaisir et aux sensations, McLaren réalise la démonstration que les deux choses ne sont pourtant pas incompatibles. Ce qui rend la 650S d'autant plus réussie et désirable, c'est qu'on ne prendra pas du plaisir à son volant que sur un circuit. A moins de vouloir absolument perdre son permis dans la journée, ou d'être totalement cinglé, il est de toute façon impossible d'exploiter en permanence un tel niveau de performances sur route ouverte. Le moindre bout de ligne droite entre deux virages est effacé d'une pichenette d'accélérateur par le V8 qui vous tabasse vigoureusement la nuque au passage.
Il faut bien le dire, s'arrêter de rouler demande un sérieux effort, un sacrifice, tant on prend plaisir à enfiler les kilomètres au volant de la McLaren. C'est bien simple, on voudrait que la route ne s'arrête jamais ! Une étude a d'ailleurs montré que les clients de la marque parcourent généralement plus de kilomètres que la plupart des propriétaires de supercars. Comme quoi, il existe bien un "effet" McLaren. Il s'appelle le plaisir de conduire. Un plaisir d'autant plus grand que même décapoté, la 650S Spider reste hyper agréable, les remous sont parfaitement maîtrisés et les bruits aérodynamiques très bien contenus. On vous aura prévenus, la 650S Spider pourrait bien être la voiture de sport parfaite...
CARACTERISTIQUES TECHNIQUES
MCLAREN 650S Spider
MOTEURType : 8 cylindres en V à 90°, 32 soupapes
Position : central AR
Alimentation : injection directe, double calage variable + 2 turbos avec échangeur air/air
Cylindrée (cm3) : 3799
Alésage x course (mm) : 93 x 69.9
Puissance maxi (ch à tr/mn) : 650 à 7250
Couple maxi (Nm à tr/mn) : 678 à 6000
TRANSMISSION
AR + DGL électronique
Boîte de vitesses (rapports) : double embrayage SSG (7)
ROUES
Freins Av-Ar (ø mm) : Disques ventilés (370-350) + Aérofrein
Pneus Av-Ar : 235/35 R19 - 305/30 R20 (Pirelli P Zero Corsa)
POIDS
A sec constructeur (kg) : 1370
Rapport poids/puissance (kg/ch) : 2,3
PERFORMANCES
Vitesse maxi (km/h) : 329
400 m DA : 10"6
0 à 100 km/h : 3"0
0 à 200 km/h : 8"6
0 à 300 km/h : 26"5
CONSOMMATION
Moyenne normalisée (L/100 Km) : 11,7
CO2 (g/Km) : 275
PRIX NEUF (09/2016) : 260.750 €
PUISSANCE FISCALE : 53 CV
CONCLUSION
:-) "Restylage" très réussi V8 exceptionnel, sonorité, caractère ! Plaisir de tous les instants Cabriolet très agréable Position de conduite Direction Freinage Comportement Facile, confortable et sûre... |
:-( ... trop pour les puristes ? Visibilité arrière (hors caméra) Prix élevé, forcément... |
La McLaren 650S Spider est tellement aboutie qu'on se demande à quoi sert le Coupé. Encore plus séduisante et envoûtante une fois le toit replié, elle transcende un potentiel émotionnel incroyable. Cette "super voiture" est capable de vous faire vivre un rêve éveillé : concilier les sensations d'une voiture de course à la simplicité d'une voiture pour tous les jours. Du plaisir à l'état pur...