SIMCA 1200 S Coupé (1967 - 1971)
SPORTIVE TARDIVE
Dérivé de la Simca 1000, le joli petit coupé Simca dessiné chez Bertone se construit une belle popularité mais manque de puissance pour figurer au rang d'authentique sportive. Il faudra attendre l'arrivée du nouveau moteur 1200 S pour qu'il obtienne enfin ses lettres de noblesse...
Texte :
Sébastien DUPUIS
Photos : Nicolas LISZEWSKI
Au début des années 60, Simca est une firme fleurissante. Henri T.Pigozzi, fondateur de la Société Industrielle de Mécanique et Carrosserie Automobile (Simca) en 1935, est un chef d'entreprise doué d'un grand sens du marketing. En juillet 1961, il se distingue une nouvelle fois en présentant la Simca 1000, une petite berline populaire qui est un succès immédiat. Mais Pigozzi n'entend pas en rester là car de son côté, Renault prépare la Floride, dérivée de la Dauphine. Depuis 1949, Simca a toujours proposé à son catalogue des coupés et cabriolets, sur base Simca 8 puis sur châssis Aronde. C'est alors que Simca lance l'étude d'un petit coupé sport sur le châssis de la Simca 1000. Après avoir mis en concurrence Facel et Bertone sur le projet, c'est la proposition du carrossier italien qui fut retenue. Dessiné chez Bertone par un jeune designer de 23 ans du nom de Giorgetto Giugiaro (on réentendra parler de lui plus tard...), le fruit de cette étude est présenté au salon de Genève 1962. Le coupé Simca 1000 présente des lignes fines et équilibrées, plus élégantes que réellement sportives et qui ne sont pas sans rappeler la NSU Prinz Sport également conçue chez Bertone.
Mais voilà, au goût de la presse et du public, ce dessin manque de virilité autant que le moteur manque de chevaux. La concurrence des petits coupés sportifs est alors très vive, avec en tête de file chez les français la nouvelle Alpine A110, la CD Panhard et la René Bonnet Djet. On peut également citer la rivalité des coupés Lancia Fulvia, Glas 1300 GT ou des Alfa Romeo Giulia Sprint. Au même titre que la Renault Caravelle, sa principale concurrente sur le marché français, le petit coupé Simca se forge donc rapidement l'image d'une "voiture de femmes". Par ailleurs, le prix du coupé Simca 1000 est le double de la berline. Des arguments qui expliquent en bonne partie la déception de la marque qui en écoulera à peine plus de 10.000 exemplaires entre 1963 et 1967.
Entre temps, la marque subit de grands bouleversements. En 1963, c'est Chrysler qui prend une participation majoritaire au capital, puis en 1964, Simca est touché de plein fouet par la disparition de son fondateur. Le salut du coupé Simca ne tient plus qu'à un fil. C'est alors qu'arrive à cette date le lancement d'un nouveau moteur 1100 chez Simca et Chrysler débloque de nouveaux fonds à la fin de l'année 1966 pour développer une évolution de son coupé. Afin de redorer le blason du Coupé Simca Bertone 1000 qui a des difficultés à se vendre, Georges Héreil qui préside désormais Simca, déclare lors d'une conférence de presse en 1967 : " Nous vous présenterons prochainement le Coupé Bertone dans sa version améliorée".
PRESENTATION
Baptisée 1200 S, ce nouveau Coupé Simca Bertone est effectivement présentée à la presse dès le mois de juin 1967, avec des essais dynamiques sur la piste de Monthléry. La "virilisation" de son tempérament est clairement affichée et se traduit par une face avant à quatre phares, avec des projecteurs de fort diamètre et des phares à iode prennant place dans une large grille de calandre. Le "nez de requin" renforce l'agressivité du coupé Simca 1200 S et deux sorties d'air sont percées dans le capot avant. Bien que le moteur soit toujours à l'arrière, leur rôle n'est pas cosmétique puisqu'elles refroidissent le radiateur qui a été déplacé à l'avant. Précisons également que la carrosserie a été étudiée en soufflerie, chose rare à l'époque, pour obtenir un Cx de 0,38. On note aussi la présence sur le capot d'un logo Simca sur fond de drapeau à damier et de nouvelles jantes en tôle qui mettent en valeur le carrossage fortement négatif des roues arrière. Les double feux circulaires à l'arrière permettent également de reconnaître le coupé 1200 S.
L'exemplaire de notre essai est également équipé d'un toit vinyle optionnel (de série sur les derniers millesimes) et de longues-portées Cibié. Enfin, l'empattement du coupé 1200S est très légèrement allongé (de 222 à 223 cm), ainsi que la voie arrière (de 125,5 cm à 126 cm). Ainsi remanié, le coupé Simca Bertone fait forte impression. Sur ce modèle d'architecture tout-à-l'arrière, la poupe plongeante est d'une grande finesse et l'habitabilité reste celle d'une 2+2.
HABITACLE
La planche de bord en imitation bois avec ses cadrans cerclés de chrome et le petit volant 3 branches à jante en bois nous replongent immédiatement dans l'ambiance des sportives des années 60. L'ensemble revêt même quelques accents anglais et un certain charme. On peut signaler une instrumention assez complète avec compte-tours central, des pochettes de rangement, un allume cigare, des aérateurs latéraux réglables, et une bonne position de conduite. La vision médiocre dans le petit rétro obus est compensée par ce charme inimitable du chrome qui l'enrobe.
MOTEUR
Extrapolé du 944 cm3, le nouveau moteur de 1204 cm3 délivre 80 ch DIN à 6000 tr/mn, soit le double de la puissance du coupé 1000 ! On peut donc réellement parler d'une voiture transfigurée par ce nouveau bloc, doté d'une nouvelle culasse et gavé par deux carburateurs double corps Solex de 35 mm. Le taux de compression élevé de 10,25 à 1 et son couple de 10,5 mkg confirment le bon travail des motoristes. On retrouvera d'ailleurs très vite ce bloc chez quelques petits construteurs ou artisans-carrossiers, à l'image des CG 1200S et 1300.
La boîte de vitesses à 4 rapports à synchronisation Porsche reste inchangée, le guidage et le verrouillage pourraient être meilleurs et on note un trou entre la 3ème et la 4ème, mais les performances font un sérieux bond en avant grâce à un bon étagement. La vitesse maxi dépasse les 175 km/h et le 1000m départ arrêté est parcouru en 34"5, une valeur tout à fait correcte en 1967.
SUR LA ROUTE
Conçu sur la base de la berline Simca 1000, le coupé en reprend tous les attributs techniques. Bien que la 1200 S accuse cent kilos de plus que le coupé 1000, elle bénéficie d'une meilleure répartition des masses (350 kilos à l'avant et 540 kilos à l'arrière). Pour faire face à l’amélioration des performances, la suspension du coupé Simca 1200 S a été renforcée. Elle reçoit une barre stabilisatrice à l'avant, tandis que le ressort à 8 lames transversales et bras triangulés est fixé en son milieu sur une traverse en tôle emboutie. A l'arrière, le carrossage négatif a été nettement accentué. La direction utilise en revanche toujours l'antique technique à vis globique et à galet, mais le comportement équilibré et la tenue de route efficace du coupé Simca est saluée unanimement. précisons qu'à l'époque, une tendance survireuse, même marquée, est considérée comme la norme ! Bien que disposant de 4 freins à disques, le freinage de la Simca 1200 S pêche au lancement par son absence de servofrein et une efficacité moyenne. La plupart de ces défauts seront très vite corrigés par l'usine, suite aux différents tests et compartifs réalisés par la presse spécialisée.
EVOLUTION
Quelques améliorations seront apportées au cours de l'évolution du modèle, dont la direction à crémaillère (en 1969) apparaît la plus importante puisqu'elle permet de gagner énormément en précision de conduite. Un servofrein et des sièges inclinables complèteront l'équipement, alors que des jantes Cromodora Fergat en alliage de magnesium sont proposées rapidement en option. Le moteur gagne également 5 chevaux grâce à une culasse et des échappements modifiés, permettant au coupé Simca Bertone d'accrocher les 179 km/h. En 1970, l'assemblage est transféré dans l'usine Chrysler de Rotterdam afin de laisser de la place à Poissy pour la nouvelle Simca 1100. La Simca 1200 S y sera assemblée à 3114 exemplaires jusqu'en juin 1971, les invendus de cette dernière année ayant été refrappés au millésime 1972.
ACHETER UNE SIMCA 1200 S Coupé
Nombre de coupés Simca 1200 S sont partis à la ferraille ou au talus, et pour les rares survivants sur lesquelles la rouille n'a pas fait des ravages, les cours ont donc en toute logique grimpé ces dix dernières années. Mais attention, un prix fort ne justifie pas d'acheter à l'aveugle. Les bas de caisse, très sensibles ont souvent été choucroutés à la "va-vite", et rares sont les coupés 1200 S dans leur strict état d'origine. Sinon les mécaniques sont très fiables, les boîtes également sauf pour quelques synchros fragiles d'origine et le desserrage du couple conique. Les pièces se trouvent encore assez facilement, à des prix et qualités variables, d'où l'intérêt de se faire aiguiller par un club. La vidange moteur est à faire tous les 5.000 km et celle de la boîte et du pont tous les 10.000 km. Seule difficulté de nos jours : trouver quelqu'un qui saura régler les deux carbus double corps. Respectez bien l'intervalle des vidanges, et votre Simca 1200 S vous rendra bien du plaisir. Cela d'autant plus que les performances avec nos références actuelles nous paraissent bien maigres, mais à la conduite c'est tout autre chose !
PRODUCTION
Simca Coupé 1000 : 10.124 exemplaires
Coupé 1200 S : 14.741 exemplaires.
CARACTERISTIQUES TECHNIQUES
SIMCA 1200 S Coupé
MOTEURType : 4 cylindres en ligne, 8 soupapes
Position : porte-à-faux AR
Alimentation : carburateurs double corps Solex 35 PHH 5
Cylindrée (cm3) : 1204
Alésage x course (mm) : 74x70
Puissance maxi (ch à tr/mn) : 85 à 6200
Couple maxi (Nm à tr/mn) : 105 à 4500
TRANSMISSION
AR
Boîte de vitesses (rapports) : manuelle (4)
ROUES
Freins Av-Ar (ø mm) : Disques (221), étrier flottant monopiston
Pneus Av-Ar : 145 SR 13 (Michelin XAS)
POIDS
Données constructeur (kg) : 890
Rapport poids/puissance (kg/ch) : 7,6
PERFORMANCES
Vitesse maxi (km/h) : 178
400 m DA : 18"4
1000 m DA : 34"4
0 à 100 km/h : 11"8
CONSOMMATION
Moyenne (L/100 Km) : 7,5
PRIX NEUF (1968) : 14.400 FF
COTE (2012): 12.000 €
PUISSANCE FISCALE : 7 CV
CONCLUSION
Conçu dans la tempête, le Coupé 1200 S, malgré les efforts de Simca et des débuts prometteurs en terme de vente, connut une carrière en demi teinte. La commercialisation des Matra 530 par le réseau Simca à la fin des années 60 achèvera certainement sa carrière sur un marché devenu très concurrentiel. Avec ses puissances de 80 à 85 ch DIN, il constitue aujourd'hui un bon investissement en collection et offre un niveau de performances et une polyvalence toujours séduisants. On peut aussi en apprécier le comportement, très typé, de tout à l'arrière !
Ligne signée Bertone
4 places
Moteur de caractère
Boîte bien étagée
Comportement "sportif"...
Corrosion endémique
Performances dépassées
Freinage (premiers millésimes)
Réglage des carbus délicat
Consommation
Nos remerciements aux membres du forum Simca-Bertone qui ont validé cet article avant sa parution.
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J'ai possédé successivement les deux évolutions de la "1200 S". La première, avait une grosse déficience de freinage (pas d'assistance) et m'avait un jour obligé à finir dans les portes arrières d'une bétaillère! Une petite année plus tard, elle a carrément finit à la féraille : la jeune fille à qui je l'avait revendue, quelques jours après l'avoir acquise, n'a pas réussi à freiner suffisamment avant une flaque d'eau et a terminé au fossé après un bel acquaplanning! (peu de poids sur l'avant) La seconde, beaucoup plus agréable avec son toit de vinyl noir, ses dossiers inclinables et surtout une agréable direction à crémaillère et, enfin, des freins assistés. Par contre le supplément de puissance n'était que peu perceptible. Ces voitures, pour l'époque, étaient très vivaces et très agréables à conduire avec un bon rapport qualité-prix, Je me souvient d'un temps de 2 h 21 min pour faire les 406 km de Charnay-lès-Mâcon, "la Coupée" â Vincennes, devant le château soit plus de 172 km/h de moyenne !!! Des chiffres du passé (années 1975) plus possible maintenant avec notre 130 sur autoroute ! Cela faisait quand même une bonne heure de gagnée par rapport à ce que serait le même trajet actuellement !(réflexion à avoir sur l'accenditologie due à la fatigue). Le réservoir d'essence de 45 litres était un peu juste, plein au départ du trajet précédent et pratiquement vide ä l'arrivée, ce qui ne faisait qu'à peine plus de 11 litres au cent, grâce à l'excellent Cx .(pied à "la planche" pratiquement tout le long, doublé par de rares Porsche ou quelques encore plus rares BMW). Par contre réglages des carbus très délicats (que je faisais moi-même à l'oreille et à l'aide d'une feuille de papier à cigarette), depuis qu'un mécano incapable de les régler après les avoir démontés pour me changer les bougies m'avait fait grimper la consommation à presque 18 litres aux cent hors autoroutes !!! Il est vrai que le nécessaire changement fréquent des bougies n'était pas très commode ! Autre point de fragilité :le risque de formation de poches d'air dans les deux longues durits qui passaient sous le plancher jusqu'au radiateur avant qu'il fallait parfaitement purger sinon risque de surchauffe immédiate. Les bas de caisses étaient très sensibles au salage des routes et lorsque mon concessionnaire ex SIMCA me l'a reprise pour en faire une voiture de collection, il a dû les refaites intégralement. Dans l'ensemble il me reste le souvenir de sensations que nul ne pourra plus jamais ressentir maintenant sur routes ouvertes.