© L'AUTOMOBILE SPORTIVE (31/01/2009)
CHALLENGER !
L'histoire des " petits " constructeurs de sport semble
se répéter. Alors sous-traitant de talent pour les
équipements télématique embarqués dans
l'automobile, Paragon dirigé par Klaus Dieter Frers va aller
jusqu'au bout de sa logique et sa passion : construire sa propre
voiture de sport. Ainsi est née l'Artega GT qui vient ajouter
un modèle sportif de plus dans le catalogue des constructeurs
allemands. Mais attention, n'imaginez pas que l'Artega est une production
artisanale bricolée. Bien au contraire, sa présentation,
sa conception, ses prestations et les ambitions de son géniteur
laisse augurer un bel avenir et une sacrée concurrente pour
Porsche, Audi et consorts. L'Artega est même importée
en France, c'est dire de la motivation de la petite marque !
Texte : Gabriel LESSARD
Photos : D.R.
Klaus Dieter Frers a créé Paragon il y a près
de 20 ans pour devenir sous-traitant des constructeurs automobiles
en matière de télématique (comprenez les équipements
électroniques de confort et de sécurité dans
l'habitacle). En 2003, afin de mettre en valeur ses dernières
innovations et mieux faire découvrir sa marque auprès
du grand public, il cherche un constructeur disposé à
lui laisser carte blanche dans l'habitacle. Devant le refus des
constructeurs, il lança finalement lui-même le projet
avec sa propre voiture. Mais pas question de préparer une
voiture vitrine à la va-vite. Au contraire, notre homme va
s'entourer des meilleurs ou presque pour garantir le succès
dans le résultat final. Il faut dire que déjà
habitué à piloter ses Porsche de course, notre homme
sait ce qu'une voiture sportive doit offrir comme prestations. En
2005, Henrik Fisker est mandaté pour le design, de nombreux
composants proviennent des équipementiers les plus réputés
(Brembo, Bilstein, Recaro, Paragon
) tandis que Karl-Heinz
Kalbfell est recruté pour orchestrer la stratégie
de développement international de la marque. Si son nom vous
est inconnu, il a déjà travaillé avec succès
pour des marques de renom aussi variées que BMW, Rolls-Royce et Maserati.
En 2008, la commercialisation démarre, et ce sont déjà
170 exemplaires qui sortent de l'usine flambant neuve de 4 000 m2
située à Delbrück en Westphalie (Allemagne).
Tout est fabriqué sur place et le rythme prévu en
année pleine est de l'ordre de 500 exemplaires. Les contrats
avec des importateurs de tous continents sont en cours de signature,
mais la France possède déjà un distributeur
officiel (Chassay à Tours). Cocorico ! Impossible des lors
de passer sous silence l'émergence de cette étonnante GT qui va marquer les esprits et bousculer
les ténors de la catégorie (Porsche
Cayman S, Nissan 350Z, Lotus Europa S, Audi
TTS,
).
DESIGN
Quel passionné de voiture de sport ne connaît pas le
designer Henrik Fisker ?! Ayant précédemment uvré
avec succès chez Aston
Martin, il parti ensuite créer son propre studio de design
indépendant avec diverses réalisations à son
actif dévoilées lors des différents salon.
Avec la demande de Klaus Dieter Frers pour donner un visage à
l'Artega GT, le designer danois a du s'acquitter
de sa tâche en tenant compte des dimensions particulières.
Avec près de 4 mètres de long, mais une largeur de
1,88 mètres, les proportions de la petite GT de Delbrück
ne sont pas banales et contribuent à lui donner une personnalité
bien à part. Très agressif, son design suggère
la puissance et le dynamisme. Puissance par la forme des blocs optiques
et des prises d'air grillagées comme sur les Lamborghini
Gallardo, et dynamisme par cette chute de rein au niveau de la porte
sur son profil qui fait remonter son postérieur. Ailes bien
échancrées et galbées, le charme opère
et la GT semble irrésistible. La poupe est réellement
une réussite et les blocs optique avec fond rouge et doubles
ronds enchâssés sont de toute beauté. Les sorties
d'échappement aux formes design encadrent la plaque minéralogique.
La découpe des vitres latérales rappelle celle des
Aston. Sacré Henrik ! Les grosses jantes au dessin des branches
altier de 19 pouces pose l'ensemble par terre et donne l'impression,
même à l'arrêt, d'une tenue de route terrible.
L'habitacle réserve une surprise par sa largeur aux coudes
agréable et bien vue. Malgré une faible hauteur de
l'Artega (1,18 mètres seulement !),
à l'intérieur on se sent à son aise. Le design
de la planche de bord est des plus classique avec une casquette
pour le bloc d'instruments, et une console centrale. Sièges
baquets Recaro mi-cuir, mi-tissu de série, volant trois branches
frappé du logo Artega, levier de vitesse cuir
La présentation
est simple mais moderne et très soignée.
VIE A BORD
Pour l'habitacle
tout cuir, sièges compris, il faudra passer par la case des
options (3 250 euros). Ce qui retiendra surtout l'attention du conducteur,
et qui fait la fierté de son concepteur, ce sont les équipements
électroniques embarqués tout simplement bluffants,
et de série : climatisation automatique, système de
navigation GPS à écran tactile avec affichage dans
le rétroviseur intérieur, connexions (bluetooth, iPod,
audio auxiliaire), tableau de bord avec écran programmable
(pression d'huile, accéléromètre, chronomètre
)
Le tout de série ! Chez la concurrence c'est généralement
pas disponible du tout en contre de coûteuses options. Petit
bémol tout de même sur l'ensemble d'un seul tenant
tachymètre + compte-tours qui perturbe un peu l'il
à la consultation en roulant. Reste qu'à près
de 80 000 euros, l'Artega en donne pour son argent, surtout face
à sa rivale désignée de Zuffenhausen. En équipement
de série c'est pas "Cayman"
pareil
MOTEUR
Pas question pour Artega de concevoir sa propre mécanique.
Bien trop cher à assumer seul. Alors le plus simple est de
se servir chez un constructeur automobile, et en Allemagne ce n'est
pas ce qui manque. Le V6 3,6 litres à injection directe d'essence
du catalogue VAG est justement indiqué. Compact, très
moderne, coiffé d'une culasse à 24 soupapes, ce bloc
délivre 300 ch à 6 600 tr/mn et un couple très
copieux de 351 Nm à 5 300 tr/mn. Les accrocs de la pédale
d'embrayage en seront pour leurs frais puisque c'est toujours la
boîte d'origine de VAG, la DSG 6 rapports à double
embrayage, qui est de la partie. Mais les quatre premiers rapports
sont plus courts pour garantir des accélérations et
reprises fulgurantes. Un choix imposé qui peut surprendre,
mais qui se justifie dans le cas de l'Artega pour permettre d'allier
sport et confort en fonction de l'usage du conducteur. Et puis,
avec cette absence de rupture de charge entre les passages des rapports,
l'Artega GT semble ainsi accélérer à l'infini
avec une vigueur et une sonorité sans égal ! D'ailleurs,
le chrono a tout juste le temps de s'arrêter lors du passage
à 100 km/h depuis l'arrêt avec moins de 5 secondes,
et la vitesse maxi s'établi autour de 270 km/h. Des performances
dignes d'une Porsche 997 Carrera S,
pourtant bien plus puissante
L'Artega est un joli paradoxe
puisqu'elle arrive à concilier souplesse et confort de conduite
par l'onctuosité de son V6 et la douceur de sa boîte
DSG en mode confort, et l'explosion de sport en mode Sport de la
boîte que vous pouvez piloter de l'accélérateur
et des doigts avec les palettes solidaires du volant. On comprend
mieux pourquoi, après les progrès enregistrés
par VAG sur sa DSG, que Ferrari soit passé à un tel système sur sa California,
et Porsche avec sa boîte
PDK sur sa gamme 997 et Cayman/Boxster.
CHASSIS
Très moderne et misant sur un poids réduit au maximum
("Light is right" disait Colin Chapman !), c'est
une structure en aluminium de type Spaceframe qui a été
élaborée. Dessus viennent se greffer les module arrière
et les arceaux en acier haute résistance. Toujours pour limiter
la prise de poids, la carrosserie est en fibre de carbone renforcée
avec des matériaux composites. Le résultat est à
la hauteur des espérances avec un poids de 1 128 kilos soit
plus de 200 kilos d'écart avec la concurrence directe. Seule
la Lotus Europa S tourne autour de la tonne en faisant mieux, mais
elle est beaucoup plus ascète en confort, équipements
et aspects pratiques que la GT allemande. D'ailleurs, ce poids est
d'autant plus exceptionnel de nos jours, que l'Artega GT embarque
un sacré paquet d'équipements de confort et sécurité
comme on l'a évoqué plus haut. Ses suspensions à
double triangulation comme sur les voitures de course, profitent
d'amortisseurs Bilstein et d'une suspension sport. Couplée
avec l'ESP et le contrôle de traction (TC), ces derniers sont
évolutifs en fonction du mode retenu. Lorsque le mode sport
est retenu, l'ESP intervient plus tard, et le contrôle de
traction se montre plus efficace. Les jantes sont généreusement
chaussées procurant à la GT un grip étonnant
avec du 235/35 ZR19 à l'avant et 285/30 ZR19 à l'arrière.
Ultra-basse (ce qui profite au centre de gravité), des voies
larges (1 534 mm AV et 1 570 mm AR), des porte-à-faux réduits
à leurs plus simple expression, le tout complété
par une direction assistée électromécanique
précise rend l'Artega très vive et communicative à
conduire. C'est net et précis, et malgré les 300 ch
sur les roues arrière, c'est sans mauvaise surprise que la
petite berlinette allemande mène le bal sur le ruban bleu.
Les freins sont confiés à un ensemble Brembo et des
disques ventilés avant et arrière. Les plus de 200
kilos d'écart avec la concurrence rapprochent ainsi plus
l'Artega des productions de Lotus en guise de conduite et sensations, tandis que sa polyvalence lui
permet de jouer sur tous les tableaux. Chapeau !
:: CONCLUSION
Une nouvelle GT est arrivée sur le marché, et le moins
que l'on puisse dire, c'est qu'elle mérite le détour.
Plus qu'une simple challenger, ou une production artisanale confinée
à l'anonymat, l'Artega GT semble oser le pari de combler
le vide laissé entre les Lotus Elise/Europa S et les Porsche
Cayman/Audi TTS. Un choix qui nous ramène des années
en arrière en matière de sensations, mais avec l'efficacité
d'aujourd'hui. Le tout pour un prix certes pas à la portée
de toutes les bourses, mais très cohérent et presque
bon marché face à la plupart de ses concurrentes.
Très sportive, mais prévenante à ses heures
perdues, agressive de ligne mais élégante et charmeuse,
ascète mais bien équipée, c'est presque la
quadrature du cercle qu'aucun constructeur n'arrive à réaliser.
Du sang neuf bienvenu donc qui prouve que tout est possible à
condition de le vouloir et ne pas jouer l'enfermement stratégique
de la course au volume imposant des choix consensuels pour ratisser
large. Une auto et marque à surveiller de près donc,
à la condition que les autres ne lui taillent pas des croupières.
Oserez-vous passer à l'acte ?
CE QU'EN PENSENT NOS CONFRERES :
"Si l'Artega exige du conducteur un instinct aiguisé,
elle lui offre en retour, une précision exceptionnelle, à
l'image de la direction électromécanique lui garantissant
une maniabilité hors pair. Nettement plus sportive que celle
du Cayman S, sa suspension à double bras préserve
un remarquable confort de roulement Jusqu'à 80 km/h, le conducteur
ressent les irrégularités de la chaussée, mais
à mesure que la vitesse augmente, l'Artega se fait de plus
en plus plaisante. A chaque virage prestement enroulé, le
conducteur se délecte de la stabilité du train arrière.
Son naturel résolument sportif distingue la nouvelle égérie
de Delbrück de la Diva de Zuffenhausen. Avec la boîte
en mode automatique, la GT perd un peu de son mordant pour se parer
des atours Grand Tourisme."
Driven - Janvier 2009 - Artega GT - Juergen Zoellter. |