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MASERATI MERAK (1972 - 1983)

maserati merak ss
© L'AUTOMOBILE SPORTIVE (12/06/2012)

ITALIENNE CHEVRONNEE

S’il y en a bien une qui illustre à elle seule l’histoire torturée de Maserati, c’est la Merak. Surnommée « mini-Bora » à cause de sa base commune d'architecture à moteur central arrière, elle profita du V6 - remanié - de la Citroën SM pour permettre à Maserati de disposer d’un modèle plus accessible. La Merak connut deux évolutions majeures pour autant de nouveaux propriétaires, dont la version SS que nous avons eu la chance de pouvoir essayer. Une vraie Maserati ou un modèle au rabais ?

Texte : Sébastien DUPUIS
Photos : Étienne ROVILLÉ

En même temps que celui de la GranTurismo MC Stradale, notre séjour à Modène s’est soldé par un autre essai. Beaucoup moins moderne celui-là puisqu’il s’agit d’une Merak SS. Maserati nous proposa cet essai pour illustrer les liens qui ont uni les français et les italiens pendant l’histoire de Maserati…

PRESENTATION

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Devant la nécessité d’accroître leurs ventes, les constructeurs de grosses GT n’ont d’autre choix que d’agrandir leur gamme en proposant des modèles plus abordables. C’est comme cela que Lamborghini présente en 1970 son Urraco, motorisée par un V8. Trois ans plus tard, c’est au tour de Ferrari de réutiliser la marque Dino, pour cette fois troquer le V6 contre un V8. La Dino 308 GT4 est née de cette nécessité de descendre en gamme. Entre les deux, Maserati combine l’architecture apparue sur la Bora et le V6 créé pour la Citroën SM pour sortir la Merak… C’est en 1972, après avoir été présentée au salon de Paris, que la Merak sortit des chaînes de production de Maserati, en complément du nouveau porte-drapeau symbolisé par la Bora. Le nom donné au "Tipo AM122" ne fait cette fois pas référence à un vent mais à une des étoiles de la constellation de la grande Ours. Comme sa grande sœur, son dessin est signé du centre Ital Design dirigé par Giugiaro. Les différences de style entre la Merak et la Bora sont minimes mais permettent néanmoins de bien distinguer les deux modèles qui reposent sur la même plateforme. Là où la Bora utilise une grande verrière pour héberger son V8, la Merak se contente de deux arcs-boutants pour simuler cette pente alors que sa ligne de toit s'interrompt pourtant brutalement derrière le cockpit. Une idée originale que l'on reverra plus tard sur la Lancia Beta Montecarlo, dessinée par Pininfarina. Sur la Merak, le toit n’est plus en inox comme la Bora, la partie arrière est découverte, et pour finir, les baguettes latérales ont disparu. Sur la face avant, on joue sur la nuance, avec une calandre qui troque ses deux encadrements chromés pour de simples bandeaux faisant office de pare-chocs.

HABITACLE

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A l’intérieur en revanche, Maserati nous avait habitué à bien mieux. Cantonné à des réductions de coûts par la maison-mère du Quai de Javel, on retrouve dans l’habitacle de l’italienne des éléments venus de chez Citroën. On peut immédiatement reconnaître le tableau de bord et l'instrumentation ovale héritée de la SM ainsi que son volant mono-branche particulièrement peu sportif ! Homologuée comme une 2+2, la Merak ne peut être considérée comme une 4 places. Ses places arrière sont bien moins accueillantes que celles de la 308 GT4 par exemple.

CARACTERISTIQUES


MASERATI MERAK / SS
v6 merak ss
MOTEUR
Type : 6 cylindres en V à 90°, 12 soupapes
Alimentation : 3 carburateurs double corps Weber 42 DCNF 31 ou 32 / Weber 42 DCNF
Cylindrée (cm³): 2965 / 2965
Alésage x Course (mm) : 91.6 x 75
Puissance (ch DIN à tr/mn ) : 190 à 6000 / 220 à 6500
Couple (mkg à tr/mn) : 26 à 4000 / 27,5 à 4500
TRANSMISSION
AR
Boîte de vitesse (rapports) : manuelle (5)
ROUES
Freins AV-AR (mm): Disques pleins (280/300)
Pneumatiques : 185/70 VR 15 X - 205/70 VR 15 X / 195/70 VR 15 X - 215/70 VR 15 X
POIDS
Poids à vide (kg) : 1420 / 1400
Rapport poids/puissance : 7,5 / 6,3
PERFORMANCES
Vitesse maxi (km/h) : 245
0-100 km/h :
0-1000 m DA : 29" /
CONSOMMATION
Moyenne constructeur (L/100 km) : 12
PRIX NEUF (1971) : 150.000 FF
COTE (2012) : 30.000 €
PUISSANCE FISCALE : 17 CV


MOTEUR

La Bora fut la première Maserati équipée d’un moteur central arrière. Il aura fallu le temps à Modène pour se décider à tester cette architecture mais beaucoup moins pour en rééditer l’expérience. La politique de partage des coûts se poursuit avec l’utilisation de la base mécanique de la Citroën SM. Fiscalité française pénalisant la SM et prestige obligent, la Merak se devait d’être plus puissante. C’est pourquoi, le V6, placé en position longitudinale, fut réalésé à 2965 cm3 à partir du 2.7 de la française. Dans cette configuration, le bloc C114.50.30 revendiquait 190 chevaux et 255 Nm, des valeurs encore un peu justes pour un constructeur tel que Maserati. La vitesse maximale annoncée à 240 km/h semblait un brin optimiste, en partie à cause de son médiocre Cx. Non, aucun rapport avec la Citroën ! Blague à part, le V6 3 litres finit par être implanté sous le capot de la SM, pour sa version destinée à l’exportation, notamment les Etats-Unis. La conception de ce V6 fait aussi encore l’objet de controverses, les historiens se battant sur ses véritables origines. Il est clair qu’il ne s’agit pas du V8 de l’Indy amputé de deux cylindres. L’hypothèse la plus plausible reste l’utilisation d’un V8 issu d’un ancien projet d’Alfieri. Il faut dire que Citroën lui mit la pression pour concevoir un V6 dans un laps de temps record. L’angle d’ouverture particulier de 90° est une résultante de cet héritage. Techniquement, ce six cylindres repose sur un vilebrequin à quatre paliers et sa distribution par chaîne se fait par deux doubles arbres à came en tête. La commande de distribution est placée juste derrière la première paire de cylindres. L’alimentation se fait par l’intermédiaire de trois carburateurs Weber 42DCNF et ceci jusqu’à 1983, date d’arrêt de sa commercialisation. La SM finira par connaître une évolution à 3 litres et même une version à injection. Chose qui n’arriva jamais en Italie puisqu’entre temps, les chevrons avaient abandonné le trident… Citroën eut quand même le temps d’imposer une transmission mécanique maison, à cinq rapports, déjà vue sur la Lotus Esprit.

SUR LA ROUTE

essai maserati merak

A l’installation à bord, ce qui frappe en premier lieu est l’assise basse et la position de conduite moyenne. Les premières manœuvres sont délicates à cause du manque de visibilité à l’arrière. Par rapport à la Bora, la Merak dispose d’une meilleure répartition des masses et le V6, relativement léger, allège l’essieu arrière. L’important gain de poids par rapport à la Bora est un autre plus, même si les performances pures sont en baisse. Le freinage à quatre disques ventilés y gagne et se révèle même excellent. La direction « made by » Citroën demande un temps d’adaptation pour les non-habitués et reste, dans tous les cas, trop floue et surassistée. On retrouve les suspensions indépendantes de la Bora, doublés d’amortisseurs hydrauliques et de barre anti-roulis, à l’avant comme à l’arrière. Le comportement routier est très sain. Moins pointue que la Bora, la Maserati Merak peut aussi se montrer joueuse lorsqu’on lui le demande. Une Merak SS pouvait ainsi accrocher les 240 km/h avec une étonnante aisance. Un léger sous-virage et une prise de roulis, des amortisseurs et ressorts datés ternissent le tableau. Du moins pour nous, habitués aux sportives modernes…

EVOLUTION

Ayant mené grand train et accumulé les dettes autant que les échecs commerciaux, Citroën ne pouvait plus faire face financièrement à toutes ses dépenses. Le choc pétrolier de 1973 sera l'élément déclencheur d'une rapide chute des ventes qui conduit à la faillite de la société d'André Citroën en 1974. Michelin, actionnaire majoritaire de la marque, envisage alors de la vendre à Fiat, qui augmenta considérablement sa participation sans jamais parvenir à la majorité et donc au contrôle de Citroën. Le gouvernement français, pour sauver ce fleuron national déchu et éviter son rachat par les italiens, demande à Peugeot d'absorber la marque. C'est chose faite en décembre 1974. Le regroupement donnera naissance à PSA Peugeot-Citroën en avril 1976. Malgré les difficultés de Citroën, en mars 1975, la Maserati Merak SS (Tipo AM122/A) est introduite au salon de Genève. La grille noire insérée entre les phares escamotables permet de distinguer la nouvelle Merak SS de la précédente version dont la production est définitivement arrêtée. Le moteur n'est que très peu retouché, mais le V6 3.0 avec une admission optimisée et un taux de compression plus élevé affiche 220 ch à 6500 tr/mn. Le 22 mai suivant, un événement bouleversa toute la production et l’avenir même de Maserati fut compromis. Peugeot supprima sans ménagement tous les projets Citroën non rentables. Sans trop avoir d'autre choix, Citroën mit alors en liquidation Maserati. En août, la GEPI - une société d'état destinée à recueillir les entreprises en difficulté - reprit 70% des parts de Maserati, en laissant 30% à Alejandro DeTomaso qui fit rapidement le ménage. Alfieri, jugé trop proche de Citroën, fut viré après 20 ans de service dans la maison. Il ne tarda pas à retrouver du boulot, non loin de Modène puisqu’il travailla sur la Lamborghini Countach 5000S. Le départ de Citroën aboutit à de nombreuses modifications de la Merak SS par rapport au concept de Paris. Tous les éléments Citroën furent supprimés, y compris la boîte manufacturée par ZF. Le différentiel autobloquant vient lui aussi de ZF et les suspensions avant et arrière sont à ressorts hélicoïdaux et barre stabilisatrice. Le diamètre des freins passe à 280 et 300 mm. Dans la foulée, Maserati a également remplacé toute la partie haute de la planche de bord pour quelque chose de beaucoup plus classique. Le poids est parallèlement à la baisse de plusieurs dizaines de kilos grâce à l'abandon de divers systèmes hydrauliques mais malgré tout, la Merak reste encore trop lourde pour offrir des performances digne du blason Maserati. La Merak SS est à la fois la version la plus puissante et la plus diffusée. Sur les dernières années de production, dont fait partie la Merak SS noire de notre essai, la planche de bord de la Bora est intégralement reprise.

maserati merak 2000gt catalogueMERAK 2000 GT (1977-1983)
Alors que Maserati avait déjà développé sa version plus économique de la Bora, le nouveau patron Alejandro De Tomaso imagine une version spécialement conçue pour le marché italien afin d'en booster les ventes. Durement taxées par une TVA de 39%, au lieu de 19%, les voitures de plus de 2.0L de milieu de gamme trouvent en effet difficilement preneur. La Maserati Merak 2000 GT (Tipo AM122/D) fut mise au point dans cette optique, avec un V6 ramené à 1999 cm3. Extérieurement, cette version se singularise de la Merak SS par ses bandes noires adhésives latérales. Seulement deux couleurs sont proposées : un bleu métallisé et un beige doré. La Merak 2000 GT ne trouva que 200 acheteurs, la faute à des performances vraiment trop justes. Dommage car avec 170 ch, le rendement du 2 litres était excellent pour un moteur né à la fin des années 70. Mais plus que sa puissance, c’est son couple de 186 Nm qui était insuffisant pour le poids. Un prototype équipé d’un Turbo fut testé, sans suite commerciale. Il est visible au musée Panini. La transition est toute trouvée avec la Maserati Biturbo. L’architecture globale du V8 ouvert à 90° est en effet commune mais tout le reste est différent : distribution à l’avant du moteur et par courroie, un seul arbre à came par banc de cylindres et 18 soupapes pour la Biturbo…

ACHETER UNE MASERATI MERAK

Contrairement à la croyance générale, les Maserati classics se révèlent plutôt fiables. Les principaux problèmes venant des éléments Citroën… Contrairement aux anciennes classics, la Merak a un talon d’achille de taille… son moteur. Là où les V8 sont increvables, le V6 sur la Merak a le même défaut que sur la SM : sa chaîne. La chaîne primaire entraîne les quatre arbres à came, un alternateur, une pompe à eau haute pression et un compresseur de climatisation. Tout ceci n’était pas prévu quand Alfieri conçut son moteur. Sur un des AC, la chaîne secondaire n’entoure pas suffisamment le pignon. Un décalage peut se produire au niveau de l’AC si la chaine se détend. Ce problème de chaîne qui se détend interdit tout frein moteur et demande un contrôle régulier. Plus grave, les soupapes inclinées à 45° peuvent être menacées. La Maserati Merak est avec l’Indy et la Kyalami la classique qui cote le moins. On en trouve autour de 25.000 €, selon l’état de la voiture. C’est le bon moment pour en acheter car sa cote est appelée à monter…

PRODUCTION MASERATI MERAK
Merak (1972-1974) : 630 exemplaires
Merak SS (1975-1983) : 1000 exemplaires
Merak 2000 GT (1977-1983): 200 exemplaires
Total : 1830 exemplaires

CONCLUSION

:-)
V6 central arrière
Son sympa !
Comportement routier
Design
Version SS à conseiller
Encore abordable
:-(
Fiabilité mécanique
Finition
Fausse 4 places
2000 GT peu intéressante

Bien que moins prestigieuse que ses ancêtres, la Maserati Merak n’en est pas pour autant inintéressante. Si vous avez le choix, optez pour la Merak SS. Son moteur placé à l’arrière en fait à lui seul une Maserati à part. Du fait de sa cote encore très abordable, elle peut même devenir un investissement fructueux sur le moyen terme, comme l’a récemment été la Mistral. Attention toutefois à son capricieux V6…

PHOTOS


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