© L'AUTOMOBILE SPORTIVE (08/12/2009)
LA MITSUBISHI QUI VALAIT 3000 YENS
Face à la Mitsubishi 3000 GT la concurrence était rude,
aussi bien les Européennes avec la Porsche 911, Bmw M3, que les
Japonaises Honda Nsx, Subaru Impreza … Le vieux continent très attaché
à l'image de la marque n'offra pas un terrain propice à sa commercialisation.
Mais pour moi un rêve d'enfant allait enfin devenir réalité et les
yeux aussi bien que les oreilles vibrent encore de cette sulfureuse
rencontre...
Texte :
Jérôme TORDJMAN
Photos : D.R.
Sortie en 1991 la Mitsubishi 3000 GT connut une brillante carrière aux Etats-Unis et au Japon, respectivement sous le nom de Dodge Stealth et Mitsubishi GTO, où elle vogua de restylage en restylage (1994 puis 1997), jusqu'à l'année 2001. Ses concurrentes désignées au Japon sont les Mazda RX-7, Nissan 300ZX, Skyline GT-R et la Toyota Supra. En Europe, la tâche s'annonce plus délicate entre les étalons du moment que sont la Porsche 911 type 964 (puis 993) et la Bmw M3 e36 qui va bousculer la catégorie. Commercialisée en France et en Europe sous le nom de Mitsubishi 3000GT VR-4, la bête restera méconnue et achèvera sa carrière européenne brusquement en 1997. Pourtant elle avait tout pour elle sur le papier : un design agressif, 4 roues motrices, un bagage technologique à faire pleurer Monsieur Spoke et un moteur développé pour la compétition.
PRESENTATION
Au premier coup d'il
on ne peut se tromper, cette voiture est une véritable GT.
Centre de gravité au ras du sol, jupe et bas de caisse, aileron
de bonne dimension, prises d'air multiples et 4 sorties d'échappement
pour cracher les flammes du V6 biturbo. Le design est inspiré du concept car Mitsubishi 3000 GT HSX présenté en 1989 au Tokyo Motor Show dont elle reprend au lancement le principe de phares escamotables. La 3000 GT est longue 4m60
soit presque la même taille qu'une berline Peugeot 405, 1m84 de large, 1m20
de haut et un empattement de 247 cm avec des jantes de 17 pouces en 225/50
à chaque extrémité.
HABITACLE
On ne dit pas monter dans
une 3000GT mais descendre dans une 3000GT. Les sièges en
cuir très bas, les vitres étroites et
inclinées donnent une sensation de confinement et de sécurité.
Le réglage de la position de conduite s'apparente plus à
la correction d'un matelas électrique que d'un siège.
Allongé, on regarde le tableau de bord typé Boeing
747 ou trône une multitude de cadrans et de voyants (manomètre
de pression du turbo et d'huile, position confort ou sport de la
suspension pilotée,
), la climatisation automatique
(à écran LCD), les commandes de l'aileron et du spoiler
(à réglage électrique), le système de
cruising ; et pour finir des plastiques granuleux grisâtres
et des comodos noirs brillants indignent d'une voiture de cette
catégorie. Le frein à main et la boite de vitesse
(au levier très court) sont à proximité du
volant et annoncent un réel plaisir de conduite. Les agencements
des différents matériaux sont corrects et l'ensemble
vieillit plutôt bien. Une remarque serait que l'ambiance austère
aurait réclamé un peu plus de personnalité.
MOTEUR
La base du moteur de la 3000GT est le V6 3L ouvert à 60°
déjà présent sur les Pajero ; adjoint de deux
turbos le couple grimpe à 410 Nm à 3000 tr/min et
la puissance autour de 300 chevaux. Cette base est depuis longtemps
éprouvé, mais sa longévité sera fonction
de l'attention particulière qu'on lui apporte.
La voiture est très bien insonorisée et elle
ne laisse rien transparaître de son tempérament. C'est
seulement en ouvrant la vitre que l'on entend au ralenti les feulements
du V6. Les deux turbos soufflent à basse pression (0,69 bars)
et n'émettent qu'un sifflement léger même lors
des montées en régime. C 'est à ce moment que
le V6 dévoile toute sa hargne, au-dessus de 3000 tours/min
la tonalité passe du grave au métallique. L'enchantement
des oreilles est aussi du au système d'échappement
dynamique qui n'ouvre les 4 sorties qu'au-dessus de ce régime.
SUR LA ROUTE
La Mitsubishi 3000 GT est une voiture puissante ; avec plus
de 300 chevaux et un 1000m DA en 26 secondes on se place directement
dans le monde des GT. Mais la puissance n'est rien si on ne peut
la contrôler et son châssis a été particulièrement
bien étudié. Ainsi au 4 roues motrices, s'ajoutent
4 roues directrices et deux DGL (Différentiels à Glissement
Limité), un central et un à l'arrière. De plus
l'électronique est omniprésente. On trouve sur le
véhicule une suspension pilotée, un anti-patinage,
et différents capteurs utilisés pour déterminer
l'angle de braquage des roues arrières. Ces capteurs se basent
sur un système qui évalue le niveau d'adhérence
du sol, l'angle de braquage du volant, l'accélération
tangentielle appliquée à la voiture et l'état
des suspensions.
La 3000 est typée propulsion, la répartition
de la puissance se fait 55% sur le train arrière 45 à
l'avant. Sous la pluie aux limites du véhicule et ceci malgré
les quatre roues motrices on peut sentir le train arrière
s'échapper et enrouler les virages. La voiture devient joueuse
et mieux vaut avoir son brevet de pilote pour réussir à
gérer les transferts de masse du mastodonte. Sur le sec la
tenue de route est très saine, le mode sport affermit les
suspensions et permet à la voiture de virer quasiment à
plat. Sur autoroute elle est divine à partir de 80 Km/h l'aileron
s'incline de 14° et le spoiler avant s'abaisse pour plaquer
la voiture au sol.
Un seul point noir à ce tableau le système
de freinage. Les disques ventilés sont de bonne dimension
mais l'auto accuse 1700Kg sur la balance. Autant d'énergie
cinétique à absorber par les pneumatiques et les étriers
4 pistons à l'avant et 2 à l'arrière. Sur circuit, tous ces défauts sont évidemment amplifiés et comme nous avons pu nous en rendre compte sur le circuit de magny-cours, le poids met les freins totalement au tapis lors d'une journée de roulage. Par ailleurs, les pneus sont eux aussi très sollicités et avouent leur raz-le-bol par un souvirage marqué et une usure rapide. De toute façon, il est impossible de faire décrocher l'arrière de la voiture, y compris en surjouant du transfert de masses, donc tout pilotage "fun" ou "artistique" est à proscrire au volant de la 3000 GT. Très rigoureuse et un peu avare en sensations, la grosse Mitsubishi est une GT qui pourra donc décevoir les amateurs de sportives de caractère rebelle.
ACHETER UNE MITSUBISHI 3000 GT VR4
Les moteurs Mitsubishi ont été élus plusieurs
années de suite, parmi les plus fiables au monde donc ne
vous étonnez pas de voir des 3000 GT dépasser les
150 000 Km sans un problème grave. Aujourd'hui ces modèles se trouvent en occasion pour des budgets parfois très alléchants entre 7 et 20.000 €. Le prix des pièces
et quant à lui à la Japonaise, c'est à dire
cher. Un moyen permet pourtant de faire des économies ce
sont les achats par Internet en provenance des Etats-Unis.
L'entretien est le maître
mot que doit apprendre son conducteur. Avant
d'acheter une 3000 GT il faut penser à l'entretien, le moteur
doit être vidangé tous les 7500 km avec une huile 100%
synthétique type 5W40 ou 10w40. Les grosses révisions
tous les 40 000 kilomètres sont obligatoires, mais la facture
reste "raisonnable" (3000€) par rapport aux
sportives type Porsche ou Ferrari
Les blocs moteurs sont
d'une fiabilité impressionnante (distribution 90 000 km) mais
vérifiez toujours le kiloémtrage du véhicule convoité. Les modèles
français sont à privilégier par rapport aux
modèles importés (Etats-Unis, Allemagne, Pologne...) dont le passé n'est parfois pas clair ou falsifié.
A noter que les moteurs américains, même s'ils sont siglés
Mitsubishi, ont été assemblés par GM !
Le gros problème des 3000GT a été sur tous
les modèles sa boite de vitesse si elle a été
malmenée. Vérifier qu'elle ne se bloque pas, ne craque
pas, les rapports sont fermes mais doivent bien se verrouiller. Le fabricant Getrag par
soucis de compacité et d'économie a diminué
la taille de la boîte appartenant originellement à
la Mitsubishi Eclipse (modèle seulement présent aux
EU). Pour cela Getrag a supprimé certaines pièces
et aminci d'autres, conséquence pour une mécanique
susceptible d'être soumise à 410 Nm de couple ; une
usure prématurée si l'on conduit très sportivement.
Pour en rajouter encore Getrag refuse de vendre les pièces
détachées pour réparer et oblige les garages
à effectuer un échange standard pour la modeste somme
de 3000€
L'autre problème connu est au niveau
des disques de freins. Lors des freinages violents, si les disques
ne sont pas déjà montés en température,
ils ont tendance à se voiler.
Pour les séries de 1992
à 1995 les modèles Phase 1 de la 3000 GT connurent
aussi quelques problèmes de fiabilité au niveau de
l'électronique. De 1995 à 1996 les deuxièmes
séries du premier modèle gagnèrent en fiabilité
et en options (lave phare,
). A partir de 1996 la caisse fut
restylée (phase 2 : spoiler avant, feux cristaux et l'arrière)
et gagna une boite 6 vitesses Getrag encore plus fragile...
PRODUCTION MITSUBISHI 3000 GT
3000 GT VR-4 Coupé : 15539 exemplaires
3000 GT VR-4 Spyder : 877 exemplaires
TOTAL 3000 GT (toutes versions) : 86151 exemplaires
:: CONCLUSION
Finalement on regrette que cette jolie bête n'ait pas rencontré
son public, son agressivité affirmée, sa tenue de route redoutable
et son moteur envoûtant font presque oublier ses défauts ; son poids
considérable, son freinage peu endurant et ses plastiques " originaux
". Sa consommation quant à elle est importante en conduite sportive
mais en définitif normale au vu des caractéristiques de la voiture.
On se demande alors pourquoi fut-elle boudée pendant toutes ces
années ? Son prix peut être (450000 FR) ? Sa finition ? Le manque
d'image de la marque ? Quoi qu'il en soit aujourd'hui la Mitsubishi
3000 GT est une occasion en or ! Performante, bon marché, elle est
très fiable. |