PORSCHE 911 (993) Carrera RS (1995 - 1996)
L'HERITIERE
La Porsche 911 a depuis les origines été déclinée comme une véritable gamme. Une stratégie qui lui a permis tout au long de sa carrière de s'offrir quelques facéties avec des versions en marge de celles assurant le gros des ventes. La génération 993 étant parfois considérée comme la dernière "vraie" 911 (comprendre à air), il serait impossible de passer sous silence l'héritière la plus pure des gènes sportifs de la marque : la Carrera RS...
Texte :
Sébastien DUPUIS
Photos : Étienne ROVILLÉ
Une Porsche sportive, cela sonne à première vue comme un pléonasme... mais le Cayenne nous a brillament démontré le contraire. L'histoire des 911 sportives commence donc en 1973 lorsque Porsche réalise pour les besoins de la compétition sa première RennSport, la Carrera 2.7 RS. Produite à 500 exemplaires, initialement pour se conformer au règlement, son succès est tel que le volume final est trois fois supérieur aux prévisions. Ce monument de l'automobile, adulé par tous les passionnés de sportives, reste le plus beau patrimoine vivant de la marque. Vivant oui, au point qu'il est inconcevable de ne plus trouver de version RS au catalogue de la 911 ! Produite à près de 2000 exemplaires, la 964 RS reprend l'affaire à son compte en 1991 après une période d'oubli. Elle renoue alors avec l'esprit de la mythique 2.7 RS et son succès est immédiat auprès des puristes. La légende renaît et cet esprit compétition, savamment entretenu par un marketing avisé, continuera de se perpétuer de génération en génération et ce, jusqu'aux dernières 997 GT3 RS 3.8 et 4.0. Entre temps, la 993 RS vient apporter un peu de souplesse au concept...
PRESENTATION
L'apparition de la génération 993 en 1993 conduit Posche à revisiter sa 911 Carrera, pour les mêmes fins de compétition. Une obligation sportive qui s'accompagne donc, une nouvelle fois, d'une version routière produite en petit nombre et baptisée RS. La 911 Carrera RS type 993 fait sa première apparition au salon d'Amsterdam en janvier 1995.
Au premier coup d'oeil, cette RS impose un style plus musclé que celui de sa devancière. S'il reste relativement sage en version standard, il devient carrément bestial sur la Clubsport, parée de son monstrueux aileron de 993 Carrera Cup. D'origine, l'appendice est plus sobre et consiste en un aileron plat monoplan rappelant celui des premières 911 Carrera RS 3.0. Parfois invisible, la chasse aux kilos - indissociable du programme RS - passe par un capot en alu et des jantes 18" allégées, en deux parties.
HABITACLE
Livrée d'origine avec une climatisation et des sièges sport, la Porsche 911 RS type 993 ne renonce pas totalement à tout confort. La Clubsport laisse en revanche au vestiaire ces équipements en échange d'un arceau, de deux sièges baquets avec harnais et d'un extincteur. Le terme habitacle ne semble plus tellement approprié en parlant de la 993 RS Clubsport. Il s'agit là en effet d'un véritable cockpit, digne d'une voiture de course. La position de conduite n'est pas parfaite, mais on s'y sent tout de suite à l'aise, totalement calé dans le baquet. Les contre-portes simplifiées reprises à la 964 RS sont en revanche de série dans les deux versions, tout comme la direction assistée, mais la 993 RS Clubsport fait également l'impasse sur les vitres électriques de sa frangine. Bien entendu, pas de siège à l'arrière, ce qui exclut toute promenade dominicale en famille. Plaisir solitaire la 911 RS 3.8... Les moquettes sont affinées, tout comme les vitrages, ou même retirées dans le coffre.
En grapillant quelques isolants, on a redonné de la voix au moteur et contribué au régime minceur. Le Logo spécifique "Carrera RS" termine la signature visuelle sur le capot moteur. La contrepartie de l'effort d'allègement se mesure sur la balance avec un poids ramené à seulement 1270 Kg, soit une bonne centaine de moins que la 993 Carrera 2 standard.
MOTEUR
La base mécanique de la Porsche 993 Carrera RS est le bien connu 3.6 inauguré par la génération 964. Partant de ce bloc, Porsche réalèse le tout à 3746 cm3 (l'appellation 3.8 est donc inexacte...) par augmentation de l'alésage. Cette modification constituera l'option X51 pour les dernières 993 Carrera. Refroidi par air depuis 1963, le flat 6 Porsche conserve aussi ses deux soupapes par cylindre, ce qui n'en fait pas un modèle de modernité en 1995, notamment face aux 6 cylindres d'une Bmw M3 e36 ou d'une Honda NSX. Son rendement de 80 ch/L n'est d'ailleurs pas une valeur attendue sur une sportive de cette trempe. Mais ce serait oublier un peu vite deux choses fondamentales concernant ce moteur.
Tout d'abord, son exceptionnelle souplesse obtenue grâce à une valeur de couple élevée et à l'architecture boxer. 355 Nm, c'est déjà pas mal en soi, mais à 5400 tr/mn cela traduit en plus sur le papier un vrai caractère rageur. La poussée devient très franche entre 5000 et 6500 tours. La puissance retombe ensuite avant le régime de coupure à 6800 tr/mn. Le râle du flat 6, suave à bas régime et puissant à partir de 4000 tours, est toujours aussi formidable.
Côté modernisme, Porsche a adopté un rattrapage de jeu hydraulique des soupapes, contrairement aux 964 RS, ainsi que le système Varioram, système breveté par la maison mère, agissant sur la longueur des tubulures d'admission selon le régime moteur et permettant d'améliorer le remplissage d'air et donc le couple. Spécificité de la 993 RS Clubsport, elle ne possède pas de volant moteur bi-masse et se montre donc un peu plus brutale dans sa conduite, notamment en conditions urbaines (quelle idée me direz-vous que d'aller faire du shopping avec).
L'autre atout de la Porsche 911, c'est l'implantation de son moteur qui favorise comme aucune autre les accélérations. On se retrouve ainsi projeté à 100 km/h en à peine plus de 5" et les reprises sont tout aussi remarquables.
SUR LA ROUTE
La génération 993 apporte à la Porsche 911 une véritable (r)évolution au niveau des trains roulants et de son comportement dynamique, critiquable, il est vrai, sur bien des points. Le train arrière en aluminium à triangles superposés, constitue la principale nouveauté introduite sur la 993. Le but recherché est comparable à celui d'un essieu directeur, avec des épures permettant de générer de légers braquages lors des mises en appui et d'augmenter la stabilité et l'agilité. Plus large que la 964, la 993 RS est donc fort logiquement plus facile à emmener vite en courbes et plus efficace. Trop facile même, d'après les râleurs. Toujours est-il que face à nos sportives actuelles, on est loin de l'endormissement ! La direction assistée, qui ne gomme pas les sensations, se montre appréciable, surtout avec des boudins XL en 18". Appréciée, tout comme l'ABS qui permet de ne pas ruiner les-dits boudins sur un bout de ligne droite abordé avec trop d'optimisme. Heureusement, on peut aussi compter sur les freins. Reprenant la monte de la 993 Turbo, la RS enfile deux paires de disques ventilés en 322 mm et deux paires de pinces 4 pistons.
Une bonne nouvelle donc, d'autant plus que la 911 se conduit comme ça : en ignorant le panneau "frein" autant que possible ! Et ce n'est pas (seulement) pour épater les copains qui n'ont pas de 911. L'idée est d'emmener le plus tard et le plus loin possible afin de contrer le sous-virage induit par le gros sac à dos de 3.8L qui vous pousse aux fesses. Une fois l'avant inscrit, il suffit de laisser le popotin partir doucement (doucement j'ai dit...) en glisse pour enrouler la sortie du virage et repartir comme une balle un fois tout remis en ligne. Pas facile, la maîtrise d'une 911 sur un circuit. A fortiori d'une 911 sportive authentique comme la 993 RS. Elle réclame un temps d'adaptation plus ou moins long. Et pour certains, il est suffisamment long pour avoir envie d'aller voir ailleurs... Mais cette réticence naturelle à se dévoiler au premier venu est aussi ce qui rend la Porsche 911 si désirable, si unique et finalement si attachante. Ajoutant à ce mauvais caractère du châssis le vrai caractère de la mécanique, vous avez là sous les yeux ce qui constitue pour beaucoup de pilotes le must de la production automobile. Une voiture désirable et désirée, autant pour ce qu'elle est que pour ce qu'elle représente. La 993 RS y ajoute potentiellement la possibilité de se laisser conduire comme la voiture de tout un chacun ou presque, ce qui n'est pas le derniers de ses atouts.
CARACTERISTIQUES TECHNIQUES
PORSCHE 911 (993) Carrera RS
MOTEURType : 6 cylindres à plat, 12 soupapes, refroidi par air
Position : porte-à-faux AR
Alimentation : Injection électronique Bosch Motronic 2.1 + Varioram
Cylindrée (cm3) : 3746
Alésage x course (mm) : 102 x 76,4
Puissance maxi (ch à tr/mn) : 300 à 6500
Couple maxi (Nm à tr/mn) : 355 à 5400
TRANSMISSION
AR + autobloquant 40%
Boîte de vitesses (rapports) : manuelle (6)
ROUES
Freins Av-Ar (ø mm) : Disques percés ventilés (322/322), étriers 4 pistons + ABS Bosch
Pneus Av-Ar : 225/40 - 265/35 ZR 18
POIDS
Données constructeur (kg) : 1270
Rapport poids/puissance (kg/ch) : 4,2
PERFORMANCES
Vitesse maxi (km/h) : 275
1000 m DA : 23"7
0 à 100 km/h : 5"2
CONSOMMATION
Moyenne (L/100 Km) : 12
PRIX NEUF (1995) : 514.330 FF
COTE (2011) : 65.000 €
PUISSANCE FISCALE : 21 CV
CONCLUSION
:-) Collector Ligne sublime Flat "à air" au mieux de sa forme ! Fiabilité mécanique éprouvée Poids Freinage Résolument Sportive... |
:-( ... mais peut-être pas assez ? Version Clubsport rarissime Prix des pièces spécifiques Cote à la hausse Pourquoi elle n'est pas dans mon garage ? |
Produite à seulement 1014 exemplaires, la Porsche 993 RS est ce qu'on a coutume d'appeler un "collector". Son tarif s'en ressent et la flambée des cours des dernières 911 "à air" ne cesse de se confirmer un peu plus chaque année. Il y a donc fort à parier que ce modèle suive le même chemin que ses glorieux aînés. Même si sa relative facilité de conduite pourra l'éloigner des puristes, tous les autres verront au contraire en elle une formidable polyvalence doublée de performances canon. Une modernité non dénuée de sensations qui la rend donc particulièrement désirable.
Remerciements à Alex pour la présentation de sa Porsche 993 RS.