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AUX SIXTIES
Jusqu'ici, Smart
était pour le grand public un concept de mobilité. Objet culte pour certains (surtout
en Italie et en Allemagne), jouet inutile pour d'autres, force est de constater
que les Smart City-Coupé et City-Cabriolet, idéales en utilisation urbaine, ont marqué leur époque. Mais en 2002, grande nouvelle, Smart n'est plus un produit mais une marque qui développe et commercialise une gamme complète avec au programme un petit roadster et même une citadine quatre places
en préparation ! Les roadster et roadster-coupé vont remettre au goût du jour les petites sportives légères et pétillantes des sixties !
Texte : Gabriel LESSARD
Photos : D.R.
L'aventure Smart, fruit de l'association
entre Swatch de Nicolas Hayek (le "S" de Smart) et Mercedes-Benz (le
"M" de Mercedes-Benz), a longtemps amusé les observateurs sceptiques.
Certes, notamment en France, le démarrage de Smart a été
laborieux mais deux ans après son lancement, la marque va connaitre une croissance constante de
ses ventes, conduisant les responsables du projet à envisager d'ajouter d'autres modèles
dans sa besace. Première étape : encore plus de fun avec un produit
image, le roadster ! Si l'idée est lancée dès 1998, il faudra attendre le salon de Paris 2000 pour voir le premier prototype de cette nouvelle voiture plaisir, sous la forme d'un petit coupé à toit amovible, puis la présentation des modèles définitifs en 2002 à Paris. Disponible en deux variantes de carrosserie et avec deux motorisations, 82 ch
ou 60 ch, le roadster avait fait l'objet
de notre essai dès son lancement officiel en avril 2003. Mais deux ans seulement après son lancement et malgré un total de 43.000 exemplaires produits, soit bien plus que les premières prévisions, la carrière de ce pétillant petit roadster s'achevera prématurément sur l'autel de la rentabilité, laissant un goût amer à ses créateurs et à la tribu de passionnés qu'il a su rassembler autour de son concept novateur...
DESIGN
Lorsque les ingénieurs de Smart, encore appelé MCC
à l'époque, ont conçu les premières Smart, ils sont
partis d'une feuille blanche et ont pu essayer des solutions peu courantes. Ainsi,
le moteur était-il un 3 cylindres turbocompressé, placé en
position transversale arrière, la boîte, pour des raisons d'encombrement
était séquentielle à 6 rapports, la propulsion se faisait
par les roues arrière et toute la cellule centrale est baptisée
Tridion, car ultra-résistante et constituée de 3 métaux différents.
Les Smart roadster-coupé conservent le même esprit technique. Quelques
différences toutefois. Les roadster sont plus longs que les fortwo City-coupé car le moteur est plus gros et l'aérodynamique plus soignée. La problématique d'encombrement extérieur n'étant
plus la même sur les roadster, les designers ont pu travailler sans contraintes.
Il faut avouer que c'est plus facile de dessiner une auto lorsqu'un capot avant
est autorisé. Le résultat est très réussi, avec en
prime, deux autos avec deux esthétiques différentes. Soit un coupé
avec une bulle arrière, soit un roadster avec un capot arrière plat.
Si cela ne se voit pas très bien sur les photos, imaginez-vous, que le
Smart roadster est plus court qu'une Twingo RS, et vous comprendrez alors mieux
l'esprit mutin de ce petit coupé découvrable. La cellule centrale
Tridion grise est rassurante et imprime la marque de fabrique des Smart. Les panneaux
sont toujours en plastiques ("Body Panel") et sont interchangeables.
Les flancs travaillés intègrent des prises d'air du plus bel effet
et bien campé sur ses jantes alu, le roadster respire la sportivité
et la récréation.
HABITACLE
Pas facile de pénétrer dans le roadster Smart,
tant il est bas. Mais une fois assis, l'habitué des Smart des villes ne
sera pas dépaysé. L'habitacle surprend agréablement par son
habitabilité et sa luminosité, surtout avec le toit découvert.
La planche de bord reprend le même dessin que celle des Smart urbaines,
et les plastiques sont du même tonneau. Si les plastiques sont parfois légers,
l'ergonomie est très satisfaisante et le petit levier de la boîte
séquentielle tombe pile sous la main. Les sièges baquets possèdent
une coque dure et offrent un maintien suffisant. Pour avoir de nombreux équipements,
il faut avoir recours à la longue liste d'options. Dommage, tant l'esprit
général qui se dégage est fun !
MOTEUR
Le roadster Smart était la bonne surprise de l'année 2003 dans le
monde des sportives. Quoi ? 82 ch seulement pour une sportive ? Oui monsieur,
mais avec 815 kg seulement ! Et vous connaissez beaucoup de sportives dotées
d'une mécanique qui offre un rendement de 117 ch/litre ? Cela fleure bon
l'esprit des années 60 avec les petites Fiat boostées par Carlo
Abarth ou les MG Midget. Pour afficher un tel rendement, ce petit tri-cylindres de 0,7 litres est bien entendu turbocompressé (1 bar). Sa sonorité qui évoque celle du flat 6 Porsche
est amusante et agréable, ponctuée par les petits siifflements de la wastegate, on peut même croire que l'on roule à des vitesses supersoniques... mais en toute légalité.
Il est installé en position transversale arrière et est secondé
par une boîte de vitesse séquentielle à 6 rapports. Le sixième
rapport tire long, et si le cur vous en dit, vous pouvez même opter
pour le mode automatique. Sport ou confort, tel est le luxe que se permet ce petit
roadster ludique et très politiquement correct. D'autre part, le roadster Smart était une sportive écolo avant l'heure avec son poids réduit et son moteur "dowsizé" qui se contente en pratique de 5 à 7 litres de super 98 pour 100 kilomètres.
SUR LA ROUTE
Sur toutes les Smart roadster de présentation, les jantes montées
sont des Spikeline 16" chaussées en 205/45 mais la monte standard du roadster est en 185/55 R15 (hors séries limitées). Dès les premiers tours de roues, on regrette que la direction assistée gomme un peu les sensations au volant. Pour une fois, on se félicite donc qu'un tel équipement soit à choisir dans
le catalogue des options ! Mais globalement, on reste
tout émoustillé à l'idée de conduire cet engin. Assis
très bas, au ras du sol, on démarre le petit "moulin" avec la
clé sur la console centrale, comme sur les Saab. Les premiers tours de
roues donnent le ton. La sonorité est rigolote, l'amortissement est très
efficace et même confortable, et on se sent d'attaque pour l'arsouille sur
petites routes dès que l'huile sera chaude. L'huile est enfin chaude et
on monte les rapports jusqu'à 6 000 tr/mn. Dommage que les passages des
rapports soient encore trop longs, car l'idée de la boîte séquentielle
est très fun, et offre en outre l'appréciable avantage du tout automatique
lorsque l'on décide de laisser reposer tout pilote qui sommeille en nous.
Poids plume, propulsion, comportement de kart, tous les ingrédients sont
là pour une petite sportive vive et efficace. De virages en virages elle
virevolte et offre des sensations oubliées jusque-là. Aussi rafraîchissante qu'une 205 GTI 1.6 d'antan
à la différence près que la Smart, elle, est totalement soudée au bitûme ! L'autoroute n'est évidemment pas
son terrain de prédilection, le manque de puissance s'y fait vite ressentir. Mais le roadster Smart offre une polyvalence
appréciable. Nul doute en revanche, que si ici les 82 ch sont suffisant
pour offrir des sensations "sportives", le moteur de 60 ch est en revanche bien trop timide pour
ce Roadster, et n'aura pour objet que d'offrir une entrée de gamme à
prix abordable.
ACHETER UNE SMART ROADSTER
Une sacré bouille, un capital sympathie énorme et un caractère attachant, tel pourrait être résumé le roadster smart. Mais doit-on pour autant céder à ses sirènes sans retenue ? Pour acquérir la belle, la fourchette de prix semble désormais assez stabilisée en raison d’une quantité limitée de véhicules sur le marché (et pour cause on peut estimer à environ 5000 véhicules mis sur le marché français). Si les prix les plus bas ne semblent pas très raisonnables à la vue de la qualité des véhicules présentés, comptez environ entre 8 à 10.000 euros pour une version 82 ch (60 kw), et 10 à 15.000 euros pour les versions Brabus et Brabus Xclusive. Il est à noter que les versions coupés sont plus cotées, tandis que certaines options peuvent prétendre à un surcoût (pack sport, climatisation, régulateur de vitesse et hard top). Ne vous laissez pas leurrer par le surcoût revendiqué par un vendeur d’une série spéciale. La seule qui soit suffisamment pertinente à notre avis est la Brabus Xclusive en raison d’une finition nettement améliorée. Les roadster 82 ch Xclusive, mieux présentés certes, ne sont pas tous dotés, loin s’en faut, du pack Sport avec les palettes au volant. Si le prix d’achat devient donc très raisonnable pour un roadster plaisir qui distille autant de sensations, qu’en est-il de l’entretien ? Véritable talon d’Achille de cette usine à sensations, l’entretien reste exigeant avec une révision tous les 10000 km ou tous les ans. Les « gros rouleurs » apprécieront. Si vous êtes adeptes du carnet tamponné dans le réseau, les tarifs sont salés et font vite grimper la facture. Et que ce soit en smart Center ou dans le réseau Mercedes-Benz, dans les deux cas les prix des pièces sont très chers rapportés au prix de la voiture (le système d’embrayage « actuateur » revient à près de 600 euros la pièce complète, pare-brise à 500 euros….) tandis que la main d’œuvre est en rapport avec le prestige revendiqué par le groupe étoilé. Sans parler des pièces spécifiques Brabus (le pot à 2.000 euros la pièce !!) où on frise le scandale. Dans les bonnes nouvelles, le poids plume de l’auto lui permet d’être très économe en consommables (pneus, freins, amortisseurs) et aussi en carburant (autour de 7 litres en moyenne). Autre bonne nouvelle, si vous n’êtes pas spécialement attaché au carnet tamponné « constructeur » certains spécialistes smart se font fort de réparer et entretenir des smart à prix plus doux (notamment en taux de main d’œuvre). Globalement fiables si entretenus, les roadster smart peuvent dépasser allègrement les 100.000 km (attention à ceux reprogrammés mécaniquement). On notera quelques soucis d’étanchéité liés généralement à un défaut d’ajustement des joints de portes ou à des joints séchés et durcis par le soleil. Dans tous les cas des solutions existent et sont connus. Moins économiques qu’annoncés à l’usage, ce roadster reste l’un des plus attachants et un rapport prix/plaisir relativement rare sur le marché…
CHRONOLOGIE SMART ROADSTER
1999 : en septembre, exposition au salon de Francfort de la Smart Roadster Concept.
2000 : exposition au salon de Paris du concept car Smart Roadster-Coupé.
2002 : présentation en septembre au salon de Paris du roadster et roadster-coupé de série.
2003 : Le 11 avril, lancement officiel de la commercialisation. En septembre au salon de Francfort, série limitée "Bluewave" (500 exemplaires) qui bénéficie de nombreux équipements du catalogue Brabus. Toujours au salon de Francfort, lancement de la motorisation 61 ch sur le roadster. Premier prototype smart roadster Brabus V6 biturbo.
2004 : En janvier, série spéciale limitée "Affection" (1500 exemplaires). Cette série spéciale combine la motorisation 82ch avec les équipements de la version 61ch, agrémentée de quelques options. En mars, au Salon de Genève, présentation et lancement des versions roadster et roadster-coupé Brabus. En mai, série limitée Speedsilver (755 exemplaires en roadster uniquement).
2005 : Gamme améliorée avec le roadster et roadster coupé Brabus Xclusive 60 kW. En Novembre, la production des roadsters est stopée après 43.000 exemplaires produits.
2006 : En janvier, série limitée MTV (80 exemplaires) puis du roadster "Collector's Edition" symbolisant l'arrêt de la production du modèle et permettant d'écouler les stocks restants. En juillet, pour écouler ses derniers stocks restants, smart France commercialise la série Xclusive. En décembre, le consortium financier Project Kimber et DaimlerChrysler signent un accord concernant le transfert de licence du Smart Roadster et l’achat d’équipements de production. Le groupe britannique, qui a échoué au rachat de MG, souhaite débuter la production du Smart Roadster restylé durant l’été 2007 et le commercialiser sous le nom AC Ace SuperSports. Quelques croquis sont diffusés mais le projet restera finalement sans suite...
::
CONCLUSION
Quelle joie ce roadster ! C'est tout l'esprit des
roadsters et coupés des années 50 et 60, comme les Austin-Healey
Sprite, MG Midget et Triumph Spitfire, qui ressurgit avec bonheur. Technique originale
Smart, esprit et design fun et poids léger sont les composantes de ce coupé.
Si ici, ce ne sont pas les performances pures qui priment, Smart nous rappelle,
surtout en cette période de répression routière accrue, que
les sensations et le plaisir de conduite sont les premières composantes
de la passion automobile. Et si le look suit en plus, alors il ne vous reste plus
qu'à en trouver une ! |