AUDI RS5 (II) (2017 - )
Sortir des sentiers battus
La nouvelle Audi RS 5 Coupé (Type 5F) est le premier modèle Audi Sport. Et comme pour nous ramener aux origines du label RS, elle reçoit un moteur sur mesure conçu par les motoristes de Porsche et Audi réunis. Cerise sur les anneaux, la transmission quattro serait même enfin capable d'offrir un comportement sportif. Sérieusement ?
Texte & photos : Sébastien DUPUIS
Quattro GmbH n'est plus, l'entité historique des Audi sportives de route a été renommée Audi Sport GmbH en 2016 par Stephan Winkelmann, le temps de son passage éclair à la tête de la prestigieuse filiale d'Audi. Si l'enseigne n'est pas vraiment nouvelle en soi, elle n'officiait jusqu'ici que dans le sport automobile, avec les succès qu'on lui connaît, de la toute première Audi Sport Quattro aux non moins légendaires LMP1 qui s'imposèrent 13 fois aux 24H du Mans. De son côté, quattro GmbH ne travaillait que sur les modèles de route avec une production dédiée sur le site historique de Neckarsulm. En pratique, les changements sont toutefois relativement minimes, les deux activités restant complémentaires et indépendantes. Mais le rattachement des nouveaux modèles de route RS à Audi Sport est un symbole extrêmement fort. La RS 5 Coupé incarne cette renaissance et porte des ambitions nouvelles. Elle ne doit plus en effet se contenter d'être l'A5 la plus performante mais aussi influer un esprit nouveau, résolument plus... sportif.
PRESENTATION
Ecoulée à près de 13 000 exemplaires sur sa première génération (8T), la RS 5 est revenue au printemps 2017 avec l'intention de faire mieux dans tous les compartiments du jeu. Oubliez la trop discrète S4, voici la vraie méchante de la gamme ! Et cela commence par un look sérieusement bodybuildé. Les designers se sont paraît-il inspirés de l’Audi 90 quattro IMSA GTO mais avec, heureusement, un peu plus de finesse. On trouve donc des emboutis d'ailes avant et arrière spécifiques permettant à la seconde RS 5 (Type 5F) de gagner 15 mm en largeur de chaque côté par rapport à l'A5 Coupé. Le nouveau Coupé est aussi 74 mm plus long sur un empattement allongé de 15 mm et plus basse de 6 mm, ce qui se traduit par des volumes encore plus statutaires. Les larges entrées d’air avant sont pourvues de grilles en nid d’abeilles typiques des modèles RS. Cela se complète de multiples ouïes, tant à l'avant qu'à l'arrière, renforçant le côté bestial de la RS 5.
On peut regretter que certains artifices soient purement décoratifs mais il faudrait être de mauvaise foi pour ne pas reconnaître qu'au final, cette RS5 a une sacrée gueule ! Impression probablement renforcée par la couleur rouge Misano qui habille notre exemplaire d'essai et ses immenses roues de 20 pouces (19 en série). Les nombreux packs d'options jouant sur l’apparence permettent de personnaliser encore plus le véhicule, que l'on préfère le noir brillant, le carbone (y compris le toit à 4250 €.... qui permet d'économiser 3 kg) ou l'aluminium mat.
HABITACLE
A l'exception du logo RS frappé sur les sièges baquets, l'intérieur de la RS5 rappelle trait pour trait celui de la S4. Elément désormais incontournable des intérieurs Audi, le Virtual cockpit accueille le pilote avec un affichage "RS" fournissant les informations relatives à la pression des pneus, la puissance et le couple utilisés ou encore les forces G. La personnalisation RS se prolonge avec quelques touches de rouge sur les ceintures de sécurité ou encore les tapis de sol.
Haut de gamme, la finition fait aussi appel aux options pour renforcer l'ambiance sportive, avec du carbone notamment. Comme toujours, les ajustements sont impeccables et l'ergonomie quasiment parfaite, si ce n'est l'écran central multifonctions non tactile. Tout passe encore par la molette MMI touch qui prend un petit coup de vieux. Un petit bémol pour la note "technologique", si chère à la marque. Autre petit point de déception sur la finition, la banquette arrière n'est pas en cuir avec l'option sellerie cuir, mais en simili. Un peu mesquin...
MOTEUR
Roulant dans les pas de la BMW M3, l'Audi RS 5 abandonne à sont tour le V8 atmosphérique à haut régime pour un 6 cylindres biturbo. Moins enchanteur sur le papier, c'est une forme de retour aux sources si on se remet en tête le 2.7 biturbo de la première RS4 (B5). On pouvait cependant craindre que la RS5 devienne trop proche de la simple S5, elle aussi dotée d'un V6 biturbo, et perde en caractère autant qu'en exclusivité.
Dérivé du bloc en aluminium 3.0 TFSI de la S4, ce 2.9L porte la caution Porsche puisqu'il a été développé conjointement et équipe déjà la Panamera II 4S. On se demande d'abord : pourquoi réduire la cylindrée pour gagner en puissance ? "Less is more" disait Colin Chapman et, en l'occurrence, le nouveau V6 biturbo pèse 31 kg de moins que l'ancien V8. Mais la course réduite des pistons permet principalement d’augmenter le rapport volumétrique - lequel atteint ici 10:1 - par retardement de la phase de compression, tout en favorisant le régime maxi et donc le gain de puissance. Pour un meilleur temps de réponse, les deux turbocompresseurs, capables de souffler à 1,5 bars au maximum, sont positionnés entre les bancs de cylindres et le flux d’air passe par un système à double tubulure d’admission.
Au final, avec une gestion spécifique Audi Sport, le V6 2.9 TFSI fournit 450 ch dès 5700 tr/mn et jusqu'à son régime maxi de 6700 tr/mn, fait assez rare. Le couple n'est pas en reste et atteint 600 Nm, soit 170 Nm de plus que le modèle précédent, entre 1900 et 5000 tr/min. En pratique, la poussée est vigoureuse depuis le tréfonds du compte-tours, sans temps mort, et continue sur sa lancée jusqu'au limiteur. On pourra trouver que ça manque de relief mais on en vient à regretter que cela n'aille pas plus haut tout de même, tant le moteur semble coupé dans son élan. La sonorité est un peu trop présente en mode Dynamic à cause de résonances dans l'habitacle mais nous dispense des pétardes un peu caricaturales de certaines concurrentes au levé de pied. Même un peu trituré, on retrouve le feulement typique d'un V6 dans les tours qui rappelle à notre bon souvenir les anciennes RS4 B5. Dommage qu'à l'inverse, le mode confort étouffe un peu trop le moteur. Un réglage intermédiaire serait pertinent.
On ne peut donc pas dire qu'on soit perdant au change, l'ancien V8 n'étant pas hyper démonstratif en dehors de sa zone rouge haut perchée. Certains disaient même de lui qu'ils ne sortaient pas tous ses chevaux... Une chose est sûre, ce V6, lui, les sort ! Comme on dit parfois aussi, il y a les chevaux Porsche et les autres...
Grâce à l’injection directe, le nouveau V6 est aussi capable de fonctionner à charge partielle selon le procédé de combustion Miller pour réduire sa consommation. Audi annonce une baisse spectaculaire de 17% par rapport au V8, on y gagne donc sur tous les tableaux, en théorie. En théorie voulant dire sur le cycle NEDC... De fait, la baisse de consommation est remarquable aussi dans la vraie vie, avec une moyenne de 12 L/100 relevée sur notre essai, contre 16 L pour le précédent modèle. Avec 197 g de CO2 par km, l'efficience du V6 n'aura toutefois pas d'impact sur sa fiscalité et vous devrez vous acquitter du malus maximal de 10.500 €. La bonne nouvelle, c'est qu'avec "seulement" 34 CV fiscaux, la RS5 échappe (pour le moment ?...) à la nouvelle super taxe des puissances fiscales supérieures à 36 CV...
Enfin, comme précédemment vous n'aurez pas le choix de la transmission. Mais cette fois, Audi abandonne la S-tronic à double embrayage pour retenir la boîte automatique tiptronic à 8 rapports de chez ZF. Disposant de deux modes de gestion, confort et sport, elle affiche des temps de passages similaires mais gagne en douceur sur de la conduite coulée tout en ajoutant une pointe de brutalité en conduite sportive. Le résultat est donc positif et les premiers rapports assez courts accentuent le dynamisme du moteur. En revanche, avec autant de rapports à gérer, on finit par ne plus avoir tellement envie d'utiliser les (petites) palettes et le mode manuel. Malheureusement, la gestion de la boîte, pas totalement intelligente, impose encore régulièrement de reprendre la main. Ce n'est pas le cas pour abattre le 0 à 100 km/h que la RS5 arrache en un peu moins de 4 secondes, un chrono qui commence à causer...
SUR LA ROUTE
L'autre volet de la transmission concerne la partie purement "quattro", pour laquelle Audi a ajusté la répartition du couple de façon asymétrique entre les essieux (40:60) afin d'apporter plus de dynamisme. D'un point de vue cinématique, l’essieu avant utilise une architecture à cinq-bras de guidage. A l’arrière, l’essieu à cinq bras également remplace la suspension trapézoïdale utilisée sur le modèle précédent.
Et ce n'est pas que du marketing, l’agilité du gros coupé d'Ingolstadt étant transifigurée au point qu'il fait oublier son poids, pourtant élevé, comme par magie. Paramétrez les différents composants du système selon vos envies et c'est parti ! Après quelques kilomètres de découverte abordés à 80 km/h pour se faire une idée de la torture qui nous attend en juillet, nous mettons de côté quelques principes pour mieux faire connaissance avec cette nouvelle RS 5. Conscience professionnelle oblige, cela passe malheureusement par de petits excès... mais jamais d'optimisme. Difficile d'avoir le regard concentré sur la route et pas sur le compteur, car le paysage défile vite, très vite. Mais même en mettant plein gaz en sortie de courbe, le niveau de sécurité offert par la RS 5 dépasse de loin l'imagination d'un adepte de la lutte contre la violence routière. La sportive allemande réagit avec une vivacité encore jamais vue mais toujours sainement et virevolte autour de son axe pour avaler chaque changement de cap à la manière d'une petite GTI. Réellement surprenant et très agréable !
Dans le même temps, comme le veut le jeu des options, Audi Sport propose la suspension sport RS avec Dynamic Ride Control (2400 €), laquelle a encore progressé. Sur route, avec le mode auto on atteint un compromis confort/efficacité de haut niveau mais sur mauvaise route, la RS 5 a tendance à rebondir sur le mode confort. Dans ces mêmes conditions, le mode sport est en revanche un peu trop ferme, à réserver au circuit et routes bien lisses. Heureusement, jamais la suspension ne cogne ni ne provoque de réaction nuisant à la tenue de cap. Audi Sport propose en outre un différentiel sport à l’arrière (1630 €) qui complète parfaitement la panoplie avec sa fonction de torque vectoring. Même chose pour les freins céramiques (7300 €), mordants et inébranlables. Enfin, la direction (dynamique en option) a gagné en consistance et, bien que le feeling reste artificiel, elle se montre plus communicative qu'auparavant. Tous ces "petits" plus mis bout à bout font des merveilles au point de rendre la nouvelle RS5 franchement plaisante et attachante. Sans rien perdre en polyvalence ni en confort, elle devient un choix très recommandable pour qui voudra l'utiliser sur piste régulièrement.
CARACTERISTIQUES TECHNIQUES
AUDI RS5 (II)
MOTEURType : V6 à 90°, 24 soupapes avec levée variable
Position : transversal AV
Alimentation : Injection directe + 2 turbos (1,5 bars) avec échangeur air/air
Cylindrée (cm3) : 2894
Alésage x course (mm) : 84,5 x 86
Puissance maxi (ch DIN à tr/mn) : 450 de 5700 à 6700
Couple maxi (Nm à tr/mn) : 600 de 1900 à 5000
TRANSMISSION
4x4 permanent, différentiel central autobloquant
Boîte de vitesses (rapports) : automatique (8)
ROUES
Freins Av-Ar (Ø mm) : disques ventilés (345) - disques pleins (310) + ABS
Pneus Av-Ar : 265/35 R 19 98Y XL (Hankook Ventus S1)
POIDS
Donnée constructeur (kg) : 1655
Rapport poids/puissance (kg/ch) : 3.7
PERFORMANCES
Vitesse maxi (km/h) : 250
1000 m DA :
0 - 100 km/h : 3"9
CONSOMMATION
Moyenne cycle mixte (L/100 km) : 8.7
Moyenne de l'essai (L/100 km) : 11.9
CO2 (g/km) : 197
PRIX NEUF (04/2018) : 96.520 €
PUISSANCE FISCALE : 34 CV
CONCLUSION
:-) Design V6 plein partout Comportement dynamique Tenue de route et motricité Position de conduite Confort Performances Consommation |
:-( Tarifs Options nombreuses Résonances d'échappement en mode sport |
Qu'on se le dise, cette nouvelle RS 5 signée Audi Sport frappe fort ! Avec son dynamisme inattendu, au prix de quelques (chères) options, elle laisse derrière elle l'ombre d'un coupé plus bourgeois que réellement sportif. Aujourd'hui la RS 5 sait tout faire et même donner du plaisir, sans rien perdre de sa plastique séduisante ni de ses aspects pratiques. Les Mercedes C 63 AMG Coupé et BMW M4 ont enfin trouvé à qui parler...