AUDI S4 (B9) V6T 354 ch (2016 - )
L'art du compromis
Face à un marché en perte de vitesse, l'Audi S4 reste fidèle à son programme, entre sportivité et confort, entre exclusivité et discrétion. Mais, déjà maintes fois revisitée, la recette a-t-elle encore de quoi séduire ?
Texte & photos : Sébastien DUPUIS
Première Audi sportive avant l'avènement des modèles RS signés Audi Sport (anciennement Quattro Gmbh), la S4 reste incontournable chez les berlines sportives. Née en 1991 sur la base de l'Audi 100 et de la technologie quattro, la S4 (C4 qui deviendra finalement S6 C4) a écrit la définition des Audi "S", des modèles taillés pour les hautes performances sans renier leurs qualités de confort, de luxe et de sécurité. Un credo tenu avec succès depuis 20 ans et que l'actuelle S4 B9 entend perpétuer, malgré le déclin inexorable du segment des berlines au profit des SUV...
PRESENTATION
L'Audi A4 B9 a été présentée au Salon de Francfort 2015 et commercialisée en novembre de la même année. Les variantes sportives S4 et S4 Avant ont fait leur apparition au même moment mais leur commercialisation n'a débuté qu'à l'été 2016. Comme de coutume, la sobriété des lignes est de rigueur et depuis l'avènement des pack S-Line, on peine toujours à distinguer les S4 des simples versions "S-Line". Une discrétion assurée et assumée puisqu'elle plait visiblement à une clientèle dont les attentes sont significativement différentes des acheteurs de modèles RS.
Ceci étant, l'oeil expert saura immédiatement séparer le bon grain de l'ivraie grâce notamment aux deux doubles sorties d'échappement à l'arrière. Les touches d'aluminium sur les rétroviseurs ou encore les jantes spécifiques de 19" (de série en France) sont d'autres traits de personnalité propres à la "vraie" S. Notons que notre modèle est équipé de jantes optionnelles en aluminium coulé à 10 branches, toujours en 19". Les bas de caisses et boucliers sont également spécifiques mais sans ostentation. Le bouclier avant est lui aussi exclusif à la S4 avec des écopes retravaillées dans le style RS et soulignées par un jonc chromé. Ajoutons qu'avec ce très beau coloris Bleu Navarra (option peinture métallisée à 1010 €), la nouvelle S4 paraît un peu plus exclusive que revêtue d'un banal gris métal.
HABITACLE
A l'intérieur de la nouvelle Audi A4, l'évolution la plus marquante concerne à la fois les grilles de ventilation qui s'étendent sur toute la largeur de la planche de bord (comme sur le SQ7 essayé juste avant) et la présence de nombreux écrans. A la place des classiques cadrans, l'instrumentation numérique Audi virtual cockpit continue de coloniser toute la gamme tandis que la console est surplombée par un second écran de 8,3 pouces comme dans la Mercedes Classe C. Dommage cependant que celui-ci ne soit pas tactile et qu'il faille se plonger un certain temps dans les divers menus du système multimédia MMI (ou via la commande vocale et celle du volant) pour gérer les nombreux paramètres de conduite proposés. L'avantage est qu'on dispose d'un moyen d'affiner la conduite selon ses goûts en plus des modes pré-programmés.
Côté ambiance, l'austérité due à l'utilisation massive de matériaux noirs reste prédominante. Heureusement, ils sont comme d'habitude de très belle facture et sur ce point l'écart de standing avec l'A3 berline est clairement marqué. L'aspect luxueux est relevé par diverses touches de chrome et de plastiques façon aluminium, tandis que pour le côté sport on notera une baguette de finition en carbone sur la planche de bord et les portes, le petit volant à méplat ou encore les sièges Sport S en cuir Nappa avec surpiqûres contrastées. Une option tout de même facturée 1120 € mais qui permet néanmoins d'accéder à des coloris plus lumineux (gris ou rouge). Par défaut, la sellerie est un mixte Cuir/Alcantara noir ou gris. Par ailleurs, la position de conduite apparaît excellente même si les sièges sport mériteraient un maintien un peu plus près du corps.
MOTEUR
La précédente S4 avait déjà troqué le V8 contre un V6 3.0 suralimenté mais les apparences sont parfois trompeuses. Ainsi, la génération B9 adopte derrière le même blason "V6T", un nouveau 3.0 TFSI de cylindrée identique, mais dont le T évoque bien cette fois la présence d'un turbo. Parmi les autres changements de conception, citons le bloc chemisé (au lieu de l'Alusil) et l'adoption de "flux inversés" qui ont permis d'utiliser des collecteurs d'échappement intégrés dans les culasses et de rapprocher le turbo (de type twinscroll) au centre du V6 pour réduire le lag au maximum. Sur la balance, le nouveau V6 est aussi plus léger avec un poids de 172 kg au lieu de 189.
Toujours ouvert à 90° (ce qui implique la présence d'un contre-arbre d'équilibrage) et alimenté par injection directe, le nouveau V6 a donc échangé son compresseur contre un système plus efficace sur le plan énergétique, d'autant que le moteur est aussi capable de fonctionner selon le cycle Miller (ou Atkinson) à faible charge grâce à la levée variable des soupapes.
Ce basculement technologique s'accompagne pour la S4 d'un bonus de quelques chevaux et d'une courbe de couple mieux remplie que précédemment. On dispose ainsi de 500 Nm en continu, de 1370 à 4500 tr/mn, tandis que la puissance culmine en plateau avec 354 ch de 5000 à 6400 tr/mn. Les connaisseurs remarqueront que c'est donc la même puissance que l'ancien V8 4.2 atmo de la S5. Par rapport à la S4 B5 qui disposait déjà d'un V6 (2.7L biturbo) on mesure pourtant le fossé qui s'est creusé en matière de puissance durant la décennie écoulée...
Conséquence directe des choix opérés, le caractère de ce nouveau V6 est assez différent de l'ancien... mais pas beaucoup plus enthousiasmant. Sur le plan auditif, sans jamais être désagréable, sa sonorité semble un peu trop artificielle en activant le mode Dynamic ou au contraire trop discrète par défaut. En pratique, le calage à 90° donne à ce V6 une tessiture assez particulière qui brouille les repères, un peu comme la dernière Honda NSX. Sur les régimes intermédiaires, on pourra parfois lui trouver un grain de 5 cylindres ou le grognement d'un V8, tandis que le feulement typique des 6 cylindres ne transparaît vraiment qu'à haut régime.
Parallèlement au changement de moteur, Audi a également remisé aux archives sa transmission S-tronic double embrayage à 7 rapports, remplacée corps et âme par une Tiptronic à 8 rapports. Il s'agit ici de la dernière née de chez ZF, dont nous avons déjà pu apprécier ailleurs les qualités. N'ayant plus grand chose à envier à la S-tronic sur le plan de la rapidité, celle-ci s'illustre pourtant ici avec une gestion spécifique Audi, moins aggressive dans ses changements de rapports que ce que nous avions eu l'occasion de voir. On note également quelques réticences lors de rétrogradages un peu violents, comme quoi tout n'a pas changé. En fait, si on ne vous le disait pas, il serait facile de penser que la boîte S-tronic est toujours là... Avantage du 8ème rapport cependant, l'étagement a pu être reserré tandis que la consommation normalisée, et donc le malus co2, sont en net progrès. Bref, il n'y a rien à regretter à ce niveau même si on aurait pu espérer tout de même un vrai mode manuel qui ne passe pas de lui-même le rapport supérieur.
SUR LA ROUTE
Fidèle à ses valeurs et ses principes comme peu d'hommes politiques le sont, l'Audi S4 incarne le progrès dans la continuité. Historiquement attachée à la technologie quattro, elle ne cède donc rien sur ce terrain où elle a déjà largement fait ses preuves en matière d'efficacité. En face d'elle, l'Audi S4 n'a plus beaucoup d'opposantes mais la plupart se sont d'ailleurs converties à la transmission intégrale. Il s'agit des BMW 340i Xdrive et Mercedes C43 AMG (ex-C450) 4Matic, tandis que les Jaguar XE S et Infiniti Q50 3.0T préfèrent la bonne vieille propulsion. Une bonne raison pour prendre à contre-pied ses détracteurs avec de tous nouveaux réglages châssis...
Longtemps marquée par une certaine paresse à l'inscription, la S4 se dévoile en effet au fil des kilomètres sous un nouveau jour. Une vraie surprise et une bonne ! Réussissant à faire oublier son poids toujours conséquent, malgré une baisse annoncée de 75 kg, elle montre une agilité comme jamais vue au volant d'une Audi de la gamme S. Le train avant se montre étonnamment vif, sensation accentuée par la direction dynamique (option) qui varie la démultiplication en fonction de la vitesse. Dommage qu'elle se montre encore trop muette en informations. A l'autre bout de la chaîne, les pneus (des Hankook Ventus S1 Evo2 sur notre exemplaire) encaissent le couple sans jamais faillir et restent accrochés à la trajectoire choisie tandis que l'arrière accepte enfin de participer en accompagnant le moment de pivot.
Qu'on se le dise, la S4 offre des sensations inédites et c'est avant tout grâce à l'évolution de sa plateforme. Outre une meilleure répartition des masses, la transmission quattro revisitée de fond en comble permet en effet d'octroyer jusqu'à 85% du couple sur les roues arrière (60% par défaut) tandis que la fonction Torque Vectoring sublime les capacités du châssis en courbe en exerçant un léger freinage sur la roue intérieure. Dans le même temps, le différentiel sport disponible en option ravira les adeptes de glissades du train arrière, à condition de mettre hors service toutes les assistances.
La suspension à 5 bras se caractérise par plus de confort et une meilleure tenue de caisse, on y gagne donc sur tous les tableaux. Abaissée de 23 mm par rapport aux autres A4, la S4 conjugue la souplesse d'un amortissement de grande routière lorsque nécessaire à la rigueur d'une sportive dès qu'on veut se faire plaisir dans une série de virages. Via l'Audi Drive Select, on peut paramétrer tous les systèmes pour se concocter une voiture à la carte, plus ou moins confortable, plus ou moins bruyante, plus ou moins vive. Bien sûr ce ne sont toujours que des compromis mais l'effet sur la conduite est suffisamment perceptible pour ne pas ranger tout ça aux rayons des gadgets marketing. Rien à redire non plus sur le freinage, puissant, endurant et facile à doser.
Il est cependant un point où l'on ressent finalement une légère déception, c'est celui des sensations mécaniques. Avec un tel châssis on aurait aimé un ensemble moteur-boîte plus démonstratif en conduite sportive et ce n'est pas le cas avec ce nouveau V6 Turbo. Se comportant plutôt gros un gros V8 atmo pas spécialement affûté, il fait le job en assurant d'excellent chronos mais sans panache particulier. Par conséquent, l'Audi S4 a peu de chances de devenir un achat coup de coeur. Il s'agit bien d'un achat de compromis pour qui ne veut pas d'une simple Audi A4 et d'un banal 4 cylindres, mais sans non plus céder à l'exubérance d'une RS4, ni au côté m'as-tu-vu d'un SQ5. Et histoire de ne pas trop céder de terrain à son prétentieux frère haut perché, la S4 Avant pourra s'imposer comme une alternative de choix avec son coffre plus volumineux. Difficile en revanche de ne pas voir un positionnement plus inconfortable pour la berline, notamment face à la RS3 et son 5 cylindres ensorceleur...
CARACTERISTIQUES TECHNIQUES
AUDI S4 (B9) V6T 354 ch
MOTEURType : V6 à 90°, 24 soupapes avec levée variable
Position : transversal AV
Alimentation : Injection directe + turbocompresseur avec échangeur air/air
Cylindrée (cm3) : 2995
Alésage x course (mm) : 84,5 x 89
Puissance maxi (ch DIN à tr/mn) : 354 de 5400 à 6400
Couple maxi (Nm à tr/mn) : 500 de 1370 à 4500
TRANSMISSION
4x4 permanent, différentiel central autobloquant
Boîte de vitesses (rapports) : automatique (8)
ROUES
Freins Av-Ar (Ø mm) : disques ventilés (345) - disques pleins (310) + ABS
Pneus Av-Ar : 245/35 R19 93Y (Hankook Ventus S1 Evo2)
POIDS
Donnée constructeur (kg) : 1630
Rapport poids/puissance (kg/ch) : 4.6
PERFORMANCES
Vitesse maxi (km/h) : 250
1000 m DA :
0 - 100 km/h : 4"7
CONSOMMATION
Moyenne cycle mixte (L/100 km) : 7.5
Moyenne de l'essai (L/100 km) : 11
CO2 (g/km) : 170
PRIX NEUF (09/2016) : 70.500 €
PUISSANCE FISCALE : 24 CV
CONCLUSION
:-) Design élégant Finition exemplaire Technologie dernier cri V6 onctueux Comportement plus dynamique Tenue de route/motricité Confort Performances |
:-( Tarifs Poids Caractère moteur trop lisse Sonorité assez "artificielle" |
Fidèle à ses principes, l'Audi S4 se réinvente pourtant une fois de plus. Cette génération B9 se démarque ainsi par un comportement plus incisif et dynamique sans rien perdre de ses qualités initiales. Un ensemble qui serait proche de la perfection si son moteur était un peu moins avare en émotion. Peut-être pour mieux laisser sa place à la RS4 ?
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Je possède une S4 B9 avant depuis presque 1 an, et en toute franchise , je n'ai quasi aucun reproche à faire à cette auto. Elle est performante, confortable, économique ( moins de 8L/100 aux limitations sur autoroute ), très bien finie avec les sièges sport et le Virtual cockpit, la position de conduite est parfaite ( même pour les grands au delà d 1m 90 ) et je la trouve plutôt sobre et belle ( un peu haute sur pattes pour pinailler ) , juste ce qu'il faut ! Concernant le bruit artificiel du moteur mentionné dans l'article, c'est vraiment un détail, il est silencieux en conduite normale mais il est surprenant dans les tours. Par contre, il est vrai que la boite n 'est pas la meilleure en rétrogradage, c'est à mon avis son seul défaut. Je n'ai pas d'avis sur la fiabilité, l'entretien et la revente car je n'ai pas fait qu'une vidange à ce jour ( 5000 km en tout) . On sait que les entretiens chez Audi sont chers, je ne me fais pas d'illusions sur ce point. J 'adresse cela dit un carton rouge concernant les abonnements aux services Audi notamment pour conserver google earth dans le GPS de l’auto après les 3 ans. Plus de 300 euros pour 2 ans , c'est purement du vol. J’avais hésité une BMW 340i M performance , plus démonstrative et plus performante, moins bien finie mais aussi plus petite en terme d’habitabilité. L’occasion a fait le larron …