BMW M135 xDrive (F70) (2024 - )
Transgenre
En juillet dernier, BMW présentait la 4ème génération de sa Série 1 sous le nom de code F70. Reprenant un certain nombre d'éléments techniques de la précédente M135i, la nouvelle M135 xDrive pousse à se demander s'il s'agit bien toujours d'une vraie BMW...
Texte & photos: Sébastien DUPUIS
La Série 1, alias E87, a fêté cette année ses 20 ans. Un an après sa sortie, nous faisions l'essai de la regrettée 130i qui avait marqué sa catégorie avec les 265 ch de son gros 6 cylindres 3 litres. Succédant à deux premières tentatives mitigées de BMW d'investir le segment des compactes premium, d'abord avec la 323ti E36 puis la 325ti E46, la Série 1 repositionna clairement l'entrée de gamme BMW comme un modèle à part entière et non comme une version "diminuée" de l'indétrônable Série 3. Même si, en réalité, la base technique restait partagée avec sa grande soeur, le modèle réussit parfaitement cette transition pour s'inscrire durablement au catalogue et dans le paysage automobile. Au point que BMW présente aujourd'hui la Série 1 comme la "pionnière du plaisir de conduire" dans le segment des voitures compactes haut de gamme.
Oui mais voilà, ça, c'était avant. Avant que la Série 1 de 3ème génération (F40) lancée en 2019 abandonne sa - lourde et coûteuse - plateforme de Série 3 qui lui permettait d'être la seule du segment à héberger un gros 6 cylindres turbo jusqu'aux M135i et M140i (après restylage) de génération F20/F21. Ainsi, bien que baptisée elle aussi "M135i", la compacte F40 perdait deux cylindres et sa nature de propulsion. Devenue F70 après seulement 5 ans de carrière à l'occasion d'une grosse évolution technique, il est temps pour nous de savoir si la nouvelle "M135 xDrive" est bien une vraie BMW et plus encore, une vraie BMW M...
PRESENTATION
Officialisée le 5 juin 2024 à l'occasion des 20 ans du modèle, la Série 1 fait sa mue. Pour autant, ses dimensions n'évoluent que très peu par rapport à la précédente F40 et ce n'est pas surprenant puisque, comme les Série 2 Active Tourer et Gran Coupé, elle reste basée sur la même plateforme (UKL) que sa devancière. Néanmoins, la longueur gagne 42 millimètres pour atteindre 4m36 tandis que la hauteur a aussi augmenté de 25 mm pour atteindre 1m46. Ainsi, bien que grandement remaniées, les lignes conservent des proportions très similaires : un long capot (qui d'ailleurs conserve le même embouti que la F40, tout comme les portières), un habitable reculé entre les essieux, une ligne de toit dynamique et un arrière puissant, tels sont les marqueurs de la Série 1 depuis toujours.
Côté style, entre la F20 aux phares hypertrophiés et la plus récente F40 aux naseaux affublés du même mal, on ne peut pas dire que les designers BMW aient réussi à faire l'unanimité avec la Série 1. Bien sûr, juger un design est une chose bien subjective mais en ce qui nous concerne, difficile de dire s'il y a vraiment du mieux sur cette nouvelle F70... même si on peut admettre que ce n'est pas pire qu'avant. Positionnée plus bas et plus petite, la nouvelle calandre est moins caricaturale. On regrette seulement qu'elle fusionne toujours les célèbres naseaux, formant un ensemble qui perd un peu son identité. Cette impression est nettement amplifiée par la couleur noire "Shadow line" propre aux finitions M. A l'image de l'emblématique "pli Hofmeister" de la vitre de custode qui accueille maintenant la désignation « 1 », la rupture semble consommée entre les designers BMW et les gardiens du temple qui voudraient que rien ne change jamais. Les phares amincis apportent eux aussi un peu plus de finesse sur l'avant. La face arrière avec ses feux marqués par un décroché est également nouvelle mais pas inédite puisqu'elle s'inspire directement du dernier X2. Abandonnant la signature en "L", là aussi la petite "béhème" se détache de l'identité de la marque.
Extérieurement, la finition sportive "M Performance" réservée à la M135 se démarque finalement peu des simples finitions "M Sport" et "M Sport Design" que vous croiserez sur bon nombre de motorisations plus modestes. Ainsi, l'ajout d'un (faux) diffuseur dans le bouclier arrière vient avec la finition M Sport tandis que les jantes en alliage léger 18" bicolores avec leur branches en Y (Style 975M) font partie de la finition "M Sport Design". A cela, s'ajoutent les éléments du pack "M Sport Pro" (option réservée aux versions M Sport) comprenant les phares "Shadow Line M", une finition "Shadow Line M" (noir brillant) étendue sur divers éléments, les étriers de freins M Sport peints en rouge et un spoiler arrière M sur le hayon. Les vraies spécificités de la M135 se résument donc à deux paires de sorties d’échappement rondes (100 mm), des coques de rétroviseurs de style "M" et une grille de calandre à barres horizontales.
HABITACLE
L'abandon de marqueurs immuables (le croyait-on) qui composaient l'identité typique des anciennes BMW se confirme à l'intérieur de la nouvelle BMW Série 1 F70. Adoptant les derniers standards de la marque, la planche de bord fait place nette pour accueillir un large panneau d'affichage (Curved Display) composé de deux écrans, certes moderne mais peu différent de ce qu'offre la concurrence. Heureusement, les stylistes ont ajouté de nombreuses petites attentions pour flatter l'oeil et créer une ambiance "premium" qui n'égale toutefois pas la Mercedes Classe A. Ainsi, la finition M Sport ajoute un ciel de pavillon anthracite, des inserts décoratifs M en aluminium mat (illuminés la nuit pour un effet "whaaa c'est trop beau"...), un pédalier inox et un volant M multifonctions à 3 branches gainé cuir. Concernant ce dernier, la jante très épaisse et un peu molle n'est pas des plus agréables en mains.
La jolie sellerie rouge et noir de notre exemplaire en similicuir "Veganza" est plus convaincante. C'est une option mais son prix est étonnament raisonnable (400 €) ! Elle remplace la sellerie mixte Alcantara / Veganza noir à surpiqûres bleues fournie de série. Les excellents sièges avant M Sport sont heureusement de série sur la M135, contrairement aux ceintures de sécurité décorées aux couleurs M, faisant partie du pack M Sport Pro (option à 1550 € réservée à la M135 xDrive). Comme toujours chez BMW, on apprécie une position de conduite idéale. En revanche, la disparition de nombreuses commandes physiques, une tendance regrettable, n'est vraiment pas un progrès sur le plan ergonomique. L'interface digitale se montre de plus assez fastidieuse à utiliser avec ses nombreux menus qui obligent à quitter souvent la route des yeux.
Outre les systèmes d’aides à la conduite, la dotation d'équipements de série de la nouvelle BMW Série 1 a été élargie avec la climatisation automatique, un système d'alarme, des sièges avant chauffants, la Personal e-SIM, la connectivité Apple CarPlay® et Android Auto™ ainsi que le BMW Live Cockpit Plus comprenant le système de navigation basé sur le cloud BMW Maps. En soi, rien d'exceptionnel à l'heure actuelle sur une berline compacte.
MOTEUR
La nouvelle "Une" s'accompagne d'un changement partiel d'étiquettes. Afin que les clients ne s'y perdent plus avec la gamme électrique, les motorisations essence de la compacte F70 abandonnent donc la dénomination « i » historique. Encore un reniement pour les puristes de la marque attachés aux traditions mais bon, avouons qu'il y a plus grave en matière de faits divers... D'autant que sous le capot de la première M135 "pas i", c'est loin d'être la révolution.
On retrouve en effet le 4 cylindres 2.0 turbo "TwinPower" qui, comme son nom ne l'indique pas, se contente d'une seule turbine. Il a en revanche été revu pour satisfaire les dernières normes et adopte une double injection, directe et indirecte. Les conduits d'admission et d'échappement ont été revus, la combustion optimisée ainsi que la gestion de la levée des arbres à cames et de l'injection pour améliorer le rendement et la dépollution. La "touche" du département M justifiant l'apposition du badge tricolore sur le cache isolant moteur concerne officiellement le vilebrequin et la lubrification des pistons. Pour autant, on découvre qe le nouveau 2.0 turbo délivre au final 300 ch, soit 6 de moins que précédemment. Par rapport aux 340 ch du 3.0l de la M140i F20, c'est une rude décroissance ! Présentant un plateau entre 5750 et 6500 tr/min, la courbe de puissance n'augure pas non plus le tempérament des bonnes vieilles BMW M. La très grande linéarité des montées en régime va confirmer très vite cet a priori.
Dans la pratique, ce bloc se distingue surtout par sa réponse rapide à l'accélérateur, quasiment sans lag, et un couple solide à mi-régime. Effectivement, avec 400 Nm délivrés dès 2.000 et jusqu'à 4.500 tours, la BMW M135 est plutôt à l'aise en reprises. C'est efficace, certes, mais malheureusement sans émotion particulière, notamment sur le plan sonore tristement amplifié par les haut-parleurs. On apprécie cependant la sobriété en carburant de ce moteur même si, faute d'hybridation, les efforts déployés ne lui évitent pas une surtaxe écologique sévère... La moyenne de notre essai se situe pourtant à moins de 10 litres, ce qui reste raisonnable pour une compacte de 300 ch pesant plus de 1500 kg à vide...
La M135 xDrive est donc la seule F70 à se passer du système électrique intégré directement dans la boîte de vitesses sur les autres versions. Cette boîte Steptronic à 7 rapports imposée par BMW sur toute la gamme n'est d'ailleurs plus automatique, comme la précédente boîte Aisin à 8 rapports, mais à boîte double embrayage. Ajoutons qu'elle s'accompagne, sur la M135 xDrive, d'un différentiel à blocage mécanique qui optimise de façon très discrète la motricité du train avant. Le changement de rapports via les palettes solidaires du volant est rapide et réactif tandis que l'étagement court des premiers rapports favorise clairement les accélérations. Cela étant, malgré un chrono flatteur de 0 à 100 sur le papier (4"9), les sensations délivrées par la BMW M135 ne sont pas aussi intenses qu'on l'aurait souhaité.
SUR LA ROUTE
La partie mécanique ayant livré ses secrets, passons maintenant aux dessous. Bien que basée sur une plateforme connue, l'agilité, la précision de la direction et la dynamique en virage de la nouvelle BMW Série 1 ont pu être améliorés grâce à une rigidité accrue de la structure et de la connexion de carrosserie au châssis. Le châssis de base de la Série 1 F70 connaît une optimisation de la cinématique des essieux, des supports de barres antiroulis hautement précontraints et une nouvelle technologie d'amortisseur. Un amortissement supplémentaire hydraulique, dépendant de la course dans le sens de l'extension, permet en effet l'optimisation de l'acoustique et la stabilisation de la carrosserie. L'angle de chasse des roues avant a quant à lui été augmenté de 20 %, ce qui permet d'accroître la stabilité directionnelle et offre un meilleur retour d'information (même si l'assistance électrique nuit toujours à la pureté du feeling). En complément de la technologie ARB (système de limitation du patinage), la nouvelle BMW Série 1 est équipée du système BMW Performance Control (répartition du couple de lacet) qui améliore l'agilité grâce à un freinage ciblé sur les roues à l'intérieur du virage pour assurer un comportement neutre en virage. C'est bien pour l'agilité, un peu moins pour l'usure de splaquettes... Pour terminer, ajoutons que la finition M Sport comprend de base la suspension "Adaptative M" avec rabaissement de 8 mm, une direction "sport". Les jantes 18" de notre exemplaire sont chaussées des derniers pneus Goodyear Eagle F1 Aymetric 6 en 225 aux quatre coins.
En pratique, la M135 xDrive se montre effectivement assez incisive grâce à un amortissement plutôt ferme (sur tous les modes), un freinage puissant et une direction vraiment directe. L'assistance est un poil trop prononcée mais aucun mouvement parasite du train avant ne vient nous rappeler que l'on est au volant d'une BMW dont la nature profonde reste celle d'une traction avant ! Pour autant, le bilan dynamique reste mitigé. Un peu trop neutre, le train arrière ne montre pas un tempérament particulièrement sportif. Ne pouvant jamais recevoir plus de 50% du couple, ne comptez pas vraiment sur lui pour vous aider à resserrer la trajectoire ni à entretenir une petite dérive. Comme pour le "quattro" chez Audi, chez BMW il y a donc aussi xDrive et... xDrive. En matière de comportement, la BMW M135 présente vraiment la même philosophie que ses rivales, Mercedes A35 AMG et Audi S3 : même recette, même résultat. Oui, sauf que depuis son arrivée sur le marché, la compacte Audi n'a eu de cesse d'améliorer son agilité tandis que la petite BMW en est plutôt réduite à faire ce qu'elle peut pour cacher que c'était mieux avant. Autrement dit, même si la M135 ne démérite pas avec un train avant parfaitement guidé et une motricité excellente, on prend davantage de plaisir aujourd'hui dans le sinueux au volant d'une VW Golf R... Et ça, personne ne l'avait vu venir.
Toutefois, comme il n'est pas dans nos habitudes d'émettre un jugement définitif, il nous faut encore préciser que BMW propose d'ajouter (moyennant 3750 €), un pack M Technology pour pousser la M135 xDrive plus loin dans la sportivité. Cet ensemble, dont n'était pas équipé notre modèle d'essai, comprend notamment le châssis "M Technology" et des freins M composites (étriers gris) logés dans des jantes forgées à rayons de 19" (style 1085M) chaussées de pneus plus sportifs (jusqu'au semi-slick) en 235 de large. Pour préciser ce que signifie le "châssis M Tech", il s'agit d'un ensemble amortisseurs avant plus rigides - supports rigides de barres anti-roulis avant et arrière - renfort du train arrière et géométrie spécifiques. Possible qu'ainsi équipée, la petite M135 dévoile un visage un peu différent avec notamment un arrière plus mobile.
ACHETER UNE BMW M135 F70
Certes, elles sont devenues bien rares ces compactes sportives mais tout de même. Acheter une BMW M135, en France, aujourd'hui, peut ressembler à une douce folie. D'un prix de base fixé à 57 200 euros - déjà salé pour la catégorie -, une BMW M135 xDrive dans la configuration de notre essai fait grimper la note à quelques 86 560 €, moyennant 13 465 € d'options et un douloureux malus de 14 585 € (!). A ce tarif là, il faut être salement drogué du sans plomb pour trouver encore de l'intérêt à une compacte purement thermique. Face aux malus appliqués, on comprend d'ailleurs sans mal pourquoi la plupart des généralistes, notamment français, ont jeté l'éponge en abandonnant cette niche de marché aux premiums allemands. Ce sont les seuls à pouvoir pratiquer de tels tarifs auprès de leur clientèle...
Objectivement moins performante et moins plaisante qu'une i4 M50 pour rester chez le constructeur de Munich, la BMW M135 est pourtant un peu mieux placée financièrement que la Mercedes A35 AMG (63 649 €) dotée de 320 ch grâce à une micro-hybridation et l'Audi S3 Sportback de 333 ch (63 000 €) qui écope en prime d'un malus mortifère. Mais en adoptant une architecture plus traditionnelle, la BMW M135 xDrive trouve aussi sur sa route des compactes "populaires" parfaitement affûtées comme la VW Golf 8 R ainsi qu'une Honda Civic Type R FL5 tout aussi efficace malgré ses seules roues avant motrices...
CARACTERISTIQUES TECHNIQUES
BMW M135 xDrive (F70)
MOTEURType : 4 cylindres en ligne, 16 soupapes à calage et levée variable
Position : transversal AV
Alimentation : Injection directe + indirecte, turbo avec échangeur
Cylindrée (cm3) : 1998
Alésage x course (mm) : 94,6 x 82
Puissance maxi (ch DIN à tr/mn) : 300 de 5750 à 6500
Couple maxi (Nm à tr/mn) : 400 de 2000 à 4500
TRANSMISSION
AR + autobloquant avec Torque Vectoring (PTV)
Boîte de vitesses (rapports) : automatique double embrayage (7)
ROUES
Freins Av-Ar (Ø mm) : disques ventilés (350), étriers fixes 4 pistons - disques ventilés (330), étriers flottants monopiston
Pneus Av-Ar : 225/45 R18 95Y XL
POIDS
A vide constructeur (kg) : 1550
Rapport poids/puissance (kg/ch) : 3.2
PERFORMANCES
Vitesse maxi (km/h) : 250
1000 m DA :
0 - 100 km/h : 4"9
0 - 200 km/h :
CONSOMMATION
Moyenne WLTP (L/100 km) : 7.6-8.1
Moyenne de l'essai (L/100 km) : 9.5
CO2 (g/km) : 173-185
PRIX NEUF (10/2024) : 57 250 €
PUISSANCE FISCALE : 19 CV
CONCLUSION
Privée de la propulsion et du 6 cylindres en ligne, la M135 F70 poursuit la rupture engagée par sa devancière avec l'héritage des BMW classiques. Ayant malheureusement perdu beaucoup de son charme, sinon son âme, avec ce changement de personnalité, la compacte de BMW n'a désormais rien de mieux à offrir que la concurrence. Pour autant agréable et performante, cette grosse GTI fait payer trop cher ses prestations. Une proposition qui apparaît dépassée mais surtout du passé...
Présentation
Performances
Direction vive
Motricité
Freinage
Consommation...
... mais malus disproportionné
Comportement très neutre
Amortissement ferme
Tarif et options