ECHAPPEE DU HARAS !
Fini la Challenge
Stradale ! C'est désormais avec la F430 Scuderia que les esthètes
de trajectoires de haute volée devront compter. Ce changement de patronyme
n'est pas anodin car il annonce un vrai changement de cap pour la dernière
venue. Si la priorité est toujours donnée au sport, le point de
départ vient de la série et non plus de la compétition pour
la conception de ce bolide avec en parrain un certain Michael Schumacher penché
au-dessus de son berceau. Et comme cadeau de naissance, le record de la piste
de Fiorano, qu'elle partage avec l'Enzo
Texte : Gabriel LESSARD
Photos : D.R.
"1"25 !" C'est
le temps annoncé par Ferrari pour sa dernière F430 Scuderia sur la piste de Fiorano. Aussi rapide
que l'Enzo, tout simplement. C'est dire si à Maranello on n'a pas chômé. Mais la plus beau tour de force de ce résultat
est qu'il est obtenu d'une auto dérivée de la série et non
pas d'une auto héritée d'une voiture de course. Certes, nous en
conviendrons volontiers, admettre une Ferrari F430 Scuderia
comme une voiture de série a de quoi faire sourire. Mais la nuance est
de taille et la politique de rupture (tiens eux aussi !...) annoncée par
Ferrari pour sa dernière née indique clairement les options différentes
retenues par rapport à la Challenge Stradale. C'est donc la route qui va
au circuit et non plus l'inverse. Un choix qui permit ainsi de garantir à
la Scurderia une philosophie encore assez proche
et " humaine " à la F430 " standard
" alors que la Challenge Stradale vous
rappelait à l'ordre sur chaque imperfection de nos routes. La Scuderia
par sa conception et mise au point à laquelle le sextuple champion du monde
de F1, Michael Schumacher himself, a participé activement et guidé
certains réglages et solutions techniques. La Scuderia n'est donc pas une
simple série spéciale ou limitée, pas seulement un caprice
pour enfants gâtés, mais avant tout un aboutissement d'un modèle
déjà existant qui fait la part encore plus belle au sport
DESIGN
Difficile
de retoucher un dessin déjà réussi et agressif à l'origine.
Pourtant, les aérodynamiciens de Maranello ont apporté leur lot
de modifications de détails qui ont pour but d'améliorer encore
le ratio appui aéro/pénétration dans l'air. En clair, augmenter
les appuis sans dégrader les performances pures. Le Cx régresse
donc de 0,1 (0,34 contre 0,33 à une F430 standard), mais l'appui augmente
significativement de +10%. Le pilote peut donc désormais compter sur 75
kg d'appui à 150 km/h et 300 kg à 300 km/h. Cette dernière donnée, surtout en France est marginale tant
il semble difficile d'aller tutoyer de telles vitesses même sur circuit
Pour réussir ces améliorations, les modifications les plus visibles
concernent le spoiler avant plus proéminent dont les " naseaux "
semblent dilatés par l'effort, l'aileron arrière plus imposant,
le nouveau diffuseur et les flancs retravaillés. L'assiette plus basse
de 1,5 cm donne également un look plus trapu à la berlinette Ferrari.
Les jantes de 19 pouces sont d'un dessin très aéré laissant
entrevoir les freins en céramique pincés de gros étriers.
Le carbone se fait la part belle sur de nombreux détails comme les rétroviseurs
extérieurs, et s'accorde avec les grilles noires.
A BORD DE LA F430 SCUDERIA
L'habitacle marie dénuement
et esthétique. Cuir, carbone, Alcantara et aluminium se partagent l'espace
avec quelques plastiques incontournables. Pourtant si l'ensemble est flatteur
à l'il, on remarque une finition pas exempte de reproche. Que l'on
cherche à alléger au maximum une voiture dont la vocation est de
tomber des temps sur un circuit est plutôt logique, mais que les soudures
apparentes soient grossières, les amas de fils attachés à
la va vite ou encore quelques matériaux mal poncés, c'est dur à
avaler. D'autant qu'à 208 000 euros (soit 50 000 euros de plus qu'une F430
F1 standard !), sans compter quelques options mesquines et dispendieuses pour
une auto de cette vocation (harnais 4 points à 2 380 euros, couleur spéciale
années 50-60 8252 euros -glups !-, bandes racing à 6 578 euros
Pour
ce prix, la radio est aux abonnées absentes, mais il faut reconnaître
que la seule mélodie du V8 vitaminé et en pleine forme suffit à
sa peine
Les baquets sont de série et offrent un maintien parfait,
même s'ils se révèlent peu pratique en usage courant (s'en
extirper pour sortir de l'auto demande un certaine habitude). L'instrumentation
demeure fidèle au reste de la gamme Ferrari avec le gros compte-tours à
fond jaune au centre reprenant les rapports de boîte engagé via les
palettes situées derrière le volant et toujours solidaires avec
ce dernier. La position de conduite est parfaite pour les amateurs de conduite
sportive
MANETTINO...
2 !
5
programmes sont disponible avec le Manettino dexuième génération
:
>CST Off : Aucune aide activée sauf celles liées
au freinage
>Race : Aides activées pour le sport mis au point
avec l'aide de Michael Schumacher
>CT Off : antipatinage débranché
mais contrôle de trajectoire
actif
>Sport : Plus roulage dynamique route
>Basse adhérence : idem sport mais en tenant compte d'une adhérence plus précaire.
MOTEUR
Les vitrines des magasins
servent à mettre en avant les plus belles pièces de leurs collections.
A Maranello la tendance est la même avec le V8 4,3 litres qui est exposé
sous sa vitre. Une pièce de choix que l'on ne peut s'empêcher d'admirer
avec ses pièces en carbone frappées du monogramme " Ferrari
". Toujours tout alu, le V8 progresse ici encore en performance avec 20 ch
de plus que la version "standard" soit un sommet à 510 ch à
8 500 tr/mn tandis que le couple stagne (+5 Nm) à 470 Nm à 5 250
tr/mn. Mais la nouvelle cartographie moteur module la courbe de couple à
l'avantage de la Scuderia avec +10% de couple à bas et moyens régimes
et +4% de 6 000 à 8 000 tr/mn. Mais 80% du couple maxi est toujours disponible
dès 3 000 tr/mn. Lorsque l'on sait en prime que l'auto a été
allégée de 100 kg par rapport à sa soeur de série,
cela donne une idée du gain en vivacité et performances... Côté
technique Ferrari a conservé la distribution à deux doubles arbres
à cames en tête à calage variable en continu qui actionne
32 soupapes. Avec ses 118,38 ch/litre, Ferrari confirme ainsi sa force de motoriste,
notamment pour un moteur atmosphérique. Combien de temps Ferrari pourra
perpétuer ses prouesses techniques avec la pression toujours croissante
sur les émissions de CO2 ? Nul ne le sait, mais on peut faire confiance
aux talents des motoristes pour y parvenir, la F430 Scuderia en étant le
plus bel exemple avec 360 gr de CO2/km contre 420 gr à la Challenge Stradale
(et une réduction de 3 litres/100 de la consommation d'essence).
On l'a
énoncé plus haut, la Scuderia se paie le luxe de tourner 2"
plus vite que sa soeur de série et aussi vite que l'Enzo en 1"25 à
Fiorano. Mais en performances pures, on nage aussi dans le surnaturel avec des
chiffres qui risquent fort de vous faire perdre votre latin et la place au somment
de sa catégorie : 320 km/h en
pointe, 0 à 100 en 3,6 secondes et le kilomètre DA en 20"9
!
C'est bien simple, après avoir mis le contact à la clé,
pressé le bouton de démarrage pour que le V8 commence à donner
de la voix et qu'enfin les liquides sont en température, vous pouvez démarrer.
Pied de dedans sans lâcher les gaz et seulement au bout de 11"6 secondes
vous êtes déjà à 200 km/h. Voilà qui va plaire
à la maréchaussée... En complément Ferrari fait toujours
appel à sa transmission F1 sauf qu'ici elle porte l'appellation "Superfast
2" puisqu'elle marque encore quelques progrès en rapidité d'exécution.
Pas exempte de brutalité et de bruit lors de chaque passage de rapport
(cela participe à l'ambiance "course" !), elle offre un double
visage. Sous les 3 000 tr/mn et une pédale des gaz enfoncée de moins
de 40% les rapports passent en 160 millisecondes. Mais si vous êtes au-dessus
de 3 000 tr/mn le temps d'attente passe à 60 ms ! Dément...
SUR LA ROUTE
Sur la Scuderia c'est mode "allègement
On" ! C'est bien simple la chasse aux kilos superflus a été
impitoyable avec un résultat flatteur puisque 100 kg se sont évadés
dans la nature pour le plus grand plaisir du pilote qui sommeille en vous. Son
architecture Space Frame lui permette de conjuguer rigidité optimale et
poids contenu. L'aluminium est omniprésent de la structure du châssis
jusqu'aux triangles superposés avant et arrière qui sont forgés
du même matériau ! Egalement en alu, les étriers 6 pistons
à l'avant et 4 pistons à l'arrière. Le freinage est en carbone-céramique
avec des disques de 398 mm à l'avant (+18 mm sur la F430 standard) et 350
mm à l'arrière. Avec tout ce travail bénéfique pour
les performances, la Scuderia affiche donc un poids de 1 350 kg (soit sur le papier
juste derrière la Gallardo Superleggera avec 10 kilos d'écart) et
une répartition des masses de 43/57% AV/AR. Joli ! Mais en bonne voiture
de sport moderne, la dernière-née de Maranello affiche la panoplie
complète en assistances électroniques, sauf qu'ici on sent que la
maîtrise devient enfin efficace et réelle. Maranello ne se prive
d'ailleurs pas de revendiquer l'aide, et c'est nouveau, à la fois de clients
très avertis via le programme FXX, mais aussi de
Michael Schumacher "himself", jeune retraité talentueux en mal
d'occupation. On retrouve donc sur la Scuderia les dernières innovations
électroniques-techniques pour aller encore plus vite : ensemble boîte-pont
E-Diff2 (E-Diff + F1-Track), ABS, EBD, Manettino 2 avec 5 programmes avancés.
C'est notamment sur ce dernier thème que l'apport du champion allemand
a été vital car il a su mettre au point quelques fonctions qui arrivent
à marier l'impossible : confort et sport. Alors que la Challenge Stradale
était très intransigeante sur le plan du confort, sa remplaçante
dispose même d'un bouton "soft" pour que votre passagère
d'un jour accepte les longs trajets. Pour les réglages, l'égo du
pilote qui sommeille en vous aura tendance à vouloir opter sur circuit
aux réglages d'hommes (CST Off ou CT Off), mais sachez que les 1"25
réalisées à Fiorano ont été réalisés
avec le mode.... "race" ! Faire aussi bien avec les aides désactivées
semble donc impossible à réaliser même pour les pilotes aguerris.
Les modes "d'hommes" permettent donc surtout de pouvoir faire quelques
figures de style. Freinage indestructible et si efficace qu'il demande un temps
d'adaptation pour ne pas freiner trop tôt, une rigidité exemplaire
et surtout une électronique qualibrée de manière chirurgicale
qui fait que le pilotage d'une telle auto sur circuit relève du fantasme
pur. Toutes les aides viennent vous aider à aller plus vite et non à
castrer le plaisir comme c'est trop souvent le cas. Les chaussettes en Pirelli
Pzero Corsa AV 235/35 R 19 et AR 285/35 R 19 ne sont pas étrangères
non plus à l'exceptionnel grip de cette championne.
:: CONCLUSION
Véritable
gourmandise pour esthètes fortunés, la Ferrari F430 Scuderia apporte
enfin une bonne nouvelle sur les aides à la conduite : elles ne brident
plus, elles accélères vos performances ! C'est bien simple, même
des pilotes aguerris n'arrivent pas à faire mieux avec les aides désactivées.
Pas étonnant lorsque l'on sait que la mise au point du châssis de
cette Ferrari light en poids mais pas en prestations a été confiée
aux bons soins de Michael Schumacher, sans compter les enseignements tirés
de la F1 et du programme FXX. Avec cette Scuderia Ferrari frappe fort et juste,
même s'il ne faut pas rester dupe, très peu d'acheteurs pourront
exploiter la différence entre une F430 et une Scuderia. Une gourmandise,
on vous l'a dit !...
CE QU'ILS EN ONT PENSE
:
"De face, la Scuderia se reconnaît
à ses naseaux agrandis qui lui donnent un air méchant. De dos, ça
se confirme : les deux grosses sorties d'échappement qui encadrent la plaque
d'immatriculation émettent un bruit qui donne le frisson. Ultra parmi les
ultra-sportives, elle est capable de rivaliser sur la piste avec l'Enzo, véritable
proto de route à moteur V12. Tout en étant beaucoup plus facile
à conduire et en offrant un confort d'utilisation équivalent à
celui d'une F430. Mais c'est surtout parce qu'elle est compétente sur circuit,
là où la passion de la conduite peut s'exprimer librement et de
façon citoyenne, que cette sportive a de l'avenir."
Le Moniteur
Automobile - 18 octobre 2007 - Ferrari F430 Scuderia - Jean-Jacques Cornaert.
"Prochains
points à vérifier dans le virage serré qui ponctue la ligne
droite, les fameux 1,5 g d'accélération en courbe, et l'antipatinage.
Freinage tardif, l'ABS crépite en autorisant de petites amorces de blocages,
mais bizarrement, les freins carbone-céramique (offerts de série),
très mordants à haute vitesse, perdent de leur puissance de décélération
au fur et à mesure que la vitesse décroît. Si je n'avais pas
pris de la marge, ça serait le bac à graviers ! Braquage en visant
le point de corde, les Pirelli PZero Corsa de 19 pouces mordent férocement
l'asphalte, et me jettent dans le bourrelet gauche du siège avec une vigueur
inhabituelle. Puis j'accélère à fond, laissant le soin au
F1-Trac de travailler. Du coup, je sens bien que les 520 ch ne sont pas tous disponibles,
mais là où une Enzo castrait méchamment l'accélération,
l'antipatinage façon F1 laisse cette Scuderia accélérer fort
dans un imperceptible déhanchement révélateur d'une limite
toute proche. Promesse tenue donc, grâce à un superbe boulot de mise
au point."
L'Automobile Magazine - HS spécial sportives
2007/2008 - Ferrari F430 Scuderia - Christophe Congrega. |