SEAT LEON (3) FR TDI 184 (2014 - )
L'ESSENCE DU DIESEL...
Réunir la puissance et les performances du moteur essence et la sobriété du diesel est une gageure marketing devenue réalité jusqu'au plus haut niveau de la compétition. Si certains se félicitent de cette prouesse technologique, les autres pleurent la contamination des caractères lissés au moteur essence. La SEAT Leon FR TDI 184 peut-elle réconcilier les deux camps sur le terrain du sport ?
Texte :
Sébastien DUPUIS
Photos : D.R.
Chez SEAT, le sport et le Diesel c'est une vieille histoire d'amour. Tout a commencé en 2001 avec l'insolente Leon Cupra 4 armée d'un 1.9 TDI de 150 ch qui bouleversait les codes de la sportivité. Un châssis ferme, une tenue de route rigoureuse, un look un brin tuning et des performances canon, il n'en fallait pas plus pour que le Diesel de Rudolf fasse une entrée fracassante dans la cour des sportives en séduisant une nouvelle clientèle de gros rouleurs frustrés d'essence. Même si l'association des mots "sportive" et diesel n'aura pas manqué de faire crier à l'infamie une décennie durant, le mal était fait et un retour en arrière semblait impossible. L'Ibiza Cupra 1.9 TDI 160 ch en 2004 démocratisa le concept dans la cour des GTI et contribua à renforcer l'image sportive de SEAT auprès des jeunes. Même si cela n'était pas du goût de tout le monde, la romance entre SEAT et les amateurs de gazole continua à s'écrire en 2006 avec la deuxième génération de Leon et l'arrivée d'une FR TDI de 170 ch qui donnait la réplique au TSI de 200 ch.
Compte tenu des progrès accomplis ces dernières années par les motorisations diesel, il était logique que la trilogie se poursuive avec la Leon III. Le Diesel était devenu puissant, il lui restait à devenir propre (de préférence sans tricher...). La norme Euro6 ayant mis tout le monde sur un pied d'égalité, le match est donc plus ouvert que jamais. Alors que la Leon Cupra se réserve encore au seul 2.0L essence, la FR, elle, continue de réconcilier le père de famille sportif avec ses impératifs budgétaires en acceptant de se ravitailler aussi au pistolet jaune. Il faut d'ailleurs remarquer au passage que la Leon FR "téhessi" la plus puissante rend 4 ch à la FR "tédéhi", un comble ! La symbolique est suffisamment forte pour nous inciter à vous proposer l'essai hautement sulfureux de cette dernière...
PRESENTATION
Inspirée des concepts IBE, IBL et IBX, la nouvelle SEAT Leon 3 est apparue en 2012. Séduisante, dynamique, elle sait attirer le regard, c'est un fait. Surtout lorsqu'elle est habillée de rouge "Emocion" comme notre modèle d'essai, seule couleur gratuite du catalogue. D’une longueur de 4m24, la Leon 5 portes est plus courte de 5 cm que le modèle (Leon 2) précédent malgré un empattement allongé de 58 mm, directement profitable à l'habitabilité. La différence se joue donc sur les porte-à-faux plus courts et le profil se montre beaucoup moins typé monospace. En finition FR, la LEon reprend 3 cm en longueur avec ses boucliers avant et arrière spécifiques. Le soin apporté à l'aérodynamisme inclut le revêtement du soubassement de carrosserie ainsi qu’un écoulement d’air dans le compartiment-moteur.
Typique du nouveau design SEAT, la face avant contribue fortement à la personnalité de la Leon 3 avec des feux "full LED" (de série sur la finition FR) inédit sur le segment. Mais n'y voyez pas qu'un gadget à la mode de plus, sur route le confort apporté par cette technologie est tel qu'il est difficile de revenir en arrière ensuite, même avec du Xenon ! L’arrière de la SEAT Leon III est joliment sculpté lui aussi avec des ailes marquées par un pli" de caisse et des feux-arrière angulaires également à LED. Le caractère sportif de la Leon FR est accentué par une double sortie d’échappement chromée. Livrée en série avec des jantes de 17", la FR peut recevoir deux autres dessins de jantes en 18" dont le modèle bi-colore du pack "Titanium" présenté ici qui s'accompagne de rétroviseurs couleur argent. Ajoutons enfin que la Leon FR est la seule du segment à proposer aussi une carrosserie 3 portes (SC) un peu plus courte et un break (ST) un peu plus long, un argument qui peut finir de convaincre les pères de famille pressés !
HABITACLE
À son bord, la SEAT Leon FR offre un petit volant sport à méplat gainé de cuir, des sièges semi-baquet avec maintien lombaire et un éclairage d’ambiance spécifique. L’ambiance générale qui accueille le conducteur de la Leon est plutôt classique et dénote avec le style encore assez latin de sa carrosserie. Sérieuse, sans fioriture, la planche de bord paraîtra un peu trop germanique à certains et ils auront raison. La console centrale orientée vers le conducteur façon BMW apporte un peu de dynamique, configuration qu'on trouve aussi désormais sur sa cousine la Golf 7. Hormis l'encadrement couleur argent de l'instrumentation et quelques surpiqûres rouges, l'atmosphère est baignée de noir. La sellerie simili-cuir et tissu de série, peut se couvrir d'Alcantara ou de cuir intégral pour gagner en prestance. La finition est au demeurant très soignée et inédite à ce niveau chez SEAT qui se "Volkswagenise" plus que jamais. Toutes les surfaces ont une finition agréable au toucher et seul le bas de la planche de bord utilise des plastiques moins valorisants. Les sièges et la position de conduite offrent un très bon confort. Le réglage en hauteur des sièges conducteur et passager est de série sur la finition FR qui y ajoute le réglage lombaire du siège conducteur.
Moins chère qu'une Peugeot 308 GT en HDI 180 mais plus qu'une Ford Focus ST TDCI 185 ch, la Leon FR TDI 184 fait chèrement payer son Diesel dernier cri avec un supplément de 2660 € par rapport au 1.8 TSI. Ce super Diesel ne sera donc pas rapidement amorti, à moins de rouler beaucoup, ce qui est en principe la vocation d'un Diesel nous direz-vous à juste titre. Mais la Leon FR n'est pas avare de technologies embarquées. Au centre de la planche de bord, le SEAT Easy Connect permet de contrôler les fonctions divertissement et communication, en plus de nombreuses autres fonctions du véhicule, via un écran tactile de 5,8 pouces à capteur de proximité. L’écran peut également être commandé par gestes de balayage et de zoom à l’image d’un Smartphone. En parlant de Smartphone, vous apprécierez aussi le MirrorLink qui synchronise vos données et applications. De série également sur la Leon FR, le GPS Europe, la Caméra de recul et le SEAT Drive Profile qui permet d’adapter quelques réglages du véhicule - y compris le son du TDI grâce à un amplificateur ! - comme nous le verrons plus loin. Enfin, la Leon FR est livrée avec une hi-fi à 8 haut-parleurs et propose en option le Sound System 10 haut-parleurs avec caisson de basses. En option aussi, la FR peut également recevoir le dernier cri des assistances à la conduite avec le régulateur de vitesse adaptatif et le Front assist (pack Adaptatif à 485 €) ou encore les feux de route intelligents et le Lane Assist (pack Techno à 305 €).
CARACTERISTIQUES
SEAT LEON (3) FR TDI 184
MOTEUR
Type : 4 cylindres en ligne, 16 soupapes avec calage variable (VVT)
Position : transversal AV
Alimentation : Injection directe Bosch (2000 bars) + turbocompresseur avec échangeur air/eau
Cylindrée (cm3) : 1968
Alésage x course (mm) : 81 x 95.5
Puissance maxi (ch DIN à tr/mn) : 184 à 4000
Couple maxi (Nm à tr/mn) : 380 de 1750 à 3000
TRANSMISSION
AV avec XDS+
Boîte de vitesses (rapports) : manuelle ou DSG (6)
ROUES
Freins Av-Ar (Ø mm) : disques ventilés (312) - disques pleins (272) + ESP
Pneus Av-Ar : 225/45R17
POIDS
Donnée constructeur (kg) : 1295
Rapport poids/puissance (kg/ch) : 7,0
PERFORMANCES
Vitesse maxi (km/h) : 228
1000 m DA : 28"1
0 - 100 km/h : 7"5
CONSOMMATION
Moyenne cycle mixte (L/100 km) : 4.3
Moyenne de l'essai (L/100 km) : 6.6
CO2 (g/km) : 113
PRIX NEUF (09/2015) : 29.720 €
PUISSANCE FISCALE : 10 CV
MOTEUR
Nous arrivons au sujet qui fâche... Sous le capot de la Leon 3 FR, SEAT propose trois moteurs. De l'essence, avec le petit 1.4 TSI ACT de 150 ch et le 1.8L TSI 180 ch (proche de celui de la VW Polo GTI restylée) et du Diesel, avec le nouveau 2.0L TDI. Celui-ci est même proposé en deux niveaux de puissances avec 150 ch ou 184 ch pour la version qui nous intéresse ici. Pour preuve de son tempérament supposé sportif, on retrouve cette dernière sous le capot de la VW Golf GTD, de la Skoda Octavia RS ou de l'Audi TT 3...
Même si le discours officiel à propos du "Clean Diesel" de Volkswagen a perdu beaucoup de son crédit dernièrement, par rapport au précédent TDI EA189 qui est au coeur du scandale "Dieselgate", tout est pourtant nouveau. Seul l’entraxe des cylindres a été conservé ! Introduit en 2014, le 2.0L EA288 est un bloc modulaire (famille MDB) développé tout spécialement pour la plateforme MQB à moteur transversal. Le respect des normes Euro6 a imposé de profondes évolutions avec pour conséquence une réduction des émissions, officielle, de 40% ! Quoiqu'il en soit réellement à la sortie du pot d'échappement, les ingénieurs ont bien travaillé sur cette nouvelle mouture. C'est notamment le cas du collecteur d’échappement qui, comme sur le 2.0 TFSI, est intégré à la culasse à 16 soupapes. Celle-ci se distingue également par son système de calage variable des soupapes, plutôt rare sur un Diesel ! Le catalyseur et le filtre à particules sont au plus près possible du moteur pour accélérer leur mise en température tandis que le circuit est complété par un catalyseur à stockage des NOx et un double circuit EGR à haute et basse pression, utilisé selon la charge moteur. Le circuit de refroidissement du bloc en fonte a été entièrement revu pour les mêmes raisons et les frottements internes ont été réduits de plus de 15%. Enfin, le circuit de suralimentation a lui aussi été raccourci autant que possible pour réduire le turbo lag au maximum.
Autant le dire dès maintenant, le 4 cylindres en ligne turbodiesel Volkswagen est transfiguré. La pédale de droite donne l'impression de marcher sur un tapis en laine très épais tant le couple disponible permet d'évoluer avec aisance à bas régime. Un moelleux très confortable qui cache une main de fer lorsqu'il s'agit d'enfoncer ladite pédale. Fort comme un buffle, le 2.0L TDI offre 380 Nm entre 1750 à 3000 t/min, ce qui en pratique s'avère beaucoup plus parlant que sa puissance maxi de seulement 184 chevaux à 4000 t/min. A l'usage, ce "turbodé" nouvelle génération masque étonnamment bien ses origines agricoles. Il affiche relativement peu d'inertie, aucune vibration parasite dans le pédalier ou le levier de vitesses - merci les contre-arbres d'équilibrage -, le temps de réponse du turbo est à peine perceptible et, plus surprenant encore, même sa sonorité ne s'avère pas désagréable ! Avouons-le sans mauvaise foi, en gommant les claquements à froid et en accélération, typiques des camionnettes, ce TDI est réellement devenu fréquentable. Certes on reste sur une sonorité de banal 4 cylindres, mais certains de ses congénères à essence ne se montrent malheureusement pas beaucoup plus enthousiasmants sur ce point...
Pour transmettre la puissance aux seules roues avant, le TDI 184 est associé soit à une boîte manuelle, soit à la DSG, avec 6 rapports dans les deux cas. Efficace et agréable en mode Normal, la DSG s'avère très bien adaptée à une conduite sur le couple, autorisée par la grande souplesse du TDI. En mode Sport en revanche, mieux vaut passer par les palettes, malheureusement toujours aussi petites et solidaires du volant, qui éviteront à la gestion de boîte de faire brailler le moteur inutilement.
Tous les moteurs de la nouvelle SEAT Leon sont dotés du système Start/Stop, y compris avec la boîte DSG, permettant d’économiser théoriquement jusqu’à 4% de carburant aux 100 km. Comme sur le TDI Ultra d'Audi, il est complété par un système de récupération d’énergie au freinage et en décélération prolongée. Cette énergie est stockée temporairement au niveau de la batterie qui réalimente le système électrique du véhicule par la suite, permettant de réduire la sollicitation de l'alternateur et ainsi réduire la consommation en carburant. Enfin, parmi les 3 modes du SEAT Drive Profile, le mode Eco autorise le passage en roue libre dès la levée des gaz, supprimant ainsi tout frein moteur jusqu’à ce qu’on actionne la pédale de freins. Un coup d’oeil à l’ordinateur de bord indique une moyenne de 6.6 L/100km, ce qui parait vraiment bon pour une compacte offrant ce niveau de performances.
SUR LA ROUTE
Le châssis de la nouvelle SEAT Leon repose comme vous le savez déjà sur la plateforme MQB qui a permis de diminuer le poids d'environ 90 kg à motorisation équivalente. L'inclinaison du moteur de 12° vers l’arrière et son implantation ont permis aux ingénieurs d’avancer l’essieu avant de 40 mm. Avec l’empattement plus long et une meilleure répartition de la charge sur les essieux, la Leon 3 se montre donc à la fois mieux équilibrée et plus agile. Petite subtilité technique à préciser, seules les Leon FR TSI 180 et TDI 184 disposent du complexe (et coûteux) essieu arrière multibras à ressorts hélicoïdaux et barre stabilisatrice. Sur la version 150 ch, on trouve en revanche un basique essieu arrière semi rigide en forme de U qui dans la pratique se montre un peu moins efficace.
Une raison suffisante pour dépenser environ 1000 € de plus pour le TDI 184 ? Pas forcément, pour un peu plus cher vous pourrez aussi préférer une transmission intégrale 4Drive qui n'est d'ailleurs pas proposée avec le TDI 184. Cependant, s'il est un point sur lequel le TDI 184 creuse la différence, c'est bien celui de l'agrément mécanique. Oui oui, vous avez bien lu : agrément. Disponible sur une plage de régimes démarrant à 1200 tr/mn, il pousse ensuite très fort de 2000 à 4000 t/min quand le TDI 150 commence à rendre les armes vers 3500 tr/mn. Les 60 Nm supplémentaires se font très clairement ressentir, autant sur la souplesse générale que sur les capacités de mise en vitesse avec des performances réellement sportives. Capable de grimper jusqu’à 5000 t/min sans trop donner l'impression de souffrir, ce Diesel étonne. Mais n'espérez pas le grand frisson à ces altitudes. Après 4000 tours la poussée se meurt doucement et le son se transforme en grognement appelant à passer le rapport supérieur. Heureusement fort bien filtré par l'insonorisation très efficace de l'habitacle, le TDI ne maltraite jamais les oreilles cela dit. Pire encore, si l'on peut dire, sa sonorité aux régimes courants prend parfois des accents de moteur essence ! Un peu rauque, comme un bruit d'admission sur une cylindrée généreuse, c'en est presque troublant au début. Mais on s'y fait tellement vite qu'il est difficile de conduire un autre 4 cylindres Diesel après cette "expérience"...
Le comportement de la SEAT Leon FR TDI 184 ch est du genre efficace, bien aidé par la relative légèreté de l’ensemble, mais mériterait quelques améliorations. Il faut d'abord composer avec l'abondance de couple sans autobloquant. Car les 380 Nm ne se font pas prier pour saturer le train avant et faire paniquer le XDS+, même sur sol sec, si vous avez le pied trop lourd et le cerveau trop léger. Un sous-virage inévitable s'en suit et l'arrière, peu coopératif, ne permet en rien de contrebalancer cette tendance. Si vous brusquez trop la Leon FR, l'intervention de l'ESP mettra fin aux mauvais traitements de façon peu glorieuse. Néanmoins, la Leon FR TDI 184 se montre suffisamment agile et performante pour offrir un réel plaisir de conduite. Elle mériterait juste un arrière moins verrouillé et un avant plus mordant.
L'autre petite déception sur ce train avant est la direction à assistance électrique qui filtre trop les remontées d’informations et même le mode Sport ne lui procure qu'une consistance artificielle. Disponible en option à 660 € (sauf sur les versions 4DRIVE), le pack Dynamique comprenant l'amortissement piloté DCC et la Direction Progressive de la Cupra - dont la démultiplication plus directe (2,1 tours de butée à butée contre 2,75 pour la direction standard) varie en fonction de l’angle de braquage - doit lever ces petits bémols car elle nous a pleinement convaincus sur les autres modèles du groupe qui en sont équipés. Peut-être l'option la plus indispensable en fin de compte sur cette Leon FR...
CONCLUSION
:-) Choix de carrosseries Finition Equipement Phares à LED Performances Insonorisation Sonorité (pour un Diesel !) Freinage Consommation |
:-( Surcoût important du Diesel Direction artificielle (sans pack Dynamique) Pas de vrai autobloquant Train arrière trop verrouillé Châssis différent sur FR 150 |
SEAT continue de semer le trouble avec ses sportives au gazole, bien aidé par une Leon FR TDI 184 qui n'est pas là pour amuser la galerie. Construite avec sérieux, elle l'est tout autant sur la route avec son châssis moderne et efficace. Un train avant plus incisif et communicatif (de série) et un arrière moins figé permettraient toutefois de prendre plus de plaisir sur route sinueuse. De son côté, le 2.0L TDI, puissant et volontaire, ne s'en laisse pas conter sur le plan des performances et donnera du fil à retordre à quelques sportives noblement alimentées. Il ne lui manque guère plus qu'une zone rouge reculée de 1000 tours pour se montrer aussi plaisant que le TSI, sinon plus...