BERLINETTE CONTRE-ATTAQUE !
Après la réussite
de la première génération de Berlinette Echappement, le petit
constructeur français basé à Lohéac en Bretagne, persiste
en signant une évolution significative de sa belle aventure initiée
en 1992. La berlinette RS est en effet une évolution de la Berlinette Echappement,
tout en conservant une mécanique identique à la série avec
peu de modifications. C'est toujours la Peugeot 306 S16 qui va servir de donneuse
d'organes avec en cerise sur le gâteau, le nouveau moteur de 167 ch. Sur
la berlinette Hommell de " seulement " 950 kg, il va pouvoir exprimer
tout son talent
Texte : Nicolas LISZEWSKI
Photos : D.R.
Qui aurait osé prédire un tel destin au petit
constructeur français Hommell, également
groupe de Presse bien connu, et qui se décida de créer une voiture
de sport entièrement dédiée au plaisir du pilotage autour
d'une tablée dans un restaurant parisien. Michel Hommell lui-même,
déclarait au début de l'aventure "Berlinette
Echappement" ne pas imaginer durer plusieurs années tant les contraintes
industrielles et d'homologation sont contraignantes et coûteuses. C'était
pourtant sans compter sur la passion et le talent sans limite qui animent Gilles
Dupré le chef du projet et qui en sera le moteur, aidé de son frère,
Eric de Pauw le designer de la première berlinette Echappement et Michel
Hommell bien évidemment. L'aventure durera plus de dix ans, et ce n'est
qu'en 2003 alors que la première berlinette avait été présentée
en 1992 au salon de Paris, que le groupe Hommell annoncera la fin de leur vie
de constructeur automobile, le seuil de rentabilité n'ayant jamais été
atteint. En décembre 1997, Hommell profite du nouveau moteur de la Peugeot
306 S16, dont la puissance est portée à 167 ch, pour développer
une nouvelle Berlinette qui sera baptisée " RS ", en raison de son moteur. Une bonne occasion à Lohéac, le
village breton des irréductibles gaulois de l'automobile sportive, de passer
à l'offensive. Retour sur une auto dont l'état d'esprit n'est de
souffrir d'aucun compromis et d'étaler sur le macadam un caractère
brut
DESIGN
Alors que la première berlinette Echappement
était l'uvre de Eric de Pauw pour son design épuré
et fluide, la RS constitue une évolution marquée par plus d'agressivité
et plus d'efficacité sur les contraintes thermiques. On reconnaît
cependant toujours la silhouette de la berlinette Echappement avec la reprise
notamment à l'identique de la cellule centrale. Pour le reste, les modifications
sont significatives : nouvelle proue avec des double optiques rondes en lieu et
place des blocs optiques de Citroën XM carénés, clignotants
ronds, prises d'air de bas de bouclier agrandies, et surtout extracteur d'air
sur le capot (sortie d'air du radiateur) comme sur les voitures de course. L'agressivité
est bien réelle et marque l'évolution mécanique qui a donné
plus de tonus à la berlinette Echappement. L'arrière devient lui
aussi plus personnel dans son interprétation. Exit les blocs optiques arrière
de Citroën ZX, et bienvenue les doubles
optiques rondes comme sur les Ferrari ! Le bouclier adopte une sortie d'échappement
centrale et plus volumineuse. Pour le reste, on retrouve tous les stigmates de
course des Berlinette Echappement : trappe à essence type aviation, petites
vitres coulissantes (!), jantes alu 5 branches (d'un dessin nouveau, ce ne sont
plus désormais des jantes de Peugeot 605
SV), attache-capot avant sur les flancs
Et petit détail qui ne
gâche rien, un petit logo " RS " stylisé est apposé
juste devant le passage de roue arrière (qui est désormais rond
et non plus plat comme sur la Berlinette Echappement). Les plus observateurs auront
reconnu également des rétroviseurs issus également de la
grande série, tout comme le pare-brise qui provient d'une Citroën
XM. Une fois la porte ouverte, l'habitacle dégage un parfum de sport-prototype
! Si vous êtes un habitué des autos de la grande série, aussi
exclusives soient-elles, révisez ici vos jugements sur le confort et l'équipement.
Les seuls luxes ici sont dédiés entièrement à la surveillance
de la mécanique ainsi qu'à l'efficacité dans le pilotage.
Ne cherchez donc pas de climatisation, de vitres électrique ou d'airbags.
Ici tout n'est qu'alu visible à profusion, tandis que les deux sièges
baquets course annoncent la couleur. Dans la berlinette RS, il va y avoir du sport
! Bien calé on peut mieux se rendre compte de la signification de l'expression
spartiate :un simple câble pour ouvrir les portes (comme sur les Ferrari
F40 ou les Porsche 964 RS), une batterie
de manos sur une planche de bord épurée et simpliste, le volant
trois branches à jante épaisse frappé en son centre de l'emblème
aux trois épis et le levier de vitesses bien positionné sur la console
centrale. Alors évidemment, si pour le pilotage, cet habitacle est parfait,
les voyages au long court auront vite fait de décourager les plus motivés
! C'est surtout que la chaleur et le niveau sonore qui règnent à
bord sont vite éprouvants pour ceux qui ne sont pas des passionnés
intégristes !
MOTEUR
La première Berlinette Echappement
qui servi de prototype, aussi baptisée affectueusement " La Grand-Mère
", était équipée du moteur de la Peugeot
309 GTI16. Mais entre-temps, lorsque le modèle définitif est
arrivé sur le marché, c'est le moteur de la 306 S16 de 155 ch qui
fit offrande de ses talents. Une mécanique plus à l'aise que dans
la Peugeot 306 évidemment plus lourde, mais toujours moins étincelant
depuis la pose du catalyseur. Peugeot, alors pas encore sourd aux attentes des
amateurs de voitures de sport, avait su réagir en retravaillant son 2 litres
avec une amélioration très nette de ses performances. Ce XU10J4RS
bien que toujours doté d'un bloc en fonte, était allégé
et optimisé. Le résultat était à la hauteur des espérances
des passionnés avec 167 ch à 6500 tr/mn et 20 mkg à 5500
tr/mn. La Peugeot 306 S16 pouvait enfin se montrer digne de feue la 309 qui fit
tant de ravage chez les GTI.
C'est ce moteur qui donna son nom à la première évolution
de la Berlinette Echappement en reprenant le " RS " de la fin de la
nomenclature. La Berlinette allait pouvoir compter sur une mécanique de
série (chère à Gilles Dupré pour la simplicité
et fiabilité) plus musclée. Toujours alimenté par une gestion
électronique intégrale Magneti-Marelli, ce deux litres est toujours
positionné au centre de l'auto vers l'arrière, mais il est retourné
dans le bon sens, évitant ainsi d'avoir recours à un système
spécifique et un carter de boîte spécial propres aux Berlinette
Echappement (BE) et aux Barquettes (BA). La boîte six vitesses est toujours
celles des premières Berlinette, conçue et réalisée
par la SMAN, mais son étagement est modifié pour s'adapter à
la nouvelle mécanique. Si sur les premières Berlinette Echappement
on pouvait leur reprocher un léger manque de performances, la RS fait taire
les critiques : avec 230 km/h en pointe et 27,9 secondes au kilomètre départ
arrêté, la Berlinette RS vient chasser sur les terres de voitures
de sport plus capées. Assez curieusement, le moteur de la 306 S16 semble
transfiguré. Il faut avouer que les roues arrière sont désormais
motrices avec une motricité excellente tandis que le quatre cylindres a
300 kg de moins à déplacer.
CHASSIS
Pour le châssis
de la Berlinette Echappement, Gilles Dupré a su écouter lors de
sa conception les hommes de Michelin pour la mise au point du châssis. Ainsi,
c'est donc depuis le pneu qu'est parti tout le travail. Un châssis tubulaire
se charge d'être la base sur laquelle se fixent les éléments
mécaniques et les trains roulants. Les trains roulants sont évolués
et très typés courses avec un système triangulé à
l'avant et McPherson à l'arrière. Les jantes de 16 pouces sont chaussées
exclusivement de pneus Michelin Pilot Sport 205/45 ZR 16 AV et 225/45 ZR 16 AR
(il est possible de monter également des pneus Racing 20/61-16 AV et AR
-sec N02, mixte TA 01, pluie P2B-). Avec un poids plume tassé sous la tonne,
le freinage Bendix à disques ventilés aux quatre roues, en provenance
des Peugeot 605, est efficace et endurant. Volant en main, la Berlinette RS est
étonnante, car malgré une puissance relative sur le papier, les
sensations et vitesses de passage sont étonnantes ! Il faut quelque temps
pour réussir à aller en chercher les limites, mais une fois le mode
d'emploi assimilé, cette Berlinette est une vraie diablesse. Vive et précise,
elle se faufile dans les enchaînements avec aisance et toutes les commandes
répondent instantanément et avec franchise. Rien n'est filtré,
tout est authentique ! Pour le freinage, vous laissez l'ABS à votre monospace
de la semaine, la Berlinette RS n'en a pas, c'est votre pied qui devra doser avec
talent. La Berlinette RS se pilote plus qu'elle ne se conduit et c'est avec votre
postérieur qu'on la sent se mouvoir. Une vision d'ascète du plaisir
automobile que seules les Lotus Elise, ou Caterham et autres véhicules uniquement
dédiés aux joies du pilotage procurent encore de nos jours
ACHETER
UNE HOMMELL BERLINETTE RS
Autant
le dire tout de suite, comme pour toutes automobiles de sport " collector
" de notre guide d'achat, la patience est votre meilleure alliée.
Avec seulement 63 exemplaires produits, dont environ 50% ont été
achetés pour faire de la compétition, il vous faudra déjà
attendre qu'un propriétaire ait la mauvaise idée de se séparer
de sa belle, ou en soit obligé pour diverses raisons. Les prix affichés
peuvent ainsi varier de manière assez significative, mais on peut raisonnablement
estimer que 27 à 32 000 euros est une fourchette cohérente pour
ce type d'autos selon l'état et l'historique. Comme toujours pour ce genre
d'autos, ne signer un chèque qu'à la seule condition d'être
certain de la concordance des numéros d'identification, mais aussi d'avoir
la preuve de l'historique (nombre de propriétaires successifs), de l'usage
(compétition ou non), et surtout de l'entretien. Des autos qui ne présentent
pas des garanties d'entretien doivent être éliminées de votre
liste d'achat. Peu de faiblesses notoires sont à signaler sur les Berlinette
RS, jugées fiables car bien conçues et dotées de mécaniques
de grande série éprouvées sans grandes modifications. Les
catalyseurs sont à surveiller, et il sera intéressant de vérifier
que l'auto n'a pas connu de chocs (châssis tubulaire, mais aussi la carrosserie
en polyester). Comme pour toute automobile exclusive, les préconisations
du constructeur sont à respecter au pied de la lettre. Ainsi, il faut rappeler
que seuls les pneumatiques Michelin ont été homologués sur
les Berlinette RS. Pour le circuit de freinage, seul le liquide Bendix SAE 1703
DOT 4 est validé par Hommell. Les vidanges moteur doivent intervenir régulièrement
avec de l'huile Yacco Galaxie 15W50. Si l'envie de la compétition vous
prenait, ne pas hésiter à vidanger tous les 2500 km la mécanique.
Pour plus de sûreté, il est également recommandé de
vidanger la boîte de vitesses avec de l'huile Esso ou Total 75W80 en même
temps que la vidange moteur. Si l'usage des Berlinette RS impose une sérieuse
dose de passion et d'abnégation, la partie fiabilité et entretien
est tout de même plus souple à votre égard. L'emploi de mécanique
de grande série avec très peu de modifications (ce qui n'est pas
le cas de la RS2) permet de limiter certains coûts et de garantir une fiabilité
indispensable, voulue par Gilles Dupré.
CHRONOLOGIE HOMMELL BERLINETTE RS
1990 : En
février, Gilles Dupré, Michel Hommell et Jean-Charles Rédélé
déjeune au restaurant La Calèche à Paris et initie le projet
Berlinette Echappement.
1991 : En avril, un sondage est paru dans le
magazine Echappement pour demander aux lecteurs leur vision de la remplaçante
de la berlinette Alpine A110.
En août, le projet Berlinette Echappement
démarre dans l'atelier du sous-sol des locaux de St Cloud (siège
du groupe de presse Hommell).
1992 : En octobre, le premier prototype
de la Berlinette Echappement est présenté au Mondial de Paris.
Le
16 décembre, elle réalise ses premiers tours de roue à Montlhéry.
1993 : Les deux premiers numéros de série châssis 01 et 02 sont
utilisés pour l'homologation.
1994 : Le 1er avril, l'usine de
Lohéac est inaugurée.
La première berlinette Echappement
sort de l'usine le 16 août et est livrée à Stéphane
Grégoire.
En octobre, Hommell dévoile le cabster au salon de
Paris.
1995 : En septembre, la barquette est présentée
puis développée, homologuée et produite.
1997 :
En décembre, la nouvelle Berlinette RS est présentée, puis
développée, homologuée et produite.
2000 : En octobre,
Hommell dévoile la Berlinette RS2, plus puissante et exclusive encore que
la RS.
2002 : Les dernières Berlinette RS sortent de l'usine
de Lohéac.
2003 : En février, Echappement annonce la maquette
de la nouvelle Barquette.
En octobre, le couperet tombe pour la marque Hommell
: l'aventure est terminée.
PRODUCTION HOMMELL BERLINETTE RS
1997 : 2 exemplaires
1998 : 19 exemplaires
1999 : 13
exemplaires
2000 : 17 exemplaires
2001 : 1 exemplaires
2002 : 11 exemplaires
Total
(1997-2002) : 63 exemplaires
::
CONCLUSION
Véritable hymne à la joie du pilotage, la
Berlinette RS ne s'adresse véritablement qu'à une frange la plus
intégriste des passionnés de voitures de sport. Si elle est globalement
fiable et pas trop chère à l'achat, son usage va vite vous contraindre
à ne l'envisager que pour les balades sur les petites routes et les sorties
circuits. Elle reste une bonne occasion de rouler dans l'une des dernière
sportive française artisanale produite...
CE QU'ILS
EN ONT PENSE :
"Le 16 soupapes PSA procure de sacrées reprises
à cette automobile spartiate, dotée d'une boîte spécifique
à 6 rapports ultraserrés et rendant près de trois quintaux
à la 306 S16. Le châssis tubulaire en acier est d'une conception
très sophistiquée et caissonné par des tôles d'aluminium
rivetées. Bien qu'ouverte, puisque commune à l'ex-barquette, cette
magnifique structure maison affiche une rigidité phénoménale.
La carrosserie est en résine polyester armée de fibres de verre.
Le tout est donc totalement artisanal mais réceptionné aux "Mines"
comme une 306. Cette religieuse façon d'apprécier l'automobile est
aujourd'hui partagée par près de 200 adeptes..."
Le
Moniteur Automobile - Guide d'achat 2000-2001 - Hommell Berlinette RS - Collège
d'auteurs. |