MERCEDES-BENZ AMG-GT (2014 - )
Le retour des supercars
Après la flamboyante SLS, voici le second modèle intégralement industrialisé par AMG. Moins élitiste que sa devancière, l'AMG GT n'en demeure pas moins pour autant une authentique supercar ou presque...
Texte : Maxime JOLY - Photos : Thomas POSLUSZNY
Alors que Mercedes et AMG ont confirmé lors du Mondial de Paris 2016 la sortie future d'une hypercar, l'histoire de la supercar date de plusieurs décennies chez le constructeur à l'étoile. Outre les versions routières des CLK DTM et CLK GTR, ou bien la délirante SL 73 AMG, il y eut aussi la superbe - mais imparfaite - SLR conçue avec McLaren avant qu'AMG ne réalise en interne ses propres joujoux. Bien sûr, ses flèches d'argent connurent de multiples variantes qu'il serait trop long de lister ici et il en est de même pour la GT dont les déclinaisons R et C ont récemment été présentées...
PRESENTATION
Etant basée sur la SLS, et plus précisément sur le roadster avec son empattement réduit de 50 mm, on dénombre de nombreux points communs entre les deux modèles. D'un point de vue industriel, cela semble logique pour un constructeur de la taille de Mercedes-AMG, branche très modeste par la taille au sein du géant de Stuttgart. Mais la bonne nouvelle est que cela profite au client et, plus exactement à son porte-monnaie. Voici le genre de remarque que je ne pensais pas écrire dans un article sur une Mercedes et c'est pourtant la vérité. Nous y reviendrons.
Comme la SLS, la GT est assemblée dans l'usine de Sindelfingen et possède une carrosserie en aluminium. Presque, car pour être exact, le couvercle du coffre est en acier et le module avant en magnésium. La caisse brute est composée à plus de 90 % d'aluminium et ne pèse ainsi que 231 kg. La ressemblance entre les SLS et GT sont plus frappantes sur les découvrables que sur les coupés. La poupe arrière de la GT est redessinée et lui offre une troisième porte par l'intermédiaire d'un hayon. Une certaine ressemblance avec les Jaguar Type E et F-Type n'est pas imaginaire mais on retrouve aussi des airs de Porsche 911, autant de références plutôt agréables à admirer. Par le jeu des différents éléments de design, le coupé arbore une allure souveraine et déterminée : au centre de la partie avant figure la grille de calandre diamant tridimensionnelle avec étoile Mercedes centrale, lamelle large et inscription AMG. Des projecteurs LED hautes performances avec feux de jour dessinant des « sourcils » stylisés, feux de position et clignotants, ainsi que trois réflecteurs de feux de route séparés. Des prises d'air surdimensionnées n'ont rien de factices et fournissent l'air frais nécessaire aux modules de refroidissement tout en réduisant la portance. La teinte rouge métalisé du modèle d'essai lui va à ravir. Difficile de ne pas craquer !
HABITACLE
L'habitacle ne déçoit pas non plus. Tout est bien assemblé et les matériaux de qualité sont omniprésents. La présentation se distingue des productions AMG plus classiques à plusieurs égards, hormis par la présence de l'écran tactile central. Le tunnel central entre les passagers abrite la console de jeux. Point de manettes mais plusieurs boutons dont certains sont éloignés du poste de pilotage. Pas très ergonomique surtout à moins de mesurer moins d'1m80. La ligne de boutons en haut du pare-brise contient le chauffage des sièges, l'ouverture de l'aileron ou encore le Warning. Derrière, pas de moteur mais un coffre assez vaste et une barre de rigidité (en carbone dans le cas présent). Les premières impressions sont excellentes, il ne reste plus qu'à les confirmer…
Le prix de départ de l'AMG GT est de 124.900 €, certes avec un équipement incomplet, mais avec une dotation de série qui offre pourtant déjà l'essentiel sinon l'indispensable. Evidemment, sur un modèle d'essai destiné à la presse, le constructeur a tout intérêt à présenter un maximum de raffinements différents et la note prend instantanément un surplus de 24.000 €. En prix de base, on est à 12.000 € de moins qu'une i8 et 45.000 € qu'une R8, toutefois plus frénétique dans sa motorisation, il est vrai. La SLS était quand même facturée à 189.000 € en 2009, avec plus de watts et ses portes magiques, d'accord, mais nous sommes suffisamment pointilleux sur les hausses de tarif pour signaler l'inverse lorsque cela se produit…
MOTEUR
L'AMG GT n'est pas qu'un modèle, mais une vraie petite gamme dans la gamme Mercedes. Une famille qui risque encore de s'agrandir si la rumeur sur une déclinaison cinq portes est fondée. Alors que le V8 AMG M178 (carter sec) en est déjà à sa quatrième évolution, nous avons opté pour la moins puissante d'entre elles pour plusieurs raisons : varier les plaisirs par rapport à la C 63 S Coupé, voir ce que la GT « de base » vaut et, tant qu'à faire, ne pas sombrer dans la course à la puissance. Avec 462 chevaux, il devrait y avoir de quoi faire. Je ne reviendrai pas sur les spécificités de ce V8, disponibles dans l'essai de la C 63 S Coupé.
Au volant, confirmation que la puissance est "suffisante". Naturellement, avec un planning qui nous a amené dans la GT après la fusée McLaren 650S, les accélérations de l'allemande paraissent plus mesurées. Le 0 à 100 km/h abattu en 4 secondes n'est tout de même pas anodin. Ceci étant, les chronos sont une chose, les sensations, en sont une autre et, par bonheur, on est servi. Assis bas et très reculé, on a la sensation d'être dans une vraie voiture de sport et non en berline amputée de deux portes. La sonorité est elle aussi franchement différente par rapport au M177 à carter humide. Le 4 litres sonne comme un vrai V8 AMG. Il fait glouglou et grogne comme on aime. Toujours linéaire car plein partout, le V8 offre une formidable élasticité de bas en haut du compte-tours, fixé à 7200 tr/mn, bien qu'il soit un peu plus faiblard que son homologue de 510 équidés à l'approche de la zone rouge. Honnêtement, c'est pour pinailler.
A l'instar de la SLS, la GT se différencie du reste de la gamme AMG (A45 mise à part) par l'utilisation d'une boîte à double embrayage. L'AMG Speedshift à sept rapports demeure très plaisante à manier. Vive et bien gérée en mode automatique, elle s'accommode également très bien du mode manuel. Pour autant, il n'y a absolument rien non plus à reprocher aux autres boîtes auto 7 et 9. Petite nuance par rapport à la S, la GT ne dispose pas du mode Race. Il faut se contenter des Individual, Comfort, Sport et Sport +. Chacun varie en parallèle le niveau de l'amortissement et l'échappement actif qui peuvent cependant être gérés indépendamment. En ajoutant le mode individuel où on paramètre à sa guise la direction, on peut carrément tout faire. Typiquement ce qu'il manque à la Honda NSX II, comme vous le verrez dans notre prochain essai.
Dernière bonne nouvelle, et pas des moindres, son appétit. C'est tout ou rien mais le fait de pouvoir être sur une consommation de 8l/100 km lorsque l'on n'a pas envie d'attaquer, c'est remarquable et appréciable. A l'inverse, le réservoir se vide à vitesse grand V si l'on caresse un peu trop la pédale de droite. Mais afficher une moyenne de 14 litres sur un essai de ce genre, je ne peux m'empêcher de dire bravo.
Si vraiment vous voulez plus de puissance, vous pouvez aller jusqu'à la R de 585 chevaux. En parallèle, la toute nouvelle E 63 S 4Matic développe la bagatelle de 612 chevaux à partir de ce moulin. Si bien que cela semble quelque peu déroutant que la supercar ne soit pas au sommet de la gamme mais, après tout, on en a l'habitude chez Mercedes-AMG puisque c'était déjà le cas pour la SLS. La preuve que la sportivité n'est pas qu'une notion de puissance…
SUR LA ROUTE
La transition vers ce nouveau paragraphe est toute indiquée. Après avoir déjà évoqué la position de conduite, continuons sur une autre distinction : la direction. Souvent mal calibrée et trop assistée chez Mercedes, elle est dans la GT beaucoup plus précise, plus directe. Elle serait parfaite si elle ne manquait pas encore d'un soupçon de consistance et de retour d'information. Son boîtier est logé dans un carter en aluminium.
Jugée inconfortable par plusieurs confrères, nous n'avons pas du tout ressenti la même chose. Les sièges font office de fusibles lorsque l'amortissement est paramétré au plus dur et filtrent à merveille les aspérités de la route. C'est parti pour des heures de roulage sans se fatiguer. Effectuant notre essai sur le réseau secondaire, l'amortissement maximal ne se montre de toute façon pas à son avantage sur des routes accidentées. Le compromis d'efficacité est supérieur et le confort, royal. Que demande le peuple ?
Et question efficacité justement ? Il faut assimiler les dimensions très américaines de l'engin. Le gros train avant n'est pas toujours facile à placer, en particulier sur le parcours que nous avons choisi. On s'aperçoit rapidement que c'est plus par retenue du conducteur que par manque de talent qu'il n'y va pas. C'est propre et consistant. Le sous-virage est gentiment contenu. Il faut se mettre dans l'idée que l'avant ne vous fera pas défaut et que, contrairement à un chien, le collier et la laisse sont à poser sur le train arrière. Les routes normandes en automne n'étant guère favorables à la motricité, on surveille l'envoi des gaz et tout va bien. Cette AMG GT porte bien son nom tant elle est équilibrée et cohérente. Seul le freinage peut éventuellement prêter à discussion. Puissant, il n'a pas non plus manqué d'endurance mais les 1.615 kg à stopper ainsi que les assauts répétés sur la pédale de gauche des précédents essayeurs ont laissé quelques stigmates se traduisant pas des vibrations à l'avant. Equipée d'étriers fixes à six pistons, la GT reçoit des disques en acier de 360 mm à l'avant et à l'arrière. Sur la S, ils sont portés à 390 mm sur l'avant. En option, il est possible d'opter pour le système de freinage céramique et ce quelle que soit la version.
Utilisable en ville la GT ? Vendues comme étant plus polyvalentes que par le passé, ces nouvelles générations de supercars se doivent de réussir le test de l'essai urbain. Soyons honnêtes, la visibilité n'est pas optimale et ne voyant pas avec certitude où s'arrête toutes les parties de la carrosserie, on se risquera difficilement au créneau...
CARACTERISTIQUES TECHNIQUES
MERCEDES-BENZ AMG-GT
MOTEURType : 8 cylindres en V à 90°, 32 soupapes
Position : longitudinal AV
Alimentation : Injection directe + 2 turbos (1,1 bars) avec échangeur
Cylindrée (cm3) : 3982
Alésage x course (mm) : 83 x 92
Puissance maxi (ch DIN à tr/mn) : 462 à 6000
Couple maxi (Nm à tr/mn) : 600 de 1600 à 5000
TRANSMISSION
AR
Boîte de vitesses (rapports) : Speedshift MCT (7)
ROUES
Freins Av-Ar (Ø mm) : disques ventilés perforés (390) - disques pleins (360) + ESP
Pneus Av-Ar : 255/35 - 295/35 R19
POIDS
En ordre de marche (kg) : 1540
Rapport poids/puissance (kg/ch) : 3,3
PERFORMANCES
Vitesse maxi (km/h) : 304
400 m DA :
1000 m DA :
0 - 200 km/h :
CONSOMMATION
Moyenne cycle mixte (L/100 km) : 9,3
Moyenne de l'essai (L/100 km) : 14
CO2 (g/km) : 216
PRIX NEUF (10/2016) : 124.900 €
PUISSANCE FISCALE : 35 CV
CONCLUSION
:-) Vrai design de supercar Présentation intérieure Position de conduite Confortable Sonorité du V8 Gestion de la boîte Consommation raisonnable Tarifs bien placés… |
:-( …sans les options Direction manquant encore de consistance Endurance du freinage sans l'option céramique ? Poids encore élevé Manœuvres délicates en ville |
Le "ou presque" de l'introduction n'était pas péjoratif, au contraire. Par habitude, une supercar possède beaucoup de mauvais côtés qui la rendent inutilisable au quotidien. Ce défaut s'est corrigé au fil des années sur la grande majorité du marché et l'AMG GT s'utilise avec facilité dans quasiment toutes les situations. Suffisamment performante et sportive dans cette version de base, elle est même affichée à un tarif tout à fait correct si l'on ne tombe pas dans le piège des options…