PORSCHE 911 (997) GT2 RS (2010 - 2011)
TERRIFIANTE
La course à la puissance est terminée ! Souvenez-vous de cette phrase lancée par les constructeurs automobiles, il y a déjà quelques années de cela. Plus facile à dire qu’à faire, notamment pour Porsche qui nous gratifie de sa 911 la plus puissante jamais produite, la GT2 RS...
Texte :
Maxime JOLY
Photos : Étienne ROVILLÉ
A la manière de Ferrari avec la 599 GTO, Porsche fait patienter son petit monde jusqu’à l’arrivée en septembre 2013 de la 918 Spyder. A mi-chemin entre une super-911 et une supercar, la GT2 RS est avant tout une vitrine technologique pour Porsche.
PRESENTATION
C’est le 4 mai 2010 que Porsche officialisa la sortie de la GT2 RS, limitée à 500 exemplaires dérivée de la GT2 de série. A l’extérieur, elle fait le plein de carbone sur le capot, la base de l’extracteur d’air, les prises d’air latérales, la partie centrale du capot moteur et la lèvre du spoiler arrière. Si cela vous semble insuffisant, le pack Carbone offre le même traitement aux ailes avant. Le gain de poids se poursuit avec le capot arrière en polymère, la lunette arrière et les vitres latérales en polycarbonate, sans oublier les panneaux de porte allégés.
La tenue de sport, ou plus exactement de RennSport, se poursuit avec les jantes de 19 pouces couleur argent, or ou noir, à écrou central et spécifiques à ce modèle. Il en est de même pour les voies élargies de 26 mm à l’avant et de 12 mm à l’arrière. Le bandeau latéral siglé GT2 RS permet aux passants de ne pas se tromper sur la marchandise. Dommage que ce que vous verrez le plus souvent d’elle, en l’occurrence l’immense aileron posé sur son joli popotin, soit strictement identique à celui de la 997 GT2…
HABITACLE
Impossible de confondre l’habitacle de la GT2 RS avec celui d’une 911 Carrera. Le compte-tours est sur fond de couleur titane tandis que l’on retrouve de l’alcantara sur la couronne de volant, le levier de vitesse, le frein à main, les poignées de porte et les sièges. A ce propos, l’acheteur avait le choix entre trois types de sièges. Les baquets allégés pesant seulement 10 kg chacun, les baquets sport (gratuits) et les baquets sport adaptatifs (payants), avec pour seule différence d’être réglables électriquement.
Selon la configuration de la voiture, les combinaisons de l’assortiment de cuir et d’alcantara vont de noir/noir à noir/rouge. Le pack Clubsport comprend l’arceau, le harnais et l’extincteur. Le propriétaire pouvait décider de le garder ou de le faire enlever, sans supplément de prix. Les frileux pouvaient aussi demander de ne pas disposer de la climatisation pour gagner quelques précieux kilogrammes supplémentaires…
Outre le système audio livré en série, le pack Audio Plus permettait de disposer d’un système hi-fi qui, de mon point de vue, n’a pas grand-chose à faire dans un tel monstre. Une Porsche moderne n’en serait plus une sans le pack Chrono optionnel, assorti à un autre, sobrement appelé Chrono Plus, comme plus cher…
MOTEUR
Jusqu’à maintenant, les RS de Porsche carburaient exclusivement aux moteurs atmos. A Zuffenhausen, on a décidé de faire une entorse à la règle en dopant la GT2. Contrairement aux autres 997 qui sont passées aux 3.8, la GT2 RS reste fidèle au 3600 cm3 qui tire son origine des années 80. Refroidi par eau tout comme le bloc de la 956 dont il dérive, il poussa ses premiers cris sur routes ouvertes dans la 964. D’abord dépourvu de toute suralimentation, on lui greffa une turbine KKK sur celle qu’on appelle en France la 965 Turbo. La génération 993 passa à la double turbine sur deux modèles phares : d’abord la Bi-Turbo et ensuite la rarissime GT2 Street Legal, première de la lignée des GT2. Depuis, ce blason a acquis ses lettres de noblesse chez les porschistes grâce à des performances toujours plus démoniaques.
Seulement, impossible de satisfaire totalement une clientèle de plus en plus avide de puissance. Certains se sentaient à l’étroit avec 530 chevaux alors Porsche a pensé à eux. Avec les 90 étalons offerts, ils devraient en avoir pour leur argent et bénir les dieux de faire partie des 15 français qui ont eu la chance de s’offrir la bête. L’accroissement de la pression de turbo à 1,6 bar, l’apparition de nouveaux échangeurs air/air et le travail porté sur l’admission à expansion ont permis d’obtenir un rendement de 172 ch/L et d’atteindre la puissance de la 956 de compétition ! La boucle est bouclée.
Pensée pour se défouler sur circuit, la Porsche fait appel à une lubrification par carter sec et à un volant moteur monomasse (plus léger) qu’elle partage avec les GT3 et GT3 RS. La consommation tire bénéfice du régime Slim Fast, avec 12 litres annoncés en parcours mixte ce qui au vu de la puissance et des performances est plus que raisonnable. Au moins aussi raisonnable que la conduite qu’il faut adopter pour s’y tenir…
Etouffée par le souffle des deux turbocompresseurs à géométrie variable, la sonorité du Flat6 se fait discrète, échappements en titane ou pas. Leur seul mérite revient à alléger la caisse de 8 kg. Incapable de donner autant de voix que ses semblables atmosphériques, mieux vaut ne pas tenter la comparaison du 3.6 à plat au V10 de la Carrera GT. Malgré 8 chevaux de moins, le 10 cylindres remporte les suffrages haut la main. Cependant, n’enterrez pas trop vite la RS.
La GT2 RS se rattrape dans d’autres domaines, à commencer par celui des reprises qui tiennent plus du registre aérospatial que de l’automobile. 300 km/h en 28,9 secondes, RPP de 2.21 kg/ch et rapport poids/couple sous la barre des 2, on a déjà le tournis assis sagement dans son canapé. Ce n’est pourtant rien par rapport aux poussées dantesques qui vous encastrent au fond du baquet ! Pour parvenir à ce résultat, point de sorcellerie, juste du savoir-faire. Il serait injuste de ne retenir de la nouvelle RS que sa « turbalisation » et de la discréditer en jugeant le procédé facile. Les turbocompresseurs sont à géométrie variable, ce qui consiste à faire varier l'orientation du flux des gaz d'échappement alimentant la turbine à l'aide d'aubes pilotées électro-mécaniquement. Le procédé permet de profiter d'une pression de suralimentation élevée, apanage des gros turbocompresseurs, sans en payer l'inertie synonyme de temps de réponse élevé. Le système de distribution variable VarioCam Plus accroît le taux de remplissage en associant un déphaseur d'arbres à cames (à l'instar du Vanos de BMW) et des cames à double profil permettant de faire varier la levée de soupape en fonction du régime moteur et de la charge. Entre les deux, les conduits d'admission à expansion permettent de limiter l'échauffement des gaz admis et de limiter les résonances. Avec 700 Nm disponibles dès 2.250 trs/min, il n’y a aucun doute à avoir sur le résultat.
Du couple, la RS en a à foison. En contrepartie, il faudra faire une croix sur les envolées du fantasmagorique V10 et vous contenter d’un régime maximal situé à 6.750 tours. A ce niveau, la GT3 fait beaucoup mieux, c’est sûr. Du coup, malgré des performances ahurissantes, on reste sur notre faim. Là où une 959 se démarquait de la concurrence grâce à ses deux turbos à double étage, une première à l’époque, une GT2 RS ne le peut plus… Ce qui ne l’empêche pas de se démarquer grâce à un détail tout simple mais tellement important : sa transmission. Pas de palettes au volant (ni même en option), la GT2 se conduit à l’ancienne. Attention, l’impressionnant couple de camion qui déboule dans les synchros de la boîte ne vous ménagera pas ! C’est avec la Corvette ZR-1 la dernière supercar de cette trempe. Cette seule caractéristique rend la GT2 RS éminemment sympathique et probablement collector. Pourquoi ? Simplement parce qu’à partir de la 991, GT3 et GT2 ne seront disponibles qu’avec la PDK à double embrayage. L’argument du gain de poids offert par la boîte mécanique ne l’aura pas éternellement sauvée…
SUR LA ROUTE
Avec le temps va, tout s’en va. Le moteur en sac à dos de la 911 aura causé des frayeurs à plus d’un conducteur. Au fil des générations, Porsche a augmenté l’empattement pour une prise en main plus facile, tout en conservant les avantages tirés du moteur logé en porte-à-faux arrière. De là à dire que la teutonne s’est assagie, il y a un pas que quelques puristes ont franchi. Mais s’il y en a bien une qui continue à faire peur, c’est la Porsche 911 GT2, surnommée la "faiseuse de veuves". Le décor est planté…
Imaginez une 997 Turbo gonflée à bloc et dépourvue de transmission intégrale. La grenade sous la pédale de droite ne demande qu’à être dégoupillée. Plusieurs pilotes aguerris s’y sont d’ailleurs cassés les dents. Trois « Je vous salue Marie » ne seront pas de trop avant de se mettre en route au volant de la terrifiante GT2 RS pour mettre toutes les chances de son côté. On s’attend à faire un demi-tour sur place et à faire crisser les imposants Michelin au premier lâché de gaz. Même pas ! La motricité est impeccable. La combinaison du grip des Michelin et l’efficacité du différentiel autobloquant dont le tarage évolue selon qu’il y a ou non accélération est un morceau de bravoure à elle seule.
Pour autant, n’espérez pas que la voiture fasse le boulot à votre place. Comme sur la 997 GT3 RS, tous les réglages sur la hauteur, le carrossage, les voies et les barres stabilisatrices sont possibles et incombent au pilote. L’essieu avant utilise une suspension McPherson avec des bras longitudinaux et transversaux indépendants pour chaque roue. Des paliers à rotule à l’avant et des supports d’essieu fixes à l’arrière optimisent la liaison du châssis et de la carrosserie. Plus basse de 25 mm qu’une 911 classique, la 911 GT2 RS ne s’aventurera pas sur toutes les routes.
Pour diminuer au maximum le poids de l’auto, les bras obliques de l’essieu arrière sont en aluminium. Le poids de la RS bi-turbo est d’ailleurs un vaste sujet. Pour respecter les 1.370 kg annoncés (soit 70 de moins que la GT2), il faut conserver les sièges baquet allégés de 20 kg, les disques carbo-céramique, renoncer à la climatisation, opter pour le pack Carbone et la batterie lithium-ion. Le PASM, sorte de miracle concocté par Porsche, est livré en série. Le mot miracle n’est pas exagéré compte tenu des exploits faits en matière de confort, par rapport au pedigree de l’engin. Je pinaille car même en s’octroyant quelques éléments de confort, la Porsche conserve 200 bons kilos d’avance sur une Ferrari 599 GTO…
Les aides à la conduite sont paramétrables de plusieurs façons, l’antipatinage et le contrôle de stabilité étant désactivables en deux temps. Les freins de 380 mm à l’avant et de 350 mm à l’arrière, supportés par des étriers monobloc en aluminium à six et quatre pistons, sont autant performants qu’endurants. Pour ceux que cela intéresserait, il est possible de repasser sur disques en acier, moins onéreux à l’usage.
CARACTERISTIQUES TECHNIQUES
PORSCHE 911 (997) GT2 RS
MOTEURType : 6 cylindres à plat, 24 soupapes, 2 double arbres à cames en tête + calage variable Variocam Plus
Position : longitudinal porte-à-faux AR
Alimentation : Injection électronique Bosch ME 7.8 + turbo à géométrie variable (1,6 bars)
Cylindrée (cm3) : 3600
Alésage x course (mm) : 100 x 76,4
Puissance maxi (ch DIN à tr/mn) : 620 à 6500
Couple maxi (Nm à tr/mn) : 700 de 2250 à 5500
TRANSMISSION
AR + autobloquant + PASM
Boîte de vitesses (rapports) : Manuelle (6)
ROUES
Freins Av-Ar : disques ventilés et perforés (Ø 380 mm) étriers 6 pistons - (Ø 350 mm) étriers 4 pistons
Pneus Ar-Ar : 245/35 ZR 19 - 325/30 ZR 19
POIDS
Données constructeur (kg) : 1370
Rapport poids/puissance (kg/ch DIN) : 2,2
PERFORMANCES
Vitesse maxi (km/h) : 330
1000 m DA : 20"4
0 à 100 km/h : 3"5
0 à 200 km/h : 9"8
80–120 km/h (5ème) : 4"
CONSOMMATION
Moyenne constructeur (L/100 km) : 11.9
PRIX NEUF (2011) : 239.589 €
PUISSANCE FISCALE : 56 CV
CONCLUSION
:-) Performances hallucinantes ! Poussée (très) brutale Boîte manuelle Freinage Poids Gueule d’enfer |
:-( A ne pas mettre entre toutes les mains... Moins jouissive qu’une GT3 Sonorité décevante Hauteur de caisse problématique |
Usine à sensations, bête de circuit, la Porsche 911 GT2 RS est tout cela à la fois. Malheureusement, il lui manque ce petit quelque chose qui rend une Carrera GT ou même une GT3 si spéciales. La faute à un moteur trop discret sur le plan sonore et, par-dessus tout, à une conduite moins exaltante. La course à l’armement aurait-elle trouvé ses limites ?