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LOTUS ELETRE S (2023 - )

Au pied de l'Eletre...

Lotus Cars a toujours été associé au « Light is Right », devise de son créateur Colin Chapman. En prenant le virage de l’électrique, concrétisé en 2020, l’ancien petit artisan anglais se prend à rêver de luxe. Quitte à couper le cordon avec son passé en osant avec l'Eletre le premier "hyper-SUV" de son histoire…

Texte : Maxime JOLY
Photos : Sébastien DUPUIS

Après le rachat de Lotus Cars en 1996 par le constructeur malaisien Proton, un nouveau changement de cap et de propriétaire a été amorcé 21 ans plus tard. En 2017, le géant chinois Geely prenait en effet possession de 51% des parts de Lotus qui allait faire face au changement le plus radical de son histoire. S’en suivra la fin des Elise, Exige et Evora à Hethel en 2021, pour laisser la place au nouveau coupé Emira et à l'hypercar Evija. Mais pas seulement.

L’annonce par l’Union Européenne de la fin du moteur thermique et la peur engendrée par Euro7 aboutiront pour Lotus à un revirement semblable à celui que connaît Alpine avec son Dream Garage électrique. Ce n’est donc pas un hasard si les deux constructeurs eurent un accord pour partager les dessous de leurs futures A110 / Elise électriques, avant que le divorce ne soit prononcé en 2023. C'est justement à la fin de l'année 2023 que les premières livraisons européennes de l’Eletre ont commencé...

GAMME LOTUS CARS 2025
La gamme actuelle est constituée de 4 modèles. Pour l’hypercar Evija, présentée en 2020, les livraisons viennent de débuter. Si 3 millions d’euros dorment sur votre compte, il est encore possible de craquer pour la Type 130 qui sera produite à un maximum de… 130 exemplaires. Ensuite, il y a la type 131, alias Emira. Elle prend le flambeau de l’Evora, tout en montant ses tarifs. Lancée avec le V6 Toyota, elle est depuis passée au 4 cylindres turbo Mercedes-AMG. L’Emira bénéficie d’une dérogation temporaire à la norme GSR2 (voir notre actualité). Il est prévu qu’il s’agisse du dernier modèle thermique de Lotus. L’Eletre (type 132) arrivée en 2022 a été complétée l’année suivante par une berline reposant sur la même plateforme. La Type 133 prend le nom d’Emeya.

PRESENTATION

C’est au DG Lotus de 2014, le Luxembourgeois Jean-Marc Gales, que nous devons le retour d'un projet de SUV chez Lotus (le Type 132), prévu pour être accompagné par une berline (le Type 133). Nous ne sommes pas dans les secrets des dieux pour savoir si les Type 132 et 133 découlent du concept APX (voir encadré) ou bien si les ingénieurs ont tout remis à plat pour se conformer à la dernière feuille de route, nommée Vision 80, annoncée en 2018. Toujours est-il que, pour celles et ceux qu’un SUV Lotus choquerait, Clive Chapman, fils de Colin Chapman, va jusqu'à affirmer que son père n’aurait pas renié ce modèle dans le teaser de la Type 132...

Le nom Eletre signifie « prendre vie » en Hongrois. Cela fait écho à Evija que l’on peut lire comme "Alive" dans un miroir. Si l’équipe Design est désormais située à Coventry, la R&D en Allemagne près de Francfort et la production des coupés toujours assurée à Hethel, les différentes versions de l'Eletre, elles, sortent des chaînes d’une usine chinoise, dans le secteur de Wuhan. Cette manufacture a coûté 1,2 milliards d’euros à Geely et est en capacité de produire jusqu’à 150 000 véhicules électriques par an. Le temps des petites Lotus montées à la main est bien révolu...

Pour revenir au design du SUV Lotus Eletre, il faut savoir que sous ses airs d’armoire normande, se cache un concentré d’aérodynamisme dont le Cx affiche la très enviable valeur de 0,26. Pas moins de 7 canaux d’air passent autour et à travers le véhicule pour améliorer les fluxs et réduire la résistance de l'air, élément fondamental pour l’autonomie sur une voiture électrique. Puis, il y a la calandre, active, sous forme de fleurs de Lotus dont les volets s'ouvrent automatiquement pour refroidir le moteur et se ferment pour augmenter l'autonomie. La calandre fermée offre à elle seule un gain de 15 km. Les ailerons en forme d’aile et aileron déployable automatiquement ou bien en manuel (de série à partir de l'Eletre S) peuvent générer jusqu’à 112,5 kg d’appui aérodynamique. Les poignées affleurantes sont déjà plus classiques contrairement aux rétroviseurs caméras, optionnels sur les Eletre et Emeya. Ces rétros influent sur la largeur de l’Eletre : 2m13 avec, contre 2m23 en rétrovision standard.

Avec une longueur de 5 103 mm, l’Eletre est évidemment bien loin de l’idée que l’on peut se faire d’une sportive Lotus, même s’il ne faut pas tomber dans l’excès inverse en ne résumant pas l’histoire de Lotus aux Seven et Elise. De série, les jantes proposées sont au minimum de 20" sur la finition Eletre et grimpent à 22" sur Eletre S et Eletre R, ce qui évidemment agit en trompe-l'oeil sur le gabarit réel de l'auto. Un jeu en 23" existe même en option pour mieux dégager la vue sur les très beaux étiers 6 pistons propres à l'Eletre S et R. Le bandeau lumineux à LED offre une animation à l’ouverture et la fermeture du véhicule. Les feux de jour LED et phares Matrix LED sont de série sur toutes les finitions. Enfin, pour l’heure, on dénombre 5 teintes extérieures dont le Jaune Solar de notre essai, que l'on pourra agrémenter des Packs carbone extérieur avec différentes combinaisons d'inserts sur les pare-chocs avant et arrière.

CONCEPT LOTUS APX
On peut crier au scandale en découvrant l'Eletre mais il ne faut pas oublier que, dès 2006, Lotus avait osé l’impensable : dévoiler un concept de crossover. Il s’appelle Lotus APX pour "Aluminium Performance Crossover" et, si vous ne vous en souvenez pas, c’est normal. Initialement motorisé par un V6, il eut même droit à sa déclinaison électrique, preuve que les germes de l'Eletre étaient déjà dans la maison d'Hethel ! Censé utiliser une toute nouvelle plateforme baptisée "Versatile Vehicle Architecture" (VVA), ce concept ne vit finalement jamais le jour et sa plateforme, non plus.

HABITACLE

Niveau technologies et finition également, avec l'Eletre on n’est plus du tout dans une Lotus de l'ancien temps ! Outre les multiples aides à la conduite sur lesquelles nous ne nous focalisons pas, le constructeur a le mérite d’avoir les moyens de ses ambitions en affichant une finition irréprochable à bord, en plus des matériaux qualitatifs parsemés un peu partout. Seul bémol : les traces de doigts visibles sur l’écran central OLED de 15,1". A l’instar de l’extérieur, différents choix de sellerie s’offrent aux clients dont un classique cuir Nappa associé à de l'Alcantara.

Dans un souci de quiétude dans l’habitacle, le choix a été fait de restreindre au maximum les bruits. Ainsi, le double vitrage est de série sur les portières de toutes les versions de l'Eletre. Cela profite au système audio KEF Reference. On l’aura compris, à défaut de se la jouer mélomane avec un gros moteur thermique à l’ancienne, on peut l’être au sens premier du terme. Côté technologie, on retrouve le désormais répandu affichage tête haute avec réalité semi-augmentée ou encore les caméras Ultra-HD pour une visibilité optimale à 360°.

Parmi les options de notre exemplaire, notons les rétros caméras, le pack Sièges confort (massants), le toit vitré intelligent / opacifiant (avec un réglage sur 10 niveaux), les inserts en carbone ou encore l’attelage électrique (jusqu’à 2 250kg). Ce n’est pas tout puisqu’il est également possible de choisir entre une version 5 places (banquette arrière rabattable en 40/20/40) ou 4 places (sièges fixes, rangement bouteille, console centrale, écran 9’’ inclinable, …).

MOTEUR

La plateforme EPA utilisée par le SUV Lotus Eletre a été rebaptisée SEA-S pour s’incorporer dans la famille des plateformes SEA du groupe Geely (voir notre essai de la Smart #3 Brabus). L’architecture de celle-ci est basée sur la technologie 800 Volts tandis que la batterie embarquée dans le plancher est d’une capacité brute de 112 kWh (109 kWh nets). La masse des batteries seules représente un total de 665 kg, pour un engin pesant pas loin des 2,6 tonnes. Pour le "light is right" on repassera mais c'est le prix à payer pour offrir une autonomie satisfaisante au Lotus Eletre, nous y reviendrons.

Les Eletre et Eletre S ont la même disposition technique avec un moteur électrique d’origine ZF par essieu. Ces moteurs sont produits à l’usine ZF de Hangzhou. La puissance cumulée sur ces deux versions atteint 611 chevaux pour un couple de 710 Nm. L'Eletre R dispose en revanche d’un moteur arrière plus puissant (venant de chez Geely celui-ci), faisant grimper la cavalerie à 918 chevaux (pour un couple de 985 Nm !). La R se démarque également par l’adjonction d’une boîte de vitesse à deux rapports, provenant aussi de chez ZF, sur le train arrière (à l’instar de la Porsche Taycan, par exemple), lui permettant de conserver sa vélocité à haute vitesse.

En ce qui concerne l'Eletre S qui nous intéresse ici, il faut donc se contenter d'une boîte à un seul rapport mais le 0 à 100 km/h est tout de même expédié en 4,5 secondes, un temps tout à fait honorable pour un mastodonte qui joue autant la carte du luxe et du confort que celle du sport. Plus utile au quotidien que la vmax de 258 km/h, la capacité de reprise de 80 à 120 km/h en 2 secondes est l'un des autres atouts du SUV électrique Lotus.

Comme évoqué, en ce qui concerne l’aspect autonomie et recharge, la batterie colossale de l'Eletre et le système de recharge rapide permettent de voyager loin sans avoir peur de la panne. En puissance de charge maximale à 350kW, la recharge de 10 à 80 % est annoncé pour ne durer que 20 minutes. En attendant de voir se développer le réseau de "superchargeurs" Lotus, les bornes Ionity sont parmi les seules à proposer une telle puissance de recharge actuellement. La consommation officielle de notre Eletre S est comprise entre 23,9 et 25,5 kWh/100 km, ce qui est à la fois élevé et à relativiser par rapport au gabarit. L’Eletre S est homologuée pour 535 km d'autonomie. C’est moins que l’Eletre de base (570-600 km) mais nettement mieux que l'Eletre R (410-450 km).

SUR LA ROUTE

Aller vite, c’est bien mais savoir tourner, c’est encore mieux. Surtout quand on porte un badge Lotus. Autant le dire tout de suite, avec l’Eletre, c’est Tournez Manège ! Comme nous l’avons vu via la participation de ZF, la sino-germano-anglaise dispose dès l’entrée de gamme d'une suspension pneumatique à 2 chambres, du contrôle d’amortissement en continu (CDC), du contrôle de châssis intégré (ICC) et de la répartition du couple par le freinage. La hauteur de caisse varie également selon le mode de conduite (-25 mm en Track, -15mm en Sport et +25mm en Off-Road) pour adapter le centre de gravité au rythme de conduite. Au final, seul le Pack Lotus Dynamic est en option (en série sur la R). Ce rajout est toutefois loin d’être fortuit puisqu’il ajoute les 4 roues directrices, fort utiles pour offrir un regain d'agilité à ce beau bébé. Et ce n’est pas utile que sur petite route pour raccourcir virtuellement l'empattement, ça l’est également en ville ! Le rayon de braquage est juste bluffant.

Sur petite route, le Lotus Eletre S démontre des aptitudes insoupçonnables au premier abord. Il est toutefois vrai que nous commençons à avoir l’habitude du combo magique 4RD + barres antiroulis actives si vous lisez régulièrement nos essais de gros SUV sportifs (Audi SQ7, Porsche Cayenne Turbo Coupé, BMW XM Label…). Les ingénieurs arrivent à nous livrer des mastodontes dépassant les 2 tonnes plus agiles que nos bonnes vieilles youngtimers. Le tout dans un confort royal, dans cette Eletre...

Le freinage du SUV anglais n’est heureusement pas oublié avec des étriers à 6 pistons de série à l'avant sur l'Eletre S et des disques gigantesques de 412 mm. Si vous avez de l’argent à jeter par la fenêtre, vous pouvez même opter pour du carbone-céramique avec étriers 10 pistons ! On peut en revanche regretter que la direction ne soit pas au diapason du reste. Elle n’est pas suffisamment tranchante ni communicative et demeure trop assistée. Comme beaucoup de constructeurs, Lotus souffre sur ce point du passage à l'assistance électrique. Encore un petit effort sur ça, svp…

Contrairement à d’autres qui tentent de donner du son à leurs électriques, Lotus a un parti pris inverse. Cela peut dérouter. Mais si l’on doit comparer cette 100% EV à une PHEV récemment essayée, à savoir la BMW XM et son V8 Biturbo hybride aseptisé, nous préférons l’Eletre. En revanche, en est-il de même pour les clients ? Rien n’est moins sûr…

ACHETER UNE LOTUS ELETRE

Et les tarifs dans tout ça ? La Lotus Eletre S débute en France à 123 090 € TTC. C’est un prix élevé mais pas plus que la concurrence, Audi Q8 e-tron, BMW iX, Mercedes EQE SUV ou encore Tesla Model X. En outre, les anglais offrent une garantie de 5 ans ou 150 000 km. La version d’entrée de gamme de l'Eletre est encore plus raisonnable, sans rien perdre en puissance, avec un prix de 97 890 €. Quant à la R, elle s’affiche à partir de 153 090 €. Y a-t-il un réel intérêt à passer à l'Eletre R par rapport à la version S ? Nous pouvons en douter, compte tenu des performances déjà plus qu’élevées de cet Eletre S et de la dégradation de l’autonomie !

CARACTERISTIQUES TECHNIQUES
LOTUS ELETRE S

MOTEUR
Type : moteur électrique synchrone à aimant permanent
Position : 1 par essieu
Alimentation (capacité) : batterie Lithium-ion 800 V (109 kWh net)
Puissance maxi (ch DIN) : 611
Couple maxi (Nm) : 710
TRANSMISSION
4x4
Boîte de vitesses (rapports) : automatique (1)
ROUES
Freins Av-Ar (Ø mm) : disques ventilés (412), étriers fixes 6 pistons - disques ventilés (397), étriers flottants
Pneus Av-Ar : 275/40 R22 107Y XL - 315/35 R 22 111Y XL
POIDS
A vide constructeur (kg) : 2520
Rapport poids/puissance (kg/ch) : 4.1

PERFORMANCES
Vitesse maxi (km/h) : 258
1000 m DA :
0 - 100 km/h : 4"5
80 - 120 km/h : 2"
CONSOMMATION
Moyenne WLTP (kWh/100 km) : 23,9-25,5
Moyenne de l'essai (kWh/100 km) : 26
CO2 (g/km) : 0
PRIX NEUF (12/2024) : 123 090 €
PUISSANCE FISCALE : 10 CV

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