PORSCHE 718 Cayman T (2019 - )
T aux épices
Avec le coupé 718 Cayman T, Porsche ajoute une corde à son piano pour étoffer la gamme sur le modèle pyramidal de la 911. Pour autant, est-ce que l'opération ne tourne pas simplement au vulgaire coup de marketing ? Réponse...
Texte & Photos : Sébastien DUPUIS
Traditionnellement, le « T » signifie « Touring » chez Porsche. Une lettre qui se veut symboliser le plaisir de conduire à l’état pur. Elle a fait sa première apparition sur la 911 2.0L à l’automne 1967. Mais contrairement à la 911 S, plus sportive, il s'agissait surtout ici de proposer un tarif plus avantageux, ce qui se fit en réduisant la puissance et l'équipement. Aujourd'hui présentée comme une version pour "puriste", la 911 T n'en devenait pas moins le nouveau bas de gamme de la 911 avec seulement 110 ch (contre 130), réduisant ainsi l'écart entre la 912 E et la 911 de base (rebaptisée 911 L en 1968, puis 911 E en 1969). La compétition se chargera ensuite d'écrire la légende puisqu'en 1968, l'équipage officiel constitué de Vic Elford et David Stone remporte le rallye Monte Carlo au volant d’une 911 T (dotée d'un moteur de 180 ch de 911 S pour un poids de 923 kg !), la première grande victoire d’une 911 sur la scène du sport automobile international.
Même si elle n'en portait pas directement le nom, cette philosophie réapparaîtra furtivement avec la 911 Carrera 3.2 Clubsport en 1987, puis la 968 CS de 1993. En 2018, Porsche a redonné vie au concept en créant la "Carrera T" sur la 911 type 991. La recette ayant porté ses fruits, il n'était pas très surprenant que les Cayman et Boxster en profitent à leur tour...
PRESENTATION
La Porsche 718 Cayman T s'inscrit dans la lignée avec une approche moins minimaliste que par le passé. Plus que le dépouillement, c'est la sportivité qui est mise en avant sur les nouvelles versions T, tout en restant sur la motorisation d'entrée de gamme. Autrement dit, un(e) 718 T s'apparente à un(e) 718 S sans le moteur qui va avec.
Cet entre-deux donne naissance à un modèle plutôt séduisant esthétiquement, notamment grâce à ses grandes jantes Carrera S de 20 pouces peintes en gris titane et ses strippings latéraux exclusifs. Les phares "Full LED" visibles sur nos photos sont une option mais de série on dispose déjà du bi-xénon avec feux diurnes intégrés, ainsi que de coques de rétroviseurs grises ou encore de l'échappement noir à double sortie centrale.
La caisse du Cayman T est également abaissée de quelques 20 millimètres ce qui finit d'asseoir son look résolument sportif, surtout lorsqu'il est vêtu comme ici de la célèbre couleur "Speedgelb" de Porsche. Le Cayman T peut également être peint gratuitement en noir, en rouge indien et en blanc. D'autres teintes sont proposées en option mais la palette du nuancier est plus réduite que pour le modèle de base.
HABITACLE
A l'intérieur de la nouvelle Porsche 718 T, la promesse d'un modèle pour puristes ne se traduit pas par une chasse aux kilos intraitable. L'anachronique vide-poche à deux étages qui ouvre un trou béant dans la planche de bord en remplacement du système audio et navigation (PCM) pourrait donner l'impression inverse, mais il est surtout là pour la symbolique. Ce sacrifice à la modernité compense seulement le poids du filtre à particules ajouté l'an dernier... Cette amputation n'est d'ailleurs pas imposée, puisque la configuration standard reste disponible en option, gratuite qui plus est !
Pour mieux se concentrer sur la conduite, on appréciera en revanche disposer d'office du volant GT inspiré de la 918 Spyder, du levier de vitesses court ou encore des sièges sport électriques. Et le fait est qu'on se sent très vite bien installé dans ce Cayman. Pour les plus sportifs, les sièges baquets sport ou intégraux restent proposés en option. Pour le reste, on retrouve en série à bord du Cayman T tous les fondamentaux d'une voiture de 2019... hormis le régulateur de vitesse. La clim auto n'est pas bizone (option) mais elle est bien présente.
Côté look, les cadrans des instruments et seuils de portes se mettent au diapason avec l'inscription Cayman T. Mais pour mieux marquer sa différence, l'habitacle du Cayman T renvoie aux options avec un onéreux, mais séduisant, "Pack intérieur 718 T". Celui-ci ajoute à l'ensemble une finition (encore) plus cossue avec des coutures contrastées pour les sièges et du cuir sur les contre-portes et la partie supérieure de la planche de bord. Avec ce pack, la couleur (jaune, rouge, vert ou gris) vient s'ajouter un peu partout, sur les sièges "Tex Stripe", les sangles qui remplacent les poignées de portes, les ceintures de sécurité, le sigle « 718 » des appuie-tête ou encore les surtapis.
MOTEUR
Nous l'avons déjà dit, la Porsche 718 T repose sur la motorisation d'entrée de gamme des Cayman et Boxster. Contrairement au 718 Cayman S, la cylindrée du nouveau "flat four" Porsche (code MA2.20) est ici de deux litres, par réduction de l'alésage nous faut-il préciser. Seulement deux litres, dîtes-vous ? Un peu maigre pour une Porsche, non ? Sur le papier, ce 2 litres turbo n'a effectivement pas de quoi impressionner la première compacte sportive venue : 300 ch à 6500 tr/min et un couple maxi de 380 Nm offert entre 1950 tr/min à 4500 tr/min.
Dans la pratique, ce quatre à plat offre pourtant un agrément certain, supérieur même à celui de nombreux équivalents en ligne. Tout d'abord, il séduit par ses réactions spontanées et sa souplesse à bas régime, ensuite par son couple solide à mi-régime qui permet de relancer aisément sur tous les rapports, puis par ses montées en régime qui ne faiblissent pas jusqu'au dernier repère du cadran. Ce petit miracle d'élasticité est favorisé à la fois par les pistons à plat, le double calage variable continu et un coup de pouce de l'électronique baptisé "Dynamic Boost". Intégré à la gestion moteur, il maintient le papillon d'admission ouvert quand on retire brièvement le pied de la pédale en pleine accélération. Malgré la rupture de charge, la pression du turbo ne baisse pas complètement, apportant un gain immédiat à la reprise des gaz. Et si la bande son n'est pas aussi ensorceleuse que sur les anciens Cayman, son timbre unique "façon Subaru" reste plutôt sympa. D'autant qu'il est renforcé ici par l'échappement Sport de série, lequel s'accompagne des désormais incontournables pétarades au lâcher de gaz sur les modes Sport et Sport+.
Enfin, il convient de dire que, même avec "seulement 300 ch", cette affaire là marche plutôt vigoureusement. Annoncé pour 1 350 kg à vide, le Cayman T bondit de 0 à 100 km/h en 5,1 secondes. Si vous pouviez douter de ses compétences, ce genre de chrono commence à écrémer tout de même pas mal de monde. Si on y ajoute la boîte de vitesses PDK en option, il tombe même à 4"7 malgré une prise de poids significative (+30 kg).
S'il ne s'agit que de gagner cette fraction de seconde sur de futiles départs-arrêtés, nous ne pourrons vous la conseiller quand, de série, pour zéro franc, Porsche vous offre encore un régal de boîte manuelle. Avec six rapports bien étagés, une commande précise et rapide, un embrayage viril juste ce qu'il faut pour maintenir le pied gauche en forme, ce bon vieux levier permet de garder un lien sincère avec la conduite authentique. Selon les goûts, on pourra en revanche apprécier diversement le soupçon d'assistance que Porsche a rajouté au package : le double-débrayage automatique lors du rétrogradage sur les modes Sport ou Sport Plus.
SUR LA ROUTE
Privé d'une hausse de puissance, le Cayman 718 T mise à fond sur sa partie châssis pour affimer son caractère plus sportif. Il obtient même le privilège de quelques équipements indisponibles sur les Cayman et Boxster 2.0L : le Porsche Active Suspension Management (PASM) qui s'accompagne d'un abaissement de 20 mm, le pack Sport Chrono avec son mode ESP exclusif "PSM Sport", les supports moteur dynamiques (Porsche Active Drivetrain Mounts) et même le Torque Vectoring (PTV) avec blocage mécanique du différentiel arrière. Rien que ça !
La 718 T bénéficie aussi d’une direction électromécanique issue de la 911 Turbo, 10 % plus directe que la génération Cayman et Boxster précédente. Pas trop assistée, pour conserver une fermeté appréciable du volant, et doublée d'un train avant redoutablement précis, ce point caractérise à lui seul la qualité du "toucher de route" de cette petite Porsche. Cette fermeté s'harmonise avec celle de l'amortissement, mais aussi la très grande rigidité structurelle du Cayman, à laquelle s'ajoutent les supports dynamiques du moteur.
L'agilité n'est pas en reste puisque, tout profitant de la motricité et de la stabilité exceptionnelles de ses généreuses enveloppes (265/35 ZR 20 à l’arrière), le Porsche Torque Vectoring (PTV) avec blocage mécanique du différentiel arrière vient idéalement pimenter la conduite sportive du Cayman T. Par le biais du freinage, au niveau de la roue intérieur du virage, le système envoie une impulsion de rotation autour de l’axe vertical du véhicule. Le blocage mécanique du différentiel optimise de son côté la réaccélération en sortie de virages serrés.
Enfin, il serait surprenant de devoir dire du mal des freins d'une Porsche et le petit Cayman ne fait pas exception à la règle. Nul besoin de coûteux disques en carbone-céramique pour disposer déjà d'un freinage puissant et constant dans l'effort. De série, la 718 T reçoit des étriers fixes à quatre pistons et des disques de frein de 330 mm à l’avant et 299 mm à l’arrière. Si toutefois vous pensez arriver à bout d'un tel matos, Porsche propose évidemment sa fameuse option PCCB. Les étriers peints en jaune sont à six pistons à l'avant et les disques passent à 350 mm de diamètre aux 4 roues !
En un mot, la conduite de ce Cayman T sent bon la sportivité ! En contrepartie, le confort pourra se montrer un peu sec dans certaines conditions mais, au moins, il n'y a pas tromperie sur la marchandise. Cette version T ravira tous ceux qui privilégient les sensations sportives.
ACHETER UNE PORSCHE 718 CAYMAN T
Pour 66 170 €, les acheteurs du 718 Cayman T bénéficient selon Porsche d’un avantage financier de 5 à 10% par rapport à un modèle de base comparable. Sur le papier, ce rapport prix/équipement plus intéressant trendrait donc à légitimer la présence de ces modèles T au catalogue. Cependant, il convient de relativiser cet "avantage" car, d'une part, le tarif de base du Cayman T augmente le prix de départ du Cayman de quelques 9000 € (!) comparé à la version de base mais, en outre, les équipements qui restent sur la liste des options finissent par trop saler un plat qui n'en a pas besoin. C'est ainsi que notre modèle d'essai doté, entre autres, des phares LED (1992 €), de l'intérieur tout cuir (1770 €) et du Pack intérieur (2580 €), passe de justesse sous la barre des 75 000 €...
Pour autant, lorsqu'on aborde la concurrence du Cayman, on constate tout d'abord que celle-ci s'est réduite au fil des ans comme peau de chagrin. Si le nouveau BMW Z4 et sa demi-soeur jumelle, la Toyota GR Supra, sont encore à prendre au sérieux avec leur puissant 6 cylindres, du côté de chez Mercedes on laisse tomber le SLC tandis qu'Audi devrait faire de même avec son TT S de puissance équivalente. Chez les italiens, l'Alfa Romeo 4C est en roue libre faute d'évolution et pour les anglais il en va de même avec l'Elise S3 qui n'en finit plus d'attendre la relève après 20 années de loyaux services. Chez les japonais, encore, la vénérable Nissan 370Z continue elle aussi à faire de la résistance avec son V6 atmo, faute de remplaçante là encore. En élargissant la palette, une alternative inattendue peut se glisser dans votre "wish list" à ce niveau de prix, c'est la... Ford Mustang V8 ! Et oui, pas vraiment le même calibre mais elle permet de relativiser la "bonne affaire" que constitue ce Cayman T. En fin de compte, la plus sérieuse rivale du 718 Cayman T pourrait bien être une française. Non pas la Megane RS Trophy-R (!) mais plus probablement la nouvelle Alpine A110. Pas aussi sportive que le Cayman T en version de base mais sa nouvelle variante, l'A110S, promet de corriger ses principaux défauts. Excepté l'absence de boîte manuelle...
CARACTERISTIQUES TECHNIQUES
PORSCHE 718 Cayman T
MOTEUR
Type : 4 cylindres à plat, 16 soupapes à double calage et levée variable VarioCam Plus
Position : longitudinal central AR
Alimentation : Injection directe + turbo (1,25 bars) + échangeur
Cylindrée (cm3) : 1988
Alésage x course (mm) : 91 x 76,4
Puissance maxi (ch DIN à tr/mn) : 300 à 6500
Couple maxi (Nm à tr/mn) : 380 de 2150 à 4500
TRANSMISSION
AR + autobloquant avec Torque Vectoring (PTV)
Boîte de vitesses (rapports) : manuelle (6)
ROUES
Freins Av-Ar (Ø mm) : disques ventilés perforés (330), étriers fixes 4 pistons - disques ventilés perforés (299), étriers fixes 4 pistons
Pneus Av-Ar : 235/35 - 265/35 ZR 20
POIDS
A vide constructeur (kg) : 1350
Rapport poids/puissance (kg/ch) : 4.5
PERFORMANCES
Vitesse maxi (km/h) : 275
1000 m DA :
0 - 100 km/h : 5"1
0 - 200 km/h : 18"3
CONSOMMATION
Moyenne cycle mixte (L/100 km) : 8.1
Moyenne de l'essai (L/100 km) : 11.5
CO2 (g/km) : 186
PRIX NEUF (09/2019) : 66 170 €
PUISSANCE FISCALE : 21 CV
CONCLUSION
Avec le Cayman T, Porsche propose un package séduisant qui s'adresse à ceux qui privilégient les sensations sans céder à la tentation de la puissance supplémentaire d'une version S. Si la proposition se montre tout à fait pertinente, il est regrettable que le tarif reste aussi élitiste pour un "simple" 4 cylindres. Mais ce Cayman T offre déjà un énorme plaisir de conduire...
Look soigné
Position de conduite
Performances
Boîte manuelle
Châssis superbe
Pas de réel effort sur le poids
Tarif de base et options
Vous avez aimé cet article ? Merci de le partager
Belle et efficace, c’est la voiture idéale pour les routes secondaires mais elle permet aussi de s’amuser sur circuit. Avec elle vous allez en surprendre plus d’un. Un quatre cylindres ? Et pourquoi pas ? Plus petit, plus léger avec une inertie plus faible et pas mal de couple, c’est vraiment un choix qui se défend. Elle n’a pas le ‘sound track’ d’un flat 6 atmo ? OK, je lui pardonne cela, je l’aime trop. Ne vous laissez pas impressionner par les avis définitifs de ‘spécialistes’ auto-proclamés, essayez la et vous comprendrez.